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Full text of "Revue des langues romanes"

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1 


REVUE 


DES 


LANGUES  ROMANES 


^ 


REVUE 


DBS 


LANGUES  ROMANES 


PUBLIEE 


PAR   LA  SOCIETE 


POUR  L'ÉTUDE  DES  LANGUES  KOMANES 


Tome  XLV 


(Ve  Série  —  Tome  VII) 


MONTPELLIER 

AU  BUREAU  DES  PUBLICATIONS 

DE  LA  SOCIÉTÉ 

POUR  L'ÉTUDE  DBS   LAXQCBS  HOMANK3 

Rue  de  l'Aucieu-Courrier,  2 


PARIS 
G.  PEDONE-LAURIFL 
Libriire-Édilear 

13,  RUE  SOUPFLOT 


» 


MDCCCCII 


Z 

1. 1+5 


REVUE 


DES 


LANGUES  ROMANES 


UNE  NOUVELLE  EDITION 
DU  ROMAN  DE  FLAMENCA  ' 


Le  volume  qui  fait  l'objet  de  la  présente  étude  n'est  que  le 
premier  et  ne  constitue  que  la  moitié  de  la  2e  édition,  depuis 
longtemps  attendue,  de  Flamenca.  Il  comprend  seulement  le 
texte  du  poème,  précédé  d'un  court  avant-propos,  et  le  voca- 
bulaire. L'introduction,  la  traduction,  qui  cette  fois  sera  com- 
plète, et  les  notes  composeront  le  second  volume. 

La  première  édition  de  Flamenca  parut  en  1865.  Il  est 
naturel  que  celle  qui  nous  est  offerte  aujourd'hui  réalise  sur 
celle-là  un  progrès  considérable.  C'est  dans  la  traduction  que 
ce  progrès  devra  surtout  se  marquer,  car,  outre  les  lacunes 
qu'on  regrettait  d'y  trouver,  elle  laissait  à  désirer  plus  encore 
que  le  texte  lui-même. 

Ce  texte,  dont  nous  avons  donc  seulement,  aujourd'hui,  à 
nous  occuper,  se  présente  à  nous  sous  un  aspect  autrement 
satisfaisant  qu'autrefois.  L'éditeur  l'a  revu  soigneusement  sur 

i  Le  roman  de  Flamenca,  publié  d'après  le  manuscrit  unique  de  Car- 
cassonne  traduit  et  accompagné  d'un  vocabulaire. —  Deuxième  édition, 
entièrement  refondue,  par  Paul  Meyer,  membre  de  l'Institut.  Tome  I. 
Paris,  Emile  Bouillon,  1901.  Bibliothèque  Française  du  Moyen  Age, 
t.  VIII. 

xlv.  —  Janvier-Février  1902. 


6  UNE  NOUVELLE   EDITION 

le  ms.  unique,  ce  qui  lui  a  permis  de  corriger  un  très  grand 
nombre  de  fautes  de  lecture  qui  le  dénaturaient  dans  la 
première  édition.  Il  a  de  plus  introduit  dans  ce  même  texte, 
ainsi  rétabli  selon  la  teneur  du  ms.,  mais  visiblement  altéré 
en  mille  endroits  par  un  scribe  négligent,  les  plus  heureuses 
corrections.  Enfin  le  vocabulaire  ,  qui  dans  la  première 
édition,  malgré  le  louable  effort  dont  il  témoignait,  était  resté 
par  trop  insuffisant,  a  reçu,  dans  celle-ci,  un  accroissement 
et  des  améliorations  qui  en  font  un  ouvrage  tout  à  fait  nou- 
veau. M.  Meyer,  du  reste,  n'en  est  plus  à  faire  ses  preuves  en 
ce  genre  de  travaux.  Si  le  glossaire  actuel,  pas  plus  que  ceux 
de  la  Croisade,  de  Daurel  et  Béton  et  de  Guillaume  de  la  Barre, 
n'est  partout  exempt  d'erreurs,  et,  s'il  présente  même  quel- 
ques lacunes,  on  ne  peut  qu'en  louer  la  richesse  et,  en  géné- 
ral, l'exactitude. 

On  aurait,  peut-être,  en  décernant  à  cette  première  partie 
de  la  nouvelle  édition  de  Flamenca  les  éloges  qu'elle  mérite, 
à  faire  quelques  réserves  sur  la  méthode  et  les  procédés  de 
critique  de  l'éditeur.  Je  crois  devoir,  aujourd'hui  du  moins, 
m'en  abstenir,  parce  qu'il  est  possible  —  c'est  du  moins  ce 
qu'un  passage  de  l'avant-propos  laisse  entendre  —  que  l'in- 
troduction et  les  notes  présentent  une  justification  acceptable 
de  ce  qu'on  serait  autrement  porté  à  blâmer. 

Mais,  il  faut  le  dire  dès  aujourd'hui,  car  il  n'est  pas  néces- 
saire d'attendre  l'apparition  du  second  volume,  pour  se  pro- 
noncer sur  ce  point,  la  nouvelle  édition  du  texte  de  Flamenca, 
si  considérable  que  soit  le  progrès  qu'elle  réalise  sur  la  pre- 
mière, si  nombreuses  qu'y  soient  les  habiles  restitutions  de  pas- 
sages corrompus,  n'est  point  encore  l'édition  ,  je  ne  dis  pas 
définitive  (il  n'y  en  a  guère  de  telles,  et  il  ne  saurait  y  en  avoir 
dans  des  conditions  pareilles  à  celles  du  cas  présent), mais  l'édi- 
tion aussi  parfaite  que  possible,  ces  conditions  étant  données, 
qu'on  était  en  droit  d'attendre  de  M.  Paul  Meyer.  Aussi  ne  sau- 
rais-je  souscrire  sans  réserve  au  jugement  qu'il  émet  lui-même 
sur  son  travail  :«  Je  crois,  dit-il,  avoir  fait  rendre  au  manuscrit 
tout  ce  qu'on  en  pouvait  tirer.  »  Eh  bien  !  non.  On  en  pouvait 
tirer  davantage,  et  M.  Meyer  le  pouvait  mieux  qu'aucun  autre. 
Il  lui  suffisait  d'y  appliquer,  avec  une  attention  plus  soutenue  et 
plus  réfléchie, et  aussi  avec  quelque  défiance  de  son  propre  sens, 


DU    «  ROMAN    DE    FLAMENCA  »  7 

surtout  de  la  justesse  de  ses  premiers  aperçus,  cette  critique 
si  éveillée  d'ordinaire,  qui  l'a  rendu  justement  redoutable,  et 
ces  rares  qualités  de  c'airvoyance  et  de  pénétration  qu'on 
admire  en  lui,  et  dont  il  sait  si  bien  user,  —  non  parfois  sans 
un  surprenant  mélange  de  légèreté,  —  quand  il  s'agit  de  juger 
les  travaux  d' autrui. 

Cette  remarque,  je  le  répète,  ne  porte  et  ne  peut  porter 
que  sur  l'établissement  du  texte.  Une  appréciation  générale 
ne  sera  possible  que  lorsque  nous  en  aurons  tous  les  éléments, 
c'est-à-dire  quand  le  second  volume  aura  paru.  Je  me  borne- 
rai donc,  dans  les  pages  qui  vont  suivre,  à  soumettre  au  lec- 
teur et  à  l'éditeur  lui-même,  qui  en  acceptera  peut-être  quel- 
ques-unes, les  corrections  qui  me  paraissent  pouvoir  être 
proposées  en  certains  endroits  du  texte,  et  en  général  les 
observations  que  m'a  suggérées  une  lecture  attentive,  en 
même  temps  que  les  résultats  d'une  collation  minutieuse 
que  j'ai   faite    du   ms.   et    dont  je    parlerai  tout  à  l'heure. 

Je  me  suis  autrefois  beaucoup  occupé  de  Flamenca,  et 
j'avais  même  commencé  dans  la  Revue  rfes  langues  romanes, 
il  y  a  déjà  vingt-cinq  ans1,  la  publication  d'une  série  de  notes 
consacrées  à  la  critique  et  à  l'interprétation  du  texte  de  ce 
charmant  poème.  Cette  publication  fut  interrompue  et  fina- 
lement abandonnée,  pour  des  motifs  qu'il  est  inutile  d'exposer 
ici.  Mais  j'ai  conservé  mes  notes  et  plusieurs  d'entre  elles 
ont  pu  encore  être  utilisées,  les  passages  qu'elles  visaient 
n'ayant  pas  reçu  dans  la  nouvelle  édition  les  corrections  dont 
ils  me  semblaient  susceptibles. 

Depuis,  ayant  obtenu  de  M.  le  Maire  de  Carcassonne,  par 
l'obligeant  intermédiaire  de  son  collègue  de  Montpellier,  qui 
était  alors  M.  Castets,  doyen  de  la  Faculté  des  lettres,  com- 
munication du  manuscrit,  j'ai  pu,  grâce  à  la  collation  très 
attentive  que  j'ai  faite  du  texte  imprimé,  corriger  un  grand 
nombre  de  fautes  de  lecture.  De  ces  fautes  plusieurs  ont  per- 
sisté dans  la  nouvelle  édition,  et  il  y  en  a  çà  et  là  quelques- 
unes  de  nouvelles.  Je  relèverai,  des  unes  et  des  autres,  celles 
que  j'ai  pu  constater  avec  certitude. 

Au  lieu  de  ranger  mes  remarques  sous  des  chefs  différents, 

1  Tome  IX,  pp.  "24  et  suiv. 


8  UNE   NOUVELLE   EDITION 

il  m'a  paru  plus  simple  et  plus  commode  de  les  présenter  dans 
Tordre  même  des  vers  du  poème,  qu'elles  s'appliquent  aux 
leçons  du  ms.,  à  l'établissement  du  texte,  ou  à  son  interpré- 
tation, c'est-à-dire  au  vocabulaire.  On  pourra  trouver  plu- 
sieurs de  ces  remarques  minutieuses.  Mais  le  Roman  de  Fla- 
menca occupe  d  ins  la  littérature  provençale  et,  en  général, 
dans  la  littérature  médiévale,  un  rang  si  élevé,  c'est  pour 
l'histoire  de  la  civilisation  un  document  d'une  telle  importance 
que  tout  effort,  si  bumble  qu'il  soit,  tendant  à  en  rendre  le 
texte  plus  intelligible  et  plus  correct,  paraîtra  devoir  être 
encouragé.  L'éditeur  lui-même,  qui  se  fait,  ajuste  titre,  un 
mérite  d'avoir  indiqué  en  note  «toutes  les  particularités  gra- 
phiques qui  ne  pouvaient  être  conservées  dans  le  texte  »,  ne 
me  saura  pas  mauvais  gré  d'avoir  noté  celles  ou  une  partie 
de  celles  qui  ont  échappé  à  sa  révision. 

M.  Antoine  Thomas  a  publié  dans  le  cahier  de  juin  dernier 
du  Journal  des  Savants,  sur  la  nouvelle  édition  de  Flamenca, 
un  article  très  important,  rempli  d'observations  judicieuses 
et  de  conjectures  pour  la  plupart  aussi  ingénieuses  que  plau- 
sibles1. Dans  un  certain  nombre  de  passages,  j'avais  déjà 
corrigé  les  mêmes  fautes  ou  fait  les  mêmes  observations  que 
lui.  Je  n'ai  pas  cru  devoir  supprimer  de  mon  article  les  notes 
concernant  ces  passages. 


Vers  18.  «Si  Flamencha  deven  esclava.  »  Pourquoi  ne  pas 
écrire  ici  Esclava,  avec  une  majuscule,  puisque  plus  loin 
(v.  36)  on  écrit  ainsi  Fsclaus,  qui  en  est  le  masculin? 

30.  «  pot  ».  Le  ms.  porte  poc. 

65.  «  e  demandet  ».  Corr.  e[l]  d. 

71.  «  si  a  bon  plag  ».  Corr.  ci,  puisque  l'éditeur  ramène 
systématiquement  à  l'orthogr.  étymologique  les  particules 
si  et  ci  et  leurs  composés.  Et  c'est  le  seul  cas,  pour  le  remar- 
quer en  passant,  où  il  agisse  ainsi,  malgré  l'inconséquence 
qu'il  y  a  à  ne  pas  généraliser  le  procédé. 

i  Je  signalerai  particulièrement  elles  qui  concernent  les  vers  1096, 
2717,  5236,  6097.  —  Quant  aux  vers  1194-1199,  je  ne  saurais  être  de  son 
avis,  sauf  en  ce  qui  concerne  l'observation  sur  fenera  et  sabra. 


DU    «   ROMAN    DE    FLAMENCA  »  9 

73.  «  Ben  par  que  no  t'iest  feinz.  »  Lire  no  t'i  est,  en  sup- 
primant que? 

79.  «  que  i  ponhem  »  =  que  nous  tardions.  Le  vocab.  ne 
donne  pas  cette  acception,  qu'on  retrouve  au  v.  6842  et  qui 
est  encore  en  usage. 

147-8.  a  Consi  a  venir  s'aparella  Tais  cortz...  ».  Venir  doit 
paraître  ici  un  peu  surprenant.  Aussi  n'est-ce  pas  ce  qu'il  y 
a  dans  le  ms.  On  y  lit  nemur  =  Nemours  (san<  s,  comme  au 
v.  1077)  ;  et  c'est  justement  ce  que  le  contexte  exige. 

153.  «  Ane  Archirabautz  gos  non  retenc».  Ms.  Ans,  qui  ne  con- 
vient pas  ;  mais  anc  ne  convient  guère  mieux.  Corr.  Ens.  Le 
nom  de  ce  personnage  est  partout  ailleurs  précédé  de  l'article 
honorable.  Je  remarquerai  à  cette  occasion  que  presque  partout 
où  l'éditeur  imprime  En  A.  ou  d'En  A.,  il  faudrait  imprimer 
e  N'A.  ou  de  N'A.,  selon,  d'ailleurs,  l'indication  constante, 
ou  presque  constante,  du  ms. 
154.  «  avant  ».  Ms.  avan. 

104.  «  sufr'  el  cors.»  M.  Meyer,  à  Verrata,  supprime  avec 
raison  l'apostrophe.  Mais  il  devrait  aussi  rétablir  la  leçon  du 
ms.  sufril,  qu'il  a  le  tort  de  changer  en  su/rel,  car  su/ri  (3e 
pers.  sing.  ind.  prés.)  n'est  pas  une  forme  incorrecte. 

175,  note.  Us  de  tostz  est  exponctuée  dans  le  ms. 

256.  «  De  part  Flamenca  saludet.  »  Cor.  Flamencal. 

274.  «  si  en  leis.  »  Ms.  ses  (sesi,  avec  Vi  exponctué),  à 
rétablir.  C'est  une  forme  bien  connue,  et  dont  il  y  a  d'autres 
exemples  dans  ce  texte. 

309.  Supprimer  la  virgule.  La  construction  doit  être:  a  de 
ren  que  cor  saupes  pensar  que  boca  etc.  » 

311.  «  Archimbaut[z].  »  Rétablir  Archimbaut.  «  On  servit 
(serviron)  Archambaut  et  le  comte.  »  On  ne  s'expliquerait  pas 
que  le  comte  et  surtout  Archambaut,  son  hôte,  fissent  le  ser- 
vice. L'emploi  de  coms,  comme  régime,  ne  doit  pas  faire  dif- 
ficulté. Les  exemples  ne  sont  pas  rares  d'une  pareille  infrac- 
tion à  la  règle  des  cas,  pour  les  noms  de  personne  ou  de 
dignité.  Cf.  Revue,  X,  277. 

327-28.  «  maïstre  :  mal  istre.  »  Corr.  maestre  :  mil  eslre, 
car,  s'il  n'y  a  pas  d'objection  à  faire  à  maïstre,  je  ne  crois 
pas  qu'on  puisse  accepter  istre  comme  une  forme  régulière. 

387-388.  «  deneir[s],  drapfs],  cullier[s],  enap[s]  ».  Pourquoi 


10  UNE   NOUVELLE   EDITION 

ces  s?  Ce  sont  là  des  nominatifs  pluriels.  Ou  alors  pourquoi 
aur  et  aryen  sans  s  ?  Il  n'y  avait  rien  à  changer  à  la  leçon  du 
ms. 

400.  «  Ni  l'autra  carn  ja  meins  non  valgra  ».  Le  con- 
texte, ce   me  semble,    repousse   ici  l'idée  du  conditionnel.  Il 

audraitdonc  donner  à  valgra  sa  signification  étymologique, 
et  entendre  :  «  les  autres  viandes  (bœuf,  mouton,  etc.)  ne 
valaient  pas  moins  »,  à  savoir  que  la  volaille  et  la  venaison 
dont  l'énumération  précède.  On  sait  qu'un  pareil  emploi  de 
l'ancien  plus-que-parfait,  rare  à  la  vérité  et  archaïque,  n'est 
pas  sans  exemples  en  d'autres  textes.  Il  serait  intéressant 
de  pouvoir  le  constater  ici. 

401.  «  a  fag  ».  Ms.  ha  f. 

429.  «  moutaspessa  ».  Corr.  moût  espessa.  Je  ne  crois  pas 
que  le  féminin  mouta  ait  jamais  été  employé  devant  un 
adjectif,  dans  la  fonction  de  moût,  pour  exprimer  le  super- 
latif, comme  il  est  dit  au  vocabulaire. 

433.  «  ques  fo  eissitz  A.  l'encontre.  »  ques  fo  est  pour  que  fos 
du  ms.  Bonne  correction;  mais  mieux  vaudrait  quel  fo. 

469.  «  paubre[s].  »  Pourquoi  cette  correction?  Le  pluriel 
convient  mieux  ici  que  le  singulier. 

473.  «  Es  anc  per  el  non  s'amermet  ».  Corr.  per  al?  L'édi- 
teur propose  per  ren,  qui  revient  au  même,  mais  s'éloigne 
bien  davantage  de  la  leçon  du  ms. 

488.  «  Ben  lo  feiran  el  cais  gelar  ».  Corr.  il. 

570.  «  tantareva  ».  C'est  bien  par  a  fantaisie,  idée  saugre- 
nue, absurdité  »  que  ce  mot  rêva  (voirie  vocabulaire)  doit  se 
traduire.  Il  existe  encore  avec  des  acceptions  diverses,  dont 
celle-ci.  On  dit,  par  exemple,  à  Montpellier  :  «  Quanta  rêva 
te  pren  ?  »  Quelle  lubie  te  prend?  «  Aco's  una  rêva  que  i  a  pas- 
sât per  la  testa.  »  Ce  même  mot  s'applique  aussi  aux  épidémies 
ou  à  leur  cause  inconnue.  De  l'influenza,  du  choléra,  on  dira: 
o  C'est  une  rêve  qui  passe.  »  Une  servante  disait  dernière- 
ment, à  propos  d'une  maladie  qui  sévissait  dans  mon  quartier  : 
«  Moi,  je  ne  prends  pas  facilement  les  rêves.  »  Faut-il  voir  là 
une  expression  métaphorique,  analogue  à  celle  de  «  payer 
son  tribut  à  la  maladie  »,  si  fréquemment  employée  ?  On  sait 
([uereva,  en  provençal  comme  en  bas-latin,  et  comme  rêve 
en  français,  est  le  nom  d'un  certain  impôt. 


DU    «ROMAN    DE   FLAMENCA»  11 

573.  «  baizar  es  estreiner.  »  M.  Meyer  indique,  avec  doute, 
au  vocabulaire,  la  correction  esteinar,  qui  paraît  sûre.  Mais 
il  faut  aussi  corriger  baizar  en  baissar.  Ces  deux  mots  baizar 
et  estreiner  étant  naturellement  associés  (cf.  5941),  la  première 
erreur  du  scribe  a  entraîné  la  seconde. 

588.  «  conseillers...  »  Ce  mot  signifie  coussin,  ou  quelque 
chose  d'analogue.  M.  Meyer  en  a  trouvé,  dans  un  inventaire 
de  1288,  un  exemple  qui,  joint  à  celui  qu'a  relevé  Raynouard, 
ne  laisse  aucun  doute  sur  sa  vraie  signification.  Mais  il  paraît 
bien  difficile  d'admettre  que  ce  soit  «  une  expression  méta- 
phorique dérivée  de  conseil,  au  sens  d'entretien  privé.  »  Il 
existe  en  provençal  à  côté  de  coissiun  autre  substanr.if  de  signi- 
fication analogue,  sinon  identique,  qui  est  cosser,  féminin  cos- 
sera1.  Serait-il  trop  téméraire  de  supposer  un  dérivé  cos  e- 
rier,  qui  aurait  pu  facilement  devenir  cosselier?  Mais  d'où 
vient  cosser? 

681.  «  Que  l'vras  trobet  a  l'uisset.  »  Dans  la  première 
é  lition  on  lisait  Lyras.  Ce  Lyras  devient  aujourd'hui  un  nom 
commun,  sans  que  le  glossaire  nous  éclaire  sur  sa  significa- 
tion. Les  notes  du  second  volume  le  feront  sans  doute.  En 
attendant,  on  ne  peut,  semble-t-il,  le  traduire  que  par  Cafflûjé 
ou  l'irrité.  Je  ne  sais,  quant  à  moi,  quel  est  le  personnage  de 
roman  ainsi  désigné. 

710.  «  en  bala.  »  A  cette  expression,  que  M.  Meyer  traduit 
très  justement,  à  ce  qu'il  semble,  par  en  bloc,  ensemble,  on 
peut  comparer  anias  o,  aujourd'hui  si  usité,  qui  a  ce  même 
sens. 

736-737.  11  doit  y  avoir  une  lacune  entre  ces  deux  vers. 
Les  idées,  de  l'un  à  l'autre,  ne  paraissent  pas  se  suivre,  et  le 
v.  737  est  très  obscur. 

739.  «  a  cascus  ».  Corr.  cascun. 

T.VJ.  «  Mais  Cobezesal  venc  comtar  ».  Comtar  paraît  ici 
assez  impropre.  Corr.  conortar,  en  supprimant  Mais? 

1  On  en  trouvera  un  exemple,  en  morne  temps  que  de  cosseillier,  au 
tome  XXXII  de  la  Revue,  p.  193.    Une   variante   est  cocena  (Rayn.  II 
127)  à  qui,  comme  à  cossera,  paraît  convenir  plus  spécialement  la  s 
fication  de  matelas  ou  de  couette.  C'est  d'ailleurs  de  cocena  [cossena)  que 
cossera paraît  provenir,  comme  cosser  de  cossen.  Mais  je  n'ai  pas  ren 
tré  cette  dernière  forme. 


12  UNE  NOUVELLE   EDITION 

755.  «  Oi  !  oi!  »  Oi,  interprété  simplement  par  exclamation, 
doit  signifier  ici  oui,  comme  en  d'autres  endroits  du  poème 
qui  seront  signalés  plus  loin. 

810.  «  Que  lamanega  no[n]  i  es  gap  ».  Corr.  plutôt,  car  la 
grammaire  exigerait  gaps,  que  la  rime  repousse  :  no  i  es 
[per]  gap. 

816.  «  li  di[s]  sos  cors  ».  Ms.  se  cors.  M.  Meyer,  qui  accepte 
ailleurs  l'article  féminin  sa,  aurait  pu  ne  pas  rejeter  ici  ce  se, 
qui  est  la  forme  masculine  suj.  sing.  du  même  article.  «  Le 
cœur  lui  dit.  »  L'adjectif  possessif,  en  de  telles  phrases,  n'a 
pas  besoin  d'être  exprimé. 

823.  «  Neis  antreseinz...  »  L'édit  propose  la  correction  ni. 
C'est  nés  {ne  -J-  s  euphonique),  qui  est  ici  naturellement  indi- 
qué. 

823-4.  «  deia...  torneia.  »  C'est  sans  doute  par  distraction 
que  M.  Meyer  écrit  ici  ces  deux  mots  par  ï,  car  ailleurs  il 
emploi  le >.  Cf.  vv.  519-20,  2238-9,  etc. 

870.  «  sen.  »  Corr.  fen  (=  fenh)  ?  Cf.  v.  875. 

890.  «  Lo  reisvol  ».  Le  ms.  porte  Le,  qu'il  faut  naturelle- 
ment rétablir. 

952.  «  vos».  Ne  peut-être  ici  le  pronom  personnel,  ni,  sera- 
ble-t-il,  voz  (vocem).  Le  vocabulaire,  sans  citer  pourtant  ce 
vers,  n'indique  d'autre  signification  que  celle  de  voix.  Je 
pense  qu'ici  il  s'agit  de  vœux.  S'il  fallait  une  correction,  als 
serait  tout  indiqué. 

976.  «  a  despes.  »  Ms.  ha  d. 

980.  «  dures.  »  Voir  la  note.  Le  ms.  porte  durelz. 

1024.  «  Oi!  lo  mal  aion...»  Lire  Oi  loi  Mal  aion...  C'est  une 
réponse  à  la  question  qu'Archambaut  se  faisait  à  lui-même 
au  vers  précédent.  Oi  est  une  forme ,  déjà  signalée  plus 
haut  v.  755,  de  l'affirmation  {=oc  avec  c  vocalisé),  encore  fort 
usitée  en  divers  lieux  (Montpellier,  Alais,  etc.),  et  lo  est  le 
pronom  neutre  sujet,  inexprimé,  comme  à  l'ordinaire,  dans 
la  proposition  à  laquelle   celle-ci  répond.  Cf.  v.  2579,  6187. 

1038.  «  Deforas  art,  dedins  acora.  »  Corr.  atora  (il  gèle), 
que  le  contexte  semble  exiger.  Voy.  Mistral  Tor,  Sauvages 
Toura,  et  les  glossaires  des  diverses  éditions  de  Goudelin. 

1072.  «  aital  doner!  »  Que  signifie  cela?  Il  faut  un  mot 
pouvant  rimer  avec  enquer  ou  enquier.  La  correction  dongier 


DU    «  ROMAN   DE    FLAMENCA  »  13 

ou  donier  se  trouve  ainsi  toute  indiquée.  C'est  le  français 
dangier,  avec  son  acception  ordinaire  chez  les  romanciers  et 
les  lyriques. 

1073.  Virgule  après  leis. 

1078.  «  Mi  euh  eu  be  que  la  sentis  ».  J'écrirais  l'asenlis 
(—lia.),  du  verbe  asseniir,  qui  manque  à  Raynouard,  mais 
qu'on  peut  voir  dans  Mistral. 

1079.  «  Asaborada  la  savia  ».  Cette  forme  savia,  admise 
au  vocabulaire  comme  imparfait  de  saber,  paraît  inadmissible. 
Je  lirais:  la  s'avia:   «  il  se  l'avait  savourée  ». 

1125.  «  geus  ».  Pourra  vos,  est-il  dit  au  glossaire.  J'en 
doute.  Je  lirais  gens  avec  un  point  d'exclamation  à  la  fin  du 
vers.  Cette  particule  qui  accompagne  d'ordinaire  la  négation, 
est  aussi  employée  au  positif,  comme  explétive,  et  il  y  en  a, 
dans  notre  poème,  des  exemples  certains.  Voy.  le  vocabulaire 
et  ajoutez  aux  exemples  cités  giens  5528. 

1129.  «  forfes.  »  Est-ce  bien  la  vraie  leçon?  La  lro  édition 
portait  forses,  ici  comme  plus  loin  (3579),  et  je  n'ai  pas,  en 
ces  deux  endroits,  relevé  de  faute,  dans  ma  collation.  Cette 
forme  d'ailleurs  existe  encore  Çnâ  forsei  en  Limousin). 

1147.  a  Malaus  balli  ».  Ms.  falli;  la  correction  salli  est 
mieux  indiquée,  et  le  contexte  n'y  répugne  pas,  à  condition 
de  sous-entendre  quelque  chose  comme  cela  (ce  mot,  cette 
parole)?  Cf.  v.  0022,  où  un  sujet  neutre  est  également  sous- 
entendu. 

1152.  «  tan  s'i  pert  ».  Corr.  tems  i. 

1162.  «  Que  semblon  Flamencha  espinat  ».  Il  ne  s'agit  cer- 
tes pas  ici,  malgré  la  majuscule,  de  l'héroïne  du  poème  :  fla- 
mencho,  d'après  Mistral,  signifie  (oison  en  Dauphiné  ;  quant 
à  espirat,  qui  suit  dans  le  ms.,  c'est  vraisemblablement  un 
autre  substantif,  qu'on  pourrait  traduire  par  buisson,  tas 
d'épines,  en  adoptant  la  correction  très  plausible  de  M.  Meyer. 

1192.  a  que  nom  folleja.  »  Corr.  non.  Le  pronom  réfléchi 
de  la  l'e  personne  n'a  rien  à  faire  ici.  Le  sujet  du  verbe  est 
Flamenca,  et  non  Arcbambaut,  comme  le  suppose  assez  sin- 
gulièrement l'éditeur  (voir  le  vocabulaire),  o  Je  la  crois  inno- 
cente, quoique  je  me  plaigne  d'elle;  mais  il  faut  être  sur  ses 
gardes.  Et  que  ferais-je  si  un  misérable  l'avait  fait  succom- 


14  UNE  NOUVELLE   EDITION 

ber?...  »   La  contradiction  des    paroles    du    personnage  est 
l'expression  naturelle  du  désordre  de  ses  idées. 

1-17.  «  [D']  aisso. ..  »  Correction  inutile:  aisso  est  régime 
direct  de  blasman,  comme  que,  qui  le  remplace,  de  lauzar ; 
me,  dans  le  premier  quem,  comme  dans  le  second  (où  il  ne 
peut  y  avoir  doute),  =  mihi. 

1218.  «  Petit  sap  fors  de  castiar.»  Le  ms.  a  fort.  D'après 
la  première  édition,  où  on  lit  for[s],  j'avais  cru  que  la  leçon 
du  ms.  était  for;  et  c'est  la  bonne,  comme  je  l'ai  dit  il  y  a 
longtemps. 

1222.  a  Mais  am  [mais]...  »  Cette  répétition  de  m  .is  est  un 
peu  choquante.  Dans  la  première  édition,  M.  Meyer  avait 
adopté  une  autre  correction:  Mais  am[ieu],  peut-être  préfé- 
rable. Ou  vaudrait-il  mieux,  corriger,  si  on  tient  à  la  conjonc- 
tion adversative,  [Mas]  triais  ami 

1224.  «  a  Bolonha.  »  Le  ms.  porte  na  Bolonha,  ce  dont 
l'éditeur  ne  parle  pas.  On  peut  conserver  ce  na,  sauf  à  écrire 
n'a.  Et  comme  la  tournure  de  la  phrase  paraît  s'accommoder 
mieux  du  parfait  composé  que  du  parfait  simple,  je  supplée- 
rais un  second  a,  ce  qui  donnerait:  «  Apres  n'a  a  Bolonha,  o 
bon?  »,  avec  élision  de  l'a  final  de  Bolonha.  «  Il  en  a  appris,  de 
la  chicane,  à  Bologne  ou  ailleurs  !  » 

1236.  «  so  trobet  en  espéra.  »  Par  des  procédés  mathé- 
mathiques,  est-il  dit  au  vocabulaire.  Il  faut  plutôt  entendre 
par  l'astrologie.  Cf.  un  des  exemples  cités  parRaynouard. 

1237.  «  qui  m'o  sabria.  »  Je  mettrais  après  ce  mot  plu- 
sieurs points  (il  n'y  a  aucun  signe  de  ponctuation  dans  l'édi- 
tion) et  un  point  d'interrogation  à  la  suite. 

1255.  «  cachutz  ».  Corr.  cajutz  pour  cazutz. 

1275-6.  «  miellers:  piegers.  »  Simples  assonances,  à  moins 
qu'on  n'admette  un  déplacement  peu  vraisemblable  de  l'accent. 
On  ne  voit  pourtant  pas  de  correction  à  proposer,  et  le  contexte 
n'en  réclame  pas. 

1312.  «  nom  [fai]  demora.  »  Lire  non  i  et  supprimer  fai. 

1315.  «  E  fes  li  faire  aital  pertus  ».  Pourquoi  écrire  aital, 
puisque  les  deux  premières  lettres  sont  grattées  dans  le  ms.? 

1330.  «  Quan  la  fort  gelosial  tocha  ».  Corr.  cocha. 

1334.  «  Non  escriurian  los  motz  nils  vers.  »  Ce  vers  doit 


DU    «ROMAN    DE   FLAMENCA»  15 

rimer  avec  Mes  (la  ville  de  Metz).  Corr.  vetz  (défenses)  ?  Cf. 
5428  et  devesa  1776. 

1411.  «  per  son  jausimen  ».  Au  vocab.  «  jouissance  ».  Corr. 
ckausimen,  qui  est  certainement  le  mot  qui  convient  ici. 

1423.  a  E  de  davan  es  el  ac  messa  ».  Leçon  du  ms.  a  con- 
server,  soit  qu'on  lise  ainsi  (es  étant  pour  etx)%  soit  qu'on  pré- 
fère e  sel  (=  en  ce/),  «pour  celer».  Cette  même  expression  se 
retrouve  plus  loin,  v.  1552.  Le  Donal  provençal  traduit  cel 
par  cautela,  qui  convient  très  bien  à  ce  dernier  exemple. 

1426.  «  Hon  i  sezia.  »  Corr.  simplement  i[[\. 

1480.  «  cascus.  »  11  y  a  cascuns  dans  le  ms. 

1493-4.  Mettre  le  point  à  la  fin  du  second  vers,  et  une  vir- 
gule seulement  après  le  premier.  Cf.  v.  1901. 

1502.  «  Ni  [ljeis  si  descaus...  »  Correction  inadmissible, 
leis  ne  pouvant  être  sujet.  Le  ms.  porte  Nieis  qui  suggère 
Nieil 2  =  m  il,  comme  niei(v.  5102)  =  ni  i,  comme  siei  (v. 
4294)  =si  ï,  et  par  conséquent  la  correction  Ni  il.  Sur  ces 
formes  et  des  pareilles  cf.  Revue  XIV,  116. 

1540.  «  Pas  ai,  fai  s'el,  las  mas  e  mort  ».  Lire  posai  en  un 
seul  mot  (cf.  anai  7361)  et  corr.  els  7nas  se  mortl 

1546.  «Geus  bainas  plus  soven  que  nos.  »  Lire  Gens.  «  Vous 
vous  baignez  bien  plus  souvent  que  nous  !  »  Cf.  la  note  sur 
v.  1125. 

1552.  «  car  estet  en  cel  De  sa  mollier  ».  estar  en  cel  veut 
dire  ici  être  en  surveillance,  plutôt  que  se  tenir  en  cachette, 
comme  il  est  dit  au  glossaire.  Cf.,  à  la  fin  d'une  charte  que 
M.  Meyer  a  publiée  dans  son  Recueil  d'anciens  textes  (p.  173)  : 
«  Aquist  cofraire  nos  tenont  en  sel  e  en  regart  deus  avers  e 
daus  cors...  »  Voir  ci-dessus  la  note  sur  1423. 

1557.  «  E  tôt  o  fes  digastendons  ».  Ce  dernier  mot,  qui 
reparaît  plus  loin  (v.  2441),  et  dont  la  signification  précise 
est  incertaine,  n'a  été  signalé  nulle  part  ailleurs.  Comme  c'est 
évidemment  un  mot  composé,  M.  Meyer  propose,  avec  doute, 
de  le  décomposer  en  digas  t'en  donz,  sans  l'expliquer  autre- 
ment.  Ce  doit  être,  dit-il,  «  une  expression  populaire,  indi- 

1  Pour  cet  emploi  pléonastique  de  et,  d'ailleurs  bien  connu,  cf.  plus 
haut  1040  et  plus  loin  1511. 

2  Rien  de  plus  commun  dans  le  ms.  que  la  confusion  de  l  et  de  s. 


16  UNE  NOUVELLE  EDITION 

quant  un  état  d'esprit».  Pourquoi  pas  aussi  bien  une  attitude 
physique  ?  Je  me  demande,  quant  à  moi,  si  nous  n'aurions 
pas  dans  digas,  où  M.  Meyer  voit,  à  ce  qu'il  semble,  l'impératif 
du  verbe  dire,  une  autre  forme  de  gigas,  jambes.  Pour  la 
réduction  de  gi  [djï)  à  di,  cf.  Revue  des  l.  r.,  VI,  293,  et  Guil- 
laume de  la  Barre,  introduction  p.  lxxv-lxxvi.  Le  tout  signi- 
fierait alors  :  Donne  t'en  des  jambes!  et  cette  expression,  dont 
il  y  a  tant  d'analogues  en  provençal  (cf.  p.  ex.  a  no  m'en  cal), 
surtout  dans  le  provençal  moderne,  reviendrait  à  dire  «  à  la 
course  »,  «  à  la  hâte  »,  et,  par  une  extension  assez  naturelle, 
«  brusquement  ».  —  On  peut  encore  supposer  que  le  mot  a 
été  forgé  par  l'auteur  lui-même,  sur  le  modèle  des  expressions 
adverbiales  telles  que  de  genoillons,  pour  peindre  plaisam- 
ment l'attitude  raide  (litt.  à  jambes  tendues)  d'Archambaut, 
l'aspect  rude  et  sévère  qu'il  voulait  se  donner. 

1678.  «  gabar  ».  Le  voc.  n'indique  d'autre  acception  que 
moquer  (se),  railler.  Ce  verbe  a  aussi  la  signification  de  louer, 
ici  louer  avec  exagération.  Borel,  dans  son  dictionnaire,  sous 
gaber,  qu'il  traduit  par  se  moquer,  donne  deux  exemples  en 
ancien  français  de  cette  signification,  et  ajoute:  «Au  con- 
traire ce  mot  signifie  louer  dans  les  montagnes  du  haut  Lan- 
guedoc. » 

1729-1730.  «  En  l'an  cen  ves  en  un  jorn  tan  Com  a  de 
renda  en  tôt  l'an.  »  Une  correction  est  évidemment  indis- 
pensable. En  lai  (là-bas)  pourrait  convenir.  Ou  suffirait-il 
d'écrire  En  lan,  où  lan  serait  le  la  nasalisé  qu'on  a  dans  la 
locution  lanquanï 

1756.  Je  corrigerais  fora  en  fos  et  rétablirais  per  supprimé 
par  l'éditeur,  en  dépit  de  la  grammaire. 

1762.  a  lo  ver  ».  Ms.  per  ver,  que  je  préférerais. 

1764.  «  Cant  legit  ac  totz  los  auctors  ».  Cant,  ici,  a  la 
signification  de  puisque,  car.  Cette  acception,  connue  des  dia- 
lectes modernes,  et  que  Raynouard  n'a  pas  mentionnée,  n'a 
pas  été  relevée  dans  le  vocabulaire.  On  la  retrouve  plus 
loin,  v.  3035. 

1765.  Supprimer  la  virgule  à  la  fin  du  vers. 
1877.  «  bel  les  ».  Lire  beil  (=  be  lï)  les,  avec  le  ms. 
1881.  Lire  pros  kom  W  plusleial, 


DU    «  ROMAN    DE   FLAMENCA  »  17 

1915.  Lacune  après  ce  vers?  Cf.  v.  1917:  En  pauc  de  temps 
es  fort  cregutz.  Or  on  n'a  pas  dit  l'âge  de  Gui  liera. 

1921.  «  alajet.  »  Corr.  alachet.  Plus  loin  v.  4540  co/'atz,  où 
le  même  affaiblissement  de  la  chuintante  se  remarque,  a  été 
justement  corrigé  cochatz. 

1944.  a  qu'en  son  cor  ha.  »  Corr.  que  ?  Cf.  les  trois  vers 
suivants,  surtout  1916-7  et  encore  lOiVJ. 

1966.  «  E  la  tor.  »  Corr.  De  lu  toi  ! 

1981.  «  ben  Bai.  »  Paraît  avoir  ici  déjà  la  signification  du 
moderne  bessai  (peut-être). 

1985.  «  per  aquest  ».  A  quoi  se  rapporte  cet  aquestl  Corr. 
aiga  ?  C'est-à-dire  par  les  bains. 

1992.  «  non  garisqu'els  bainz  Ab  sol  que  lo  perque  s'i 
bain.  »  Rimes  incorrectes.  Corr.,  au  premier  de  ces  deux  vers 
ou  el  bain,  ou,  mieux  peut-être,  nol  gariscol  bain. 

2049.  «  Sin  aissim  »  Ecrire  si'n(si  en  aùsi),  la  préposition 
en  ne  se  liant  pas  avec  si,  comme  l'ad verbe-pronom  en  ou  ne, 
dans  les  textes  correctement  imprimés. 

2088.  «  Quar  pauc  n'i  a  e  par  non  dura.  »  Rétablir  l'ordre 
des  mots  comme  dans  le  ms.,  en  corrigeant:  «  Quar  par  no 
i  a  e  pauc  madura  »  ? 

2091.  Corr.  et  ponctuez  :  «  Qui  Pi  met,  Pus  o  l'autre  mor.  » 

2109.  «Quesvan...  gaban.  »  Se  vantant,  et  non  pas  se 
moquant.  Cf.  v.  1678. 

2164.  «  Ben  cug  valgues  unas  daveras.  »  Corr.  ne  valgues 
an  ?  Le  copiste,  trompé  par  la  finale  de  l'adverbe,  aura  donné 
à  un  la  flexion  du  féminin  pluriel  et  supprimé  ne  pour  réta- 
blir la  mesure.  Ou  vaut-il  mieux  ne  rien  changer  ici,  et,  au 
vers  précédent,  substituer  joia  à  plazersï 

2168-2169.  Ces  deux  vers  sont  terminés  par  le  même  sub- 
stantif plazer,  de  signification  identique  aux  deux  endroits. 
Corr.  voler  au  second. 

2203.  «  Si  ben  hom  tant  non  la  tirera».  Corr.  las.  «  Il  n'eût 
pas  porté  de  chausses  de  saie,  si  bien  qu'on  les  eût  tirées 
(aussi  collantes  qu'elles  fussent).  »  La  construction  est  un 
peu  embarrassée;  ou  faut-il  une  autre  correction?  Cf.  le 
v.  5827. 

2216.  a  Be  Paiga  ».  Corr.  De  l'aiga.  v.  Cf.  3884,  5666. 

2224.  «  Abtant  lai  venc  En  Peire  Gui.  »  Le  ms.  a  lo  venc, 

2 


18  UNE  NOUVELLE   EDITION 

qui  pouvait  rester,  soit  qu'on  considère  ce  mot  comme  pronom 
neutre,  sujet  explétif,  soit  qu'on  préfère  y  voir  un  adverbe 
de  lieu.  Cf.  pour  le  premier  cas,  Romania  IV,  342  ;  pour  le 
second,  Revue  des  L  /*.,  IX,  357,  et  X,  210. 

2213.  «la».  Ms.  lo,  à  rétablir;  se  rapporte  à  argen. 

2304.  «  ben  moût  sabes  orar.  »  Corr.  moût  ben. 

2309-10.  «  no  m'en  fas  Ges  ara  trop  gais  ni  trop  leri.  » 
Corr.  gai,  pour  mettre  cet  adjectif  d'accord  avec  le  suivant, 
que  la  rime  ne  permet  pas  de  modifier. 

2314.  «  ben  meut  ne  vales  mais.  »  Corr.  e  moutl 

2349.  «  Guillem  non  au  ni  ve  ni  sen  ».  Ms.  Non  aus  nives, 
et  de  même  ailleurs,  p.  ex.  2750  ves,  également  rejeté.  Pour- 
quoi ces  corrections,  puisque  l'éditeur  a  renoncé,  il  le  dit 
lui-même,  «  à  régulariser  la  graphie  »,  et  que  ces  formes 
peuvent  être  caractéristiques  du  dialecte  de  l'auteur  ou  de 
celui  du  copiste  ?  Il  y  en  a  d'ailleurs  de  pareilles  en  d'autres 
textes,  p.  ex.  la  Vie  de  Sainte  Douceline.  Voy.  Revue  des  l.  r. 
XVIII,  21,  note  1. 

2355.  «  qu'el  cor  li  reveilla  ».  Lire  quel  cor.  Reveillar,  que 
je  sache,  n'a  jamais  été  neutre. 

2381.  «  E  ja  nol  toc  hom  trop  suau.  »  La  correction  pro- 
posée [sil  toc)  fausse  le  sens,  qui  est  et  doit  être,  comme  le 
contexte  l'indique  suffisamment:  «  On  le  frapperait  rudement 
qu'il  ne  sentirait  pas  le  coup.  » 

2399.  «  P.erque  so  vos  mi  celavatz  ?»  M.  Meyer  lit  ici  comme 
le  ms.  lui-même  ;  mais  je  crois  qu'il  aurait  mieux  valu  écrire 
Perçues  o. 

2424.  «  Al  meins  baissera  lo  nasil.  «Non  pas  le  nez,  comme 
traduit  l'éditeur,  mais  la  bande  qui  le  cachait.  L'auteur  ap- 
pelle ici  cette  bande  nasil,  peut-être  par  plaisanterie,  comme 
nous  appelons  cache-nez  une  cravate  qui  n'a  pas  pour  em- 
ploi de  cacher  le  nez  plus  que  la  bouche  ou  le  menton. 

2442.  «mal  aceutz  ».  Ce  mot,  où  M.  Meyer  voit  aujour- 
d'hui avec  raison  le  représentant  d'acceptus  (en  catalan 
accepte,  castillan  acepto),  figure,  sous  la  forme  aciout,  dans  le 
dictionnaire  de  Sauvages,  qui  le  traduit  par  dispos,  alerte. 

2483-4.  «  Le  cappelas  ab  l'isop  plou,  Lo  sal  espars  per  miei 
lo  cap.  »  La  ponctuation  indique  que  l'éditeur  ne  donne  pas  de 
régime  kplou.  Je  crois  que  c'est  à  tort,  et  qu'il  faut  supprimer 


DU    «  ROMAN  DE   FLAMENCA  »  19 

la  virgule.  «Le  prêtre  pleut  (fait  pleuvoir),  avec  le  goupillon, 
l'eau  bénite  sur  la  tête  de  Flamenca.  »  Le  mot  sal  est  ici  mas- 
culin, contrairement  à  l'usage  général  de  la  langue  d'oc  (comme 
man  en  plusieurs  endroits  du  poème),  ce  qu'on  n'a  pas  noté  au 
vocabulaire,  non  plus  qu'on  n'y  a  relevé  la  signification  d'eau 
bénite,  qu'il  a  évidemment  en  ce  passage,  soit  à  lui  seul,  soit 
avec  l'adjonction  du  participe  espars  qui  le  suit  (sal  sparsum 
[in  aqua]^)  ',  et  qui,  dans  le  cas  contraire,  serait  là  seulement 
pour  donner  plus   de  précision  à  l'idée  exprimée   par  plou. 

2501.  Virgule  après  ce  vers. 

25*20-1.  «  Et  ab  la  ma  qes  fon  seinada  Ac  baissât  un  pauc 
lo  musel  ».  Ce  mot  musel  reparaît  plus  loin  .'U33,  et  dans  les 
deux  cas  M.  Meyer  le  traduit  par  «  museau,  bas  du  visage  ». 
Ce  qui,  à  mon  avis,  est  inexact.  Je  pense  que  le  poète  veut 
désigner  la  bande  qui  recouvre  le  bas  du  visage  de  Flamenca 
et  que  plus  haut,  comme  on  l'a  vu  v.  2 124,  il  appelle  nasil. 
Le  contexte  s'accommode  du  reste  beaucoup  mieux  de  cette 
signification  que  de  celle  que  M.  Meyer  suppose  ;  car 
Flamenca  n'avait  pas  besoin  de  s'aider  de  la  main  pour  baisser 
la  tête.  Un  synonyme  de  mus,  d'où  vient  musel,  proprement 
ce  qui  enveloppe  le  mus  (muselière),  et  par  extension  le  mus 
lui-même,  est  mourre,  dont  nous  avons  en  limousin  le  dérivé 
mourreu  qui  a  exactement  la  signification  du  musel  de  notre 
texte.  On  appelle  ainsi,  par  exemple,  un  mouchoir  plié  en 
forme  de  large  cravate  dont  on  s'entoure  en  partie  le  visage, 
lorsqu'on  y  souffre  d'un  mal  quelconque,  spécialement  du  mal 
de  dents  ou  du  mal  d'oreilles. 

2554.   Il  faut  un  point,  ce  me  semble,  au  lieu  d'une  virgule 
après  ce  vers. 

2568.  «  de  si  don.  »  Corr.  si  dons. 

2577.  «  per  quan  sim  costa.  »   Cela  ne  donne  pas  un  sens 


1  II  existe  à  Montpellier  un  verbe  d'un  fréquent  usage  signifiant  as- 
perger, arroser,  mais  qu'on  n'applique  pas,  ou  qu'on  n'applique  plu-,  à 
l'aspersion  de  l'eau  bénite.  C'est  issala  (de  exsalareÇ?),  comme  issir  de 
e.rire).  Pourrait-on  trouver  là  un  appui  à  l'hypothèse  de  sal  =  « 
bénite  »  à  lui  seul?  On  n'ignore  pas  que  la  langue  de  l'Église  a  fourni  à 
celle  du  peuple  nombre  d'expressions  métapboriques,  souvent  emplo; 
d'une  façon  peu  respectueuse  de  ses  cérémonies  et  de  ses  mystères. 


20  UNE   NOUVELLE  EDITION 

satisfaisant.  J'écrirais  qu'ansim  et  corrigerais  gosta.  Gustar 
s'emploie  encore  ainsi,  en  catalan,  comme  en  castillan,  dans  la 
signification  de  agréer,  plaire.  Cheville  pour  cheville,  celle-ci 
est  plus  acceptable  que  l'autre.  La  confusion  de  c  et  de  g  est 
constante  dans  le  ms. 

2579.  «  Seiner,  oilo.  »  Ecrire  oi  lo,  en  deux  mots,  puisqu'on 
écrit  de  même  o  el  (v.  7061).  C'est  la  réponse  à  la  question  du 
vers  2575  :  Ha  i  comtier,  où  le  pronom  neutre  sujet  n'est  pas 
exprimé,  selon  l'habitude,  tandis  qu'il  l'est  dans  la  réponse. 
Cf.  ci-dessus  1024,  et  plus  loin  6187. 

2728.  Virgule,  au  lieu  d'un  point,  après  ce  vers. 

2701-68. 

Per  son  part  lo  cors  el  cor  laissa, 
Car  cel  non  vol  ben  segre  [en]  laissa, 
E[l]  cors  pensa  que  l'esteisses, 
Sel  forsava  que  s'en  mogues 
Entro  que  lo  n'aia  gitat 
Cil  on  ha  tan  lonc  teras  musat; 
Mas  cant  ha  conogut  e  vist 
Q'us  autre  ha  cel  hos  conquist... 

Ce  passage  est,  ainsi  écrit,  à  peu  près  incompréhensible. 
Il  faut,  au  premier  vers,  lire  laissa  et  mettre  un  point  après  ; 
au  second,  supprimer  en  et  corriger  segre[l}\  au  troisième,  au 
lieu  de  corriger  e[f],  substituer  car  à  cora/au  cinquième,  écrire 
lo  s'aia,  d'après  le  ms.  ;  au  sixième,  mettre  un  point,  et  au 
huitième  corriger  cel  hos  en  celheis. 

2793.  «  festa  rica  en  als.  »  La  correction  proposée  en  note 
est  inutile.  Lire  enals  pour  anals  =  fête  solennelle  (annuelle.) 
Voyez  Sauvages  festonaou,  et  les  autres  lexicographes. 

2805.  «  E  preguet  li  :  «  Sius  plas,  merce  ».  On  lit  de  nou- 
veau sius  plas  au  vers  suivant. Voyez  la  note.  Corr.  «  E  preguet 
li  suau  :  «  Merce  »  ? 

2831.  «  non  sai  coraus  m'i  veirai  ».  Il  faut  écrire  mi  évi- 
demment, et  non  nii  {quando  vos  mihi  videbo.)  Que  signifierait 
quando  vos  me  ibi  videbo?  Dans  la  première  édition,  M.  Meyer 
n'avait  pas  fait  cette  faute. 

2843.  La  correction  proposée  en  note  {Ni  anc  ni  re  mais  )  ne 
saurait  être  acceptée;  car,  à  quoi  serviraient  les  deux  ni?  Du 
reste,  le  texte  ne  paraît  pas  en  exiger. 


DU    «  ROMAN   DE   FLAMENCA  »  21 

3013-4.  «  Et  autre  mal  an  qualques  ora[s]  :  aboi'a[s].  » 
Corrections  fâcheuses.  Us  qui  termine  quu'ques  n'est  pas  la 
flexion  du  pluriel,  car  c'est  à  quai  qu'elle  devrait  s'attacher. 
C'est  sans  doute  l'orthographe  du  français  moderne  qui  a 
induit  M.  Meyer  en  cette  erreur. 

3035.  «  Quan  ».  Pourquoi  corriger  quar,  mot  qui  est  plus 
loin  dans  la  même  phrase?  Quan,  ici,  signifie  puisque. 

3054-5.  «  Per  so  nom  meravil  eu  ges  Si  Guillems  era  fort 
laisatz  ».  M.  Meyer  propose  en  note  la  correction  lassatz,  et 
non  sans  motif,  le  verbe  laisar,  s'il  faut  lui  laisser  sa  signifi- 
cation propre  et,  à  ce  qu'il  paraît,  constante,  de  souiller,  ne 
pouvant  en  effet  convenir  loi .  Mais  le  même  verbe  se  trouve 
déjà  au  v.  1831,  où  il  présente  la  même  difficulté  d'interpré- 
tation, et  là,  il  n'est  pas  possible  de  lui  substituer  lassar.  Il 
faudrait  donc  admettre  pour  ce  verbe,  à  côté  de  la  signification 
ordinaire  de  souiller,  celle  de  rendre  malade,  faire  du  mal. 

3070.  «  Vel  vos  si  1jl4  e  clar  ».  Ms.  ci.  Pourquoi  cette  cor- 
rection, puisque  ci  est  justement  la  forme  qui  convient?  Vous 
le  voici.  Cf.  272  où  l'éditeur  s'est  mieux  gardé  de  cette  faute, 
car  il  a  lui-même  corrigé  en  veci  la  leçon  (vesi)  du  ms. 

3072.  «  Ben  pograbeure.  »  Corr.  Be  i  ? 

3102.  «  Mais  [sol]  nom  cominal  avion.  »  J'aimerais  mieux 
Mais  [que]. 

3108.  Il  n'y  avait  pas,  ce  me  semble,  lieu  d'hésiter  à  intro- 
duire dans  le  texte  la  correction  proposée  en  note,  sauf  à 
écrire  seladon'intret,  et  non  si  la,  qui  n'expliquerait  pas  aussi 
bien  la  bévue  du  copiste. 

3110.  «  Venc  [E]n  Archimbautz,  fera  guida  ».  J'aimerais 
mieux  :  «  Venc  N'Archimbautz,  trop  fera  guida  ». 

3124-25  a  Baissai  musel  tan  que  gausir  Poe  ben  Guillems 
tota  la  boca.  »  Voir  la  note  sur  le  v.  2521,  où  j'ai  déjà  fait 
remarquer  que  musel  est  non  le  museau,  mais  ce  qui  le 
recouvre.  Comment  Guillaume,  qui  regardait  à  ce  moment 
Flamenca  par  son  pertuis,  aurait-il  pu  voir  (car  gauzir  ici  est 
certainement  pour  causir,  comme  ailleurs  agabar  pour  aca- 
bar,  csgolas  pour  escolas,  etc.),  comment,  dis-je,  aurait-il  pu 
voir  la  bouche  de  Flamenca,  si  celle  ci  avait,  sans  la  décou- 
vrir, simplement  baissé  la  tête  ? 


2  2  UNE  NOUVELLE   ÉDITION 

3195.  «  Mas  so  es  d'Amor  sa  dreitura.  »  Corr.  natura.  Cf. 
le  vers  suivant  et  le  v.  3193. 

3232.  «  quel  seras  son  fâchas.  »  La  correction  proposée  en 
note  est  à  rejeter.  Sera  est  masculin,  comme  j'ai  eu  occasion 
il  y  a  déjà  longtemps  de  le  faire  remarquer,  en  rendant  compte 
ici-même  d'une  autre  publication  de  M.  Meyer.  Voy.  Revue 
XIV  (1878),  p.  117. 

3312.  «  An[s]  s'en  recrusa  e  pejura.  »  Dans  sa  première 
édition  M.  Meyer  avait  laissé  sans  correction  la  leçon  du  ms. 
(Ans  en  r.),  et  il  aurait  dû  la  conserver.  Recrusar,  que  par 
parenthèse  Raynouard  explique  mal,  n'a  nul  besoin  du  pro- 
nom réfléchi.  Sa  signification  est  évidemment  celle  du  latin 
recrudescere. 

3414.  «Nulla  ren  d'aiso  c'ar  mi  pes».  Il  serait  plus  correct 
d'écrire  car,  sans  apostrophe  :  «  quem  sia  bes...  car  mi  pes 
nulla  ren  d'aiso  ». 

3591.  «  E  car  seran  mil  ves  baisât  ».  Corr.  can  [quantum)  ? 
Ou  corn? 

3606.  Virgule  après  plas. 

3618.  «  E  fes  lor  del  plorar  giquir.  »  Le  ms.  porte  los,  qui 
vaut  mieux,  et  que  l'éditeur  n'a  pas  mis  en  note. 

3619.  «  Oimais  ploras  !  »  Corr.  Si  mais  et  remplacer  par 
une  virgule  le  point  d'exclamation? 

36-10.  «  Mais  que  non  a  fagra  fag  en  très.  »  C'est  la  leçon, 
évidemment  corrompue,  du  ms.  M.  Meyer  a  corrigé  que  non 
agra.  Mais  l'idée  de  ici  doit  être  exprimée  :  «  Il  aura  en  deux 
ans  plus  appris  qu'il  n'aurait  fait  ici  en  trois.  »  La  leçon  du  ms. 
suggère  naturellement  sa.  Corr.  que  non  sa'gra  fag?  Une  con- 
traction pareille  me  paraît  devoir  être  admise  au  v.  6480 
(bentaular,  au  lieu  de  ben  entaular  du  ms.),  et  peut-être  en  :ore 
au  v.  6978  (qui^s,  pour  qui  es). 

3681.  «quem  cobri.  »  Corr.  cobra.  Cobri,  de  cobrir,  ne  peut 
être  une  forme  de  subjonctif,  et  ce  mode  est  ici  indispen- 
sable. 

3705.  «  E  pot  li  ben  ara  gabar.»  Lire  ar'agabar,  pour  acabar. 
«  L'amour  en  peu  de  temps  l'avance  ;  il  peut  bien  maintenant 
le  mener  au  bit.  »  Cf.  v.  782 1  :  «  Qaant  pauc  enanson  et 
acabon!»  Ls  vers  suivant  devrait,  peut-être,  être  corrigé: 
«  Qu'il  [l']a  fah  en  clerc  ordenar.  » 


LE    «  ROMAN   DE   FLAMENCA  »  2  î 

3873.  «  que  li  faza.  »  Corr.  si?  Cf.  w.  4311,  4313,  7352. 
3899.  «  quan  tal  ».  Ms.  qu'aitnl,  leçon  qu'il   n'y  avait  pas 
lieu  de  rejeter,  et  qui  n'est  pas  relevée  dans  les  notes. 

3928.  «  neisa  pas  donar.  »  Corr.  nei[s]  (ni  eîs)  sa?  ou  sim- 
plement rieisa?  neis  pas  [li]  donar  serait  encore  plus  satis- 
faisant. 

3965.  «  E  fes  parer  los  salms  i  vis.  »  Corr   [ç]uis? 

3997.  «  Lo  cors.  »  Ms.  le  que  les  notes  ne  mentionnent  pas, 
et  qu'il  faut  rétablir. 

4001.  Suppr.  liane  ai  rétablir  mali.  Le  féminin  est  habituel, 
sinon  de  règle,  dans  les  formules  de  ce  genre. 

40 J8.  «  ad  home  ».  Corr.  a  domna? 

4011.  «  Non  sai  qui  donc,  Amors,  quet  va]  ?  »  Je  crois  qu'il 
faut  mettre  un  point  et  un  tiret  après  gui,  et  supprimer  les 
deux  virgules  suivantes  ;  qui  serait  ensuite  avantageusement 
corrigé  en  quai,  comme  l'éditeur  le  propose. 

4046.  «  beu  la  m'eu  eis.   »  J'écrirais  plutôt  beu  lam  eu  eis. 

4078.  «  sufïris  si.  »  Corr.  suffri.  C'est  un  prétérit. 

4134.  «  gra[n]s  ».  Pourquoi  cette  correction  ?  «  Il  n'est  pas 
malade,  mais  beau  et  gras  »,  c'est-à-dire  bien  portant. 

4135.  «  Nos  es.  »  Ms.  Non,  que  le  sens  exige  et  qu'il  faut 
rétablir.  Peut-être  est-ce  une  faute  d'impression,  car  il  n'y 
a  pas  de  note  sur  ce  vers. 

4178.  «  Sa  vines,  ma  douza  piuzella.  »  Formule  encore 
usitée,  surtout  en  Gascogne  [sabietz,  au  singulier  sdbi,  avec 
déplacement  de  l'accent).  M.  Meyer  corrige  inutilement  sa 
en  sa[i].  Au  contraire,  aux  vv.  892,  3516,  il  conserve  sa. 
Son  édition  est  pleine  de  pareilles  inconséquences. 

4190.  Je  mettrais  un  ?  à  la  fin  du  vers.  La  phrase  a  tout  à 
fait  la  tournure  interrogative. 

4219.  «  Aici  es  vers.  »  Corr.  plutôt  aissi  que  aisso  proposé 
en  note. 

4233.  a  Ans  [nos]  coven.  »  Ans  ne  convient  guère  ici.  Corr. 
simplement  yl  n[o]<. 

4257.  u  lo  destreiuna.  »  Il  faut  une  rime  en  ina.  Corr.  lont 
destina,  dont  le  contexte  s'accommoderait  assez  bien1  ? 


1  Cf.  pourtant  vv.  5973-4,  où  ansina  (=ensenJicC\  rime  avec  /ina,  et  v. 
1136,  estrinz  =estreinz.  Faudrait-il  admettre  la  légitimité   de  pareille3 


2  4  UNE   NOUVELLE    EDITION 

1277.  «  que  no.  »  Corr.  il  no  ? 

4293.  «  Qu'om  nol  pusca.  »  Corr.  non. 

4304.   «  E[l]  dis.  »  Le  manuscrit  porte  bien  El. 

1325.  «  si  poc.  »  Corr.  si  moc  et  modifier  la  ponctuation 
en  conséquence. 

4364.  «  Nom  pert  una  ».  Corr.  Non[no  en)  =  il  n'en  pert 
pas  une. 

4392-5.  Les  pronoms  vos  et  nos  sont  confondus  dans  ces 
quatre  vers.  Voici  comme  il  me  semble  qu'il  faut  les  lire  : 

Parlât  vos  ha  una  vegada 
Amors  ;  hoimais  es  sobre  vos 
De  respondre,  quar  davan  nos 
Vos  a  tornada  la  pilota 
Aicil  que  ben  garda  e  nota 
Et  entent  so  ques  hora  li  dis. 

11  faut  après  ce  dernier  vers  un  point  ou  du  moins  un  point 
et  virgule. 

4425.  «en  tota  ren.»  La  rime  exige  la  correction  en  totas  res. 

4136.  Ponctuation  à  modifier.  Il  faut  mettre  une  simple 
virgule  après  dis,  et  supprimer  la  majuscule  à  ben,  le  membre 
de  phrase  qui  commence  ici  continuant,  après  l'incise  (lui  dit 
r amour),  le  propos  du  vers  précédent. 

4449.  «  Gran  angoissa  e  grans  martires.  »  Ms.  Grans  an- 
goissas. Il  fallait  garder  grans. 

4474.  «Voles  o  vos  domna?»  Corr.  doncas,  et  mettre  un 
tiret  au  commencement  du  vers.  C'est  une  question  de  Fla- 
menca, comme  le  montre  la  réponse  qui  suit. 

4527.  «envejos».  Ms.  enujos,  qu'il  n'y  a  aucun  motif  de 
changer  en  envejos,  à  côté  degilos  qui  précède  immédiatement. 

4571.  «  qu'ieil  diga  ».  Corr.  qu'ieul  (=  que  ieu  lo).  Il  n'y  a 
pas  place  ici  pour  le  datif. 

4575.  Mettre  un  tiret  devant  ce  vers.  C'est  Alis  qui  parle. 

4582.  «  De  malesa  coma  sas  pelz.»  Corr.  toma,  du  même  verbe 
que  le  français  tumer:  secouer,  jeter  de  côté  et  d'autre.  C'est 
aussi  le  sens  que  conjecture  M.  Meyer.  Mais  il  propose  une 

formes,  et,  par  suite  corriger  destrina  au  v.  Î257  ?  M.  Meyer  ne  l'a  pas 
cru,  car,  au  v.  5973,  il  a  corrigé  aisina. 


DU    «   ROMAN    DE    FLAMENCA  >  2ô 

correction  beaucoup    plus    éloignée  du  texte.  Le    catalan  a 
conservé  cette  acception  à  tombar,  autre  forme  du  même  mot. 

1589.  «non  [a]  pausa  ni  fina.  »  Je  corrigerais  plutôt  mm  si 
pausa. 

4640-1.  Il  n'y  a  point  ici  de  lacune  :  il  faut  seulement 
mettre  un  point  après  le  premier  de  ces  deux  vers,  et  un 
point  d'interrogation  après  le  second.  Guillaume  s'interrompt 
ici,  au  milieu  de  son  monologue,  pour  se  réfuter  lui-même, 
et  il  constate  par  sa  propre  expérience  que  ce  n'est  pas 
la  pitié,  mais  l'amour  qui  donne  son  prix  à  «  merci  »  . 

4653.  «  E  per  tôt  bon.»  Corr.  E  de  totben?  Cf.  vv.  2890 
et  0277. 

4722.  Virgule  après  clisses  ses,  qui  suit,  et  que  M.  Meyer 
propose  de  changer  en  ques,  est  la  conjonction  se  (  =  si  ), 
accrue  de  Ys  euphonique,  comme  déjà  ci-dessus,  v.  274.  Cf 
aussi  5130.  Il  n'y  a  pas  lieu  à  correction;  il  faut  seulement 
écrire  Qu'o. 

4724.  «  Celar  lan  dei  a  mon  semblait.  »  Il  faut  une  virgule 
après  dei,  et  une  autre  virgule  seulement  après  semblan:  la 
de  lan  se  rapporte  à  lauzenga  du  vers  suivant,  à  la  fin  duquel 
il  faut  un  point  et  virgule. 

4727.  Virgule  après  ment  a  va. 

4728.  «  lam  mandava  ».  Corr    lom. 

4730.  «  Ben  son  maïstre  de  l'obrar  ».  Ms.  siu,  qu'il  fallait 
conserver:  siu  est  ici  la  3e  pers.  plur.  de  l'imparfait,  que  le 
contexte  ne  repousse  nullement;  au  contraire. 

4741.  «Tal  colp  que  fassa  gap  ni  b[r]uis».  Il  n'y  avait  pas  de 
correction  à  faire.  Buis  reparaît  au  v.  7211  où  l'éditeur  le 
laisse  sans  changement.  Le  même  mot  est  dans  Sancla  Agnes 
v.  SOI,  sous  la  forme  buh,  que  M.  Bartsch,  commettant  la 
même  erreur  que  M.  Meyer,  a  corrigé  bruk. 

474C).  «Qu'anc  i  toques  ».  Le  sujet  manque.  Corr.  Qu'ont? 

4700.  «  Que  d'als  pens'  e  non  fai  parvent.  »  Corr.  penses? 

17N7.  «  le  cor  ».  Il  faudrait  lo,  le  substantif  étant  régime, 
et  c'est  en  effet  ce  que  porte  le  ms. 

4811 .  «  aibida.  »  La  leçon  du  ms.  cabida  (=  pourvue),  non 
indiquée  en  note,  et  qu'il  faut  rétablir,  est  bien  préférable. 
La  première  édition  donne  cubida. 

4*26.  «  Ans  es  vizis.  »  Ms.  utizis.  La  correction  est  peu 


5  6  DNE   NOUVELLE   EDITION 

satisfaisante.  Il  faudrait  un  participe  ou  toute  autre  épiihète. 
La  lre  édition  offrait  aunitz,  très  acceptable  pour  le  sens,  mais 
trop  éloigné  de  la  leçon  du  ms.  Corr.  vilzis  (vilzilz,  avili  . 

4851.  Remplacer  le  point  à  la  fin  du  vers  par  une  virgule. 

4873.  «  Le  jous  de  Roasos  a  tersa  »  Ms.  Lo  dijous.  Il  fal- 
lait évidemment  conserver  lo,  le  substantif  n'étant  pas  au 
nominatif  ;  et  il  n'était  peut-être  pas  indispensable  de  rejeter 
dijous,  car  fioasos  devait  pouvoir  être  dès  lors,  ad  libitum,  disyl- 
labique,  comme  il  l'est  devenu,  par  exemple  en  Limousin,  où 
l'on  dit  las  rasous,oa  devenu  diphtongue,  comme  je  suppose 
qu'il  ait  pu  l'être  ici  déjà1,  s'y  étant  réduit  à  a. 

4875.  «  Non  vol  per  ren  sa  pas  ad  esme.  »  Je  crois  que 
vol  est  cuit  et  non  volvit,  comme  le  suppose  M.  Meyer.  Et 
comme  il  faut  une  rime  en  erme,je  corrigerais  saderme,  sub- 
jonctif prés,  du  verbe  adermar,  qui  signifie  (f  laisser  en  fri- 
che »,  métaphoriquement  «  négliger  »  ;  sa  passerait  non  pour 
sa  paz,  qu'on  lit  déjà  au  v.  précédent,  mais  pour  sa  pars.  Le 
sens  serait  en  gros  :  «  Il  ne  veut  pas  manquer  son  rôle,  n  Cf. 
vv.  4514,  GU76. 

4992.  Point  d'interrog.à  la  fin  de  ce  vers,  et  un  autre  après 
le  v.  4rJ  E . 

4998.  «  Quar  si  ».  Corr.  Qu'aissi? 

5021.  a  mas  geins.  »  Corr.  ma[/]s  geins. 

5024.  ((  respondet.  »  Corr.  respondelz. 

5046.  Mettre  deux  points  (ou  un  seul?)  à  la  fin  du  vers. 

5067.  «  ni  tôt  V  la  re  qu'aves.  »  Le  ms.  porte  ques  aves. 
Corr.  donc  plutôt  tôt  l'(j[i]re  ques  aves;  d'autant  plus  que  tota 
la  re  étonne  tant  soit  peu. 

5068.  «  S'avias  neis. ...»  Le  vers  est  incomplet  et  M.  Meyer 
propose,  pour  le  parfaire,  l'hémistiche  tôt  quan  feses.  Mais  H 
faut  une  rime  en  e  cuvei  t.  La  correction  d'un  lecteur  du  XVe  s., 
indiquée  en  note,  peut  mettre  sur  une  voie  meilleure:  «  dos 
tans  o  dttz  »,  au  lieu  de  très,  qui  a  le  même  défaut  que  feses. 

5080.  «  Car  plus  no  i  gitarTal  pe».  Pourquoi  cette  correc- 
tion? gitara,  ici,  =  gitera,  et  c'est  justement  le  conditionnel 


i  II  faut  pourtant  remarquer  qu*à  un  autre  endroit  du  poème   v.  1  ±  i  -  » 
où  ce  mot  figure,  il  reste  tri  ;e. 


DU    «ROMAN    DE   FLAMENCA»  27 

passé  qui  convient.  Pour  d'autres  formes   pareilles  (en   ara 
au  lieu  de  era),  cf.  3695,  7  178. 

5 122.  «  Que  poguesson  »  Corp.  Quo  (C<>,  Coût  ? 

5147.  «  posca  trobar.  »  Corr.  pose  [s]  (posca  se). 

5164-5.  Je  mettrais  une  virgule  après  le  premier  de  ces 
deux  vers  et  supprimerais  le  point  à  la  fin  du  second.  La  con- 
jonction Otte  est  sous-entendue  devant  celui  qui  suit. 

5-17.  «  Pren  li,  car  s'el  eis  non  lui  pren  ».  Ecrire  /ï(=lo  i) 
et  de  même  au  v.  5230,  et  corriger  lui,  où  M.  Meyer,  par  je 
ne  sais  quelle  distraction,  semble  vouloir  trouver  un  équi- 
valent de  lo\  en  loi  [lu  i). 

5265  0.  «  Pero  sens  es...  Zo  que  sens  vol.  »  Corr.  quAmors 
vol. 

5279.  (i  Je  soupçonne  ici  une  lacune  d'au  moins  quatre 
vers,  le  premier  terminé  par  les  mots  pren  Ci,  que  Flamenca 
à  ce  moment  devrait  prononcer. 

5284.  «  laboca  el  morsol.  »  Je  n'ai  vu  morsol  nulle  part  ail- 
leurs ;  mais  ce  ne  peut  être  la  bouche,  comme  il  est  dit  au 
vocabulaire;  il  faut  probablement  entendre  par  ce  mot  le  bas 
du  visage.  La  signification  propre  paraît  être  mâchoire  (de 
mors). 

5321.  «  A  pessat  venc  corn  pogues  far.  »   Corr.    Apessalz 
«  11  avait  pensé  à  moi  avant  de   venir;   ce  n'est  pas  ici  et  su- 
bitement {desopte  que  l'idée  lui  est  venue  de  me  secourir.  » 

5352-3.  «  .Malaventura  Deus  li  don  Qui  mais  vos  arnara 
qu'eu  sia».  Passage  des  plus  difficiles.  M.  Meyer  propose, 
avec  doute,  de  corriger  vos  en  nos  et  qu'eu  enquea,  qui  serait 


1   Voy.  le  vocalnlaire,  sous  Lui.  Il  n'est  pas  moins  surprenant  de  voir 
le  savant  éditeur  écrire,  dans  le  vocabulaire  également,  en  tète  de l'arti- 

Li  :  «  Li,  l'orme  abrégée  de  lui  »,  car  il  peut  moins  que  personne 
ignorer  que  /('  n'est  autre  chose  que  le  latin  Mi.  Se  serait-il  fait  en  ce 
moment  sous  sa  plume  une  confusion  entre  ce  li,  datif,  et  un  autre  li, 
qui  est  en  effet   une  forme   abrégée,  ou  mieux  contractée,  mais  à  peu 

-  exclusivement  française  celle-là,  non  pas  de  lui,  mais  de  liei,  et 
qui  n'est  que  féminine?  Dans   ce  même    article,   renvoyant  aux  deux  li 

-  dans  la  note  ci-dessus,  M.  M  rit  :  «Dans  pren  li.  il  faut 
peut-être  écrire  Vi.  »  Il  n'y  a  lieu  ici  à  aucun  «peul-étre  ».  Suppose-t-il 

■  qu'on  ait  jamais  pu  dire  pren  îi(ce  qui  serait  encore  plus  extr. 
dinaire  que  pren  lui),  au  lieu  de  pren  lo,  en  parlant  de  n'importe  quoi? 


28  UNE   NOUVELLE   EDITION 

pour  quin/i.  Je  propose  à  mon  tour,  sans  prétendre  avoir 
mieux  trouvé,  la  correction  suivante  pour  le  second  vers,  en 
mettant  une  vigule  à  la  fin  du  précédent  :  «  Qui  mais  vos  am, 
cora  qu'en  (ou  que?)  sia?  »  C'est-à-dire:  «  Malheur  à  qui  vous 
aimerait,  n'importe  quand  !  »  Flamenca  désigne  par  vos  les 
chevaliers  des  terres  de  son  père  et  de  son  mari  (cf.  v.  5335, 
5330)  dont  elle  vient  de  se  plaindre  amèrement. 

5407.  «  Deves  tôt  la  re  consentir.  »  Ce  vers,  tel  qu'on  le  lit 
ici,  ne  signifie  rien,  à  moins  de  supposer  que  l'auteur  parlait 
une  langue  barbare.  Je  ne  propose  pas  de  corriger  Ta[/Jre, 
comme  je  l'ai  fait  pour  le  vers  50G7,  parce  que  je  pense  que, 
malgré  l'apparente  identité  des  mots,  le  cas  n'est  pas  le  même. 
Je  crois  qu'il  faut  simplement  lire  Pare  (li  are)  où  are  (en  un 
seul  mot  ou  en  deux)  est  la  locution  encore  fort  usitée,  surtout 
dans  le  composé  adere,  qui  signifie  «  successivement,  sans 
cesse  ».  Le  sens  est  donc:  «  Vous  devez  consentir  à  tout  ce 
qu'il  va  désormais  vous  demander.  » 

5423.  «  Honors  e  jois,  precs  e  jovens  ».  Corr.  prêts  (pretz). 
Rien  de  plus  commun  dans  le  ms.  que  la  confusion  du  t  et  du 
c.  Ainsi  au  v.  249,  au  lieu  de  tel  on  j  lit  cel,  ce  qui  n'est  pas 
indiqué  en  note. 

5424.  «Domnei  ».  Corr.  Domneis. 

5425.  Supprimer  le  point  à  la  fin  du  vers. 
5437.  «  prendes.  «  Corr.  prend[r}es. 

5453.  La  correction  proposée  en  note  paraît  inacceptable, 
car  comment  Guillem  pourrait-il  être  du  conseil  dont  il 
s'agit?  C'est  de  l'Amour,  naturellement  désigné  par  le  féminin 
aquil,  qu'il  est  question,  assas  us  du  vers  précédent  est  obscur, 
et  rien  au  vocabulaire  n'indique  comment  l'éditeur  l'entend. 
Une  correction  paraît  s'imposer  ;  mais  laquelle  ? 

5482.  «  Pos  luec  no[n]s  fug  quel  jorn  vos  diga  a.  Il  faudrait 
une  virgule  à  la  fin  du  vers  précédent,  et  une  autre  après  fug. 
Mais  pourquoi  corriger  nons  (no  nos)  plutôt  que  nous  (no  vos)  ? 
Cette  phrase  d'ailleurs,  qu'on  lise  nons  ou  nous^  ne  satisfait 
point  pleinement.  On  attendrait  quelque  chose  comme  :  Puis- 
qu'il vous  a  dit  le  lieu,  qu'il  vous  dise  le  jour  :  Pos  luec  vos 
dis'? 

5488.  «  o  demanda  ».  Répétition  de  la  rime  précédente. 
Corr.  c  manda  ? 


nu    «  ROMAN   DE   FLAMENCA  »  29 

5407.  «  lo  coven.  »  Corr.  coven[c],  il  fallut.  Seul  exemple 
(avec  celui  du  v.  2224?  voy.  ma  note)  de  ce  pronom  neutre 
sujet,  en  dehors  de  la  locution  oi lo.  Il  aurait  dû  être  relevé  au 
vocabulaire. 

5499.  «  jorn  breu  e  gent.  »  Cette  réponse  de  Guillem  pa- 
raît longue,  dans  la  circonstance,  outre  que  e  gent  y  a  l'air 
d'un  pur  remplissage.  Ne  faudrait-il  pas  écrire  :  «que  «jorn 
breu»,  e  gent  Pueis  s'ostet...  »  (et  s'éloigna  ensuite  genti- 
ment)? 

TmOI  .  Remplacer  le  point,  à  la  fin  du  vers,  par  une  virgule. 
Faute  d'impression  évidente. 

5513-11.  «  Car  noi  amas  deman  el  mieg,  Quant  al  respon- 
dre,  mis  respieg.  »  M.  Mever  interprète  el  mieg  «  au  milieu 
du  jour.  »  A  tort,  ce  me  semble.  La  phrase  est  embarrassée 
et  assez  mal  construite  ;  mais  le  sens  paraît  clair  :  «  Car  il  n'y 
a,  pour  répondre,  mis  répit,  dans  l'intervalle,  que  demain.  » 
Cet  emploi  du  participe  mis,  avec  un  sujet  neutre,  paraît,  à  la 
vérité,  un  peu  singulier;  mais  c'est  parce  qu'il  n'est  pas  habi- 
tuel; remplacez-le,  je  suppose,  par  accordé,  et  la  pbrase  ne 
cboquera  pas.  Cf.  le  vers  6822  qui  offre,  avec  une  meilleure 
tournure,  une  phrase  construite  grammaticalement  de  la 
même  manière. 

5518.  Mettre  une  virgule  à  la  fin  du  vers. 

5527.  «  Mais  ara  ven  tota  la  forsa.  »  Il  faut,  ce  me  sem- 
ble, écrire  ar  aven  =  maintenant  convient.  Cf.  v.  1345  : 
l'aven  del  gilos  a  suffrir:  v.  5635:  mais  pos  vei  qu'a  suffrîr 
m'ave.  Ne  faudrait-il  pas  aussi  corriger  ma  forsa  ? 

5515.  «  L'un'es  de  ser,  autra  de  fueill.  »  Corr.  de  fer?  Ce 
qui  reviendrait  à  dire  :«  L'une  est  pesante,  l'autre  est  légère.  » 

5563.  «  lorn  dis  Amors.  »  Corr.  som.  Le  copiste  confond 
souvent  les  deux  lettres  s  et  /. 

5600.  «E  si  passa  .xxi.  an  ».  Corr.  passo;  avec  passa  il 
faudrait  corriger  ans  et  au  vers  précédent  avans. 

5613.  «Pos  er  mescabada  per  jor.i.  »  Cette  locution  per 
jorn,  traduite  au  vocabulaire  par  u%  jour,  paraît  signifier 
plutôt  jour  à  jour,  chaque  jour. 

5617.  Ici  s'interrompt  le  monologue  de  Flamenca,  qui  le 
reprend  seulement  au  v.  5622.  Il  faut  donc  mettre  des  guille- 


30  UNE  NOUVELLE   EDITION 

mets  à  la  fin  de  5G17  et  supprimer  ceux  qui  précèdent  les 
quatre  vers  suivants. 

5621.  «  Vis  oils  si  pren,  teunamen  plora.  »  «  Elle  est  prise 
par  les  jeux»,  dit  l'éditeur.  Il  faut  traduire:  «  Elle  s'en  prend 
à  ses  yeux  »,  jolie  expression  encore  en  usage,  pour  dire  : 
Toute  sa  ressource,  toute  sa  consolation  est  de  pleurer. 

5032.  «  Neis  ».  Corr.  nés  ou  nis  [ne  ou  ni  -\-  Y  s  euphonique). 
Cf.  niz  3348. 

5637.  «Cou».  Lis.  C  on. 

5642.  «  Vos  sera  cambra  et  ostal  ».  La  rime  et  la  grammaire 
exigent  ostals.  C'est  d'ailleurs  la  leçon  du  rns. 

5616.  La  correction  proposée  en  note  pour  ce  vers  doit 
s'appliquer  plutôt  au  précédent.  Peut  être  y  a-t-il  une  faute 
d'impression, 

5668.  a  El  'obrils  oilz  ».  obri,  ici,  est  au  présent,  et  non  pas 
au  prétérit,  comme  il  est  dit  au  vocabulaire. 

5673.  «d'aquest[al  ».Corr.  plutôt  d'aquest  [mal]. 

5683-85.    «  Quel  luna  es  a  recontorn E  il  sera  del  tôt 

ferma  ja.  »  S'agit-il  bien  du  dernier  quartier  de  la  lune,  comme 
il  est  dit  au  vocabulaire  ?  Je  penserais  plutôt  au  premier  quar- 
tier, quand  la  lune  se  recoutourne,  commence  à  reprendre  sa 
forme  ronde,  et  alors  il  faudrait  peut-être  corriger  formada  au 
v.  5685.  Cf.  d'ailleurs  les  vv.  3259  60:  «  El  luna  sera  deman 
nona,  E  bainar  m'ai  en  ora  bona.  »  Or  le  neuvième  jour  de 
la  lune,  donné  là  comme  favorable  à  qui  veut  prendre  un  bain, 
correspond  précisément  au  premier  quartier. 

5739.  Mettre  une  virgule  après  ausent  el. 

5780.  «  cabeissa  ».  Ce  ne  peut  pas  être  un  capuchon,  comme 
le  suppose  M.  Meyer.  Le  contexte  l'indique  assez.  Ce  mot, 
encore  usité,  s'applique  aux  tiges  herbacées  de  certaines 
plantes  :  en  limousin  la  ckabesso  d'une  rave,  d'une  carotte, 
d'une  pomme  de  terre.  En  catalan  cabessa  désigne  au  contraire 
les  racines  des  plantes  bulbeuses,  ou  du  moins  les  bulbes  de 
ces  racines. 

5790.  «  Car  tôt  égal  i  conoissia  Alcun  pertus  com  far  so- 
lia.  »  Alcun  pertus  ne  paraît  pouvoir  être  qu'une  incise,  à 
mettre  entre  deux  virgules,  et  qui  exige  une  correction.  On 
pourrait  proposer,  en  supprimant  far:  [Ses]  negun  j/erlus. 

5820.  «  affars  ».  Crr.  a/fans? 


DU   «ROMAN   DE   FLAMENCA»  31 

5827.  «  on  si  ten  ».  Correction  peu  satisfaisante  :  s' a  tain, 
leçon  du  ms.,  mais  que  la  rime  repousse,  convient  ici  on  ne 
peut  mieux.  Je  soupçonne  une  lacune  de  deux  vers. 

5842.  «  Tan  bes  [tain]  ».  Pourquoi  pas  fais,  puisque  les 
autres  verbes  (estet,  semblet)  sont  au  parfait  ? 

5936-7.  «  De  nulla  ren  mais  non  s'esmaia  Mas  que  lo  puesca 
pion  servir»,  lo  est  une  correction  de  l'éditeur,  qui  a  eu  ici  la 
main  malheureuse.  Le  ms,  porte  nol,  qu'il  faut  rétablir,  a  Fla- 
menca n'a  d'autre  crainte  que  de  ne  pouvoir  assez  le  servir.  » 

6007-9 

Amdui  si  ploron  coralmen 
E  l'aiga  que  del  cor  deissen 
Mesclou  ensems  e  pueia  la  bevon. 

Voilà  un  de  ces  traits  qu'on  regrettait  que  M.  Meyer  eût 
omis  autrefois  dans  sa  traduction.  Notre  auteur  qui  savait, 
comme  tant  d'autres  passages  en  témoignent,  son  Ovide  par 
cœur,  pensait  peut-être,  en  écrivant  ces  vers,  à  celui-ci  de 
F  Art  d'aimer   II,  32(3)  : 

Et  sicco  laciïmas  combibat  ore  tuas. 

G064.  «  enn  aut.»  Pourquoi  ne  pas  lire  en  naut,  puisque  naut 
est  une  forme  connue  ? 

G074.  «  Oimais  ren  [alsj  pron  nol  tenra.  »  Corr.  plutôt  0 
j{a]mais  ren  pron  nol  tenra.  Voici,  dans  le  ms.,  la  disposition 
des  premières  lettres  :  0  i  tuais,  ce  qui  suggère  immédiatement 
la  correction  que  je  propose. 

6125.  «  Ans  dorm  ades».  Ce  verbe  dorm  est  contradictoire 
au  contexte,  car  Flamenca  ne  dort  pas;  elle  s'agite  dans 
son  lit.  Corr.  toim'  adrs. 

6102.  «  D'aisso  qu'an  dig  ac  trop  gran  juec  ».  Ms.  dig  ''cor- 
rigé de  dif,  non  de  dis,  comme  il  est  dit  en  note)  an,  ce  qui 
suggère  la  correction  dig  fa,  préférable  d'ailleurs  à  celle  de 
l'édition. 

6187.  «  per  Dieu,  oilo.  »  Écrire  oi  h.  Cf.  2579. 

6238.  Manque  ici  un  vers  dont  l'éditeur  propose  en  note 
une  restitution  qui  ne  convient  pas  grammaticalement  au 
contexte.  Suppléez  plutôt,  :  E  que  ju  tant  non  li  fara. 


&S  UNE   NOUVELLE   EDITION 

62  13.  o  E  prega  Dieu  qui  ja  la  cre  ».  Coït.   E  perga  Dieu. 
Cf.  v.  1032. 

6248.  «  por  ».  Faute  d'impression.  Lis.  pot. 

G257.  «  0  per  amie  d'ams  cuminal  ».  amie,  correction  de 
l'éditeur,  forme  avec  le  vers  suivant  un  pur  pléonasme,  car 
il  est  clair  que  l'ami  commun  de  deux  personnes  ne  veut  mal 
à  aucune  d'elles.  Pourquoi  ne  pas  accepter  la  leçon  du  ras., 
en  corrigeant  toutefois,  comme  l'a  fait  l'éditeur  an  en  ams,  et 
lire  o  per  uutr  'ad  ams  ?  Le  sens  serait  :  «  ou  par  toute  autre 
personne  de  leur  société  ». 

6264.  a  Qu'en  ren  so  tenga.  »  Lire  s'o  tenga. 

6277.  «  Parer  de  son  amie  nol  quilla.  »  Doit  rimer  en  eilln. 
Il  faut  donc  une  correction.  Celle  qui  est  indiquée  en  note, 
de  l'aveu  même  de  l'éditeur,  est  inacceptable.  Je  pense  que 
nol  cueilla  peut  convenir.  Il  y  a  d'autres  exemples  de  l'emploi 
du  simple  coillir  pour  le  composé  acoillir.  On  pourrait  aussi 
penser  à  vueilla.  Quant  à  cette  construction  avec  l'ablatif 
d'une  part  et  l'accusatif  de  l'autre,  elle  est  bien  connue. 

6300-1.  Corr.  plutôt  si[m]  podia,  Per  si  far  aucire,  guérir. 
Avec  la  correction  de  l'éditeur,  il  faudrait  au  moins  si[s]  podia. 

6340.  «  Sis  pieu  per  lui,  un  autre  clerc.  »  11  faut  une  virgule 
après  pieu.  Cette  expression  sis  pieu  ne  paraît  signifier  rien  de 
plus,  ici,  que  s'il  lui  plaît  '.  Cf.  N'  At  de  Mons: 

Mas  de  failhir  se  plevon  tant  (les  rois) 
Que  blasme  toi  al  laus  son  cors. 

Raimbaut  d'Orange: 

Qu'a  far  Ter,  sis  pieu,  per  me. 

Voir  aussi  Revue,  X,  312,  où  l'on  cherche  à  établir  l'iden- 
tité de  pleure  etde  plevir,  contestée  par  M.  Meyer. 

6345.  «  So  qu'il  manda  ».  Corr.  qu[e]>l=  que  li.  Cf.  65-SO. 
il  ne  pourrait  pas  d'ailleurs  se  rapporter  à  un  nom  masculin. 

6369-70.  «  c'om  mogut  y  agues...  mogut  s'en  es.»  M.  M.eyec 
propose  là    correction  anat  pour  le  second  vers.  J'aimerais 


1  C'est  ainsi  que  le  traduit  .M.  Meyer  dans  sa  première  édition,  mais 
en  renvoyant  à- un  passage  où  pieu  a  sa  signification  ordinaire. 


DU    ROMAN    «  DE    FLAMENCA  »  33 

mieux  eissitz.  On  pourrait  aussi  penser  à  mudat  pour  le  pre- 
mier, et  le  second  resterait  tel  qu'il  e>t. 

0380.  «  Que  nuilla  re.  »  Lire  Qu'e  nuilla  re. 

6424.  «  Mant'  angoiss[a]  ».  Répétition  du  vers  précédent. 
M.  Meyer  propose  manta  dolor.  J'aimerais  mieux  E  man 
(rebail. 

6430.  «  que  s'entramesson.  »  Ne  vaudrait-il  pas  mieux  écrire 
avec  apostrophe  s'entr'amesson? 

6439.  «  Mais  tan  vos  plaz  faitz  vostre  albir  ».  Les  mots  sou- 
lignés sont  une  correction;  il  en  faut  une;  mais  celle-ci  ne 
convient  guère.  Le  contexte  suggère  plus  naturellement  los 
venir,  à  savoir  les  deux  écuvers  que  Guillaume  a  demandé  à 
Flamenca  la  permission  de  lui  présenter. 

< »  179.   «  ferai.  »   Corr.  forai. 

6480.  «  lo  pogr'om  ben  taular  ».  Corr.  pogron  et  écrire 
be'ntaular. 

0503-4.  «  volon...  dolon.  »  Corr.  voillon...  doillon.  Le  sub- 
jonctif est  ici  de  rigueur. 

G506-7.  «  Soven  envidon  e  revidon  Lo  jorn  la  mostra  e  la 
presa».  Ms. /ors,  qui  pouvait  rester.  Lojors  est  ici  considéré 
comme  un  adverbe  et  muni  en  conséquence  de  Vs  adverbiale. 
Ce  cas  est  fréquent.  Autres  exemples  dans  Flamenca  même: 
quad'  ans  [v.  3402),  de  nugz,  (v.  6280),  guada  sers  (v.  7131). 

6589.  «  simples  et  purs.  »  Corr.  blos,  pour  rimer  avec  saboros. 

6592.  «  Si  totz  tems  i  dévia  entendre  ».  Entendre  termine 
aussi  le  vers  précédent.  Corr.  atendre  (s'appliquer).  Cf.  les 
vers  3114  et  3179. 

6598.  «  Non  s'asauton  d'aitals  esgolas.  »  Il  est  surprenant 
que  M.  Meyer  n'ait  pas  reconnu  ici  le  mot  escolas,  averti 
comme  il  l'était,  par  lui-même',  de  l'échange  fréquent  dans 
le  ms.  des  lettres  c  et  g.  Il  le  traduit  par  bagatelles,  ce  qui  est 
d'ailleurs  un  sens  approchant. 

6600.   «  Le  joi  d'amor.  »  Corr.  Lo.  C'est  un  régime. 

0614.  uL'us  en  l'autre  ».  Corr.  L'un.  Mettre  une  virgule  à 
la  fin  du  vers  suivant. 

6)17-18.  <(On  lur  désir  los  fai  venir,  Baisar,  abra^ar  e 
tenir.  »  Suivent  immédiatement  deux   autres  rimes  en  ir,  ce 

1  Voyez  la  préface  do  la  première  édition,  page  xxxn. 


3  4  UNE   NOUVELLE    EDITION 

qui  fait  supposer  une  lacune  entre  les  deux  paires  de  rimes, 
ou  une  altération  du  texte.  On  pourrait  proposer,  dans  cette 
dernière  hypothèse,  de  remplacer  venir  par  parer  et  tenir  par 
tener,  qui  serait  d'ailleurs  plus  régulier. 

6678.  «mi  agues  »  {habuistis).  Pourquoi  corriger  accès 
{habuissetis)lNi  le  sens  ni  la  rime  ne  l'exigent. 

6795.  «  tutz  mi.  »  Il  faut  tut,  et  c'est  en  effet  la  leçon  du  ms. 

6730.  «  Car  non  ac  talen  ques  mogues.  »  Ce  devrait  être 
justement  le  contraire.  Aussi  une  correction  s'impose-t-elle  : 
lezer  est  celle  qui  se  présente  le  plus  naturellement. 

6759.  «foran.»  Ms.  foron,  qu'on  pouvait  conserver.  Cf.  v. 
6724.  où  tolgron,  forme  assurée  par  la  rime,  est  aussi  un 
second  conditionnel. 

6842.  «  A[l]  revenir  mot  loue  tems  poina  ».  Pourquoi  cette 
correction  ?  Revenir  ici  n'est  pas  pris  substantivement  ;  il  est 
employé  dans  sa  fonction  verbale  ordinaire.  «  Guillaume 
tarde  beaucoup  à  se  remettre.»  Car  il  ne  faut  pas  perdre  de 
vue  que  poinar,  ici,  signifie  tarder,  acception  déjà  notée  au 
v.  79.  Cf.  locha,  même  sens,  au  v.  3944,  comme  le  remarque 
l'éditeur. 

6852.  «  Jaes[t]  vos.  »  Pourquoi  cette  correction,  puisque 
es  =  etz  est  plus  régulier?  Cf.  2839,  où  ce  même  es  n'en  souf- 
frirait d'autre  que  etz,  étant  en  rime  avec  enqueres  {...etz). 

6864.  «  Tan  co[m]plitz.  »  La  correction  aibïtz,  proposée  en 
note,  car  il  en  faut  une,  ne  convient  pas  ici.  Corr.  offlitz, 
part,  passé  de  afflire. 

6872.  «  non  colon  ».  Ne  chôment  pas.  C'est  aussi  le  même 
verbe  et  le  même  sens  qu'on  a  aux  vers  620  et  5940,  pour 
lesquels  j'avais  autrefois  proposé,  à  tort,  les  corrections  lolc 
et  toi.  Icilamêtne  erreur  n'était  pas  possible,  et  je  trouve,  dans 
mes  notes,  à  l'appui  de  cette  acception,  dans  son  sens  mé- 
taphorique, cet  exemple  tout  à  fait  probant  , 

Tiriaca,  jes  vostre  pretz  non  col 

De  meillurar,  c'uoi  valetz  mais  que  hier. 

(A.  de  Peguilain,  Gedichte  de  Mann,  344,6.) 

6880.  «E  d'els  acniliir.  »  Ecrire   dels  {de  los)  acuillir. 
6905-G.  «  ella[s]..  domna[s]..  donzella[s]..  »  On  ne  voit  pas 
l'utilité  de   ces   corrections.  Le  vers  6908  d'ailleurs  les  con- 


DU    «  ROMAN    DE   FLAMENCA  »  35 

damne.  Au  v.  6905,  vau  du  ms.  a  été  corrigé  van.  Pourquoi, 
puisque  vau  est  une  forme  connue  et  que  M.  Meyer  en  admet 
ailleurs  de  pareilles,  p,  ex.  728-8  estarau  :  venrau  ,  1761  et 
4315  aun,  1151  trobarau  ? 

6959-60.  a  fe  que  dei  vos...  s'el  es  daus  vos.  »  Corr.  nos  au 
second  vers?  Il  est  naturel  que  le  beau-père  d'Archambaut 
dise  ici  de  notre,  aussi  bien  que  de  votre  (été. 

6970.  Mettre  une  virgule  après  ce  vers,  et  un  point  et  vir- 
gule après  le  suivant. 

6978.  «  E  qui  [sj'alegri  ni  gau  senta.  »  Le  ms.  porte  alegra. 

Ne  vaudrait-il  pas  mieux  conserver  cet  adjectif  et  lire  «  E 

qui's  (=qui  es)  alegra  ni  gausenta  »  ?  Cf.  ci- dessus,  note  sur 
le  v.  3640. 

7012.  «  Non  y  ajudava  .n.  botos.  »  C'est  la  leçon  du  ms. 
Le  vers  étant  trop  long  d'une  syllabe,  M.  M.  a  corrigé  No. 
11  vaut  mieux  conserver  Non  et  corriger  ajuda,  le  présent 
convenant  ici  beaucoup  mieux  que  l'imparfait. 

7015-16.  «  fer  y  tant  gent  Que  cavalliers  pren  e  reten.  » 
Leçon  du  ms.  qui  appelle  une  correction,  la  rime  étant  fausse. 
Mais  il  vaudrait  mieux  corriger  gent  en  ben  qu'intervertir 
l'ordre  des  deux  derniers  mots  du  second  vers,  comme  l'a  fait 
l'éditeur,  car  de  sa  correction,  outre  qu'elle  renverse  l'ordre 
logique  des  termes,  il  résulte  une  série  de  quatre  rimes  en 
ent,  ce  qui  est  choquant  et  serait  dans  tout  le  poème  un 
cas  presque  unique. 

7024.  «  ab  lo  dous  avrei.  »  Ce  mot  est  traduit  par  avril  au. 
vocabulaire,  ce  qui  est  inacceptable,  puisqu'il  rime  à  tornei. 
Lire  simplement  aurei.  Cela  d'ailleurs  revient  au  même  pour 
le  sens.  Cf.  A.  de  Mareuil  ;  ab  lo  dous  aurei  Quem  reven  lo 
cor  aissi.  Il  s'agit  de  la  brise  printanière. 

7026.  «  Que  a  son  tornej[amen]  fos.  »  J'aimerais  mieux, 
pour  rendre  au  vers  les  deux  syllabes  qui  lui  manquent,  sup- 
pléer el  si. 

7065.  Virgule  après  ce  vers. 

7067.  «  qu'el  ».  Lire  quel  (que  lo). 

7075.  «Flamenca  dis:  «E  dis!  bel  seiner».  Corr.  Flaw.nca 
ris  e  dis:  «  Bel  seiner. 

7106.  «  !o[s]  »  Le  ms.  porte  bien  los. 

7143-7144.   «  sentis  :  esgauzis».  Corr.  sentisca:  esgnuzisna 


3  6  UNE   NOUVELLE   EDITION 

ou  simplement  sentissa:  esgauzissa.  Pour  ces  dernières  for- 
mes, cf.  plus  loin  vv.  7549-50. 

7154.  Ms.  quieil.  C'est  ce  que  la  note  devait  indiquer  ;  mais 
on  y  a  oublié  le  premier  i.  Faute  d'impression. 

7163.  «si  so  sap.»  Lire  s'o. 

7204.  «  Pobles  alberga  tôt  entorn.  »  Lire  Poble  s' alberga. 
Cf.  v.  7203.  Mais  on  voudrait  l'article.  Corr.  I  e  poble  albergas 
(  =  alberga  se)?  Poble,  que  M.  Meyer  n'a  pas  relevé  au 
vocabulaire,  signifie  ici  ville,  bourg.  Acception  conservée 
en  catalan  et  en  gascon.  Cf.  castillan  pueblo. 

7255.  «  Fes  bom  [un]  gran  escadafals.»  Mettre  une  virgule, 
au  lieu  d'un  point  à  la  fin  du  vers,  et  corriger  us  grans.  Cf. 
v.  7276. 

7265.  «  Car  be  i  a[c]  cavallier[s]  tal  mil  ».  Ms.  tais.  On  ne 
s'explique  pas  le  rejet  de  Y  s  dans  ce  dernier  mot,  lorsqu'elle 
est  justement  rétablie  dans  le  précédent. 

7321.  «  So  dis  le  rei.  »  Il  faudrait  rets,  mais  la  rime  s'y 
oppose.  Faute  surprenante  chez  un  auteur  aussi  correct.  On 
ne  voit  pas  de  correction  possible,  et  le  contexte  ne  laisse 
pas  soupçonner  de  lacune. 

7331.  «per  lur  ves».  L'édit.  propose  de  corriger  per  lur  ops. 
Pourquoi  ne  pas  entendre  à  leur  tour  ?  L'emploi  de  per  ici 
serait-il  si  extraordinaire  ? 

7337-8.  «  E  dis  suau  antre  sas  dens  :  Sempre  pesca  qui  una 
pren.  »  Rimes  fausses.  Corr.  si  una  prens?  pesca,  naturelle- 
ment, serait  un  impératif. 

7404.  Corr.  Qiïom  tôt  lo  près  del  mon  li  dona. 

7434-5.  «Lur  ueilz  e  lur  bocas  revenon  D'aitan  con  podon, 
e  lur  nas.  »  On  ne  voit  pas  bien  le  rôle  du  nez  dans  cette 
galante  conversation.  Corr.  mas  (les  mains).  L'auteur  a  déjà 
dit  plusieurs  fois  qu'elles  ne  restaient  pas  inactives,  et  il  le 
répétera  plus  loin. 

7440.  «  E  cant  Gruillems...»  Corr.  Abtant,  en  mettant  un 
point  à  la  an  du  vers  précédent? 

7497.  Sur  aiz  et  son  origine  (voy.  le  vocabulaire),  il  me 
sera  permis  de  renvoyer  aussi  à  la  Revue  des  langues  romanes, 
XVI,  378,  et  au  glossaire  de  Deux  mss.  provençaux,   p.  181. 

7514.  «  ben  deu  ».  Le  contexte  exige  dei  (debeo),  et  c'est  en 


DU    «  ROMAN    DE    FLAMENCA  »  37 

effet  la  leçon  du  ms.,  deu  y  ayant  été   corrigé   en  dei,  par 
l'exponctuation  du  second  jambage  de  Vu. 

7548.  «  dueilla  ».  Corr.  tueilla. 

7530.  «  Com  leva  l'us  ».  Corr.  Can  (quart)? 

7551.  «  [so]  ».  Lire  plutôt  s'o. 

7582.  a  tenti  ».  Corr.  vesti  ? 

7614.  «  Que  dunquec  o.  C'est  la  leçon  du  ms.  Corr.  quad 
unquec,  comme  le  veut  le  contexte,  et  non  que  unquec,  comme 
a  fait  l'éditeur. 

7629-30.  Les  signes  de  ponctuation  (:  et ,)  ont  été  transpo- 
sés à  la  fin  de  ces  deux  vers.  Faute  d'impression  évidente. 

7635.  «  que  so  prenda  ».  Lire  s'o. 

7642.  11  semble  qu'il  y  ait  une  lacune  après  ce  vers.  Pour 
quoi  n'est-il  question  que  d'un  couple,  quand  il  y  en  avait 
deux?  Pourquoi  très  au  v.  7643? 

7647.  «  a  leur  guisa  ».  Corr.  lur.  Faut3  d'impression. 

7648-9.  J'avais  pu  lire  moi-même,  sans  réactif,  la  seconde 
moitié  et  même  un  peu  plus  de  chacun  de  ces  deux  vers, 
qu'un  lecteur  trop  scrupuleux  avait  grattés,  et  qui  étaient 
restés  en  blanc  dans  la  première  édition;  savoir  : 

blisaus  •ni  camisa 
de  lur  benenansa  2 

Pour  le  reste  j'avais  fait  les  mêmes  conjectures  ou  à  peu 
près  que  M.  Meyer. 

Ques  anc  ni... 
Non  tolcren... 

7655.  «  consi  l'acueilla.  »  Corr.  consil[s]  a. 

7680.  «  Aissi  cos  fes  ».  Lire  coffes  et  écrire  co  fes  ?  Le  pro- 
nom réfléchi  ne  convient  guère  ici. 

7687-8.  «  Maritz  que  son  despendre  cuja  Que  mullier  ad 
amie  estuja.  »  La  correction  proposée  en  note  serait  loin 
d'améliorer  le  texte.  Il  faut  simplement  mettre  les  deux  ver- 
bes au  subjonctif  {cuje:  estuje).  Le  sens  est  :  «  bien  fou  est  le 
mari  qui  pourrait  croire   qu'il  dépend  de  lui  de  cacher  3  une 

'  M.  M.  a  lu  blisaut.  —  2  M.  M.  a  lu  benanansa. 
Proprement  «  mettre  dans  un  étui,  serrer,  renfermer». 


38  UNE  NOUVELLE   EDITION 

femme  à  son  amant.  »  Pour  cette  construction  et  cet  emploi 
substantivé  de  l'infinitif,  cf.  w.  1731,  3655,  4712. 

7705.  «  baït  ».  Il  existe  en  Saintonge  et  en  Poitou  un  verbe 
basi,  qui  signifie  disparaître,  mourir.  Aurions-nous  ici  le  même 
verbe?  Ou  faut  il  corriger  blaït,  qui  serait  pour  blasit  (flétri)  ? 
Voir  Mistral  sous  blesi,  et  aussi  Raynouard,  blezir  et  blahir. 
7802.  «  ab  blatons.  »  Corr.  ab  latons.  C'est  évidemment  un 
diminutif  de  lata,  baguette  longue  et  plate.  Le  copiste  aura  ici 
redoublé  le  b  comme  il  fait  ailleurs  l'a,  17,  etc.  —  Sesmar,  qui 
suit,  n'exige  aucune  correction.  Ce  verbe  signifie  disposer, 
arranger,  et  le  contexte  n'en  demande  pas  plus. 

7818.  «la  meillers  [r]^s.  »  Ms.  le.  Il  fallait  donc  plutôt  cor- 
riger li,  forme  qui  est  de  beaucoup  la  plus  fréquente  pour  le 
nominatif  singulier  féminin. 

7840.  «  De  son  jovens  ni  [de]  sos  vieils.  »  Ce  vers,  tel  que 
le  donne  le  ms.,  est  inadmissible  à  tous  égards.  Je  ne  sais 
comment  l'éditeur  l'entend.  Je  crois,  quant  à  moi,  qu'il  faut 
corriger  :  «  De  nos  jovens  ni  de  ocs  vieils  »  ;  c'est-à  dire  : 
«  des  non  de  la  jeunesse  ni  des  oui  de  la  vieillesse  »,  ce  qui 
s'accorde  on  ne  peut  mieux  avec  ce  qui  précède,  et  spéciale- 
ment avec  les  vers  7837  et  7838.  . 

Je  remarquerai  à  cette  occasion  que  notre  auteur,  qui  se 
plaît  aux  jeux  de  mots  (voir  entre  autres  les  passages  où  il 
joue  si  curieusement  sur  sol  et  solalz,  vv.  4592-6  et  sur  miuj 
et  mot  (4675  et  suiv.),  ne  doit  pas  avoir  employé  sans  inten- 
tion de  ce  genre  l'épithète  noada  (v.  7829)  et  le  substantif  noz 
du  v.  7832. 

7849.  Mettre  un  point  à  la  fin  du  vers.   Autrement  il  fau- 
drait corriger  au  vers  suivant,  consi  nos  penses. 
7855.  a  de  corre  que. . .  »  Lire  de  corr  e  que. . . 
7863.  «  com  hom  vesa.  »  Corr.  que  hom? 
7886.  «Turton.  »  Le  ms.  a  turcon,   qu'il  faudrait  corriger 
trucon,  mot  qui  convient  fort  bien  ici.  Raynouard  n'a  que  le 
substantif  correspondant,  truc.  Mais  voy.  Mistral. 

7896.  «  De  cal  guisa  l'obras  menet.  »  Lire  lo  bras.  Guil- 
laume montra  la  force  de  son  bras. 

7941-42.  «  deslivre:  livre  ».  Lire  desliure:  Hure. 
7968.  Lacune.  Mais  c'est  plutôt   avant  le  vers  7967  qu'il 
fallait  la  marquer,  car  ce  dernier  se  lie  parfaitement  avec 


DU    «  ROMAN    DE    FLAMENCA  »  39 

celui  qui  le  suit  dans  le  ras.,  à  condition  de  traduire  poino  par 
s'efforcent,  en  rapportant  cette  forme  -kpoinar.  M.  Meyer  au 
contraire  la  rattache  à  poiner  (pungeré). 

7986.  «  Que  non  vougues  totz  los  arsos.  o  Faut-il  corriger 
voiges  de  voïar?  Ou  rapporter  cette  forme  à  volgere?  Cf.  Diez 
sous  voto  II  a.  Dans  tous  les  cas,  ou  n'y  peut-être  que  diph- 
thongue.  On  ne  saurait  penser,  à  cette  date,  à  la  voyelle  sim- 
ple que  le  prov.  mod.,  comme  le  français  figure  par  ow,  et  que 
présentent  les  formes  actuelles  vouja,  bouja. 

8017.  «  D'aqui  on  s'es.  »  Ecrire  ses  en  un  seul  mot  (sedet). 
Cf.  ves  [videt\  ans  {audit),  etc. 

8041.  «  On  estavan  bon  feridor  ».  La  syntaxe  réclame  ici 
l'imparfait  du  subjonctif,  et  le  contexte  un  adjectif  de  quantité 
devant  bon  (estessontanbon?).  Maisla mesure  du  vers  nepermet 
pas  cette  correction;  fossnn  tan  conviendrait  très  bien.  Si  l'indi- 
catif présent  pouvait  être  ici  admis  l,  la  correction  n'exigerait 
que  l'insertion  d'un  t  dans  Testa  watt  du  ms.,  devenu  ainsi  estau 
[t]an.  On  pourrait  aussi  penser  à  estiu  tan.  On  aurait  bien  là 
un  subjonctif,  mais  ce  serait  toujours  le  présent. 

S(;65.  «Non  val  unas».  Non  pas,  ce  me  semble,  un  as, 
comme  l'éditeur  le  suppose,  mais  unis  (  trescas  ),  non  étant 
pour  no  en.  Cf.  v.  8002. 

8083-4.  «Si  tu  me  plais,  ce  nés':  pas  tout  en  cheveux  et  en 
joues»,  c.-à-d.  «ce  n'est  pas  seulement  par  tes  charmes 
extérieurs  »  Ainsi  me  paraît  devoir  être  interprété  ce  passage 
Je  lirais,  bien  entendu,  si  nïazautas,  au  lieu  de  sit  m.  Ce  t 
sera  venu  spontanément  sous  la  plume  du  scribe,  qui  pensait 
à  tu,  et  qui  aura  oublié  de  l'exponctuer. 

8089.  «  Troban  Jaufre  de  Laisina.  »  Troban  est  pour  troba 

en  (l'article  honorable),  ce  qu'il  eût  été  bon  d'indiquer,  car 

il  n'y  a  pas  d'autre  exemple   dans  le  poème  de  la  contraction 

de  cet  article  avec  un  verbe. 

C.  C. 


P.  -S.  —  Le  présent  article  n'ayant  pu  paraître  dans  le 
numéro  de  Novembre-Décembre  de  la  Revue,  je  profite  de  ce 
retard  forcé  pour  joindre  aux  remarques  qui  précèdent  un 

1  Cf.  pourtant,  v.  4,  </ue  m'es,  où  l'on  attendrait  quem  sia. 


4  0  UNE   NOUVELLE    EDITION 

certain  nombre  d'observations  nouvelles,  faites  au  cours  d'une 
seconde  lecture. 

2456-7.  «  Mais  langui,  plais,  fol  desplazer  :  vezer.  »  La 
grammaire  voudrait  desplazers,  que  la  rime  repousse.  Corr. 
fel  ci.  ?  ou  ac  desplazer,  ou  encore  del  desplazer,  en  suppri- 
mant la  virgule  après  plais  ? 

2478.  «don'  avanz.  »  Apostropbe  inutile. 

2631.  «  De  prohome  s'aver  lo  poc.  »  Corr.  s'amar  ? 

2655.  «  entendet  s'i  ».  Lire  plutôt  si,  car  à  quoi  se  repor- 
terait i  ? 

3878.  «  Aqui  la  mes,  quar  ben  l'adesa.  »  Outre  la  significa- 
tion de  toucher,  seule  indiquée  au  vocabulaire  ,  le  verbe 
adesar  devait  avoir  celle  de  «  serrer,  mettre  en  lieu  sûr  »,  et 
c'est  celle  qui  conviendrait  ici.  Ce  verbe  existe  au«si  en 
catalan,  et  le  dictionnaire  de  Labernia  l'interprète  par  «  posar 
alguna  cosa  en  lloch  segur.»  Je  soupçonne  dans  Dame  z  que 
du  vers  précédent  une  altération  d'une  leçon  meilleure,  que 
je  ne  sais  pas  retrouver. 

3991-2.  «Et  e  menz  d'oral  camja  cor...  Las!  con  no  mor.  » 
Le  ms.  a  cors  et  mors  que  je  voudrais  rétablir.  Guillaume, 
dans  le  second  de  ces  deux  vers,  s'adresse  à  lui-même,  et  na- 
turellement à  la  deuxième  personne,  ce  qu'il  fait  très  souvent. 
Cf.  p.  ex.,  un  peu  plus  bas,  vv.  4011  et  suiv.  La  forme  de  la 
première  personne  ne  serait  pas  d'ailleurs,  régulièrement, 
mor,  mais  muer. 

4053-4.  «  Quar  aissim  pren  bona  sabor  Lo  bon  saber  qu'om 
a  d'amor.  »  M.  Meyer  propose  de  corriger  Del  bon  saber.  La 
seule  correction  à  faire,  car  aissim  est  pour  aissin  [aissi  ne) 
et  non  pour  aissi  me,  est  de  donner  au  sujet  du  verbe  une 
forme  régulière,  en  écrivant  Le  bons  sabers. 

4066.  «  E  Fus  per  l'autre.  »  Corr.  l'un.  Saborir  signifie,  ici 
du  moins,  non  pas  devenir,  ma.\s  rendre  savoureux. 

4103.  «  Si  davaus  mi  donz  gauh  nom  ve.»  Le  mot  gauh 
est  déjà  au  vers  précédent  et  reparaît  au  suivant.  Il  serait  ici 
avantageusement  remplacé  par  une  particule  (yes?) 

4100.  «  conort.  »  Il  faudrait  un  mot  exprimant  l'idée  con- 
traire. Co:r.  dolors? 

4215-16.  «  gran  aventura  :  s'aventura.  »  Ecrire  plutôt  sa 
ventura. 


DU    «   ROMAN   DE  FLAMENCA   »  4  1 

4300.  «  Si  merces  i  fai  captenensa.  »  Corr.  no  i  fai?  Cf. 
v.5186. 

4549.  «  Qu[e]  ieu  non  vis  ».  La  correction  Qiïieu  non  vis 
[mais]  serait  à  mon  avis  préférable. 

4763.  «  Lo  mot  e  met  en  cor  prion.  »  Corr.  el  met  en  c.  Le 
ms.  porte  El  mot  e  mot. 

4831.  «  E  cel  que  non  sap  ni  volria  ».  Leçon  du  ms.  L'édi- 
teur corrige  ni  en  molt.  Ce  n'est  pas  là  que  la  correction 
devrait  porter,  principalement  du  moins  ;  c'est  sur  non.  Lis. 
«E  cel  que  moll  sap  ne  volria.  «Avec  la  correction  deM.Meyer, 
ancar  du  vers  suivant  s'expliquerait  mal. 

4944.  «  es  so  abetz.  »  La  traduction  de  abetz  au  vocabulaire 
(tromperie,  fourberie)  ne  saurait  convenir  ici.  C'est  tout  au 
plus  «  ruse  »  ou  mieux  encore  «  raillerie  »  qu'il  faut  entendre: 
«  Elle  se  moque  sans  doute  en  me  demandant  pour  qui    » 

51  ST.  «  E  vos  a  merce  connoissetz.  »  Corr.  cossentetz? 

5243  5.  «  Ben  vai  l'affars  ;  Nuls  affars  non  fora  plus  cars 
Aora  d'aquest  estornut.»  Le  deuxième  affars  est  certainement 
une  répétion  fautive  ;  mais  la  correction  est  indiquée  par  le 
contexte  même.  Alis  vient  d'éternuer,  ce  qui  est  de  bon 
augure.  Corrigez  donc  agurs. 

5287-8.  Le  sens  paraît  être  (pie  Flamenca  fixa  ses  yeux 
sur  Guillaume  plus  longtemps  que  lui-même  ne  faisait  sur  elle. 
Corr.  en  conséquence  ou  Ques  el  lais,  ou  el  esgarda.  Au  vers 
suivant  il  suffit  d'écrire  lion  {on)  au  lieu  de  nom. 

5412.  <(  Cossi  poeses  far  quel  plagues.  »  Corr.  placses?  ou 
pogues  et  queus  ? 

5435.  Supprimer  le  point  à  la  fin  du  vers. 

5173.  «  Que  de  tal  guisa  [sia]  fait.  »  J'aimerais  mieux [oaia] 
fait. 

5536.  «  E  negun  pensier.  »  Corr.  IJer? 

5561.  «  Nos  feiron.  »  Corr.  No  feiron. 

5567.  «  Si[l]  toi  vergoina  ni  temensa.  »  On  ne  sait  à  qui 
rapporter  le  pronom  (/==  l>)  suppléé  par  l'éditeur,  non  plus 
que  le  verbe  toi.  Corr.  «  Cel  cuitol  vergoina  e  (ou  o)  temensa.  »  ? 

5610-11.  «  Car  si  mescaba  una  ves,  En  autr'afar  pot  reve- 
nir. »  Afar  ne  parait  guère  convenir  ici.  Le  ms.  offre  une 
autre  division  autra  far:  En  autra  pourrait  signifier  une 
autre  fois,  et  il  faudrait  chercher  une  correction   pour  far. 


4  2  UNE   NOUVELLE   EDITION 

Peut-être  sai:  «  Je  sais  bien  qu'elle  peut  une  autre  fois  reve- 
nir de  son  erreur,  mais...  » 

5781.  «  Quar  las  canas  foron  fumadas  ».  Cela  ne  signifie 
rien  ;  aussi  l'éditeur  propose-t-il  une  correction,  fermadas, 
qui  ne  paraît  guère  satisfaisante.  Je  crois  que  suilladas  con- 
viendrait, et  paléographiquement  et  pour  le  sens.  Cf.  v.  6713. 

5911.  «  Per  lur  sen  ni  per  lur  parlar.  »  C'est  la  leçon  du 
ms.  Comme  il  faut  une  rime  en  <?>,  l'éditeur  corrige  saber.  Je 
crois  que  parer  vaudrait  mieux. 

5997.  «  Non  la[s]  cuja.  »  Cette  addition  d'une  s  (=  sibi) 
paraît  ici  assez  inutile. 

6045.  «  Quel  fronz.  un  pauc  si  remulliet.  »  Corr.  front  ï 

6159.  «  Cui  Alis  fai  papiejar.  »  M.  Mejer,  au  vocabulaire, 
voit  dans  ce  mot  le  même  verbe  que  l'ancien  français  papier 
qui  signifie  balbutier,  en  observant  avec  raison  que  ce  sens 
ne  convient  guère  ici.  Il  y  a  dans  le  provençal  moderne  un 
autre  verbe  qui  conviendrait  au  contraire  on  ne  peut  mieux, 
et  dont  la  leçon  d\:  ms.ne  s'éloigne  pas  beaucoup  ;  c'est  patejar, 
moins  usité  que  arpatejar,  signifiant  l'un  et  l'autre  a  piétiner, 
aller  et  venir,  tourner  surplace  ».  C'est  le  dernier  qu'il  fau- 
drait ici  pour  la  mesure  du  vers.  Mais  on  pourrait  corriger 
Qu  'Âlis  fai  [aissi]  patejar,  ce  qui  peut-être  vaudrait  mieux. 

6472.  «  E  podon  las  ben  solassar.  »  Corr.  la  ou  lai. 

6507.  <(  la  mostrae  la  presa.  »  «  Termes  de  jeu  »,  est- il  dit, 
simplement,  au  vocabulaire.  N'est-il  donc  pas  possible  d'in- 
terpréter ces  mots  d'une  façon  moins  vague  ?  Il  me  semble 
que  la  mise  (ou  Y  invite)  et  le  gain  (l'acte  de  gagner)  pourraient 
les  traduire. 

6952.  «  Al  tornei  sai  quel  veirem  doncs.  »  Voilà  déjà  le 
moderne  saique  =  probablement,  peut-être  ;  car  Arcbambaut 
n'a  à  cet  égard  aucune  certitude.  Cf.  les  vers  suivants.  — 
Voir  ci-dessus,  v.  1981,  la  note  sur  ben  sai,  aujourd'hui  bessai, 
dont  saique  est  le  synonyme. 

7028.  «  m  'i  métrai  ».  Lire  plutôt  mi. 

7307.  «  A  vostra  dona.  »  Corr.  nostra?  Cf.  v.  5708. 

7734.  «  Quar  a  cel  portai.  »  Corr.  Ques  a.  Cf.  v.  7755-6. 

7912.  «  Don  vos  n'ires.  »  Corr.  donc?  Ou  faut-il  considérer 
don  comme  un  vocatif  pluriel  (domini)  ?  Le  vocabulaire  est  muet 
sur  ce  point. 


DU    «  ROMAN    DE   FLAMENCA  »  4  3 

8000.  «  El  fer  son  tost  .l'outra  passât.  »  Corr.  tôt? 

8015.   «  E  l'estreup.  »   Corr.  Eis  estreups.  Ou  vaudrait  il 
mieux  corriger  peitral  au  v.  8013?  Ces  formes   de  nominatif 
pluriel  s'expliqueraient  par  une  anacoluthe. 

8027.  «  Non  la  pogra.  »  pogran  du  ms.  est  il  vraiment  une 
faute,  comme  on  le  dit  en  note?  J'en  doute  pour  ma  part,car 
ce  mot  peut  très  bien  se  traduire  par  «  on  n'aurait  pu.  » 


Qu'il  me  soit  permis,  en  terminant  ce  long  examen,  d'ex- 
primer le  vœu  que  M.  Paul   Meyer,  avant  de   mettre   sous 
presse  son  second  volume,   veuille  bien  revoir  le  texte  avec 
un  redoublement  d'attention,  et  s'efforcer  d'y  introduire  plus 
de  correction  et  de  clarté,  afin  que  sa  traduction  de  Flamenca 
puisse  être  l'image  la  plus  nette   et  la  plus  fidèle  de  ce  déli- 
cieux poème.  Nul  mieux  que  lui,  je  l'ai  déjà  dit,  ne  peut  le 
faire;  et  j'oserai  ajouter  que  la  reconnaissance  lui  en  fait  un 
devoir.  C'est  sous  les  auspices  de  Flamenca   qu'il  fit  si  heu- 
reusement ses  premiers  pas,  dans   une  carrière  encore  peu 
fréquentée   et    mal   aplanie.  C'est  grâce  à  elle,    grâce  à  la 
séduction  de  ses  charmes,  qu'il  fut  partout  accueilli  d'emblée 
avec  faveur.  Et  puisque,  après  trente-cinq  ans,  il  conserve 
encore  à  l'aimable  personne  qui  lui  valut  ses  premiers  succès 
toute  la  tendresse  d'autrefois,  il  lui  doit  bien  de  faire  tout  ce 
qui  est  possible  pour  rafraîchir  sa  parure  et  la  nettoyer  com- 
plètement des  taches  qu'une  main  maladroite  et  peu  soigneuse 
y  a  répandues. 

C.  Chabaneau. 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


(Suite) 


165 

GAUCELMS  FATDITZ 
(=  B.  Gr.  167,  14) 

I.   Chascus  hom  deu  conoisser 

[e  entendre 

Qe  richeza  ni  prez  ni   cor- 

[tezia 

Res  qe  sia.nons  pot  de  mort 

[défendre 

Cal  iorn  com  nais  coraensa  a 

[mûrir 

5     E  qi  mais  vin  plus  ponha  de 

[fenir 

Donc  ben  es  fouz  cel  qen  sa 

[vidas  fia 

Si  bes   pessa  de   prion  sa 

[folia 
En  nos  es  tos  los  gentil  cors 

[faliz 

Duna  valen  contessa  biatris. 

II.   Donc  neguns  hom  nos  pot 

[per  dreih  contendre 

Oimais  mas  tan  con  deus  ten 

[en  bailia 

Non  puescha  om  sa  part  de 

[valor  tendre 

Desseignamen  ni  daut  cor 

[dont  dei  dir 

5     E  pos  dieus  se  de  mort  non 

[vole  garir 


Qi  totz  los  bes  del  mon  com- 

[plitz  auia 

Ja  non  fara  als  autres  se- 

[gnioria 

Qe  tuit  murrem  e  qi  mais  er 

[grazitz 

Ni  plus  ama  cest1  segle  miels 

[ner  trahitz. 

III.  Con  auzam donc aqesta mort 

[atendre 
Canadobat  troban2  chascun 

[dia 

Qe  nostra  mort  podem  en 

[vida  rendre 

Car  dieus  qe  la  men  s  lai  ser- 

[uir 

5     Ont  el  fo  mortz  per  nos  sal- 

[uar  garir 

Aqi   morir    e   qui    per    lui 

[morria 

Cobran  son  dreih  ca  perdut 

[en  suria 

Ab   gran  razon  venria  gen 

[garnitz 

Al  iutzamen  lai  on  er  ihesu 

[cristz. 

IV.  Qui  per  dieu   vai  lauer  el 

[cors  despendre 
De    paradis    1er    uberta    la 

[via 

E  qi  non  vai  deu  baissar  e 

[descendre 


»  /.  :  amal  —  - 1.  :  Irobam  a  —  3  l.  :  d.  nos  ditz  qe  l'anem 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


45 


De  tôt  honor  car  tem  qe  dieu 

[lair 
5  Qi  rema  sa  ni  pot  anar  gar- 

[uitz 

Qeu  sai  daitals  cauers  ni  ma- 

[nentia 

E  diables  (p.  161)  e  pechatz 

[e  bauzia 

Za  retengutz  .c.  '  fais  auars 

[aunitz 

Guerriers  de  dieu  e  de  totz 

[Les  partitz. 

V.  Ben  se  eugen  en  las  terras 

[estendre 

E  sara  conqis  mas  autramen 

[eug  sia 

Mas  dieus  lo  reis  sap  sar- 

[halesta  tendre 

E  tra  cairel  trenchan  perben 

[ferir 
5  E  negus  om  al  colp  non  pot 

[gandir 

Cant  el  sirais  e  ue  com  nos 

[chastia 

Mas  qil  dopta  ni  vos  lui  su- 

[melia 

Aqel  aura  cbapdeu  saint  es- 

[peritz 

E   qi   non  fai  er   en   effern 

[puniz. 

VJ.  A  totz  degra  de  dolor  lo  cors 

[fendre 

Del    dezeret    al    fil   sancta 

[maria 

Mas  cornai  lair  qi  ves3  los 

[autres  pendre 

Sesforsa   plus  del  mal  ses 

[repentir 

5  0  4  mau  segle  don  dieus  nos 

[lais  issir 


A  saluamen  si  cou  opa  nos 

îeria 

E  monthesaurqelaisenlom- 

[bai'dia 

Don  dieus  salut  car  de  totz 

[nos  es  guitz 

E  dels  crozatz  los  cors  els 

[esperitz. 

166 

GAUCELMS  FAID1TZ 
(=  B.  Gr.  167,  54) 

I.   Si  tôt  nonqa  ses  grazitz 
Tan  can  sol  chanz  ni  solatz 

[gais 

Non  er   qttcu   lauzens 5   no 

[meslais 

Dun  vers  far  don  soi  enqe- 

[zilz 

5  Car  cel  qa  bon  escienza 

Deu  far  .  zoqapres  sagenza 

Non  deu  celai*,  son  saber  ni 

[cubrir 

Lai  on  coue  a  mostrar  ni  a 

[dir 

Qen  totz  luecs  val  adrecha 

[captenenza. 

IL  E  non  taing  qestei  plus  mar- 

[ritz 
Ni  vir  mon  fin  cuer  en  biais 
Pero  truep  michargeiGgrieu 

[fais 
La  bella  falsa  enjanairitz 
5  Qe  totz  fui  mortz  em  par- 

[uenza 

Mas  er  nai   trobat  garenza 

Tal  qi  ma  gen  desliurat  de 

[morir 


1  /.  :  Als  r.  com —  -  l.  :  far  —  3  /,:  M.  com  laire  qi  ve  —  4  c.  en  :  A.  — 


3  c.  en:  iauzens —  6  L:  charget 


4ô  LE  CHANSONNIER  DE 

Qel  '  la  genzer  qom  puescha 

[el  mon  chauzir 

Ez  il  reraa  fazen  sa  pene- 

[denza. 

III.  Don  fui  cortczamen  garitz 
Qenqer  nai  en  la  bochal  bais 
E  la  dolza  sabor  el  iai'- 
Con  fui  gen  baizan  acullitz 

5  Per  lei  cane  non  fei  faillenza 

E  pos  tan  gent  mo  comeresa 

Ane  la  douzors  del  bais  nos 

[poc  partir 

De  ma  bocha  ia  nô  deu  mais 

[faillir 

Ni  far  ni  dir  nulla  desaui- 

[nenza. 

IV.  Car3  anc  nestei  iorn  faiditz 
De  lei  veer  on  beutatz  nais 
Ni  qel  fols  cens  al  nô  satrais 
Ez  il  siâ  perdoz  e  guitz 

5  Er  vauc  mon  gran  tort  ses 

[tenza 
Adrechurar  en  proenza 
E  si  anc  re  qe  fezes  agrazir 
Agui  de  lei  de  lui  a  4  ses 
[faillir 
E  de  nagouL  e  de  saconois- 
[senza. 

V.  (p.  162)  De  re  non  es  om 

[tan  saziz 

Ni    on  tan    leus   iois  ni  es- 

[mais  3 

Ni    nô    porta  om  ta  greus 

[eschais 

Con  damor  qi  ame  comqz«is 

5  Camors  a  poder  qe  venza 

E  qant  be  nai  souinenza 

Adont0  consir  qe  miels  mi 

[degra  aucir 


BERNART  AMOROS 

Qeu  anc  sofris  qe  men  po- 

[gués  partir 

Can  vi  lamor.  e  la  gram  be- 

[volenza. 

VI.    Mes  vers  voirai  qe  sia  vitz. 

[auzitz  '' 

Per  mon  beu   thesaur  par 

[clauais 

Qil  es  de  pretz  clardatz  e 

[rais 

Ez  an 8  can  er.  de  lui  partitz 

5  An  rie  de  ioi  a  prezensa 

Dir  qen  sobeiras  dargenza 

E   ma  dona   ma  fag  de  lai 

[venir 

Car  si  per  eus  no  fos  a9  ses 

[faillir 

For  eu  lombartz  de  cenh  e 

[de  valenza. 

167 

GAUCELMS  FAIDITZ 
(=  B.  Gr.  167,33) 

I.  Lommtz10  iauzens  sers 

[ "] 

Venc  mot  bel  lespers  12 

Gen  complit I3  matendenza 

5  Mi  torna  en  plazers 

Ab  douza  souinenza 

Em  fai  chanzos  faire 

Don  mi  cuiaua  estraire 

Car  ben  es  razos 

10  Qieu  chant  gais  e  ioios 

Pos  cil  cui  sui  amaire 

Qi  es  la  genzer  cane  fos 

Vol  me  e  mas  chanzos. 

II.  Qel  sieus  plazers  pros 


1  /.  :  Qes —  - 1.  :  iais  —  3 1.  :  E  car  —  4  /.  :  de  lai  lai  —  5  l.  :  ni  esmais  — 
c  c.  en  :  Adonc  —  "  l.  :  sia  a.  —  8  /.  :  E  tan  —  9  /.  :  or.  —  10  c.  en  :  Lonratz 
—  H  /.  :  On  tant  bella  paruenza  —  l4  L  :  mos  bel  espers  —  13  L  :  com])lir 


LE  CHANSONNIER  DE 

Francs  cbauzitz  de  bonairc 
Francs  e  chars  e  bos 
Gentils  e  daut  afaire 
5  E  li  '  uil  amoios 

Qun  saub  toi2  coratraire 
Assa  lunvolenza 
Don  io  plei :t  ves  proenza 
Man  tan  aut  azers 
10  Qe  ries  soi  et  esders 
Sol  vostra  couinësa 
Sia  complitz  lezers 
Que  noi  failla  poders. 

III.  Car  adreh  sabers 

E  valens  conoissenza 
E  humils  parera 
E  precs  ab  graa  valf'sa 
5  Beutatz  genz  teners 
Son  en  lei  don  magensa 
En  son  gais  chantaire 
Per  sas  valors  retraire 
Fil  grazis  los  dos 
10  Fis  plazers  saboros 
El  afan  qweil  vi  traire 
Al  grieu  cotnnjat  doptos 
Ab  sospirs  engoissos. 

IV.  Per  soil  tain  ;  perdos 
Car  tarzei  pauc  ni  gaire 
De  tornar  coltos  s 

Ves  lai  dins  son  repaire 
5  Don  degenoillos 
Li  soi  leials  preiaire 
Qe  nierces  lam  venza 
Em  perdo  la  faillenza 
Courars  ni  valers 
10  Ni  baizars.  ni  iazers 
NO  te  sai  nî  bistenza 
Sol  noil  sia  temers 
Lafanz  nil  mais  poders. 


BERNART  AMOROS  4  7 

V.    Pero  sil  mouers 

Qeu  fau  per  penedenza 

Lai  on  dieua  lo  vers 

Près  veraia  naisenza 
5  Les  al  cor  dolers 

Noi  deu  auer  temenza 

Ca  totz  bos  veiaires 

Es  liens ,;  bos  prezlomaiers7 

Qi  sans  delechos 
10  Vai  al  rei  glorios 

Seruir  qi  es  vers  saluaire 

Car  el  cel  e  saios 

Len  ve  ries  gazardos. 
VI.   (p.  163)  Oimais  es  sazos 

Danar  ain  dieu  lo  paire 

Qi  près  mort  per  nos 

Sia  chapdelaire 
5  Ez  als  compaignos 

Qi  son  nostre  cofraire 

Per  obedienza 

Aider  me  lor  crezenza 

Eus  cors  eus  auers 
10  Can  es  sieu  seruir  ders 

Teinha  en  sa  prezenza 

Eil  sià  douz  vezers 

Lafanz  el  mais  paders. 

168 

GAUCFLMS  FAIDITZ 

(  =  B.  Gr.  243,  2*  ) 

I .   De  leis  8  cui  am  de  cor  e  de 

[saber 

Domne  segnior  et  amie  vol- 

[rai  dir 

E  ma  chanzo   sil   platz.  qe 

[voilla  auzir 


1  /.  :  Eil  —  2  /.  :  Qim  saub  lo  —  3  c.  en  :  soplei  —  4  /.  :  tain  —  5  c.  en  : 
coitos  —   (L:  de  —  ' /.  :  maire. 

*  Voyez  le  texte  donné  par  M.  Appel  dans  sa  Chr.  Prov.  p.  75  d'après 
la  thèse  de  M.   O.   Dammann  Breslau  1831,  p.  1  ss.  —  8  /.  :  Celeis 


4?  LE  CHANSONNIER  DE 

Del  menor  tenz  *  damor  son 

[gran  poder 

5  Perzo    car    nés  2    princeps 

[ducs  e  marqes 

Comtes   e  reis  e   lai  on  sa 

[cortz  es 

Non  sec  razon    mas    plana 

[volontatz 

Ni   ia  nul    temps    noi    sera 

[dreitz  vitjatz  3. 

II.  Tant    es   sotils   com   nô  la 

[pot  vezer 

E  cor  tan  tost.  qe  res  noil 

[pot  fugir 

E  fer  tan  fortqeres  noil  pot 

Tgandir 

Ab  dart  dacier  com  nos  pot 

[escremir  i 

don  fai  colp  de  plazer 

5  On   non    ten    pro    auzbes  5 

[fortz  ni  espes 

Si  lanza  dreg  e  pois  trai  de- 

[manes 

Sagetas    daur  ab   son    arc 

[estezat 

Pois  lanza  un  dart  de  plomp 

[gent  afilat. 

III.  Corona  daur  porta  per  son 

[deuer 

E  non    ve   ren  mas   lai  on 

vol  ferir 

No  fail   nul  temps  tan  gen 

[si  sap  aizir 

E  vola  leu  e  fai  si  molt  temer 

5  E  nais  desaur  c   qe  ses  ab 

[loi  enpres 

E    can  fai  mal   sembla  qe 

[sia  bes 


BERNA HT  AMOROS 

E  viu   de  gang  e   defen   e 

[combat 

Mas   noi   gara    paratge  ni 

[rictat. 

IV.  E  son  balais  lai  on  se  vai 

[iazer 
A  .V.  portais  e  qil  dos  pot 

[ubrir 

Grieu  passais  très  man"  non 

[pot  leu  partir 

Mas  ab  gang   uiu    cel    qei 

[pot  remaner 

5  E  pujai  hom  per  .1111.  gras 

[moût  les 

Mas  non  intra  vilas  ni  mais 

[après 

Cap  los    fais    son    el   barri 

[alberjat 

Qe  ten  del  mon  plus  de  luna 

[meitat. 

V.  For  al  peiro  on  ela  vei  8  se- 

[zer 
A  .1.  tauler  talcon  sai  deve- 
nir 
Qe  neguns  om  noi  saup  nul 
[ioc  legir 
Las  figuras   noi   trop  a  son 
[plazer 
5  Ezai  mil  poins  mas  gart  qe 
[noi  ades 
Om  malauzatz.  de  lah  iogar 
[mespres 
E   li  [loin  9  de  veire  trasgi- 

[tat 

E  quin  fraiu10  un  part  son 

[iuec  e  mudat". 

VI.  (p.  164)   Ai  tant   con   mais 

[ui  tra  I2  pot  tener 


i  l.  :  tertz  —  *  l.  :  ve??s  —  3  c.  en  :  iutjatz  -  W.  :  Ab  d.  dacier 
ausbers—  6  c.  en  :  desaut,  /.:  dasaut—  7  /.:  mas  —  8  c.  en:  vai 
point  son  — '°  c.  en:  train  —  '•/.:  onnuidat  —  ,s  l.:  terra 


s  t. 

9  l. 


49 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Ni   soleils  par  si  fai  *   tôt 

[seruir 

Los  uns  fai  viure  els  autres 

[fai  morir 

Los  uns  ten  bas  els  autres 

[fai  valet 

•"   Pois  estrai  leu  so  qe  gen  a 

[promes 
E  vai   nuda.  mas   can  dua 
[pauc  dorfres 
Qe  porta  seinh.  e  tuit  sa  pa- 
tentât - 
Naisson  de  fuec  de  qe    son 
semblât, 
VII.  Al  segon  reis  tam  3  franqeza 

[e  merces 
El  sobeiranz  es  de  tan  gran 

riotat 

Qe   sobre   cels  essaia   son 

[rognât. 

169 

GAUCELMS  FAIDITZ 

(  =  B.  Gr.  167,  2  ) 

I.   Er  consir  e  plaing 

En  chantan  mon  dampnatge 

Dun  ioi  qem  sofraing 

Per  mo  meteus  folatge 
5  Qen  pais  estrain 

Fui  '*  ne  no  vei  messatge 

De  leis  oui  soplei 

Don  eu  nom  recrei 

Cades  on  qeu  sei 
10  Laclin  ses  cor  volatge 

Se  tôt  non  la  vei. 
II.  Mi  donz  sui  acliuz 


Vas  on  qeu  vau  ni  vegna 

Eviers  lo  pais 

0  ill  estai  e  regnja 
5  Sola  ma  conqis 

La  bella  qi  nom  degna 

E  no  sai  per  qe 

Me  destreing  anc  se 

Qeu  lasegur  be 
10  Qe  ia  dautra  non  fegna 

Mas  il  la  uô  cre. 
III.  Moût  fes  bel  gazain 

Can  8  près  mon  homenatge 

Per  qeu  non  remain 

En  autrui  segnoratgc 
5  Ne  a  mi  nos  tain 

Qieu  seg  autre  viatge 

Ni  qieu  ia  desrei 

En  autrui  domnei 

Car  sos  sers  mautrei 
10  Humils  ab  franc  coratge 


:■ 


■j 


IV.  Amors  qe  farai 

Saissim  desasegura 
Qil  mauci  desmai 
E  de  me  non  a  cura 
5  Ai  gelos  sauai 
E  auolz  genz  tafura 
E  fais  lausengior 
Son  damor  guerrer 
Per  qa  ieu  qerir  " 
10  Qil  don  malauentura 

E  mal  encombrior. 
V.  Meils  foram  sufris 

De  leis  cui  iois  manteignha 
Qe  ia  non  la  vis 
Cattalz8maltraigz  men   re- 
[gnha9 
5  Soauet  mi  aucis 


1  /.  :  fai  a—  2  l.  :  parentat  — 3  l.  :  Al  s.  rei  tain.—  4  I.  :  Sui— s  c.  en  : 
Tan  —  s  /.  :  Qautra  non  enuei  —  7 ..  :  que  iesu  qier  —  *  /.  :  Caitals  — 
9  /.  :  vegnha 


50  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 

II.  Ben  man  trahit  seu  bel   oill 

[amoros 
E  sos  gentz corse  sos  azautz 


Ab  la  fais  antresegnha 
Cant  per  sa  merce 
Mi  retenc  ab  se 
Car  no  len  soue 
10  Tant  ma  obs   qem    reuei  - 

[gnha 

[•• '1 

VI.  Joios  ben  sescbai 

Caia  de  ioi  frachura 

Cel  qa  ioi  verai 

Et  a  lui  non  satura 

5  Qel  laz  mos  cors  estai 

Loing  de  bona  uentura 

En  grant  consireir 

E  mon  centongier 

Vei  damor  premier 

10  Si  ia  sa  ioia  dura 

Beil  vai  a  sobrier. 


170 

GAUCELMS  FAIDITZ 
(=B.  Gr.  167,3b) 

I.    (p.  165)  Maintas  fazos  -  es 

[nom  plus  volontos 

De  zo  don  mal  e  dan  li  deu 

[venir 

Qe  de  son  ben.  e  uoil  lo  per 

[men  dir 

Car  ieu  meteis  manei  mètre 

[cochos 

5  En   tal    poder.    don    aran 

[vauc  plagnen 

Qem  fai  languir,  e  suspirar 

[souen 

Qe  qan   ne3cug  ben  auer 

[ieu  nai  dan 

E  torn  atraz  qan  cug  anar 

[enan. 


[garnitz  4 

Sos   gentz  parlars.    e    sos 

[gens  acuillirs 

Sos  bels  solatz  sos  auinens 

[respos 

5  Mala  vi  anc  sa  gran  beutat 

[valen 

Don  ieu  cugei  auer  mon  cor 

[iauzen 

Mas  aram   vau  plagnen  e 

[sospiran 

E  nom  i  val  merces  qeu  lai 

[deman. 

III.  Anc    non  cugei    qe    nuilla 

[domna  foz 

Tan    grâ   beutatz   qen  fos 

merces  a  dir 

Qon  plus  li  clam  merce  nom 

[deg  nauzir 

Anz  ma  son  cors  ades  plus 

[orgoillos 

5  Per  qe  mos  mais  mi  vai  ades 

[creissen 

&   es  mi  piegz  ci   deus  mi 

[sal  per  vn  cen 

Per  leis  car  ten  ihas  de  mal- 

[estan 

Qe  per  lo  mal  qeu  nai  ni  per 

[lafan. 

IV.  Lo  mais   qieu  trac  mi  fora 

[bels  e  bos 

Bella  domna  sol  qel  pogues 

[suffrir 

Car  ses  afan  non  pot  hom 

[enreqir 

De  null  afar  qe  sia  chabal- 

[los 


'  /.  :  Nil  membra  de  me. —  i  :.  en:  sazos  —  3  l.  :  eu  —  4  c.  en 
—  B  l.  :  ren  ni  a. 


LE  CHANSONNIER  DE  REUNART  AMOROS 


51 


5  &   zo   qe  hom  onqier    ab 

[gran  turmen 

Ten  hom  plus  car  plus  celât 

[e  plus  gen 

Que  zo  que  ha  tôt  iorn  a  son 

[talan 

Qar  leu  despen  qi  de  leu  ha 

[gazaing. 

V.  De  zo  don  plus  cugei  esser 

[ioios 

Soi  plus  iratz  e  nai  mais  de 

[conzir 

Per  qom  nous  deu  per  gang 

[trop  esiauzir 

Ni  per  ira  esser   trop   an- 

[goissos 

5  Mas  ieunon  puesc  ges  esser 

daital  son 

Qen   malegrei  trop    al   co- 

[menzamen 

Domna  per  uos   mas  eram 

[vau  ploran 

Qon  hom    marritz  que  ren 

[non  sap  on  san. 

VI.  Sa    ma   domna  plaguesson 

[mas  chansos 

Naurella  mont  mestera  bel 

[egen 

Car  ia  enan  non  aurai  mon 

[talen 

De  nulla   ren  ni  puesc  far 

[bel  semblan 

5  Tro  que  de  leis  aia  zo  qeil 

[deman. 


171 

GAUCELMS  FAIDITZ 
(=  B.  Gr.  167,  19) 

I.  (p.  166)  Del  gran  golfe  de  mar 

E  dels  enois  los  x  portz 
E  del  perillos  far 
Soi  merce  dieu  2  estortz 
5  Don  pose  dir  e  cOdar 
Qe  main  ta  malananza 
I  liai  Buffert  e  maint  turmen 
E  pos    a  dieu   platz   queu 3 
[torn  men 
En  limozi  ab  cor  iauzen 
10  Don  parti  ab  pesanza 
Lo  tornar  e lonranza 
I,i  grasisc  pos  el  mo  cossen. 

II.  Ben  dei  dieu  merceiar 
Pos  vol  qe  sanz  e  fortz 
Puesc  el  pais  tornar 

Un  val  mais  uns  paucs  doir* 
5  Qe  dantra  terrestar 

Ries  ab  gran  benananza  5 
Qar  sol  li  bel  acuillimen 
Eil  onrat  fag  eil  °  dig  plazen 
De  nostra  domna  il  "  prezen 
10  Damorosa  coindanza 
E  la  douza  semblanza 
Val  totqan  autra  terra,  ren. 

III.  Ar  hai  dreg  de  chantar 
Pos  vei  ioi  e  deportz 
Solatz  e  domneiar 

Qar  zo  es  vostra  cortz  8 
5  E  la  font  el  ris  9  clar 
Fan  mal  cor  alegranza 


Voyez  les  éditions  de  cette  chanson  données  par  M.  Chabaneau,  dans 
la  Rev.  des  l.  r.,  IV  s.,  t.  II,  p.  550  s.  et  par  M.  Appel,  dans  s  i  P>'o- 
venzalische  Chrestomathie,  p.  112.  —  U.  :  enoios  (Ch.),  enois  dels  [A)  - 
*  Ch.:  deu  -3(7/i.:  que-*  l.:ovlz(Ch.  et  A.)  -  5  Ch.  :  benan[an  /.. 
—  8  Ch.  et  A.  :  eil— *  l.  :  eil  {Ch.  et  A.)  -  M.  :  vostr'acortz  {Ch.)  —  '■>  l.  : 
las  fontz  el  riu  {Ch.  et  A.) 


52     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 

Prat1  e  vergier  qar  tôt  mes 1 

[gen 
Qera  nô  dopti  mar  ni  ven 
Garbe  3  maistre  ni  ponen 
10  Ni  ma  naus  nom  balanza 
Ni  nom  sai  4  mais  doptansa 
Galier  8  ni  corsier  corren. 
IV.   Qi  per  dieu  gazaignar 
Pren  daitals  desconortz 
Ni  per  sarme  6  saluar 
Ben  es  dregz  7  non  ges  tortz 
5  Mas  cel  8  qi  per  rubar 
E  per  mal  acordanza 
Vai  per  mar  un   hom    tan 
[mal  pren 
Em  pauc  dora  sauen  souen 
Qe  qan  cujom  puiar  deissen 
10  Si  qab  desesperanza 
11  laissa  9  tôt  eslanza  10 
Larme  lo  cor  "  e  12  laur  e 
[largen. 


Finis  coronat  ojnis. 

(p.  166*:)  Argumenta  den  folqetz 
de  marssilia  [voy.  devant  n°  97]. 

(p.1663  :  )  Argumenta  de  gaucelms 
faiditz  [voy.  devant  n°  138]. 

(p.  166*:)  Copie  partielle  d'un 
planh  catalan  (B.Gr.  461,  2)  publié 
d'après  un  autre  ms.  complet  par 
Torres  Amat  à  la  p.  369  de  son 
Dictionnario  critico  de  los  escri- 
tores  catalanes  (Voy.  une  note  de 
M.  C.  Chabaneau,  dans  le  vol.XVHI 
de  la  Rev.  des  1.  r.,  p.  18  s.).  Le 
texte  incomplet  de  a  a  été  imprimé 
dans  la  préface  de  mon  édition  des 
deux  plus  anciennes  grammaires 
provençales,  p.  VII  et  era  scritto 
inanzi  al  principio  del  originale 
nelle  carte   che    si  soglion  lasciar 

1  Ch.  :  Prai  —  2  Ch.  :  mos  —  3  ch 
et  A.:  Galea  — «  Ch.  ecA.  :  s'arma  — 
ces  —  s  /.  :  Eslaissa  ou  El  /.  (Ch.)  — 
11  /. :  Larm'el  cors  (A.)—i*  Ch.:[e). 


biancbe  per  conservare  i  libri  cosi 
imperfetto. 

(p.  164')  1588.  Jaques  Tessier  de 
Tarascon. 
Concordato 1589. 

Riueduto  Antonio  Martelino. 

(p.  1666)  ARGUMENTO  DEN  PEIROLS 

Peirols  si  fo  us  paubres  caua- 
liers  daluergne  dun  castel  qe  a 
nom  peirob  qes  en  la  terra  del 
dalfin  a  pe  de  rochafou  e  fo  cortes 
hom  e  auinenz  de  la  persona.  el 
dalfin  daluergne  sil  ténia  ab  se  el 
vestia  el  daua  cauals  &  armas,  el 
dalfiz  si  auia  una  soror  qauia  nom 
sail  de  claustra  bella  e  bona  e 
molt  presiada  &  era  moillier  den 
beraut  de  mercoir  dun  gran  baron 
daluergne.  en  peirols  si  lamaua 
per  amor.  El  dalfis  si  la  pregaua 
per  lui  e  salegraua  molt  de  las 
châzos  qen  peirols  fazia  de  la 
seror.  e  molt  las  fazia  a  plazer  a 
la  seror  e  tant  qe  la  dona  li  uolia 
ben.  eil  fazia  plazer  damor  a  sau- 
buda  del  dalfin  e  lamors  de  la 
domna  e  don  peirols  monta  tant 
qel  dalfiz  sengelozi  delà  car  cudet 
qela  li  fezes  plus  qe  non  conuenis 
ad  ella.  e  parti  peirols  de  si  e  loi- 
gniet  e  nol  uesti  nil  armet.  don 
peirols  non  sen  pot  mantener  per 
caualier,  e  uenc  ioglars.  &  anec 
percortz  ereceup  delsbaros. draps 
e  diners  e  cauals. 

Ce  texte  se  retrouve  tel  quel  une 
seconde  fois  au  f°  32  v°  de  la  der- 
nière partie  du  ms. 

et  A.:  Garbi  — '■*  c.  en  :  fai  —  5  Ch. 

7  Ch. :  Ben  e  saregz  —  8  Ch.  et  A.: 

i°  l.  :  e  'slanza  (.1.),  en  lanza(C/t.)  — 


LE  CHANSONNIER    DE    BERNA  UT  AMOROS 


172 

EN  PEIROLS 
(=  B.  Gr.  366,  22) 

I.    (jp.    167)    Nuls    boni    non 
[sauci  tan  gen 
Ni  tan  douzamon 
Non  fai  son  dan  ni  folleia 
Con  cel  qen  amor  senten 

5  Pero  nai  eu  bon  talen 
Sitôt  amors  me  guerreia 
Nim  destrein  greumen 
Car  per  mo  '  voler  mal  pren. 

II.  Cuna  domn  am  finamen 
Don  mon  escien 

Mer  a  morirab  leuera2 
Tant   es  de  rie  pretz  valen 
5  E  si  plus  nonca  naten 
On  qieu  steia  lai  sopleia 
Vas  lei  franchamen 
Mos  cors  qi  la  uez  3  souen. 

III.  Estraigz  cossirers  men   ve 
E  si  gairem  te 

Conois  cades  mi  sordeia 
Tort  nai  eu  meteus  de  qe 
5  Car  nom  am  si  cos  coue 
Tal  dôna  camar  mi  deia 
Car  il  per  ma  fe 
Nô  deu  sol  pêsar  de  me. 

IV.  E  pero  can  sesdeue 
Qieu  li  par  len  rei l 

Ges  mas  paraulas  nom  veia  b 
Anz  uei  gescouta6  las  be 
5  Del  repropeher  mi  soue 
Qi  non  contraditz  autreia 
Auran  doncs  merce 
Tant  o  voil  qie  nô  lo  cre. 
V.   Pel  bel  semblan  qelam  fui 


Vol  qem  tenga  gai 
E  qem  bon  respeg  esteia 
Mas  de  sa  valor  mesmai 
5  Ai  bol  la  donna  si  us  plai 
La  vostra  francheza  veia 
Lo  greu  mal  (peu  trai 
Don  ia  senz  vos  non  guerrai. 

VI.  Chanzos  Baludar  lam  vai 
Ver  teil  mandarai 

Qeil  re-;  es  qe  plus  me  greia 
Car  tau  loing  de  mi  estai 
5  E  pos  enaissi  seschai 
Sobre  tôt  cant  es  lam  preia 
Qe  il  soueigna  lai 
Dezo.  dont  ieu  consir  sai. 

VII.  Bella  dona  de  vos  ai 
Tal  dezir  e  tal  euueia 
Qe  ren  del  7  mon  mai 
Al  cor  a  mi  nom  estai. 


173 

EN  PEIROLS 
(=  B.  Gr.  366,  31) 

I.   Si   ben  son  loing  et   entre 

[gen  estraigna 

Eu  mais  consir  damor   ab 

[qem  conort 

E  pens  dun  vers  consil  fasse 

[lacort 

Tal  qe  sia  bons  e  plazens  e 

[fil 

5  E  car  hom  mais  mon  chan- 

[tar  mi  grazis 

Adoncs  dei  miels  gardar  qe 

[nom  mesprenda 

Ni   diga  ren    don  sauis  me 

[reprenda. 


1  /.  :  mal  —  2  /.  :  l'e/mcia  —  *  l- 
—  6/.  :  qescouta  —  7  /.  :  de  tôt  lo. 


ue 


*  l.  :  parlen  re  —  5  c.  en:  neia 


54 


LE  CHANSONNIER   DE   BKRNART  AMOROS 


II.  Non  os  nuils  iornz  qe  mon 

[cor  non  descenda 

Una   douzors  qem    ven    de 

[som  pais 

Lai  iong  mas    mans  &  lai 

[estauc  aclis 

E  sapchas   ben  qeu  volgra 

[esser  fort 

5  Près  de  mi  donz  sitôt  sa  vas 

[mi  tort 

Cab  bel  sclatz  &  ab  douza 

[compaguia 

Mi  dauret   gen  zo  qe  ara 

mestragnja. 

111.  (p.  16'S)    Ben   ai    assatz  qe 

[suspir  e  qe  plaigna 

Ca  pauc  lo  cor  nô  part  cant 

[mi  recort 

Del  bel  solatz.  del  ioi  e  del 

[déport 

E  del  plazer  qelamfei  e  qem 

[diz 
5  Ai    con  fora  garitz.  sadonc 

[moris 

Qwe  can  la  prec  que  de  mi 

merceil  prenda 

Sol    veiaire    non    fai  qella 

[mentenda. 

IV.   Ben  es  razons  qieu  suffra  e 

[alenda 

Con    atendrai    pos  lieis  nô 

[abeillis 

Miels   mi  fora  som  cug  qe 

[men  partis 

Partir    non   ges.    trop    nai 

[près  lonc  acort 

5  Bona  domna  vostrô  sui  tôt 

[a  fort 

E    non    cudes   lamor  e  mj 

[remaigna 


Qen  vos  amar  tem  qe  temps 
[mesoffraigna. 

V.  A  lieis   non  fail   res  qa  prô 

[dôna  taigna 

Com   nô  la  ue  qe  de  lieis 

[laus  nom  port 

Coîde  gai  es  e  pros  \>er  qieu 

[lam  fort 

E  doncs  amorscui  tos  temps 

[soi  aclins 

5  Plagues  li  ia  cuna  ves  men 

[auzis 

Agestal1  qeirper  don  e  per 

[emenda 

0  si  non  mais  gnizardon  nô 

[mi  rôda. 

VI.  Dautre    trebail    prec    dieu 

[qellam  defenda 

Mas  vn  sol  iorn  volgra  qella 

[sentis 

Lo  mal  qeu  trac  per  leis  ser 

[e  matis 

Qen  grieu  perilh  ma  laissât 

[loïg  del  port 

5  E  non  voil  ges  qwautra  men 

[ai  estort 

E  sa  leis  platzqe  ia  vas  me 

[safraigna 

Ane  no  fes  om  damor  genzor 

[gazaigna. 

174 

EN  PEIROLS 

(=B.  Gr.  366,12) 

I .    Del  sien  tort  farai  emenda 
Leis  qwem  fes  partir  de  se 
Anqer  ai  telan  qeil  renda 
Sil  plai  mas  chanzos  e  me 


*  l.  :   Aqestal. 


LE  CHANSONNIER  DE 

5  Ses  respeig  dautra  nierce 
Sol  suffra   qen  lieis    men- 
[tenda 
E  qel  bel  mea  atenda. 
II.  Ges    per   negun   mal   qem 

[prenda 
De  samistat  nom  recre 
Anz  sufraicades  mentenda1 
La  pen  el  dan  qe  men  ve 
5  Fairem  degra  qalqe  ben 
Mas  non   tain  qeu   lan  re- 
[prenda 
Si    tôt    ses   ver   qill    mes- 
[prenda. 

III.  Moût  i  consir  nueg  e  dia 
E  no  men  sai  conseillai" 
Pero  si  sesdeueuia 

Gran  talent  ai  cunbaizar 
5  Li  pogues  tolr  o  emblar 
E  si  pois  sen  iraiaaia 
Volun tiers  lo  li  rendria. 

IV.  (p.   169)  Ben   conosc  qieu 

[non  poiria 
Mon  cor  de  samor  ostar 
Per  ira  ni  per  feunia 
Ni  per  autra  domn  amar 
5  No  mo  cal  plus  essaiar 
Caissi  con  li  plaira  sia 
Qieu  lamarai  tota  uia. 

V.  Qel   mon   nom  es   hom  qe 

[teigna 
Tan  apoderat  amors 

Qe  ges  non  vol  qneu  reteina 

Los  plazers  ni  las  honors 

5  Cauia  trobat  aillors 

Anz  vol  qede  sai  mestreigna 

Per  zo  qenô  vol  nim  degnia. 

VI.  Bella  dôna  en  cui  reigna 
Senz  e  beutatz  e  valors 
Pos    suffretz    caissim    des- 

"treigna 


BERNART  AMOROS  0  5 

Lo  dezirers  e  la  dolora 
5  Si  vais  dels  plazers  menors 
Mi  faitz    tan   don    iois   mi 

[veigna 
Sol  ca  uos  non  descoueigna. 
VII.    Chanzoneta  vai  de  cors 

Dir  a  mi  donz  qel  *reteigna 
Pos  mi  retener  non  deigna. 

175 

EN  PEIROLS 

(=  B.  Gr.  366, 14) 

I .   Dun  sonet  vau  peusan 
Per  solaz  e  per  rire 
Qeu  non  chantera  ogan 
Estier  per  mon  consite 
5  Dont  mi  conort  chantan 
Camors  mauci  desmai 
Car  ma  trobat  verai 
Plus  de  mil3  autr  aman. 

II.  Las  con  muer  deziran 
Sos  hom  e  sos  seruire 
Qieus  iria  celan 
Maintas  ves  men  azire 

5  E  die  per  maltalan 
Qe  totz  men  partirai 
Aqwei  mezeua  trop  lai 
Mon  cor  on  eran  tan. 

III.  Ges  per  autrui  nol  man 
La  ren  qe  plus  dezire 
Qeu  mezeus  tan  la  blan 
No  len  auzi  ren  dire 

5  Anz  can  li  soi  denan 
Maîtas  vetz  can  seschai 
Die  dona  que  farai 
Nom  respont  mas  gaban. 

IV.  Sivals4  vai  daitan 

Qe  ges  nom  pot  aucire 
A  tan  onrat  afan 


1  c.  en  :  men  renda  —  -  L:  qet.  —  '  l.  :  nul  —  4  /.  :  Sivals  bem 


5G 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNART  AMOROS 

E  progresser  que  miels  fora 
[apreza 


Ni  ab  tan  bel  martire 
5  Catal  donam  coman 
Qes  la  genzer  qeu  sai 
Bos  mes  lo  mais  qeu  trai 
Mas  il  na  pechat  gran. 
V.  Si  '  oilh  el  cors  mestan 
Vas  lois  caillors  nos  vire 
Si  cades  on  qeu  man 
La  vei  e  la  remire 
5  Tôt  per  aital  semblan 
Con  la  flors  com  retrai 
Qe  totas  vias  vai 
Contrail  soleil  viran. 
VI.    Si  marnes  ni2  tan  ni  qan 
Ja  for  eu  totz  iauzire 
Sapchatz  nô  es  dengan 
Qe  souen  en  sospire 
5  Dôna  per  cui  eu  chan 
Una  ren  vos  dirai 
Saquest  vostrom  decbai 
Antal3  auretz  e  dan. 

VII.  Chansonetta  ab  aitan 
Dreit  a  mi  donz  ten  vai 
E  digas  li  sil  plai 

Qe  temprenga  et  chan. 

VIII.  {p.  170)  Damor  ai  fin  talan 
E  fin  dezirer  nai 

E  ia  daqui  en  lai 

On  plus  no  men  deman. 

176 

EN  PEIROLS 
(=B.Gr.  366,  20) 

I.    Mentencion  ai    tôt    en    un 

[vers  messa 

Con  valgues  mais,    de  chan 

[qieu  anc  fezes 


Chanzonetta    sieu    faire  la 

[volgues 

5  Mas  chantars  torn  a  leuja- 

[ria 

E  bon  vers  qi  far  lo  sabia 

Qes  4  semblan    qe    degues 

[mais  valer 

Per  qieu    i  voil  demonstrar 

[mon  saber. 

II.  Amors  mauci  tan  ses  emen 

[apreza 

Greus  mes  lafanz  el  trebails 

[on  ma  mes 

Tôt   na  perdut   déportai-  e 

[gaieza 

E  sanc  nai  ioi  era  non  sai  qe 

[ses 
5  Per  mi  donz   suspir  noit  e 

[dia 
Mi  donz  cai  dig   con  lapel 

[mia 

Dir  lo  puesc  eu    caitan  nai 

[em  poder 

Mas  ill  nô  vol  nim  degna  re- 

[tener. 

III.  La  gran  beutat  de  lieis  e  la" 

[drecheza 

Non  es  nuls  hom  que  truep 

[lauzar  pogues 

Ieu   qe  pro  5   silles  bell  e 

[cortesa 

Anz  mueir   per  leis  e  noil 

[en  pren  merces 

5  Per  qel  faz  ieu  ia  trobaria 

Autra  domna  qe  mamaria 

Mas  er  sai  eu  qel  reprocher  ° 

[diz  ver 


1  /.  :  Li  —  2  l.  :  marnes 
*  c.  en  :  reproches 


3  L  :  Antai.  —  *  /.  :  Q.a  —  5  proiai  — 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Tostemps   vol    hom    zo  qe 

[nom  '  pot  auer. 

IV.  Ja  non  creirai  qeu  non  la- 

[gues  conqurzci 

Seu  ualgues  tan   qe   amar 

[mi  degues 

Las   qe  farai  amar   lai   sa 

[leis  peza 

E  suffrirai  mO  doua  uon  eu 

[ges 

5  Mas  per  merces  la  preiaria 

Qe  noil  pezel 2  si  noil  plai- 

:i  i 

Qe  nulla  ren  nom  pot   da] 

[cor  mouer 

Lo   désirer  qem  destrein  el 

[voler. 

V.  Emperairis     volgra    fos     o 

[marcheza 

O  reina  cela  qe  me  ten  près 

E  tôt  lauer  del  mond  e  la 

[richeza 

Volgra  eu  plus  qeu  non  sai 

[dir  agues 

5  Qe  peraitan  non  maueiria 

Mas  sa  beutatzmauciemlia 

Car  es  tan  granz  e  tan  sap 

[far  plazer 

Son  bel  semblan  car  le  laira 3 

[vezer. 

177 

EN  PEIROLS 
(=B.Gr.  366,  6) 

I.   Camjat  ai  mon  consirer 
Camger  *  ai  faig  damia 
Don  ai  fin  ioi  vertadier 
Mais  cauer  non  solia 
5  E  nô  es  de  prelz  sobrier 


Ieu  per  qe  mentiiia 
Car  so  dis  el  reprocheir 
Qui  nô  troba  non  tria 
E  qi  pren  nos  fadia. 

II.  Entendrem  fazi  amor 
Kn  folla  richaudia 
En  la  riijessa  auzor 

Don  mal  mon  grat  sufïïia 
5  Penas  e  dmns  e  dolor 
Si  qe  tôt  io"  moiia 
Gardatz  sera  ben  folor 
Qe  con  plus  i  perd'ia. 
E  miels  mi  entendia. 

III.  {p.  171)  Per  qem  sui  ame- 

[suratz 
E  tieng  ma  dreita  via 

Qor  qe  fes  ma  vohintafz 

Plus  aut  qe  non  deuria 

5  Ben  degresser  castiatz 

Per  danz  qe  men  venia 

Qe  zo  es  dobla  foudatz 

Dôme  qi  nos  chastia 

Pos  conois  sa  folia. 

IV.  Lai  on  ai  mon  bon  esper 
Matrait  amorz  em  lia 

Don  nom  pueis  ni  auz  mouer 
Mon  consirnuit  ni  dia 
5  Ben  pot  ma  dona  saber 
Quer  eu  lam  ses  bauzia 
Qe  ien  contrai  seu  voler 
M  os  cors  non  pensaria 
Nil  bocha  nol  diria. 
V.  Ara  sai  eu  et  enten 
Qes  bona  côpagnia 
Candos  samon  fînamen 
Per  leial  drudaria 
5  E  chascuns  tôt  franchamen 
Vas  son  par  sumelia 
Qe  amors  non  vai  qeren 
Null  autra  segnioria 
Mais  merce  tota  via. 


1  /.  :  non  —  *  /.  :  pezes  —  3  /.  :  se  laisa.  —  *  c.  en:  Camget 


58 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNART  AMOROS 


VI.  E  zo  sai  qestora  ben 
E  fora  cortesia 
Qe  ia  hom  non  âmes  ren 
Mas  zo  qe  lamaria 
5  Preiar  seschai  es  couê 
Qe  mesura  i  metria 
Mas  sapchatz  qi  trop   sen- 

[ten 
Pois  me  sembla  qe  sia 
Enuegz  eustania1. 

VII.  Leu  chanzoneta  plazen 
Vai  ten  ta  dreita  via 

A  lieis  oniois  eiouen 
Renouella  qec  dia 
5  Digas  lim  ca  leis  mi  ren 
Vas  la  cal  part  qe  sia 
Car  eu  non  ai  2  talen 
Del  autra  segnioria 
Nis  tain  qeu   plus  en  dia. 

VI II.  Miels  me  val  mon  bon  es- 

[per 
Ten  chanzon  dreita  via 
A  la  bella  on  qe  sia 
E  dil  qiel  faz  a  saber 
5  Cautra  no  voil  qe  sia 
De  mon  cors  garentia. 
IX.  Oils  vos  ren  e  boch  e  cors 
Ma  bella  douz  amia 
De  totz  bos  aibs  conplia. 

178 

EN  PE1ROLS 
(  =  B.  Gr.  366,  27  ) 

I .    Pos  de  mon  ioi  vertadier 
Si  fan  aitan  voluntier 
Deuinador  e  parlier 
Enoios  elauzenjer. 
5  Segon  la  fazenda 


Couen  qeu  mi  atenda 
Qe  gieinzmi  a  mestier 
Ab  qieu  mi  defenda 
Qe  neguns...3  aprenda 

10  Mon  celât  consirer. 

II.  Demi  donz  aie  de  premier 
Lon  veia  '*  el  dezirer 
&  ab  grâ  esfortz  sobrer 
Mi  ten  qe  ren  mais  noi  qier 
5  Mas  conque  menprenda 
Mos  cors  me  diz  qatenda 
E  sofra  e  sofrier 
Ver  qeu  crei  qesmenda 
Men  faz  amors  em  renda 

10  Qalqe  plazer  leuger. 

III.  [p.  172)  Tal   vetz    es    nom 

[puesc  suffrir 
Cab  mi  mezeus  nô  azir 
E  voill  men  aitan  partir 
Qen  altre  domnei  me  vir 
5  Ver  zo  si  remucîa 

Malautes.  qar  miels  cuida 
En  altra  part  guérir 
Mas  ren  no  maiuda 
Anz  fas  loita  perduda 
10  Cades  torn  sai  morir. 

IV.  Ai  can  douzamen  dezir. 
Si  pogues  esdeuenir 
Qamors  menfezes  iauzir 
Aissi  com  lam  fe  chauzir 

5  Trop  lai  atêduda 
Mas  la  flam  escôduda  5 
Es  grieus  a  esmortir 
Tôt  es  remazuda 
Lesperanz  e  vencuda 

10  Qem  soli  esbaudir. 

V.  Pero  ades  mi  soue 
Camors  deu  atrair  a  se 
Franc  corag  a  bona  fe 
Miels  cab  nulla  autra  re 


1 1.  :  e  uilania  —  2 1.  :  ai  ges.  —  *  l.  :  non  —  *  c.  en:  Lenveia 
ascenduda 


s  L  : 


LE   CHANSONNIER    DE 

5  E  cil  on  seslanssa1 
Tota  ma  desiranza 
Pos  mon  cor  sap  e  ve 
Nom  torn  e  viltanza 
Caitan  col  rei  de  franza 
10  Soi  eu  ries  damar  ben. 
VI.  E  pois  autre  pron  nom  te 
Preiarai  lanquar  de  me 
Cauzit  ai  retrair  anc  se 
Qe  las  si  ve  qis  recre 

5  E  sai  ses  doptàza 
Qe  ades  esperanza 
Qant  hom  troba  meice 
Dobla  lalegiâza 
El  ioi  el  benananza 

10  A  cel  cui  esdeue. 
Vil.   Dalfi  senz  doptanza 

Joi  e  pretz  vos  enanza 
Miels  camors  nô  fai  me. 


179 

EN  PEIROLS 
{=  B.  Gr.  70,  i5) 

I .  Tuit   cil   qem    pregon  qieu 

[chan 
Volgran  saubesson  lo  uer 
Sieu  vai2  aize  ni  lezer 
Chantes  qi  chantar  volria 
5  Qeu  nô  sai  ni  chan  ni  via 
Pos   perdei   ma  beneanza3 
Per  ma  mala  destinanza. 

II.  Ailas  con  muer  de  talan 
Qeu  nom  dorm  mati  ni  ser 
Anz  la  nueg  can  vau  iazer 
Lo  rossigniols  chante  cria 

5  Et  ieu  qi  chantar  solia 
Muer  denvei  e  de  pezanza 
Can  aug  ioi  ni  alegranza. 


BERNART    AMOROS  C9 

III     Ainors   bous  iet*  a  mon  dan 
Cautre  pro  noi  puesc  auer 
Ja  mais  baizar  ni  temer 
Nous  qier  cadoncs  vos  per- 

[dria 

5  Ren  es  fols  qin  vos  se  fia 

Cab  vostra  bella  semblanza 

Maues  tragses  desfinanza5. 

IV.  Damors   vos  puesc  ieu  6  dir 

[aitan 
Qi  ben  la  pogues  auer 
Res  non  la  pogra  valer 
Certas  moût  fon   bon  amia 
5  Mas  nom  duret  mas  un  dia 
Per   qels  fols  qi    ses  fer- 
[manza 
Met  en  amor  sesperanza. 
V.  [p.  173)  Lemozi  adeucoman 
Leis  qi  nom  vol  retener 
Oimais  pot  il  ben  saber 
Qe  vers  es  so  qeil  dizia 
5  Qen  terr  estragna  niria 
Pos  dieus  ni  fez  ni  fianza 
No  mi  val  ni  acordanza. 

180 

EN  PEIROLS 
(=z  B.  Gr.  366,  9) 

1 .   Coi  a  qem  fezes  doler 
Amors  nim  dones  esmai 
Eiram  ten  iausent  e  gai 
Per  qeu  chant  de  mon  pla- 
cer 
5  Car  ai  plus  rie  ioi  conquis 
Cami  nous  taignia 
Per  qe  mos  chanz  sumelia 
Cumelitatz  menreqis. 


1  c.  en:  seslaussa.  —  2  c.  en  :  nai  —  3  /.  :  beneanza 
desfianza  —  6  /.  rjpuesc. 


4  prec  —  5  l.  : 


60 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART    AMOROS 


II .  Mi  donz  merci  e  grazis 

Del  benananza  qeu  ai 
Ni  ia  nô  loblidarai 
Los  plazers  qem  fes  nim  dis 
5  Qen  mi  non  a  mais  poder 
Sill  qamar  solia 
Qem  plus  franca  segnioria 
Voil  ses  enian  remaner. 

III.  Darenan  mer  a  tener 
Al  reprocher  com  retrai 
Nos  moua  qi  ben  estai 
Non  farai  ia  eu  per  ver 

5  Que'd  flama  camors  noiris 

Mart  la  nueg  el  dia 

Ver  qeu  remain  tota  via 

Con  fai  laurs  el  fuec  plus 

[fis. 

IV.  Molt  magrad  e  mabeillis 
De  dos  amies  cant  seschai 
Qe  samon  dun  cor  verai 

E  luns  laltre  non  trais 
5  E  sabon  luec  e  lezer 
Gardar  tota  via 
Que  lurbona  compagnia 
Non  puesc  enoios  saber. 
V.  Souen  lanera  uezer 
La  plus  auinen  qeu  sai 
SU  deuinamen  qon  fai 
Nom  avengues  a  temer 
5  Pe?'o  mos  cors  es  aclis 
Vas  leis  on  qe  sia 
Qe  fin  amors  ioing  e  lia 
Cor  part1  loindan  pais. 
VI.  Ser  outra  la  cros  del  ris 
Don  nuls  hom  non  torna  sai 
Nô  crezatz  qem  pogues  lais 
Retener  nuls  paradis 
5  Tant  ai  mo  voler  assitz 
0  ma  douza  amia 
Que  senes  leis  nô  poiria 
Nul  autre  ioi  retener. 


Vil.   Chanzos  oimais  potz  rener2 
Vas  mi  donz  ta  uia 
Queu  sai  be  quela.  volria 
Te  auzir  e  mi  vezer. 

VIII.  Dalfi  sauzes  mon  voler 
Dir  a  ren  qe  sia 
Tant  am  vostra  compagnia 
Qe  vos  en  saupras  lo  ver. 


181 

EN  PEIROLS 

(=  B.  Gr.  366,  34) 

I.  (p.  174)   Tuit  mei  dezir  son 

[damor  e  de  chan 

En  aqwetz  dos  mestiers  gais 

[e  cortes 

Ai  mon  engien  e  mon  coratge 

[mes 

E  pois  amors   ab  douz  pla- 

[zers  menanza 

5  Bë  deu  esser  mos  chanz  fis 

[e  valenz 

Qar  tant  ma  faitz  ma  dona 

[ries  couenz 

Per  qa  totz    iornz    viu  en 

[bona  esperanza. 

II.  Maltraitz  damorno  sera3  tan 

[granz 

Qautre  dos  mais  noi  estec 

[cals  qe  bes 

Qwestiers  nô  crei  qom  suffrir 

[ la  '  pogues 

E  qan  seschai  com  na  gran 

[benananza 

5  Ja   tan  non   er    segura    ni 

[plazens 

Cades   noi   trop,  angoissos 

[pensamenz 


'  l.  :  part  de  —  *  c.  en  :  tener.  —  3  /.  :  s. 


mais 


*L:  lo 


LE  CHANSONNIER  DE  HERNAHT  AMOHOS 


61 


Q*<estreignion  lo  ioi  e  lale- 
[granza. 

III.  Qant  ieu  premier  la  vi  mi 

[plat  '  aitan 

Qe  de  mon  cor  retener  uon 

[poic  ges 

Totz    fo    a    leis.  &   enqera 

[si  68 

Mout  i  trobet  amoroza  coin- 

danza 
5  E  grâ  solatz  e  fin  enseigna- 

[menz 

Mas  si  tôt  sui  de  samistat 

[iauzenz 

Qar  mes  trop  loing  nai  dolor 

[e  pezanza. 

IV.  Pero  ben  sai  can  se  son  dui 

[aman 

Fort  adirat  e   lur   es  gran 

[mal  près 

Pois  los  plaideia.franchesa 

[e  merces 

Molt   lor  es  douza  e  bona 

[lacordanza 

5  Cadoncs     lur    nais     nouels 

[esiauzimenz 

Mas    ieu   no   veil    qec  iorn 

[adiramenz 

Mo  ioi  segur  torn  en   aital 

[balanza. 

V.  Envers  mi  donz  ai  tos  temps 

rbon  talan 

L 

E  lamarai  oui  qe  plassa  nil 

[pes 
Caissonon  pot  vedar  neguna 

[res 

Qe  can  recortsos  digtz  e  sa 

fsemblanza 

5  Con  ilh  es  belle coinde  aui- 

[nenz 


Tostemps    serai   en    samor 

[atendenz 

Car  ieu  nô  ai  en  au  tic  ioi 

|  fizanza. 

182 

EN  PEIROLS 
(=  U.  Gi\  366,  33) 

1.   Tôt    mon    engien    e    mon 

[saber 
Ai  mes  en  un  ioi  qem  soste 
Quan  mi  remembra  nimsoue 
Tam  bona  domnam  fai  chan- 

[tar 
5  Adoncs  mi  deuri  esforsar 
Con  pogues   far  mon  chant 
[valer 
Si  ben  trac  greu  martire 
Damor  cui  sui  seruire. 
II.   Amors  ma  si  en  son  poder 
Qel   ma  fait  comensar.  tal 

[ren 
Qieu  non  puesc  a  mal  ni  a 

[ben 

Trair  a    cap   plus   cal   cel 

îuûtar 

5  Per  la  genzer  com  pot  tro- 

[bar 
Gardatz  sim  deuri  eschazer 
Qieu  lam  tant  e  dezire 
Caillors  mû  cor  nô  vire. 
III.   [p,  175)  Ieu   lam  maiz  qe 
[non  faz  parer 
En  parli  mais  qe  nos  coue 
E  voil  qem  aucizatz  de  se 
Si  iamais  men  auzetz  parlar 
5  Ni  a  dreig  semblan  deuinar 
Tan  sai  cubertamen  tener 


1  /.  :  plac. 


0  2 


LE  CHANSONNIER  DE 


E  celar  mon  albire 
Ab  solatz  e  ab  rire. 
IV.  La  nueg  qaut  ieu  mi  vauc 

[iazer 

El  iorn  maintas  vez  esdeue 

Consir  com  li  clames  merce 

Qant  ieu  poiria  ab  leis  parlar 

5  Adoncs  mo  sai  ieu  ben  pen- 

[sar 
E  bos  motz  chauzir  e  vezer 
E  ma  razon  assire 
E  lai  nô  sai  qe  dire. 
V     Lo  repprocheirs  non  diz  ges 

[ver 
Qe  cors  oblida  cueils  nô  ve 
Anz  a  ben  faillit  endreit  me 
Qeu  nom  la  puesc  entrob- 
[lidar 
5  La  bella  cui  non  auz  preiar 
Tan  tem  faillir  al  sieu  voler 
Ver  qieu  plaing  e  sospire 
Ai  amors  nom  aucire. 
VI.  Ai  las  qeu  cudaua  auer 
Calqe  pron   en  ma  bona  fe 
On  plus  sui  desperatz  '  cre 
Qe  merces  mi  puesc  aiudar 
5  Era  nô  sai  aconseillar 
Mas  atendrai  lo  sieu  plazer 
Grieu  er  damor  iauzire 
Si  non  es  francs  suffrire. 
VII.   El  vers  na  ten2  a  dire 
Ses  qi  bel  sapcha  dire. 

183 

EN  PEIROLS 

{—  B.  Gr.  366,21) 

I.   Moût  mentremis  de  chantar 
[voluntiers 


BERNART  AMOROS 

E  dalegranse  de  ioi  man- 

[tener 

Domenz  qeu  fui  damor.  en 

[benesper 

Eras.  noi  vei  nom  3  pron  ni 

[noi  enten 

5  Ni   de  midons  mais  socors 

[non  aten 

Tais  desconortz  e  tais  esmais 

[me  ve 

Qe  per  un  pauc   de    tôt  ioi 

[nom  recre. 

II.  Gran  mal  mi  fes  lacoinda- 

[menz  primera 

Eil  bel  semblan  qe  ies  non 

[eran  ver 

Cane  pueis  non   puec  mon 

[coratge  mouer 

Tuit  mei  dezir   son   en   lei 

[solamen 

5  Ni  de  ren  als  granz  enueia 

[nom  pren 

E  pos  noil  platz.  qe  nai  autra 

[merce 

A  suffrir  mer.  lo  trebail  qe 

[mer.  ve. 

III.  Ja  non    partrai  de  leis  mos 

[cossirers 

Permalqem  fassa1  noil  pues 

[mal  voler 

Car  tan  la  fai  senz  e  beutatz 

[valer 

Segon  lafan  folei  sauiamen 

5  Va  fol  cai  dig  anz  folei  fola- 

[men 

Cane nerceus 5  qan  vi  lombra 

[de  se 

Si  bes  mori   no  fo  plus  fol 

[deman  6. 


i  /.  :  desesperatz  —  2  c.  en  :  ren.  —  »  /.  :  mon    -  •  l.  :  f.  eu  —  8  l.  :  nar- 
cissus  —  *  l.  :  de  me 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNANT   AMOROS 


63 


IV.   Qatressim  muer  entre  loncs 

[de/.irers 

Qem  fan  souen  sospirar  e 

[doler 

Per  leis  qe  ma  gitat  a  non 

[chaler 

Loing  desperans    e  de   re- 

[fraingnemen 

5  Qesquiuat   ma    soin    priuat 

pai'lamen 

&  eu  am    la  tant  a  la  mia 

[fe 

Cant   vei   mon    dan  ies  mi 

[mezeis  non  cre. 

V.   {p.  176)  Ben  fai  cals  ver1 

[totz  mos  cosseils  derriers 

Pos  del  partir  nô  ai  gen  ni 

[saber 

Senz  sos  pensais   farai  lo 

mieu  plazer 

Amarai  leis  midonz  per  tal 

[couen 

5  Qel  cor  aurai  lamoros  pen- 

[samen 

E  la  bocha  terai  ades  el  fre 

Qe  als  per  ren  no  lin  dirai 

[mais  re. 

VI.   E   estarai   cornai   pcneden- 

[siers 
Qe  ren  non  qierde  zo  qevol 

[auer 

Ai  com   tarza   qieu  nom  la 

[vau  vezer 

Irai   lai   doncs    morir  mon 

[escien 

5  Hoc  caital  mort  amarai  ieu 

[souen 

Qestraignamen  a  gran  plazer 

[qi  ve 

So  cama  fort  ia  non  ai  autra 

[be. 


VII.   Lo  uers  tramet  mi  donz  per 

[tal  couen 

Qa  tôt  lo  meinz  Bautreproz 

[no  men  ve 

Cant   lauzira    li   membrara 

[de  me. 

184 

EN  PEIROLS 
(=  li.  Or.  366,  16) 

I.    Eu    non    lauzarei  ia    mon 

[chan 
Mais  sius  agrada  ni  bons  es 
Lamors  qi  ma  el  seu  coman 
En  sapchas  grat  cami  non 

[ies 
5  Car  amors  me  guida  e  me- 

[nanza 

Si  bem  da  trebail  mi 2  pezanza 

Eu  viu    iauzenz.    can   mor 

[aman. 

II.  Ja  drutz   non  conosca  son 

[clan 
Sesser  vol  sauisni  cortes 
Ni  fassa  parer  ni  tWan 
[Qe  ren]  contra  son  dan.  li 

[pes 

5  Car  cel  enqiersa  malananza 

Qe    per  orguoil  cuida  ven- 

[janza 

Père  aqi  on  hom  nol  blan. 

III.  Mi  donz  per  sa  francheza 

[gran 
Plas  qel  receup  me  nome- 

[nes  J 
Em  fes   em   donet  em    dis 

[tant 

Qieu  non  cuiei  com  mi  val- 

[gues 


1  c.  en  :  sai  c.  ner.  —  2  /.  :  ni  —  3  l.  :  mon  omenes 


i.-J 


LE  CHANSONNIER  DE  DERNARÎ  AMOROS 


5  Mais  er  ai  paor  e  doptanza 

Qe  per  noncur  o   per  mu- 

[tanza 

Nom  oblit  em  torn  en  soan. 

IV.   Molt  fui  aut  vas  qe  vai  bais- 

[san 
E   puesc   dir  qenaissi  mes 

[près 

Com  celui   qi   vai  ioi  som- 

[gniat1 

E  qan  ressida  non  es  res 

5  On  trouarai  iamais  fîanza 

Ni  neguna  bella  semblanza 


Pos  qeu*  aqesta  trop  enian. 
V.  Truep  die  non  puesc  als  qe 
[mort  mau 
Atendrê  bellas  merces 
Que  farai  donc  deserenan 
Partirai  men  hoc  sieu  po- 

[gues 
5  Mas  mentre  mestaucemba- 

[lanza 
Si  men  luegna  desesperanza 
Sin  3  amors  mapropeh  atre- 

[tan. 


i  l. :  somgnia?i?  —  *  c.   en  :  qen  —  3  c.  en:  Fin. 


E.  Stengel. 


{A  suivre.) 


I  DODICI  CANTI 
épopée  romanesque  nu  x.viB  siècle 


CANTO  UNDECIMO 

{Suite) 

[F0  130v°'98.     Deh,  vedi,  Christo,  corne  la  tua  chiesa 
E  data  in  preda  delli  rei  Tithani 
Et  corao  dalla  gente  Collonesa 
Pria,  et  poi  dalli  maligni  Lutherani 
Fu  divorata,  et  malamente  offesa 
Da  traditori  Ausoni  et  da  marani 
Celtiberi  et  crudei  Thedeschi  insieme, 
Ch'  ognum  quanto  più  puô  la  stratia  et  prieme  ! 

99.     Da  quei,  che  falsamente  del  tuo  nome, 
Signor,  gioiscon,  la  Barca  di  Pietro 
Si  cerca  di  somerger  con  le  sorae 
Del  loro  vitio  et  lor  peccato  tetro, 
Et  hanno  le  sue  forze  tanto  dôme, 
Che  quasi  perso  haveva  il  degno  scetro, 
Ma  venne  Paulo  poi  ch'  in  picciol  brando 
Ne  fe  vendetta,  o  fatto  memorando  ! 

100.     Ma  corne  potrà  Paulo  quella  fede, 
Signor,  di  Pietro  conservar  illesa, 
S'alli  nemici  di  tua  santa  fede 
Chi  solea  diffender  la  tua  chiesa 
Èssi  appoggiato  ?  et,  se  si  è  fatto  herede 
Délia  setta  de  Lutero  suspesa, 
Chi  tenuto  è  di  prender  l'armi  in  mano 
Per  conservarla  da  Turco  et  pagano? 


66  I  DODICI  CANTI 

101 .  Hai  tu,  signor  del  ciel,  gli  ochi  si  chiusi 
Che  non  vogli  veder  tutti  i  progressi 

Che  fauuo  quei,  che  la  tua  chiesa  ha  esclusi 
Da  se  per  li  soi  tanti  et  gravi  escessi? 
Deh,  chi  fia  che  del  non  poter  ti  scusi, 
Signor,  purgare  questi  error  successi? 
Purgali,  signor  mio,  quai  l'or  si  suole 
Purgar,  tu,  che  sei  di  giustitia  il  sole  ! 

102.  Presta  tanto  favor  al  tuo  vicario 

Et  fal  da  morte  al  mon  tanto  invincibile 

Ch'  a  ciaschedun,  ch'  a  tuo  nome  è  contrario, 

Sia  come  Giosuè  forte  et  terribile  ; 

Ma  non,  che  '1  sol  faccia  il  suo  corso  varie, 

Chieggio,  signor,  quai  vedi,  et  sei  invisibile, 

Ogni  secreto  che  nel  cor  dilatasi, 

Perché  da  l'ochio  tuo  vivace  guatasi. 

[F0 131  r°]  103.     Di  cio  più.  Volcano  accende  il  fuoeo 
Et,  su  l'incudin  l'infocato  ferro 
Stendendo,  lustra  tutto  il  scuroluoeo. 
Un  dei  compagni,  chiamato  Zifferro, 
La  mazza  batte  et  cosi  a  poco  a  poco 
Fal'armi  tutte,  et  l'altro,  Brugiaferro 
Nomato,  scolpe  l'albero  et  il  nome 
Che  Guerino  a  chi  legge  aperto  prome. 

104.  Fatto  l'usbergo  et  tutta  la  corazza 
Con  l'albero  di  Giove  dinanzi  et  dietro, 
Fa  il  fabro  zoppo  una  ben  grave  mazza 
Da  far  ogni  lorica  un  fragil  vetro, 

Non  atta  a  ogniun  se  non  di  forte  razza, 
Degno  d'impero  o  almen  di  régal  scetro  ; 
Poi  fece  il  fabro  si  minuta  maglia 
Ch'  a'  riguardanti  lo  vedere  abaglia  ; 

105.  Li  braccial,  i  schineri,  il  gorzerino 

Coi  spalaccie  icosciai,  poi  duo'spron  d'oro, 
Uno  elmo  perfecttissimo  accialino 
Ch'intorno  havea  le  ghiande  d'oro  ; 
Per  tutto  è  scritto  il  nome  di  Guerrino. 
Et  per  cimier  vi  è  una  quercetta  d'oro; 
Di  accia'  il  scudo  a  ghiande  lavorato 
Et  d'una  bella  quercia  in  mezzo  ornato. 


CANTU  UNDECIMO  67 

106.  Un  brando  fece  «  1  ï  chi  la  lama  era 
Délie  più  belle  ch' ochiohuman  vedeasOj 
(Et  tutti'  fur  temprate  in  l'acqua  nera 
Di  Stige,  che  fortezza  tal  le  imprease 
Che  ogni  altre  arme  parean  di  pura  cera 
Apresso  a  queste,  che  la  maga  ellesse, 
Anzi  far  fece  per  il  suo  Guerrino) 

Et  riccamente  ornato  di  oro  fino. 

107.  Scritto  havea  nella  lama  il  braodo  altiero  : 
«  Pygra  son  di  Guerin  sempre  veloce.  » 

Ht  vera [mente]   fn  si  nmaro  et  féru 
Che  fu  chiamato  poi  la  Pygra  atroce. 
Pygra  amara  vuol  dir,  se  punto  il  vero 
Mostra  il  Greco  al  Latino  in  piana  voce, 
Ht  fu  si  atroce  il  brando  et  fu  si  amaro 
Ch'  a  chi  l'hebbe  contra  goslô  caro. 

rF°131  v°]  108.     Non  contenta  di  rpiesto  ancor  la  saga, 
Perché  non  sempre  un  huon  si  truova  armato, 
Essendo  délia  lia  sorte  presaga 
Che  devea  haver  Guerrin  privo  del  stato, 
Vollelo  inoffensibil  con  la  maga 
Arte  sua  far;  a  ciô  da  nullo  lato 
Habia  a  patir  da  pictra,  ferro  o  fuoco 

0  legno,  lo  ridasse  al  cavo  luoco. 

109.  Et,  denudatol,  tutto  in  l'acqua  dove 
Furno  temprate  l'armi  lo  somerge 

Fuora  che  il  piè,  ch'  in  man  tiene  ella,  et,  Giove 
Invocando,  il  fanciul  fuor  de  1'  acqua  erge, 
Dicendo  :  «  O  Dio  del  ciel,  se  pietà  muove 
La  tua  immensa  bontà,  poichè  si  asperge 
Con  l'acqua  Stigia  ai  Dei  per  sempre  sacra, 
Fa  che  a  Guerin  sia  dolce  e  agli  al  tri  acra  !  » 

110.  Poi  diceva  più  cose  in  su  la  conca 
Ove  era  l'acqua  Stigia,  scongiurando 

1  spiiti  délia  Tartarea  spelonca, 
Pregando  et  astringendo  et  comandando 
Che  non  havesse  con  lafalce  adonca 
Morte  podestà  o  per  lancia  o  per  brando, 
Nel  suo  Gerrino,  o  per  legno  o  per  pietra, 
Né  Giove  con  li  strai  di  sua  pharetra. 


68  I  EODICI   CANTI 

111.  Et  sette  volte  nel  predetto  modo 
Tuffo  il  fanciullo  nelle  incantate  acque, 
Quai  poi  divenne  cosi  duro  et  sodo 
Quai  alla  maga  divenisse  piacque; 

Ne  in  legno  mai  fu  tanto  fisso  chiodo 
Quanto  Guerino  in  lei,  ne  di  lei  nacque 
Figliuol  che  tanto  amasse  ella  giamai 
Quanto  lui,  che  di  se  l'ama  più  assai. 

112.  Pur  per  veder  se  impenetrabil  riede 
Ella  Guerin,  poichè  l'ha  bene  asciutto. 
Cou  un  coltello  lievemente  il  fiede 

In  questo  et  in  quel  luogo,  et  pruoval  tutto 
Con  pietra  et  fuoco  similmente,  et  vede 
Che  quai  statua  di  marmo  si  è  ridutto, 
Di  che  ringratia  il  padre  di  Volcano 
Che  col  figliuolo  le  sia  stato  humano. 

[F0 132  r°]  113.     Doppoi  voile  esperir  l'armi  incantate 
Et  su  la  incudin  dà  col  brando  ignudo 
Quai  regge  aile  gran  botte  dispietate; 
Et  con  la  grieve  mazza  pruova  il  scudo, 
Onde  ne  trahe  faville  si  infiammate 
Che  lustra  l'antro  oscur  col  colpo  crudo. 
Dal'elmo  et  da  l'altre  armi  ancor  trahe  fuoco 
Tal  che  fa  chiar  di  lume  il  scuro  luoco. 

114.  Quando  ha  de  l'armi  vista  la  bontade, 
La  gentil  maga  i  spiriti  licentia, 
Conpatto  pur  che  con  celleritade 
Ritornin  richiamati  a  sua  presentia, 

Et  li  ringratia  con  humanitade 
Lodando  i  fabri  di  loro  eccellentia. 
Si  parton  quei,lassando  l'opra  vaga 
Alla  pietosa,  degna  et  gentil  maga. 

115.  Dentro  a  un  forzier  le  serba  et  tan  ta  cura 
N'ha  quanto  haver  si  debbe  a  gran  thesoro, 
Et  ben  le  cela  nella  tomba  scura, 

Più  che  se  fusser  gemme,  argento  et  oro, 
E  il  fanciullin  nudiir  doppoi  procura 
Con  somma  diligentia  e  animo  soro  ; 
Ma  Naparro  et  Madar  privi  del  stato 
Pensano  ogni  hora  far  qualche  trattato. 


CANTO    UNDECIMO  09 

116.  Qualche  trittato  pcnsano  i  germani 
Per  ilis.vt'i'i.ii-  Mi  Ion  délia  duchea, 

El  l'an  certi  secreii  capitani 
Che  vadino  a  far  genti  in  la  Morea. 
Il  ivea  Milone  fatto  far  christiani 
Tutti  quellich1  baver  possuto  havea; 
Chi  per  L'ainor  di  Dio,  chi  per  paura 
Presa  havean  del  battesmo  la  figura. 

1 17.  Fra  gli  al  tri  batezzosi  un  Finnadusto 
Non  per  amor[di]  Dio,  non  per  timoré, 
Non  perche  fusse  pià  degli  altri  giusto, 
Ma  per  posser  più  usar  del  traditore 
Che  non  havea  di  nostra  fede  il  gusto 
Ne  dal  bon  spirto  confirma to  il  core. 
Costui  segretamente  Btimulava 
Naparro  et  alla  guerra  il  [eccitava]. 

[F"  132  v°;  1 18.     Fa  far  giostre  Milon  dentro  Durazzo 
Per  l'alegrezza  del  nato  fanciullo. 
Pei  balli  et  suon  va  sozopre  il  palazzo, 
Si  prende  ciaschedun  grato  trastullo, 
Fassi  in  corte  di  vino  un  amplo  sguazzo ; 
Délie  confetioni  è  il  numer  nullo, 
Anzi  infinito,  et  cosi  in  tutti  i  luoghi 
Délia  cita  si  fanno  feste  et  giuoghi. 

119.  Havea  Milon  per  un  mese  ordinato 
Tal  feste  et  giuochi,  et  ei  corte  bandita 
Teneva  a  ciaschedun  guerrier  pregiato  ; 
E  i  terrazzani  e  i  forastieri  invita 
Liberamente  di  quai  voglia  stato, 

Che  la  cita  le  par  dar  di  gioia  unit  a. 
Dimostra  Finadusto  esser  più  lieto 
D'altrui,  tenendo  il  mal  pensier  segreto. 

120.  A  costui  j>ar  ch'[h]or  sia  congruo  il  tempo 
Di  dar  priacipio  al  discacciar  Milone. 

Perô  avisar  Napar  non  perde  ei  tempo 

Et  con  lettere  manda  un  suo  gaizone, 

A  piè,  senza  armi,  a  quel  ch'aspetta  il  tempo. 

Corne  faceste  voi  con  quel  leoif'. 

Con  quel  leone  a  chi  lassaste  el  stato, 

Et  poi  a  tornarvi  il  tempo  vi  fe  lato. 


7  0  I  DO  ni  CI  CANTI 

121 .  Quando  fu  il  tempo  di  tornar,  tornaste, 
Signor,  et,  se  non  foste  a  Fabriano 
Stato  tradito  da  quei  che  menaste 
Infidi,  che  v'  usor  si  del  marano, 

Non  bisognava  che  voi  consumaste 
Più  tempo  nel  paese  Marchiano, 
Che  mai  non  fora  stata  in  la  memoria 
Humana  la  più  degna  et  gran  vettoria. 

122.  Non  si  vantô  Léon,  non  Lorenzino, 
Sir,  al  dassezzo  poi  di  loro  tempre, 
Ne  possedette  la  duchea  d'Urbino 
Come  in  l'animo  suo  posséder  sempre 
Si  crese,  che  '1  valor  vostro  divino 
Arditamente  dimostraste,  e,  mentre 
Stesti  in  campagna,  deste  da  pensar[e] 
Ai  popul  tutti  da  l'un  l'altro  mare. 

[F0  133  r°]  123.     Hor  Finadusto  avisa  in  la  cittade 
Posser  entrar  ben  venti  cavallieri, 
Di  quai  si  voglia  lontane  contrade 
0  di  propinque,  a  dimostrar  gli  altieri 
Animi  invitti  et  lor  alta  bontade 
Ne  l'armiggiar,  el  cor  gagliardi  et  feri, 
Et  che  egli  venghi  et  che  egli  meni  seco 
Qualche  guerrier  perfetto  o  Turco  o  Greco. 

124.  Naparro  il  Turco  sta  gioioso  et  lieto 
Dentro  Dolcigno  che  '1  fratel  possiede, 
Cui  dimostra  la  lettra  e  âpre  il  segreto, 
E  loda  Finadusto  di  sua  fede  ; 
Rimanda  il  messo  coi  bei  duon  quieto, 
Et  scrive  a  Finadusto  et  lo  richiede 
Che  non  li  manchi  mai,  che  verra  presto 
O  a  rihaver  la  patria  o  a  far  del  resto. 

125.  Poi  se  ne  va  a  truovar  Astiladoro 
Subito  in  poste,  e  il  tutto  aprendo  scuopre, 
Et  senza  far  colegio  o  coneistoro 

Lodalo  ad  eseguir  tutte  queste  opre, 
Offerendole  genti,  argento  et  oro, 
Per  mandar  i  christiani  indi  sozopre  ; 
Et  detteli  un  figliol  per  capitano 
Et  per  compagno  chiamato  Ottomano. 


CANTO  UNHECIMO  7  1 

126.      Era  valente  cavallier  costui 

In  arme  et  in  consiglio  et  molto  altiero. 
Acompagnato  che  si  fu  con  lui, 
Naparro  diventù  più  forte  et  fero, 
Eterano  valentianco  amendai, 
Che  disprezzano  ogni  altro  cavalliero. 
Pur  tolgono  iliciotto  in  eompagnia 
Ch'  havean  grau  nome  in  la  cavalleria. 

127.     Et  quai  dui  servi tor,  quai  tre  ne  piglia, 
Homin  perô  ne  l'armi  signalati 
Corne  se  fusser  tutti  una  famiglia. 
I  cavallier  sopra  gli  arcioni  armati 
Ne  van  verso  Durazzo  a  lenta  briglia, 
Et  son  settanta  tutti  anoverati  ; 
Ma,  signor  mio,  di  lor  tutto  il  soccesso 
Ne  l'altro  cantar  mio  vi  sarà  espresso. 

Ferdinand  Castets. 
(A  suivre.) 


IV 
DOCUMENTS  SUR  LES  RELATIONS 

DE 

L'EMPEREUR  MAX1MILIEN  ET  DE  LUDOVIC  SFORZA. 

en  l'année  1499 


(Suite) 


11 

Marchesino  Stanga  au  duc  de  Milan 

(Inspruch,  3  mai  1499) 

Illmoet  exmosignoremio  obsermo,  heiï  arrivai  in  questoloco  scontiato 
fora  de  la  terra  dal  R.  do  preposito  de  Brixina  et  M.  Gualtero  Stradion, 
quale  de  ordine  de  questi  signori  regenti  e  consilieri  me  venerono  in- 
contra et  accompagnorno  fin  allô  allogiamentomio.  Questa  mattinaho 
visitato  li  predicti  Regenti  in  nome  de  la  E.  V.  e  declaratoli  quanto 
haveva  in  commissione.  De  la  quale  visitatione  cum  parole  molto  ac- 
commodate  et  amorevole  hano  ringratiato  laE.  V.,  dimonstrando  reco- 
gnoscere  bene  non  solo  la  observantia  sua  verso  la  Maestà  Cesarea, 
ma  le  opère  et  effecti  quale  reusciscono  da  epsa  ad  beneficio  de  la 
predicta  Maestà. 

El  vescovo  de  Brixina  non  si  tiova  qua,  ma  e  ad  Brixinono  ;  per  il 
quale  loco  essendo  io  passato  nel  venire  mio  qua,  et  havendo  inteso 
chel  se  ritrovava  li  alquanto  indisposto,  andai  ad  visitarlo  in  nome  de 
la  E.  V.  ;  e  li  usai  tutte  quelle  amorevole  parole  che  judicai  ad  propo- 
sito  per  certificarlo  bene  de  la  dispositione  sincera  de  la  Ex.  Vra 
verso  la  Maestà  Cesarea  e  dell'  affectioneche  particularmente  epsa  ha 
alla  persona  de  sua  Signoiïa.  Non  poteria  explicare  cum  quanta  tene- 
reza  el  me  ricolse,  e  quanto  se  dimonstri  servitore  alla  Ex.  Vra.  Le 
parole  sue  furono  ultimamente  che  la  Cesarea  Maestà  unicamente 
amava  la  E.  Vra.,  e  sipeva  che  poche  persone  erano  amate  più  da  S. 
Maestà  de  quello  che  epsa  era. 

Ioera  per  scrivere  qualche  cosaa  la  E.  V.,  de  quello  che  in  questo 
loco  haveva  inteso  de  la  Cesarea  Maestà  e  de  le  occurentie  de  questa 


MAX1MIL1EN  ET  LUDOVIC  SFORZA  7  3 

guerra,  ma  essendo  arrivato  uno  cavallaro  expedito  da  Augustino 
quale  vene  a  laE.  V.,  et  havendo  aperto  le  Iettere  et  inteso  più  chiara- 
mente  li  avisi  di  quelle  cose,  me  ne  remette»  ad  quello  che  lui  scrive  ; 
sapendo  che  ritrovandosi  lui  in  facto,  el  scrivere  suo  è  più  fundato 
sopra  el  vero  che  non  poteriano  esser  li  avisi  miei,  quali  non  sono 
nisi  de  auditu.  Questo  non  omettero  già  che  non  è  toccato  da  Augus- 
tino, como,  etc  ' 


12 

Ludovic  Sforza  à  Giovanni  Colla 
ambassadeur  Milanais  en  Allemagne2 

(Milan,  5  mai  1491) 

Zoanne,  dal  cavallaro  quale  arrivé  hei'i  matina,  havemo  recevute 
le  tue  de'  24  e  26,  et  inteso  quanto  ne  scrivi,  restamo  molto  satisfato 

del  officio  per  te  usato Con  medesmo  studio  continuarai  per  havere 

bona  e  vera  noticia  de  quanto  occorrera  alla  giornata  et  tenercene 
avisati  particularmente.  E  perche  volendone  tu  avvisare  di  cossa 
alcuna  sécréta  mente  el  possi  fare,  te  mandamo  uno  scontro  de  zifra 
como  hai  domandato,  del  recevuto  del  quale  ne  darai  aviso;  accio  sel 
ne  occorrera  ancoranoi  volerti  scrivere  cossa  coperta.el  possiamo  fare; 
le  poste  non  ce  pare  di  mettere  perche  non  vorriamo  dare  suspec- 
tione  a  questi  Alamani  de  qua  et  mettere  a  periculo  che  le  Iettere  pas- 
sando  per  Monbraia  fossero  intercepte. 

A  quellirevdi  emagci  regenti,  perla  risposta  quale  te  hano  facto,  dirai 

che  non  se punto  de   la  observantia  et  amore  quai  se  per- 

suadeno  portamo  allô  Ser.  mo  Re  nostro,  quale  è  tanto  che  non  porria 
essere  maiore  ne  più  cordiale,  e  che  intese  le  due  peticione  ne  fano, 
alla  prima  dicemo  che  havendo  noi  mandato  nostrinuncii  a  Coyra  et  a' 
Suiceri,  con  la  commissione  che  hano  inteso,  con  significa  tione  del  desi- 
derio  nostro  che  le  cosse  se  agenisseno,  et  offerirli,  se  li  parevausare, 
Topera  nostra,  non  sapessimo  che  consilio  dare  aile  loro  Signorie  se  non 
che,  essendo  epse  prudentissimeet  havendo  avisato  dil  tutto  la  Maestà 
Cesarea  da  la  quale  rasonevolmente  deveno  hora  havere  resposta  se 

1  Milan  A.  d.S.  Potenze  Estere.  Germnnia.  Copie.  «Exemplum  littera- 
rum  D.  Marchesini  Stange  ad  illustrissimum.  D.  ducem  Mediolani. —  La 
suite  de  cette  lettre  est  imprimée  par  Motta,  Battaglia  di  Calven  e  Mais, 
doc.  IX. 

i  Milan  Ibid.  Minute  originale.  Peut-être  inachevée:  le  texte  remplit 
exactement  quatre  pages  et  finit  au  bout  de  la  quatrième. 


7  4  MAX1MILIEN  ET   LUDOVIC  SFORZA 

remettemo  a  loro,  e  se  melio  sapcssimo  che  dirli  el  fariamo  como  sel 
fosse  nostro  intéresse  pavticulare. 

Quanto  alli  20m.fiorini  de  Reno,qualine  domandano  in  prestito,  li 
dirai  che  voluntera  vorriamo  trovarce  in  ter  mi  ni  de  posserli  in  tutto 
satisfare  e  che  se  ben  siamo  in  le  guerre  e  spese  gravissime  che  sai,  co- 
mo ne  scrive  haverli  declarato  et  le  dirai  de  novo,  nondimeno  è  taie  la 
observantianostra  verso  la  Cesarea  Maestà,  (conla  fortuna  de  laquale 
è  sempre  stato  et  è  in  noi  proposito  firmissimo  de  haverli  accompa- 
gnata  lanostra),che  se  bennonpossemo  havere  tutto  quello  vorriamo 
e  se  sforzemo  fare  più  che  possiamo  e  siamo  contenti  prestarli  per 
adesso  12  m.  fiorini  de  Reno,  a  termino  fin  a  Natale,  quando  le  cosse 
non  siino  assetate  et  se  continui  la  guerra  :  ma  li  pregarai  voglino 
tenere  in  se  la  cossa  secretissima,  et  essere  contenti  per  satisfactione 
nostra  giurare  di  non  lassarla  intendere  ad  alcuno  altro  se  non  alla 
Maestà  Cesarea  sola,  per  evitare  el  periculo  e  maie  quale  se  ne  porria 
hora  seguire,  quando  Grisani  e  Suiceri  lo  intendessino;  trovandone  noi 
haverli  confinanti  al  stato  nostro  in  tanti  loci  quanti  tu  sai,  con  faci- 
lita de  voltarse  a  nostri  damni;  e  per  questo,  acio  che  in  lo  dare  questi 
dinari  non  se  scoprisse  la  cossa,  voglino  vedere  sel  fusse  quando  a 
Milano  qualche  mercadante  o  altro  per  mezo  del  quale  se  li  possino 
fare  havere  secretamente  questi  denari,quali  noili  daremo,  o  che  altro 
modo  li  pare  servare  acio  non  se  possi  intendere.  Advertendo  le 
Sigoorie  sue  che  per  la  restitutione  ne  siino  mandate  obligatione  in 
nome  de  la  Cesarea  Maestà  e  di  quello  consilio  de  Hispruc,  como  ce 
hai  scriptoesserte  da  loro  offerto,  et  ce  ne  li  ricercarai  a  fare;  dicen- 
doli  appresso  che  vorriamo  et  cossi  pregamo  le  Signorie  loro  ad 
poner  quando occorresse  che  questi  Alamani  intendessino  l'aiuto  nostro 
contra  loro  e  per  questo  ne  movesseno  guerra,  epse  sarano  in  nostro 
aiuto:  subjungendoli  tu  che  quando  N.  S.  Dio  ce  facia  gratia  che  le 
cosse  de  qua  se  acquetiuo  e  succéda  lo  accordo  de  le  cosse  de  Pisa, 
per  lo  quale  lo  ill.mo  sre  duca  de  Ferrare  va  de  présente  a  Venetia  et 
insieme  oratori  fiorentiniet  uno  nostro,  anche  noi  usaremo  ogni  studio 
acio  reusc....se  quelli  movimenti  contra  la  Maestà  Cesarea. 

13 

L'impératrice  Bianca  Maria  à  Ludovic  Sforza  ' 

(Fribourg,  4  mai  1499) 

Bianca  Maria,  etc.  Ill.me  princeps  patrue,  etc.  Per  haver  nui  usato 
moite  volte  del  opéra  del  honorevolc  prête  Zoanne  de  Tonsis,  prepo- 

'  Milan.  Ihid.  Original. 


MAXIMILIEN   ET  LUDOVIC  SFORZA 


.  .> 


sito  de  Gallerate,  in  Bollicitare  a  Roma  expéditions  nostro  spéciale  et 
anche  de  nos  tri  familiari,  e  quel  la  trovata  promptae  fidèle,  meritàmente 
loamiamo  e  siamo  inclinatead  favorirloin  ogni  suo  honesto  dcsiderio. 
Per  tanto,  intendendo  como  lui  desidera  baver  licentia  de  la  Sig.  V« 
di  posser  usar  in  Milano  de  le  expectative  per  osso  impetrate.ce  parso 
ricomandarlo  a  quella;e  cossi  la  exhortiamo  et  pregamo  che,  a  com- 
placentia  nostra,gli  ae  voglia  corapiacere;  persuadendosi  che,  per  essor 
dicto  preposito  persona  ben  mérita  de  nui,  concedendoli  la  Sa  V.  questa 
spécial  gratia,  ne  fara  cosa  molto  grata. 

Ex  Friburgo,  îv  maii  1409. 
Ge.  Gadius. 

14 

Le  duc  de  Milan  à  Maximilien  ' 

(G  mai  1499) 

Questus  est  graviter  apud  me  Eneas  de  Gerenzano,  filius  Nicholai, 
civis  et  mercator  noster  mediolanensis,  ablatam  fuisse  superioribus 
mensibus  ex  locis  Francie  per  Nicholaum  Stand,  nuncupatum  Felicem 
de  Nerimbergo,  subditum  sacri  imperii,  certam  pecuniarumquantitatem 
ipsius  mercatoris  mei,  et  ab  eo  nunquam  pecunias  ipsas  consequi  po- 
tuisse;  et  prwterea  supplicavit  mihi  ut  eum  Cesaree  M.ti  V.re  pro  oa- 
rum  assecutione  comendem  ;  itaque  cum  mihi  obscurum  non  sit  quod 
displicent  M.ti  V.re  quae  indebite  fiunt,  hune  mercatorern  meum  et 
quantum  enixius  possim  comendamus,  rogamusque  eam  ut  ei,  juslicie 
causa  et  mee  intercessionis  respectu,  imperare  dignetur  ut  comporta 
veritate  crediti  hujus  mercatoris  mei  contra  ipsum  Nicholaum  de  No- 
rimbergo,  ipse  cogatur  ad  eam  restitutionem  seu  satisfactionem  quee 
justaet  conveniens  fuerit,  una  cum  legitimis  impensis,  sicuti  Majesta. 
tem  Vestram  facturam  plane  confidamus. 

15 

Ludovic  Sforza  à  sa  nièce  Bianca  Maria* 

(Milan,  9  mai  1499) 

Sono  avisato  che  la  M.  V.  hascripto  al  R.mo  et  ill.mo  s.re  vicecan- 
cellaro  mio  fratello  et  ad  altri,  in  favore  de  uno  per  la  coadiutoria  in 

!   Milan.  Ibid.  Minute  originale  «  Sermo  régi  Romanorum  ». 
:  Milan.  Ibid.  ;  minutes  originales.  *  Régine  Romanorum.  » 


7  6  MAX1M1LIEN   ET   LUDOVIC  SFORZA 

lo  vescovato  de  Gurza,  la  quale  è  stata  promissa  al  exe.  M.  Petro  da 
Triesta,  ad  instantia  del  ser.mo  signore  Renostro,se  bendopoi  el  cardi- 
nale Gurcense,  quale  sponte  haveva  domandato  coadiutore,  se  sii  mu- 
tato  ;  delche  la  Cesarea  Maestà  non  è  mancato  de  opéra  alcunaper  fare 
fare  laexpeditione  in  M.  Petro,  e  non  volendosi  inclinare  el  cardinale, 
epso  ha  facto  tore  in  se  lifructi  deldicto  vescovato  et  lifadareaM.  Pe- 
tro. Credo  se  la  M.  V.  havessehavuto  noticia  di  questo  inche  è  firmata 
la  volunta  de  la  Cesarea  Maestà,  non  haveria  scripto  contra  M.  Petro,  si 
per  conformarse  ad  epsa,  si  per  esser  M.  Petro  bon  servitore  et  affec- 
tionato  a  V. Maestà,  et  anche  per  respecto  mio.sapendo  quanto  l'amo 
e  quanto  li  sono  debitore.  Et  pero,  ultra  quello  chel  ser.mo  signor  suo 
consorte  ha  più  volte  scripto  a  Roma  per  M.  Petro,  corne  ho  facto 
ancora  io  et  opéra  de  continuo  per  fare  reuscire  questo  effeeto, 
prego  la  Maestà  Vestra  che  vogli  scrivere  al  p.to  signor  vicecancelaro 
et  alli  altri  a  chi  havesse  scripto  per  alcuno  circa  dicta  coadjutoria,chel 
ha  facto  non  intendendo  quello  chel  ser.mo  suo  consorte  ha  scripto 
per  M.  Petro,  e  che  non  volendo  lei  se  non  quello  piace  a  sua  Cesarea 
Maestà  anzi  desiderando  con  epsa  che  M.  Petro  la  habia  per  lamor 
li  porta,  pregi  se  vogli  fare  omne  opéra  acio  non  se  differischi  più  la 
expeditione  di  epsa  coadjutoria,  et  in  questo  la  Maestà  V.  fara  etiam 
a  me  singulare  piacere. 


(Milan,  12  mai  1499) 

Non  è  stato  fora  delà  expoctatione  nostrache  la  Maestà  Vra  se  sia 
recordatade  nui,giuncta  che  lafu  al  ser.mo  signor  suo  consorte  e  mio 
signore,  e  che  lhabia  facto  quello  bono  officio  quale  me  sciive,  per- 
che l'amore  quale  sempre  li  ho  portato  me  fa  certo  de  dovere  expec- 
tare  da  lei  bona  correspondentia  e  pero  resto  consolato  de  tuto 
quello  che  la  mi  ha  scripto,  certificandomi  del  bon  animo  de  la  Cesarea 
Maestà  verso  mi,  alla  quale  io  ancora  sono  per  esser  sempre  obse- 
quentissimo.  Ringratio  la  Maestà  Vra  del  bono  officio  suo  e  pregola 
quando  li  accade  la  opportunita  ad  continuarlo,  perche  la  sene  trovera 
sempre  ben  contenta  [e  se  di  qua  li  e  cosa  che  la  desidera  non  mi 
po  fare  magiore  piacere  corne  di  rieercarme,  perche  me  sera  sempre 
grato  fare  cosa  che  li  piacia,  e  cosi  expecto  per  la  proxima  caval- 
cata  la  mi  ricerca  de  qualche  cosa]  '. 


i  La  partie  entre  [  ]  est  d'une  autre  main  que  le  reste  de  la  minute,  et 
d'une  écriture  beaucoup  moins  lisible. 


MAXIMILIEN   ET    LUDOVIC    SFORZA  77 

16 

Ludovic  Sforza  à.  Marchesino  Stanga  i 

(Milan,  14  mai  1499) 

M.  Marchesino,  havendo  noi  mandate»  el  nostro  in  Ast  per  quella 
differentia  de  Astesanicum  Genoesi,quale,  comosetiinformato,cercamo 
de  assettare  per  via  de  compositione,epso  ne  ha  mandato  H  inclusi 
exenipli  de  lettere  scripte  da  Tedeschi  a  M.  J.Jacomo,  e  ne  ha  scripte» 
uno  discorso  factoli  de  epso  cou  significatione  de  avvisi  havuti  de 
Franza,como  si  contene  in  la  copia  similmente  qua  inclusa.  Del  tutto 
fareti  participatione  alla  Cesarea  M. ta,  secundo  havemo  facto  noi  qui 
al  II.  M.  Petro,  e  li  direti  che,  quanto  al  discorso  de  M.  Jo.  Jacomo, 
non  gli  facemo  gia  significare,  perche  la  veda  li  stimuli  havemo  de 
accordarsi  col  Re,  col  quale  non  porriamo  fare  tanto  bene  che  non 
lo  chinassimo  inante,  essendo  lo  immutabile  proposito  nostro  de 
seguiresolo  la  volunta  de  sua  Cesarea  Maesta,  ma  perche  da  la  persua- 
sione  quale  voria  fare  M.  Jo.  Jacomo  ad  dictoaccordovedesil'animosuo, 
e  cheseben  cognoscemo  el  periculo  inloqualese  mettemocumFranza, 
essendo  el  Re  di  la  mala  dispositione  e  proposito  che  se  sa  di 
faine  contra,  et  havendo  dal  altro  canto  Suiceri  e  Grisani  indignati 
verso  noi,  como  da  ogni  canto  siamo  certificati  e  voi  vedereti  per  li 
avisi  vi  mandamo  per  qnesto  cavalaro  et  in  scripte»  per  li  predicti 
exempli,  in  liquali  se  cognoscera  le  minatie  quale  fin  adesso  ne  fano 
per  la  prohibitione  li  havemo  facta  de  le  victualie  e  per  le  altre  cosse 
facemo  perla  Maestà  Cesarea  corne  non  diremoessendolinoi  del'affec- 
tiuiie  e  servitù  che  siamo  et  havendo  havuto  questo  stato  da  lei,  siamo 
anche  per  exponerlo  ad  omne  periculo,  non  havendo  rispecto  alcuno 
ne  a  minacie  de  Francesi  ne  de  Todeschi  ne  de  altiï;  e  lo  facemo  e 
per  l'obligo  e  per  amore,  confidandone  che  non  manco  amorevolmente 
la  M. ta  Sua  non  habia  in  qualuncha  travaglio  ne  occorresseabbando- 
narne,  ma  conservare  galiardamente  quello  ne  ha  dato.  Ce  pareria 
ben  e  molto  a  proposito  ece  saiïa  gratissimo  che  epsa  in  questa  dicta 
se  ha  fare  a  Uberling  facesse  in  nome  de  S.  M  ta  e  de  tutti  electori 
ne  fosse  scripto,  demonstrando  che,  sapendo  quanto  siamo  affectio- 
nato  e  bono  et  obsequente  principe  del  imperio,  ne  amano,  et  che 
facendo  noi  quello  che  facemo  in  questi  movimenti  como  siamo  stati 
ricercati  li  e  gratissimo  e  ne  certificano  e  prometteno  che,  da  qua- 
luncha travaglio  ne  sequesse  per  questo,  ne   in  altro  chi  ne  volesse 


1  Milan.  Ibid.  Minute  originale  «D.  Marchesino  Stange.» 


7  8  MAXIM  ILIEN   ET    LUDOVIC    SFORZA 

offendere  adesso  o  in  altrî  tempi,  ne  haverano  aempre  in  singolare 
protectione  e  galiardamente  fara  al  ainto  e  defensione  nostra,  et  père 
ce  coufortano  stiamo  de  boni)  animo:  laquai  lettera  dirai  alla  Cesarea 
Maestà  che  a  noi  giovara  assai  e  crederno,  intendendosi  questadisposi- 
tione  e  proposito  del  imperio  verso  uoi,  chi  ce  ha  mal  animo  dovera 
andare  più  retenuto  et  anche  in  Italia  ne  dara  reputatione;  laquale 
quanto  sara  maior,  sara  tanto   più  ;i  suo  proposito1. 

La  Cesarea  Maestà  ultimamente  ha  scripto  ad  M.  Pietro  e 
factonescrivere  da  Augustino,  como  haveti  veduto;  e,  seben  estimamo 
poco  necessario  replicare  piùquesto,  non  dimeno,  la  importantia  de  la 
cossa  ne  strengapur  a  dirlo  che  di  novo  pregamo  Sua  Maestà  ad  farne 
intrare  in  la  lega  de  Suevia  et  fare  che,  in  qualun  :ha  appunctamento 
se  facesse  con  Suiceri  e  Grisani  e  cum  Francesi,  noi  siaino  inclusi  e 
restiamo  con  sicureza  de  non  havere  sentire  travaglio  e  recto  de 
intrare  in  la  liga  di  Suevia;  el  dicemo  tanto  più  che,  quando  Suiceri 
facesseno  pensiere  [difare?]  questi  movimenli  verso  di  noi  per  vin- 
dicarsi,  sapiano  che  haveriano  contra  et  Suevi  et  Imperio,  e  pero 
fossero  necessitati  abstenersene. 

E  perche  in  dicti  avisi  e  li  altri  havuti  de  Savoia.è  significato  quello 
vederetide  lo  illustrissimo  archiduca,  noi  estimamo  esserestato  pruden- 
tissima  consideratione  de  la  Cesarea  Maestà  laverli  lassato  di  la  al  fine 
che  in  dicti  avisi  de  Savoia  è  giudicato,  non  di  meno  ne  sara  grato  ne 
chiariati  bene  de  la  cossa  como  è,  e  sel  archiduca  havera  mandato  a 
far  qualche  ambassata  in  Franza  como  è  scripto,  o  pur  solamente 
parole  générale,  e  si  nondimeno  sii  et  habii  essere  col  padre  quello 
che  deve,  e  tutti  li  di  passati  è  stato  afferma to  chel  saracolui. 


17 
Marchesino  Stanga  à  Ludovic  Sforza  2 

(Lindau,  17,  21,  23,  28  mai  1499) 

111. mo  et  ex.  mo  signor  mio  obser.  mo,  la  causa  per  laquale  la  Cesa- 
rea Maestà  me  ha  ricerchato  è  stata,  secundo  che  epsa  me  ha  dicto, 
per  volere  declarare  et  aprire  alla  E.  V.  lo  intrinseco  suo  e  demonstrar- 
li  che  de  la  conservatione  sua  e  del  stato  ne  la  quella  memoria  e  cura 
che  ha  del'anima  de  Sua  Maestate  e  de  le  cose  proprie,  e  cossi  me  ha 

1  II  y  a  ici  cinq  lignes  effacées  par  l'humidité. 

*  Milan,  A.  d.  S.  Pot.  Est.  Germania.  Dépêches  originales.  La  première 
(la  plus  longue)  est  brièvement  résumée  par  Motta.  Battaglia  di  Calven 
e  Mulz,  n»  16,  p.  xvm. 


MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFURZA  79 

significato  che,  havendo  di  continuo  portato  amore  singolare  alla  E. 
V.ra  e  continuando  in  questo  più  che  raay,  sapeodo  di  certo  e  vedend  i 
chel  Redi  Franza  èdeliberato  di  oceupare  el  stato  délia  E.  Vra,ha  bene 
considerato  ed  in  se  exarninato  tutti  li  inezi  et  modi  cum  liquali  epsa 
possa  redimere  questa  vexatione,  cum  assicurarsi per  sempre ;  et  perho, 
vedcndo  la  Maestà  sua  che  ley  è  extenuata  per  le  pressure  de  le 
guerre  passate,  e  per  queste  che  de  présente  ha  cou  Suiceri,  non  po 
per  via  alcunadare  aiuto  alla  E.  V.,como  séria  el  desiderio  suo,  et  sa- 
pendo  che  ne  per  via  del  duca  di  Burgogna  suo  fiolo  po  dare  contrapeso 
alcuno  al  Re  di  Franza,  oe  dal  imperio  se  po  expectare  soccorso  alcuno, 
(perche,  se  bene  la  Maestà  sua  è  imperatore,  non  di  mancho  ha  solum 
lo  tituloet  la  dignitàet  non  la  obedientia),  dice  non  vedere  altroremcdio 
quale  sia  apto  ad  poterla  salvare,  cha  a  fare  lega  e  confederatione  cum 
la  liga  de  Svevia  :  la  quale  essendo  de  la  potencia  che  è,  et  havendo  de 
présente  con  questa  guerra  che  ha  con  Suiceri,  tutta  volta  che  la  E. 
V.  sia  colligata  seco,  oltra  che  la  ruina  de  Suiceri  se  possa  tenere  certa, 
quando  accordio  havesse  mai  ad  seguire,  sera  cum  conditione  tanto 
ferme  et  stabile  che  el  Re  di  Franza  non  potera  mai  valersi  de  Suiceri  ; 
et  quando  Suiceri  non  attendessero  le  conventione,  seratalmente  capi- 
tulato  cum  la  lega  de  Svevia  che  mettendosi  Suiceri  alla  offensione 
del  stato  de  la  E.  V.,  la  Lega  li  movera  sempre  guerra  ad  loro  ; 
extendendosi  la  Maestà  sua  supra  questo  molto  longamente,  cum  dire 
che  non  saperia  se  non  confortare  et  amorevolmente  ricordare  alla 
E.  Vra  ad  fare  questo  effecto,  senza  el  quale  si  como  epsa  posseva 
tenere  certa  la  ruina  del  stato  suo,  essendo  el  Re  di  Franza  de  la 
potencia  che  è,  cossi  facendolo  posseva  assicurarsi  de  havere  remedio 
al  caso  suo  et  estimare  de  liberarse  del  Re  di  Franza  e  de'  Suiceri  in 
uno  tracto,  perche  Francesi  senza  Suiceri  non  erano  homini  da  fare 
impresa,  et  havendo  Suiceri  contrapeso  de  la  qualita  che  è  la  lega  de 
Svevia,  havevano  de  gratia  ad  rem  an  ère  in  casa  et  cultivare  li  paesi 
loro,  senza  cerchare  stipendio  ne  movimenti  de  guerra,  e  cossi  sopra 
questo  la  Maestà  sua  volse  che  io  scrivesse  quello  li  pareva  se  havesse 
ad  fare  per  venire  a  lo  effecto  de  questa  liga.  La  quai  scriptura  io 
feci  secundo  lo  ditato  de  S.  M.  e  sera  qui  alligata  ;  e  finito  che  io  la 
ebbi,  epsa  me  disse  li  volesse  declarare  quello  me  ne  pareva  e  quello 
me  persuadeva  che  la  E.  V.  dovesse  fare.  Al  che  io  respose  :  che 
essendo  questa  una  propositione  de  la  quale  non  havendone  la  Ex. 
Vra  noticia  alchuna,  non  me  ne  posseva  etiam  havere  parlato  ;  non 
sapeva  ne  posseva  fare  judicio  de  l'animo  etintencione  sua,  per  quello 
mo  che  ad  me  occorreva  improvisamente,  diceria  che  la  E.  V.  inten- 
dendo  la  cura  e  studio  quale  metteva  la  Maestà  sua  alla  conserva- 
tione  del  stato  suo,  ijuesto  séria  collocato  appresso  al  cumulo  de  le 
altre  infinité  et  immortale  obligatione  che  la  E.  V.  si  senteva  havere 


SO  MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA 

alla  Maestà  sua,  non  dovendo  esserede  minore  consideratione  appresso 
ley  che  la  cerchasse  conservarli  el  stato  che  el  rispecto  de  havergelo 
concesso.  Subjungendoli  che,  se  bene  la  Maestà  sua  diceva  de  non 
potere  dare  aiuto  alla  E.  V.  alchuno,  nondimeno  epsa  sperava,  ed  io 
me  persuadeva  che  tutto  quello  la  potesse  fare  e  cum  la  forze  e  cum  la 
auctorità,  lo  faria;  et  descendendo  poi  al  particulare  de  le  conditione  di 
questa  lega,  io  disse  che,  se  ben  sapeva  che  la  E.  V.  vederia  volunteri 
et  consideraria  le  propositione  di  sua  Maestà,  nondimancho  quanto  ad 
me  le  giudicava  impossibile  epericulose;  impossibile  perche,  havendo 
la  E.  V.  Francesi  aile  spalle,  la  nécessita  la  stringeva  ad  prepararsi 
senza  dilatione  et  ad  dovere  provedere  aile  gentedarme  sue  ;  e  prove- 
dere  alli  denari  che  la  Maestà  sua  tocha  in  le  propositione,  sapeva 
certo  non  esserli  modo  ne  via  peiiculosa;  perche,  essendo  Suiceri  de  la 
natura  che  sono  e  tanto  vicini  alla  E.  V.,  quando  epsa  facesse  démon. 
stracione  de  arme  contra  de  loro,  poteriano  munire  li  loci  quali  sono 
verso  Sua  Maestà  per  starne  sicuri,  e  de  l'altio  canto  mettersi  alla 
offensione  de  la  Ex.  V.  ;  laquale  séria  de  tanto  magiore  momento 
quanto  che  da  una  banda  se  trovasse  havere  Francesi  in  casa  e  de 
l'altra  Suiceri;  concludendoli  che,  per  intiare  in  la  lega  de  Svevia, 
sapeva  che  la  E.  V.  ne  séria  contentissima  quando  la  potesse  intrarli 
cum  le  condicione  e  qualità  che  li  sono  inclusi  li  altri  principi  ;  e  più 
oltra  li  affirmava  che,  quando  la  S.  M.  parti cularmente  volesse  cosa 
alchuna  de  la  E.  V.,  se  senza  essere  ricerchata  epsa  havevasubvenuto 
li  soi  in  questi  bisogni,  molto  mazoremente  et  più  voluntera  lo  faria, 
intendendo  la  volunta  de  Sua  Maestà.  Ad  questa  mia  resposta,  epsa 
replicô  che  ley  per  lo  peso  de  questa  guerra  de  Suiceri,  non  poria  aiutare 
la  E.  V.,  ne  de  Burgogna  ne  dal  Imperio  bisognava  che  epsa  expec- 
tasse  succurso  alchuno;  che,  quello  la  poteria  fare  cum  la  auctorità 
lo  faria,  si  corne  faria  cum  le  forze  quando  potesse,  ne  per  el  particulare 
suo  voleva  cosa  alchuno  ;  perche  se  la  E.  V.  li  desse  denari  a  ley  tutta- 
volta  che  li  occorresse  bisogno  di  essere  aiutata,  non  possendolo  fare 
la  Maestà  sua  se  reputaria  a  grandissiino  caricho  havere  tolto  li  soi 
dinari  e  non  aiutarla,  e  perho  che  ad  questa  lega  confortava  la  E.  V. 
per  bene  suo  e  non  per  altro  rispetto,  dicendo  che  se  Francesi  li 
movevano  guerra,  bisognava  che  la  spendesse  e  stesse  in  periculo  de 
ruinare  ;  e  se  adesso  spenderia  bene  unopocho  foradel  bisogno  suo,  ne 
posseva  expectare  securita,  et  farelo  quale  sentiria  omne  dicrescere 
ad  magiore  beneficio  suo.  Et  havendomi  la  Maestate  suarichiesto  chel 
parère  mio  quale  lihavevadicto  ad  bocha  lo  volesse  mettere  in  scripto, 
perche  lo  potesse  examinare,  io  lo  fece  et  seraqui  incluso.  Et  havendolo 
la  M.  S.  tenuto  uno  di,me  mando  poi  a  dire  per  el  Langh  che  per 
omne  modo  persiste  va  nel  proposito  suo,  che  la  E.  V.  facesse  quello 
che  epsa  li  ricordava  e  proponeva. 


MAXIMILIEX  ET  LUDOVIC  SFORZA  g] 

In  questo  rasonamento  havendomi  la  Maestà  sua  resposto  che  quelle 
poteria  fare  ad  benrfitio  de  la  Ex.  V.ra.  cum  la  auctorita  lo  faria, 
mi  parse  ad  proposito  tocharli  due  cose;  l'uua  sopra  el  particulare 
de  lo  Papa,  e  l'altra  sopra  la  venuta  de  quattro  ambasatori  francesi 
quali  aspettaS.  M.  E  quanto  a  le  cose  del  Papa,  li  disse  che  epsa  do 
veva  havere  inteso  le  pratiche  quale  erano  state  fin  qui  cum  Sua  Sau- 
tità  per  tirarlo  al  benefitio  de  le  cose  de  Italia  e  fare  lega  cum  Sua  San- 
tità,  Re  Federico,  la  E.  V.et  Fiorentini,  e  che  havendo  dicontinuo  dal 
bone  parole  e  da  l'altrocanto  sollicitato  el  Re  di  Franza  alla  Lmpresa 
de  Italia,  e  continuando  in  questo  più  clie  mai,  se  bene  Béera  fin  qui 
expectato   de  intendere  la  finale  dispositione  sua,  non  di  mancho  a'  ■ 
era  anche  peusato  como  poterli  levare  el  modo  e  la  via  de  fare  uiale, 
quando  se  vedesse  che  oltra  chel  sia  iusti-uinento  de  la  ruina  de  Italia, 
volessc  mettersi  alla  executione  del  suo  malo  animo  e  perho  che  ha- 
vendo la  E.  V.  consultato  insieme  col  Re  Federico  la  provisione  neces- 
saria  per  assicurarsi  de  Sua  Santità  in  caso  che  Francesi  passasseno 
in  Italia,  giudicavano  et  havevano  rasonatosehavessino  ad  temptaro  le 
arme  spirituale  e  temporale  per  levarli  l'adito  di  far  maie  ;  e  quando 
al  spirituale,  havendo  lo  Re  di  Spagna  facto  ijuello  che  la  Maestà  sua 
doveva  havere  inteso,  se  la  Maestà  sua  cum  lo  imperio  facesse  lo  mede- 
simo,  pareva  potesse  cedere  ad  graudissimo  proposito  per  moderare  li 
desordinati  appetiti  del  Papa.  Quanto  al  temporale,  eravano  in  pen- 
siero,  como  se  mettesseno  Francesi  adpassare,  de  assecurarse  de  sua 
Santitàcum  la  forza,  e  deliberando  la  Maestà  sua  mandare  homo  ad 
Roma,  se  epsa  mandasse  homo   de  auctorita   et  armigero,    quando 
havesse  facto  la  opéra  spirituale  e  non  giovasse,  poteria  ad  nome  de  S. 
M.e  de  lo  imperio  mettersi  alla  executione  del  temporale  cum  le  gente 
del  Re  Federico  e  de  la  E.  V.,  che  séria  senza  spesa  de  Sua  Maestà, 
e  tutta  la  reputatione  séria  la  sua  e  del  imperio;  cercha  la  venuta  de 
li  ambasatori  francesi,  li  disse  che,  essendo  per  li  avvisi  venuti  ben 
chiara  la  mala  dispositione  loro  contra  la   E.   V.  et  quasi  in  facto  le 
preparatione  sue,  la  Maestà  sua  posseva  declararli  che  intendendo  e 
vedendo  quello  se  voleva  temptare  contra  Milano,  li  certificava  che 
cum  la  persona  propria  e  cum  la  forze  sue  e  del  sacro  imperio,  era  per 
pigliare  la  protectione  de  la  E.  V.,  lassando  tutte  le  altre  imprese  da 
canto,  e  che  non  seriano  tanto  presto  alla  offensione  sua,  che  cossi  pres- 
to la  Maestà  Sua  non  fusse  e  cum  le  forze  e  cum  la  persona  in  aiuto 
del  stato  de  la  E.   V.  Et  in  questo  li  rechay  el  rasonamento  facto  in 
Brera  col  Rdo  M.  Petro  da  Trieste,  ricordandoli  che  adesso  séria  lo 
tempo  e  la  occasione,  magiore  che  may  in  alcuno  tempo  se  pot 
expectare,  de  moderare  la  ambitione  de   Venetiani  et   ampliare    la 
dignità  e  stato  de  Sua  Maestà  cum  farli  intendere  che  la  E.  V.  non 
havendo  ad  guardarsi  indreto  faria  cognoscere  alla  Maestà  sua  quanto 

6 


82  MAX1MILIEN   ET  LUDOVIC  SFOKZA 

la  desideri  la  exaltacione  sua,  e  cum  quale  forze  et  vigore  aiutaria 
questa  impresa,  distinguendoli  la  facilita  d'epsa  impresa  cosi  per  la 
nécessita  ne  laquale  se  trova  la  Signoria  de  Venecia,  anichilata  de 
denari,  de  gente  darme  e  cum  lo  timoré  del  Turco,  como  per  la  via 
quale  haveria  la  E.  V.  de  mandare  le  gente  d'arme  sue  fin  sopra  le 
porte  di  Verona,  e  perho  che  in  questa  venuta  depsi  ambasatori  fran- 
cesi  doveva  vedere  se  la  posseva  introdure  qualche  tregua  per  doi  o 
tre  anni  col  Re  de  Franza  la  quai  fusse  de  qualita  che  la  Ex.  V. 
potesse  starne  secura  ;  e  poi  la  M.  S.  se  mettesse  in  questa  impresa 
perche  gli  ne  reusciria  tal  fructo  che  quando  poy  la  volesse  lare 
contra  el  Re  de  Franza,  haveria  tanti  aiuti  e  modo  da  per  se 
che  quello  poteria  essere  difficile  adesso  séria  facile  ad  allro 
tempo. 

LaMaestà  sua,  sopra  le  cose  del  Papa  me  respose  che  le  opère  diSua 
Santità  erano  veramente  aliène  da  quello  chel  debito  del  officio  suo 
recerchava,  ma  che,  trovandosi  adesso  epsa  in  questi  frangenti  de 
guerra,  non  li  pareva  de  irritarsi  el  Papa,  ma  expectare  de  temptare  lo 
spirituale  in  altro  tempo  ;  la  quale  cosa  confessava  spectare  al  officio 
suo  e  volevafarlo;  equanto  a  temptare  el  temporale,  disse  che,  facen- 
dosi  movimento  de  arme  contra  el  Papa,  judicava  fusse  bene  consi- 
dérais che  questo  non  movesse  più  el  Re  di  Franza  alla  pertuibatione 
de  Italia,  quali  potevano  pigliare  colore  de  fare  contra  la  Ex.  V.  per 
aiutare  el  Papa;  cercha  la  venuta  de  li  ambasatori  francesi,la  Maestà 
sua  molto  largamente  rispose  che  la  faria  lo  effecto  per  me  ricordato, 
in  farli  intendere  che  la  era  per  mettere  la  persona  e  le  forze  per 
aiutare  e  defendere  la  E.  V.  E  quanto  al  procurare  de  fare  tregua  per 
fare  quello  altro  effecto,  me  rispose  che  Francesi  cento  volte  le  have- 
vano  offerti  partiti  grandissimi  e  volevano  lassarli  Venetiani  in  preda, 
lassando  la  Maestà  sua  la  E.  V.  e  che  may  li  havevavolutoconsentire; 
cum  dire  che,  quando  de  novo  volesse  attendere  aile  propositione  sue, 
lo  fariano  più  che  mai,  ma  che  la  intencione  sua  è  sempre  stata  et  è 
de  non  lassare  V.  E.  ad  discretione  ;  et  se  bene  sapeva  che  parlando 
de  questa  tregua  non  ne  cavaria  el  fructo  che  la  E.  V.  desidera  et  ley 
voria,  non  dimeno  lo  voleva  temptare  de  novo,  dicendo  che  e  questo  e 
tutte  le  altre  cose  quale  potesse  fare  per  dimonstrare  la  grandeza  del 
amore  suo  alla  Ex.  V.,  lo  faria  promptamente  et  de  bon  core,  tochando 
in  fine  che  questo  che  haveva  proposto  delà  liga  era  la  salute  sua.  e 
ch'io  dovesse  da  parte  de  S.  M.  significarlo  alla  E.  V.  ;  in  bona  gratia 
de  laquale  continue  me  ricomando. 

Ex  Lindo,  17  mai  1499. 
Exe. me  111. me  Dominationis  vestre  minimus   servitor 
Marchesinus  Stanga. 


MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC.  SFORZA.  83 

Post  ecripta:  Sopraqueste  propositione  de  la  Cesarea  Maesta, io  ho 
resposto  quello  che  la  E.  V.  vedera,  e  me  è  parso  depingerle  impos- 
sibile  e  periculose;  perche,  oltra  che  cossi  sia  el  débile  judicio  evedere 
mio,  lo  havere  da  me  improvvisament<-  riaposta  in  questa  forma,  dara 
mancho  carico  alla  E.  V.  in  non  acceptarle  quando  non  li  piaciano, 
como  credo  non  farano  e  perche  nel  scrivere  non  si  po  cossi  extesa- 
mente  distinguere  tutti  li  rasonamenti,  ho  anche  parlato  in  modo 
che  la  Maesta  sua  non  resta  se  non  bene  edificata  de  la  Ex.tia  V.ra; 
e  quando  epsa  non  acceptasse  gia  quello  che  ha  proposto,  credo  non 
habia  ad  restarne  con  mala  opinionc,  excusando  la  cosa  cum  quelli 
modi  e  termini  che  la  E.  V.  per  la  prudentia  sua  sapera  fare.  lo  non 
sono  voluto  intrare  in  rneriti  de  pratichare  questa  cosa  per  abazarla, 
azio  la  Maestà  sua  non  si  fusse  persuasa  chio  havesse  el  parère  de 
la  E.  V.  in  pecto  et  havesse  voluto  merchantarla,  benche  più  prin- 
cipalmente  lo  habia  facto  per  non  parlare  ne  pratichare  quello  de 
che  non  ho  commissione,  e  perche  nel  parlare  mio  propose  alla 
Maestà  sua,  se  particularmente  voleva  cosa  alchuna,lo  déclarasse  che 
la  Ex.  V.ra  lo  faria.  Io  mi  mossi  ad  questo  per  levarla  fora  di 
questa  propositione,e  tractare  cum  lei  quella  offerta  che  me  haveva 
commisso  la  Ex.tia  V.ra  li  dovesse  fare,  ma  havendo  la  Maestà  Sua 
dimonstrato  essere  in  tutto  aliéna  da  questo,  se  ley  vora  mo  con- 
vertire  quello  ch'  io  doveva  offerire  in  questa  propositione  e  fare  o 
piu  o  meno  questo  stare  allô  arbitrio  e  deliberatione  sua,  havendo  ad 
essere  le  parte  mie,  sforzaromi  cum  quello  pocho  ingenio  che  Dio  et  la 
natura  me  hanno  dato  de  satisfare  allaE.  V.,  laquale,  sein  quello  che 
fin  qui  è  stato  tractato,  restasse  pocho  satisfacta.  ascrivera  el  tutto 
ad  ignorantia  et  non  alla  dispositione  mia;  laquale  in  le  cose  delà 
E.  V.  è  quella  che  deve  havere  uno  chi  lo  essere  suo  ricognosca  da 
chi  lo  ha  havuto  dopo  Dio. 

Questo  posso  certificare  alla  Ex.  V.  che  sel  acordio  se  fara  mai 
cum  Suyceri,  epsa  li  sera  inclusa  per  havere  serra  te  le  victualie 
secundo  l'ordinatione  e  volunta  del  imperio  ;  et  appresso,  sel  se  havera 
per  alcuno  ad  fare  praticha  di  questo  accordio,  la  Ex.  V.  lo  fara  o  in- 
tervenerano  segni  soi  al  tutto,  perche  cossi  me  ha  certificato  la  Cesa- 
rea Maestà  ;  laquale,  per  quanto  posso  comprendere  e  conjecturare  de 
l'animo  e  dispositione  sua,  non  è  per  fare  ne  cerchare  accordio 
alchuno  se  prima  non  prova  in  qualche  bona  bataglia  quello  possa 
sperare  di  questa  impresa,  et  benche  el  Langh  dicesse  ad  Augustino 
Somenzio  che  la  Maesta  sua  era  contenta  che  la  Ex.  V.  ra  ne  disse 
quello  la  posseva  fare  in  la  praticha  de  questo  accordio;  nondimcno 
io  trovo  la  Maestà  sua  alienissima  da  questo,  salvo  se  extrinseca- 
mente  non  dimonstrasse  una  cosa,  nel  pecto  ne  havesse  un  altra  ;  che 
non  credo. 


84  MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA 

El  discorso  de  la  lettera  longa  la  E.  V.  lo  potera  liberamente 
communicare  ad  M.  Petro  da  Trieste,  perche  cossi  mi  ha  dicto  el 
Langh  da  parte  de  la  Cesarea  Maestà  ;  et  alla  111.  S.  V.  me  ricpmando 

Data  ut  in  litteris. 
Idem  servulus. 

(Lindau,  17  mai  1499) 

In  Lindo  die  17  maii  1499. 

Serenissime  et  invictissime  Cœsar, 

Visis  et  bene  consideratis  articulis  propositis  per  sacratissimam 
Majestatem  Vestram  in  negocio  Lige  Suevie,  quoniam  de  his  quœ  tan- 
gunt  ill.  mum  D.  Ducam  menm  sententiam  meam  in  médium  afferre 
Majestas  Vestra  jussit,  et  si  illustrissimi  Ducis  iste  partes  sint  nec 
ego  deliberationem  Excellente  Suae  in  rébus  novis  neque  intellectis 
nec  sciam  nec  recte  judicare  possim  ;  ac  tamen  Cesarese  Majestatis 
V.  mandatis  parère  volens,  qua3  mihi  occurrunt  explicabo:  hoc  unum 
pro  certo  habens  illmum  Dominum  ducem  proposita  per  serenissimam 
Majestatem  Vestram  reverenter  auditurum  et  intellecturum.  Duo  sunt 
in  Liga  Suevie  per  Ser.  main  M.  tem  V.ram  proposita  :  obligationem 
ill.  D.  ducis  coucernentia,  scilicet  quod  Elvetiis  claudat  victualia  et 
contra  Elvetios  ponat  sex  milia  bellatores,  quattuor  Italicos  et  reliquos 
Alemanos,  et  quod  donec  isti  sex  milia  bellatores  sint  in  ordine,  det 
quinquaginta  milia  ducatos  modo  Lige  Sua\ie. 

Super  commeatibus  Helvetiis  impediendis,  Ser.  ma  M.  tas  Vestra 
proxime  intellexit  ill.  d.  ducem,  audita  Majestatis  Vestra?  etSacri  im- 
perii  deliberatione  et  voluntate,  se  ejusdem  sacri  imperii  principem 
obedieutissimum  ostendisse  ;  sperans  quod,  cum  ejus  sacri  imperq 
membrum  sit,  si  cum  Helvetiis  aliquo  tempore  res  componerentur  et 
concordia  fieret,  Ser.  mam  Majestatem  V.ram  ac  sacrum  imperium  in 
omni  compositione  sui  rationem  habituram,  et  in  conditionibus  et  ca- 
pitulis  firmandis  securitatem  Ex.  tie  sue  inclusuram. 

Super  capitulo  sex  milium  bellatorum  et  quinquaginta  milium  duca- 
torum,  cum  ill.  mus  dominus  dux  meus  bellum  régis  Francie  ante  oculos 
habeat,  judicio  meo  impossibilia  sunt  quse  proponuntur  et  in  novo  pe- 
riculo  res  sua?  constituerentur  ;  posset  enim  eodem  tempore  et  régis 
Francie  et  Helvetiorum  bellum  expectare,qui,  cum  in  limitibus  Domini 
ducis  sint,  cum  parva  manu  dominium  suum  invadere  possent,  et  in 
uno  die  incendere. 

Et  quoad  L.  milia  ducatos,  cum  Dominus  Dux  ad  bellum  contra 
Gallos  sustinendum  se  preparet,  non  bene  video  quomodo  ista  simul 


MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA  85 

s  tare  et  coavenire  possint.  Hoc  tamen  bcîo  quod  Dominus  dux  si  in 
Liga  Suevie  poterit  indu  li  eo  modo  quo  alii  imperii  principes  inclusi 
sunt,  cxcellentiam  suam  [iortionem  sibi  Bpectantem  quam  honeatam 
esse  putaverit  libenter  satisfacturam. 

(Lindau,  21  mai  1 190) 

Illra0  et  exm0  sig.  mio  obsermo, 

lo  credo  che  la  Cesarea  Maestà  have?se  desiderio  de  parlarmi  de 
la  fiola;  laqnale  cosa  non  ha  facto,  perche  M.  Matheo  Langh  in  dicorso 
<li  parlare,  questa  ultima  volta  che  è  stato  a  lo  alogiamentomio,  me  ha 
dicto  chel  bisognava  che  uno  di  lui  et  io  dessimo  moliere  a  V.  Extia: 
laquale  parole  indubitatamente  me  ha  usate  per  attaccarmi,  e  per 
vedere  como  mi  moveva  ad  questa  propositione  :  quello  ch'io  li  ho 
resposto  è  stato  che  son  certo  la  E.  V.trovarsi  in  dispositione  de  non 
accompagnarsi  mai  più,  e  persuadermi  che  lo  habia  facto  per  voto  ;  et 
li  ho  subjuncto  como  non  pensando  altro  la  E.  V.  che  fare  cognoscere 
alla  Cesarea  Maestà  quale  sta  la  observantia  sua  verso  epsa  e  quanto 
la  desideri,  clic  è  per  li  tempi  presentie  per  li  futuri,  si  cognoscaessere 
una  cosa  medesima  el  stato  de  la  Ex.  V.ra  cum  quelle  che  hano  ad 
veniie  dreto  ad  Sua  Maestà,  me  ha  commisso  li  debia  parlare  per  fare 
parentato  cum  lo  archiduca  di  Burgogna  per  mezo  de  la  fiola  nel  ill 
sig.  conte  de  Pavia  ;  quando  alla  Maestà  sua  paresse  questo  havers 
ad  fare  ad  satisfactione  sua.  Al  che  me  lia  risposto  che  ne  debia 
per  omne  modo  parlare  alla  Cesarea  Maestà.  Laquai  cosa  io  faro  como 
mi  accada  la  opportuuita,  e  me  è  parso  dire  questo  al  predicto  M.  Ma- 
theo, perche,  cognosceudo  me  haveva  usare  quelle  parole  per  vedere 
como  mi  moveva,  possa  referire  quello  li  ho  dicto  et  exeusare  la  prima 
propositione. 

Alla  111.  S.  V.  continue  me  raccomando. 

Ex  Lindo,  21  mai,  1499. 
E.  IUme  D.  V.  minimus  servitor  Marchisinus  Stangha.  * 

1  Suscription  :  Illmo  principi  et  exm#  dno  Dn°  meo  unico  Dno  Duci  Me 
diolani.   In  manibus  propriis. 

(A  suivre.) 

L.-G.    PÉUSSIER. 


VARIETES 


La  Société  des  «  Langues  Romanes  »  à  Bonn 

Mon  cher  Directeur, 

La.  Société  des  Langues  Romanes  m'avait  chargé  de  la  repré- 
senter au  jubilé  universitaire  de  notre  confrère,  M.  W.  Fœrs- 
ter.  Ce  n'est  pas  le  lieu  de  dire  ici  pour  les  austères  lecteurs 
de  la  Revue  les  menus  incidents  du  long  voyage  de  Montpellier 
à  Bonn.  Tout  au  plus  me  permettrai-je  de  dire  que  le  soleil  du 
Midi  m'a  accompagné  jusqu'au  bout  et  que  les  vallées  de  la 
Sambre  et  de  la  Meuse  étaient  bien  belles,  par  une  après-midi 
d'octobre,  avec  leurs  frondaisons  multicolores.  Un  mot  encore 
au  sujet  de  la  diffusion  du  français  :  à  Herbesthal,  au  moment 
du  départ,  le  conducteur  allemand  nous  invita  à  monter  dans 
e  train  par  cette  formule  :  Und  jetzt,  Meine  Herren,  en  avant 
deux!  Cette  expression  de  troupier  et  de  maître  de  danse, 
transportée  au-delà  de  la  frontière,  m'amusa  beaucoup,  et 
comme  je  le  félicitais  sur  sa  connaissance  du  français,  il  ajouta 
après  le  hertig  sacramentel  :  on  parti  Nouvelle  surprise;  mais 
je  n'en  eus  pas  d'autre  de  c;  genre  jusqu'à  Cologne:  c'était 
tout  son  bagage  de  fnnçiis  et  nous  ne  conversâmes  plus  que 
par  gestes  ou  en  allemand. 

La  fête  universitaire,  qui  eut  lieu  le  26  octobre,  fut  des  plus 
simples;  c'est  à  l'insu  du  jubilaire  qu'on  l'avait  préparée. 
M.  Fœrster  fut  très  sensible  à  l'attention  qu'avait  eue  la 
Sociétédes  Langues  Romanes.  Il  avait  reçu  à  l'occasion  de  son 
jubilé  de  nombreux  télégrammes  et  de  nombreuses  adresses: 
parmi  ceux  de  ses  collègues  étrangers  il  fut  tout  heureux  de 
me  montrer  ceux  de  M.  Gaston  Paris  et  de  M.  A.  Thomas.  Le 
Félibrige  Latin  avait  envoyé  une  longue  poésie  —  du  poète 
Charles  Gros,  si  je  ne  me  trompe  ;  notre  confrère  y  était  anobli 
et  s'y  appelait  Wendelin  de  Fœrster  et  des  strophes  harmo- 
nieuses, en  pure  langue  du  Clapas,  lui  rappelaient  son  séjour  à 


VARIETES  87 

Montpellier  et  ses  excursions  à  Saint- Gudhem  et  dans  les 
enviions. 

Les  anciens  élèves  de  M.  Fof.rster  lui  offrirent  une  très 
belle  adresse  sur  parchemin  :  la  première  feuille  contenait 
d'admirables  reproductions  des  miniatures  des  manuscrits  de 
Chrestien  de  Troyes  :  parmi  les  signataires  on  remarquait  les 
professeurs  Mohrsbach  (Gottingue),  Biilibring  (Bonn),  docteur 
Steffens  (Bonn),  Lenz  (Santiago  du  Chili),  docteur  Zacher,  cor- 
respondant de  la  Gazette  de  Francfort  à  Rome,  présenta  la  fête  ; 
parmi  les  signataires  français  le  docteur  Gaufinez,  professeur 
de  littérature  française  à  Bonn,  le  docteur  Frierlel  (Paris)  et 
moi-même.  Le  Sénat  Académique  vint  en  corps  présenter  au 
professeur  Fœ'ster  les  félicitations  de  ses  collègues  de  l'Uni- 
versité et  le  Rector  Magnifiais  rappela,  dans  an  langage  élevé, 
ses  nombreuses  contributionsàlascience.  Enfin,  unedélégation 
du  Neuphilologenverein  en  costume  de  gala  —  bottes  vernies, 
dolman  et  rapière  —  vint  aussi  présenter  ses  hommages  à  son 
président  d'honneur. 

Un  gran  1  banquet  réunit  le  soir  dans  la  Leslhalle  autour  de 
M.  Fœrster  ses  collègues,  ses  élèves  et  ses  amis.  Le  profes- 
seur Schaarschmidt,  conseiller  secret,  ancien  bibliothécaire  en 
chef  de  l'Université,  rappela  en  quelques  parole3  émues  les 
services  rendus  à  la  philologie  romane  par  son  collègue.  Invité 
à  parler,  je  prononçai  les  paroles  suivantes: 

Cher  Monsieur  Fœrster, 

La  Société  des  langues  romanes  a  bien  voulu  me  déléguer 
pour  vous  apporter  ses  hommages  et  ses  félicitations.  Il 
n'aurait  pas  été  difficile  à  la  Société  de  choisir  dans  son  sein 
des  membres  plus  dignes  que  moi  de  cette  mission  :  je  ne  sais 
si  elle  en  aurait  trouvé  dont  l'estime  fût  plus  profonde  et  la 
sympathie  plus  sincère. 

J'ai  appris  à  vous  connaître  dans  notre  Midi  ensoleillé,  dans 
cette  bonne  ville  de  Montpellier  où  vous  comptez  tant  d'amis. 
Vons  n'étiez  nullement  dépaysé  dans  ce  miliieu  de  méridio- 
naux. Votre  gaité  et  votre  belle  humeur  étaient  égales  à  la 
nôtre.  Aussi  ma  première  visite  en  Allemagne  fut  pour  vous. 
Ce  n'est  pas  le  lieu  de  rappeler  ici  l'accueil  sympathique  que 
j'ai  trouvé  auprès  de  vous  et  de  vos  collègues  de  l'Université 


3  8  VARIETES 

de  Bonn  :  qu'il  me  suffise  de  dire  que  ces  souvenirs  suffiraient 
à  expliquer  nia  présence  ici. 

Des  liens  plus  profonds  nous  rattachent  à  la  Société  des 
langues  romanes.  Vous  avez  été  un  de  ses  amis  de  la  pre- 
mière heure.  Vous  avez  connu  en  pleine  activité  quelques- 
uns  de  ses  membres  les  plus  éminents.  Vous  avez  assisté  aux 
efforts  qu'elle  a  dû  faire  pour  faire  naître  si  loin  de  ce  grand 
foyer  intellectuel  qu'est  Paris  ,  le  goût  de  la  philologie 
romane.  Vous  savez  qu'elle  y  a  brillamment  réussi,  grâce  à 
l'activité  de  tous  ses  membres,  grâce,  surtout,  aux  travaux 
de  deux  hommes  dont  l'un,  Boucherie,  fut  trop  tôt  enlevé  à 
la  science,  et  dont  l'autre,  M.Chabaneau,  est  resté  un  de  vos 
meilleurs  amis.  Vous  avez  vous-même  contribué  au  succès  de 
la  Revue  des  langues  romanes  en  l'honorant,  à  l'occasion,  de 
votre  collaboration  :  inutile  de  vous  dire  combien  nous  regret- 
tons vivement  que  d'autres  occupations  ne  vous  permettent 
pas  de  nous  continuer  cette  précieuse  collaboration. 

Nous  le  regrettons  moins  pourtant  depuis  que  nous  avons 
de  vous  ce  travail  magistral  qui  s'appelle  l'édition  des  œuvres 
de  Chrestien  de  Troyes.  Nous  savons  les  efforts  qu'il  vous 
a  coûtés  et  que,  même  au  prix  de  votre  santé,  vous  n'avez 
pas  reculé  devant  l'œuvre  ei.treprise. 

Grâce  à  vous  nous  pourrons  lire,  dans  un  texte  correct, 
l'œuvre  longue  et  dfficile,  mais  si  charmante  et  parfois  si  fine, 
de  notra  poète  champenois.  Nous  verrons  les  transformations 
de  «ette  poésie  courtoise  qui ,  née  dans  notre  Midi,  s'est 
répandue  dans  notre  littérature  grâce  à  la  renommée  de 
Chrestien  de  Troyes  et  de  ses  imitateurs. 

Elle  s'est  répandue  aussi  dans  la  vôtre  ;  vos  M 'innesinger  ont 
connu  nos  trouvères;  le  Chevalier  au  Lion  a  trouvé  de  bril- 
lants interprètes  dans  votre  littérature.  Heureux  temps  que 
celui  où  deux  grands  peuples  ne  rivalisaient  que  pour  les 
lettres  et  les  arts  ! 

De  si  longs  travaux  vous  donneraient  le  droit  de  vous  repo- 
ser ;  mais  vous  nous  paraissez  aujourd'hui  vous  ressentir  si 
peu  des  dures  souffrances  des  dernières  années,  que  nous 
espérons  encore  beaucoup  de  votre  infatigable  activité. 

Vous  nous  avez  dit  ce  matin  que  votre  foi  dans  la  science 
est  restée  la  même  qu'au  début  de  vos    travaux  :  nous  vous 


VARIETES  89 

souhaitons  de  retrouver  une  partie  de  cette  ardeur  qui  vous 
animait  il  y  a  plus  de  trente  ans,  lorsque,  modeste  profes- 
seur dans  un  lycée  de  Vienne,  vous  commenciez  à  vous  ini- 
tier, seul,  aux  secrets  de  la  philologie  romane. 

Encore  une  fois,  au  nom  de  la  Société  des  Langues  Romanes, 
et  en  mon  nom  personnel,  je  vous  adresse  mes  meilleurs 
vœux  et  mes  plus  sincères  félicitations. 

Dans  une  chaleureuse  improvisation,  M.  Fœrster  répondit 
aux  discours  qui  avaient  été  prononcés.  «  Cj  matin,  dit-il,  le 
ciel  était  pâle  et  brumeux  ;  quand  j'ai  vu  arriver  un  méri- 
dional, j'ai  cru  voir  un  rayon  de  soleil  dans  les  plis  de  ses 
vêtements  ;  puis  à  mesure  que  mes  amis  sont  venus,  le  jour 
m'a  paru  plus  clair  et  plus  gai.  »  Il  se  sentait  rajeuni  par 
cette  fête,  et  si  jamais  il  avait  eu  quelques  doutes,  il  était  sûr 
maintenant  que  son  enseignement  n'avait  pas  été  stérile. 
Puis  s'adressant  dans  un  français  très  correct  au  délégué  de 
la  Société  des  Langues  Romanes,  il  me  pria  d'être  son  inter- 
prête auprès  de  ses  amis  de  Montpellier  et  de  leur  dire  com- 
bien il  avait  été  touché  de  leur  attention.  Il  me  rappela  la 
soirée  théâtrale  à  laquelle  il  avait  assisté  dans  la  loge  muni- 
cipale avec  son  ami,  M.  Castets;  il  rappela  qu'il  avait  «  frotté 
la  Salamandre  '  »  sur  les  bords  de  la  Méditerranée,  et  qu'il 
avait  gardé  de  notre  Midi  un  souvenir  inoubliable.  Il  nous  le 
prouverait  d'ailleurs  en  revenant  le  plus  tôt  possible  voir  le 
Clapas. 

Nous  souhaitons  de  tout  cœur  que  cette  promesse  se  réalise  ; 
M.  Fœrster  sait  plus  que  tout  autre  avec  quelle  sympathie  il 
sera  accueilli  ;  elle  ne  peut  avoir  d'égale  que  celle  avec 
laquelle  j'ai  été  reçu  à  Bonn  2. 

J.  Anglade. 


1  Que  les  lecteurs  de  la  Revue  ne  se  mettent  pas  martel  en  tète  pour 
cette  expression  :  il  s'agit  d'une  manière  plutôt  bruyante  de  boire  de  la 
bière  :  Salamander  reihen. 

2  L>>  Neuphilologenverein  en  particulier  —  dont  j'étais  membre  il  y  a 
deux  ans  —  a  fait  au  délégué  de  la  S  un  accueil  cordial  et  cha- 
leureux, et  il  me  faudrait  do  longues  pages  pour  décrire  les  exercices 
variés  que  les  Fùchse  exécutèrent  en  son  honneur. 


BIBLIOGRAPHIE 


Meyer-Liibke  (W-\  —  Einfiihrung  in  das  studium  der  romanischen 
sprachwissenschaft.  Heidelberg,  C.  Winter,  1901  [X,  224  p.],  5  m. 

S'il  est  des  livres  que  le  critique  expédie  en  quelques  lignes  parce 
qu'ils  ne  méritent  pas  un  compte  rendu  plus  long,  il  en  est  d'autres 
sur  lesquels  il  n'est  guère  moins  bref  parce  qu'il  ne  trouve  pas  moyen 
d'en  commenter  les  divers  chapitres  autrement  que  par  ces  simples 
mots  :  «  Bien,  très  bien  ».  Tel  est  l'ouvrage  que  nous  offre  aujour- 
dui  M.  Meyer-Lùbke  et  qui  introduit  d'une  façon  si  alléchante  dans 
le  domaine  des  langues  romanes  une  série  de  grammaires,  d'istoires 
de  la  littérature  et  de  dictionnaires. 

Après  avoir  déterminé  les  limites  du  domaine  roman  et  donné  une 
classification  des  langues  romanes,  l'auteur  étudie  dans  une  première 
partie  les  éléments  constitutifs  de  ces  langues,  élément  latin,  élément 
celtique,  élément  germanique.  Puis  il  consacre  la  seconde  partie  à 
l'examen  des  modifications  de  toute  sorte  qu'a  subies  le  roman  depuis 
ses  origines  jusqu'à  nos  jours. 

Tous  les  problèmes  du  romanisme,  et  ils  sont  nombreux,  sont  indi 
qués  avec  des  exemples  nets  et  caractéristiques  ;  toutes  les  questions 
sont  résumées  d'une  manière  généralement  excellente.  Voyez  par 
exemple  les  gg  31  et  32  sur  les  mots  empruntés,  les  gg  42-48  sur  les 
mots  d'origine  germanique,  leur  date  et  leur  dialecte  originaire,  et 
tant  d'autres  chapitres  que  l'on  citerait  si  l'on  n'en  était  empêché  par 
l'embarras  de  choisir. 

Ce  n'est  pas  à  dire  que  tout  doive  être  aveuglément  accepté  et  que 
tout  soit  définitif  et  indiscutable.  Ainsi  le  chapitre  intitulé  «  Dauer 
und  klang»,  p.  100-112  est  surtout  une  suite  d'ipotèses.  L'auteur  le 
donne  du  reste  comme  tel,  et  la  question  est  tellement  difficile  et 
tellement  complexe  qu'elle  ne  comporte  guère  autre  chose  que  des 
constructions  problématiques.  On  doit  ajouter  d'ailleurs  que  les  ipo- 
tèses  de  M.  Meyer-Liibke  sur  ce  sujet  en  valent  d'autres  et  qu'elles 
valent  même  mieux  que  beaucoup  d'autres. 

Il  i  a  forcément  aussi  dans  le  détail  quelques  erreurs,  quelques 
oublis,  quelques  faiblesses.  Ainsi  on  ne  voit  pas  comment,  p.  16. 
l'auteur  parcourant  le  domaine  roman  de  l'est  à  l'ouest  rencontre  le 
portugais  avant  le  sarde.  On  ne  comprend  pas  pourquoi  dans  l'énu- 
caération  des  dialectes  français,  p.  22,  ne  figure  pas  celui  de  l'Ile-de- 


BIBLIOGRAPHIE  91 

France  ou  francien,  ni  parmi  les  dialectes  espagnols  le  castillan  et 
l'aragonais.  On  lit  p.  36  que  arepennis  n'est  représenté  qu'en  français; 
que  faire  alors  de  v.  esp.  arapende  ?  Des  différentes  explications  rap- 
portées au  $  83  pour  l'accentuation  de  tenébrae,  coliibra,  intégra, 
cathedra,  alécru  et  mots  analogues  aucune  n'est  satisfaisante.  Il  ne 
s'agit  pas  là  d'un  déplacement  roman  de  l'accent;  ces  mots  ont  con- 
servé l'ancienne  accentuation  latine  fixée  pendant  la  période  italique, 
à  une  époque  où  l'on  disait  encore  'patres  (plus  tard  pa-tris),  comme 
Homère  disait  irar-pô'ç  'plus  tard  na-rpéç)  et  comme  disait  d'une  ma- 
nière générale  l'indo-européen.  Cette  accentuation  une  fois  établie  a 
subsisté  durant  toute  la  latinité  et  se  retrouve  encore  dans  les  re- 
présentants modernes  des  mots  latins  qui  la  possédaient.  L'accen- 
tuation pâlpebra,  intégra,  etc.,  n'est  apparue  qu'à  la  période  du  latiu 
classique,  surgissant  par  une  analogie  presque  obligatoire,  mais  à 
aucune  époque  elle  n'a  pu  éliminer  l'accentuation  ancienne  et  n'a 
jamais  eu  à  côté  d'elle  qu'un  caractère  exceptionnel  et  plus  ou  moins 
savant.  Voyez  sur  ce  point  A.  Meillet,  Revue  bourguignonne  de  ren- 
seignement supérieur,  t.  V,  p.  232  (article  très  important). 

Nous  terminerons  en  émettant  le  vœu  que  les  autres  volumes  de  la 
collection  soient  dignes  de  celui  qui  ouvre  si  brillamment  la  série. 

Maurice  Grammont. 

Marchot  (P.).  — Petite  phonétique  du  français  prélittéraire  (vie-xe  siècle). 
Première  partie  :  Les  voyelles,  Fribourg  (Suisse),  B.  Veith,  1901 
[39  p.]. 

La  brochure  de  M.  Marchot  a  la  malchance  de  paraître  en  môme 
temps  que  YEinfiïhrung  de  M.  Meyer-Lubke.  Ce  dernier  étudie  tout 
le  domaine  roman,  tandis  que  le  premier  se  borne  à  la  fonétique  du 
roman  de  la  Gaule  du  nord  et  aux  débuts  du  français.  Presque  toutes 
les  questions  abordées  par  M.  Marchot  sont  traitées  par  M.  Meyer- 
Lù'jke,  mais  avec  une  autre  sûreté  et  une  autre  largeur  de  vues. 

La  «  Petite  phonétique  »  comprend  deux  Chapitres  :  1°  Remarques 
sur  le  vocalisme  du  latin  vulgaire  de  la  Gaule  du  Nord,  2°  Les  voyelles 
dans  le  français  prélitléraire.  On  sait  quelle  obscurité  règne  encore 
sur  un  grand  nombre  de  fénomènes  fonétiques  qui  se  sont  accomplis 
durant  la  période  qu'étudie  l'auteur;  mais  on  doit  reconnaître  pourtant 
qu'il  abuse  un  peu  des  ipotèses,  et  que  si  certaines  méritent  d'être 
prises  en  considération,  comme  celle  qui  prétend  expliquer  l'évolution 
de  l'a  tonique  libre  (p.  29  et  suivantes),  il  i  en  a  beaucoup  qui  sont 
trop  contestables. 

Le  «;  1  traite  de  l'accent.  L'ipotcse  relative  aux  mots  intégru,  tonitru, 
palpétra  et  analogues  se  détruit  d'elle-même.  Voyez  les  renseigne- 


92  BIBLIOGRAPHIE 

ments  que  nous  donnons  sur  ce  point  dans  notre  compte  rendu  de 
1  Einfuhrung  (ci-dessus,  p.  91).  —  La  question  de  paréte  est  des  plus 
ténébreuses  ;  mais  l'explication  de  M.  Marchot  n'est  pas  recevable  ; 
d'après  lui  parïcte  serait  devenu  'parèète  à  l'époque  où  ï  est  devenu  é 
(e  fermé)  en  roman,  ce  qui  suppose  que  le  changement  roman  de  ï  eu 
é  est  antérieur  à  celui  de  ï  en  jod  devant  une  autre  voyelle;  c'est 
contraire  aux  faits.  Puis  ce  * parèète  serait  devenu  *  parèète  «  par 
attraction  de  la  voyelle  accentuée  sur  l'atone  »  ;  mais  si  l'ï  était  de- 
venu é  il  n'avait  plus  de  raison  pour  perdre  l'accent.  Enfin  *  parèète 
serait  devenu  paréte  «  par  contraction  »  ;  mais  la  contraction  de  deux 
voyelles  ouvertes  ne  donne  pas  une  voyelle  fermée.  Le  cas  de  cohorte 
devenant  carte  n'est  nullement  comparable  ;  en  latin  deux  voyelles 
brèves  en  se  contractant  donnent  une  voyelle  longue,  dont  le  corres- 
pondant roman  est  forcément  une  voyelle  fermée.  Mais  le  roman  ne 
connaît  plus  de  voyelles  longues  ni  de  voyelles  brèves  ;  il  n'a  que  des 
voyelles  ouvertes  et  des  voyelles  fermées.  —  Pour  l'accentuation  des 
formes  qui  ont  donné  naissance  au  mot  foie  et  à  ses  frères  romans, 
voyez  l'article  de  M.  G.  Paris  dont  il  a  été  rendu  compte  ici  même, 
p.  186.  —  Pour  sécale,  voyez  Meyer-Lûbke,  Einfuhrung,  p.  98.  Pour 
* pûlicella  (§  4),  voyez  Revue  des  langues  romanes,  1898,  p.  287.  Cum 
à  côté  de  quum  (§  7)  n'a  rien  de  comparable  avec  le  cas  de  nil  à  côté 
de  nihil.  —  Mortu,  cocu  (non  coqu),  anticu  (non  antiqu),  etc.,  sont  dus 
à  une  évolution  latine,  et  non  pas  romane.  De  même  tus,  sus,  etc.  — 
Une  étape  '  laquju  n'a  aucune  espèce  de  vraisemblance.  —  Fr.  dès 
ne  peut  pas  sortir  de  '  de-ex  car  Yx  =  es  et  n'entrave  pas,  et  d'autre 
part  certaines  formes  dialectales  comme  Dampiichard  do  prouvent 
que  l'e  était  fermé  ;  v.  fr.  ades  qui  a  un  e  ouvert  ne  peut  pas  non  plus 
remonter  à  *  ad-de-ex  ;  nous  reviendrons  sur  cette  dernière  forme  en 
temps  opportun. 

Nous  bornerons  ici  nos  observations  ;  elles  suffisent  à  montrer 
avec  quelles  précautions  on  pourra  utiliser  l'ouvrage  de  M.  Marchot. 
La  seconde  partie,  Les  consonnes,  est  annoncée  pour  1902. 

Maurice  Grammont. 


Bartoli  'M.).  —  Ueber  eine  studienreise  zur  erforschung  des  altroma- 
nischen  Dalmatiens.  (N°  V  des  Vorlàufige  berichte  der  Balkan-com- 
mission,  en  vente  chez  Gerold  /?/?,  Vienne.  C'est  le  tirage  à  paît  d'un 
article  paru  dans  YAnzeiger  der  philosophisch-historischen  classe  du 
'29  novembre  1899.  [Académie  impériale  des  Sciences  de  Vienne]). 

M.  Bartoli,  chargé  par  l'Académie  des  Sciences  de  Vienne  d'aller 
étudier  surplace  l'ancien  dialecte  roman  de  Dalmatie,  est  revenu  avec 
les  matériaux  d'un  ouvrage  considérable  qui  ne  pourra  paraître  que 


BIBLIOGRAPHIE  93 

clans  quelque  temps.  En  attendant  il  nous  donne  un  résumé  des  lui 
vaux  qu'il  a  accomplis  dans  sa  mission  et  des  faits  (pi'il  se  propose  de 
mettre  en  lumière. 

Le  Dalmate  est  un  dialecte  jusqu'à  présent  très  mal  connu  et  dont 
les  sources  sont  maleureusement  limitées;  on  ne  voit  pas  trop  ce 
qu'on  pourrait  ajouter  plus  tard  à  celles  dont  a  disposé  M.  Rartoli, 
car  la  dernière  personne  qui  parlait  le  végliote  est  morte  en  1898,  et 
les  archives  des  notaires  de  la  ville  de  Véglia  ont  été  presque  entiè- 
rement détruites  par  un  incendie.  Pourtant  nous  en  possédons  assez 
pour  nous  rendre  compte  du  caractère  très  particulier  de  cette  langue 
et  du  aut  intérêt  qu'elle  présente  à  différents  égards. 

Dans  le consonœilisme  on  remarquera  surtout  le  traitement  des  «  gut- 
turales »:c  devient  c  devant  l,  e,  û,  mais  il  reste  c  (k)  devant  ë,  ï  comme 
devant  a,  o,  îî;  qui  devient  de  même  ci  tandis  que  que  est  représenté 
par  /ce;  et,  es  deviennent  pt,  ps  (en  gaulois  c'est  le  contraire:  pt,  ps 
deviennent  et,  es)  ;  la  sonore  g  a  un  traitement  parallèle. 

Dans  le  vocalisme  on  notera  que  les  produits  de  û  supposent  une 
fase  U,  (pie  a  tonique  devient  e  dans  certains  cas,  qu'en  végliote  les 
voyelles  toniques  libres  se  diftonguent  toutes,  et  les  voyelles  toniques 
entravées  seulement  lorsqu'elles  sont  ouvertes. 

Au  point  de  vue  etnographique  et  istorique  il  sera  fort  instructif  d'é- 
tudier d'une  façon  précise  et  approfondie  les  rapports  du  Dalmate  avec 
'e  roumain  et  l'albanais,  avec  l'italien,  avec  le  rétique,  avec  le  slave  et 
avec  le  germanique  (la  plupart  des  idées  qui  sont  rendues  dans  la 
majeure  partie  des  langues  romanes  par  des  mots  germaniques  le 
sont  ici  par  des  vocables  latins  :  haiptare  «  garder  »,juàlb  «  blanc»). 
Ces  recherches  ne  contribueront  pas  peu  à  éclaircir  la  «  question  illi- 
rienne  ». 

On  voit  par  ces  indications  quelle  sera  l'importance  de  l'ouvrage 
annoncé  par  M.  Bartoli. 

Maurice  Grammont. 


CHRONIQUE 


M.  Haguenin,  professeur  agrégé  de  l'Université,  a  été  nommé  pro- 
fesseur extraordinaire  de  fiançais  moderne  à  l'Université  de  Berlin. 
Les  journaux  allemands,  eu  annonçant  cette  nomination,  font  remar- 
quer que  tout  à  fait  exceptionnellement  le  nouveau  professeur  n'a  pas 
eu  à  perdre  sa  qualité  de  français. 


Nos  lecteurs  connaissent  sans  doute  les  deux  notes  publiées  par  la 
Romania  et  les  Annales  du  Midi  dans  leur  dernier  cahier  et  relatives 


'.M  CHRONIQUF. 

à  la  découverte  du  manuscrit  contenant  la  vie  de  Sainte  Foy  d'Agen. 
Ce  texte  sera  publié  dans  un  des  plus  prochains  numéros  de  la  Roma- 
>iia  par  l'heureux  auteur  de  cette  découverte,  M.  Leite  de  Vascon- 
CELLOS.  Poussé  par  un  sentiment  des  plus  honorables,  M.  de  Vascon- 
cellos  publiera  le  texte  avec  des  notes  et  une  introduction  en  por- 
tugais. 

Nous  croyons  savoir  —  il  n'y  aura  sans  doute  plus  d'indiscrétion  à 
le  dire  quand  ces  lignes  paraîtront  — ,  que  c'est  à  la  bibliothèque  de 
Leyde,  dans  un  manuscrit  classé  comme  contenant  des  textes  catalans 
(il  en  contenait  en  effet),  que  M.  de  Vasconcellos  a  découvert  son 

poème. 

M.  Koschwitz,  professeur  de  philologie  romane  à  l'Université  de 
Maibourg,  a  permuté  avec  son  collègue  de  l'Université  de  Konigsberg. 

* 

M.  Gaston  Paris  publie  dans  le  Journal  des  Savants  (octobre  1901) 
un  compte  rendu  de  l'Histoire  de  la  littérature  française,  publiée  par 
MM.  H.  Suchier  et  Birch-Hirschfeld.  Il  annonce  en  note  (p.  G46)  un 
Tableau  de  la  littérature  française  au  moyen  âge  qui  contiendra  le 
tableau  de  la  littérature  provençale.  «  Une  esquisse  faite  sur  un  plan 
différent  [de  celui  de  1888-1890],  embrassant  l'époque  intermédiaire 
(1327-1500)  et  la  littérature  provençale,  paraîtra  prochainement:  en 
anglais  d'abord,  puis  en  français.  » 


Du  Litteraturblatl  far  germanische  und  romanische  Philologie  : 
M.  Freymond,  professeur  de  philologie  romane  à  l'Université  de  Berne, 
a  accepté  une  nomination  à  l'Université  de  Prague. 

Le  docteur  Jeanjaquet  a  été  nommé  professeur  de  grammaire  com- 
parée des  langues  romanes  à  l'Académie  de  Neufchâtel. 


Au  mois  de  juillet  1901  s'est  fondée  à  Rome  une  Société  philolo- 
gique romaine.  Elle  publie  un  bulletin  et  des  documents  sous  la  direc- 
tion du  professeur  E.  Moxaci.  Parmi  les  documents  qui  seront  publiés 
dans  les  premiers  volumes,  on  annonce  les  suivants  : 

Il  Canzoniere  Vaticano  3793,  reproduction  diplomatique. 

I  documenti  d'Amore,  avec  le  commentaire,  de  Francesco  da  Rar- 
berino,  édition  complète  d'après  les  deux  manuscrits  originaux  de  la 
Bibliothèque  Barberinienne. 

II  Codice  Vaticano  3196,  contenant  l'original  du  chansonnier  de 
Pétrarque. 

Les  secrétaires  de  la  Société  sont  le  docteur  F.  Hermanin  et  le 
professeur  A.  Silvagni.  L'administrateur  est  le  docteur  E.  Modigliani. 
Pour  tous  renseignements,  s'adresser  à  ce  dernier  :  Rome,  Corso  Vitt. 
Emm.  20'.). 

« 
•    * 

Maoruelone  excite  les  historiens  et  inspire  les  poètes.  Voici  qu'an 
d'entre  eux,  M.  E.  Renaud,  vient  de  lui  consacrer  de  beaux  vers.  Il 


CHRONIQUE  0  5 

nous  fait  assister  aux  luttes  héroïques  de  Maguelone  contre. 

Les  Pirates  d'Alger,  montrant  leurs   faces  blêmes. 

Puis  Maguelone  est  devenue 

Une  femme  hautaine  en  son  voile  de  deuil. 

Un  étranger,  dont  la  cuirasse  étincelle,  viendra  un  jour  la  consoler: 

0  douce  Maguelone,  il  presse  ton  corps  vierge 

Celui  que  tu  cherchais  par  les  vagues  effrois 

De  l'hiver,  quand  ses  pieda  heurtaient  les  galets  froids 

Que  l'écume  insensée  a  vomis  sur  la  berge. 

Le  poème,  qui  est  d'inspiration  panthéiste,  renferme,  cà  et  là,  de 
jolies  strophes. 

Ce  ne  sont  pas,  d'ailleurs,  les  premiers  vers  de  M.  E.  Renaud  II 
a  publié,  cette  année  également,  chez  Lemerre,  un  volume  de  poésie 
intitulé  :  Amours  Barbares.  Comme  sous-titre  :  Impressions  cévenoles  ; 
et  allemandes  pourrait-il  ajouter,  car  plusieurs  des  poèmes  qui  foi - 
ment  ledit  volume  ont  été  composés  pendant  un  séjour  de  l'auteur 
en  Allemagne. 

Le  poème  de  Maguelone  est  dédié  à  l'auteur  des  Flammes  Mortes. 
C'est  le  titre  d'un  volume  de  vers,  publié  également  chez  Lemerre,  en 
1901,  et  dont  l'auteur,  M.  Martin  Paoli,  est  professeur  d'italien  au 
Lycée  de  Montpellier.  La  muse  universitaire  ne  chôme  pas  à  Montpel- 
lier, car  le  nom  de  l'auteur  de  Maguebme  la  Morte  n'est  que  le  pseu- 
donyme aux  trois  quarts  transparent  d'un  des  plus  distingués  profes- 
seurs de  langues  vivantes  du  Lycée. 


Notre  collaborateur  M.  A.  Gasté,  professeur  de  littérature  fran- 
çaise à  l'Université  de  Caen,  vient  de  prendre  sa  retraite.  11  a  pour 
successeur  M.  Maurice  Souriau,  précédemment  professeur  de  litté- 
rature et  d'art  normands  à  Caen. 


M.  W.  Fœrster  a  été  nommé  membre  correspondant  de  l'Académie 
des  sciences  de  Gottingnc.  Il  était  déjà  membre  de  l'Académie  de 
Munich  depuis  de  nombreuses  années.  Toutes  nos  félicitations. 


La  librairie  Niemeyer,  de  Halle,  prépare  une  importante  collection 
de  manuels  de  philologie  romane.  Nous  remarquons  en  particulier  dans 
la  liste  annoncée:  Manuel  d'ancien  provençal  (langue  et  littérature)  ; 
Manuel  de  provençal  moderne  langue  et  littérature).  Un  de  ces 
manuels  {Introduction  à  l'élude  de  l'ancien  français,  parM.VoRETzeH) 
a  déjà  paru. 

1  Maguelone  la  morte,  méditation  poétique,  par  Etienne  Renaud, 
Montpellier, impr.  Firmin  et  Montane,  1901,  in-8°,  12  p. 


96  CHRONIQUE 


On  annonce  un  Précis  de  phonétique  expérimentale  par  l'abbé 
Rousseloï  et  M.  F.  Laci-ottr,  qui  fera  suite  aux  principes  de  pho- 
nétique  expérimentale  du  premier  de  ces  deux  auteurs:  la  deuxième 
partie  de  ce  dernier  travail  vient  de  paraître  à  la  librairie  Welter. 


Notre  éminent  secrétaire  général,  M.  Chabaneau,  vient  d'être 
nommé  professeur  honoraire  à  la  Faculté  des  lettres  de  l'Universi  é 
de  Montpellier. 

La  Société  se  réjouit  d'une  distinction  qui,  tout  en  attestant  combien 
les  longs  services  de  M.  Cbabaneau  sont  appréciés  par  le  Ministère, 
l'attache  par  un  lieu  durable  à  cette  maison  qui  fut  si  longtemps 
sienne  et  qui  ne  l'a   vu  s'éloigner  qu'à  regret. 


M.  Maurice  Grammont,  chargé  du  cours  de  philologie  à  la  Faculté 
des  lettres,  ancien  président  de  la  Société  pour  l'étude  des  Langues 
Romanes,  vient  d'être  nommé  professeur  de  linguistique  et  gram- 
maire comparée  à  l'Université  de  Montpellier  (chaire  créée). 

M.  J.  Vianey,  maître  de  conférences  de  littérature  française  à  la 
Faculté  des  lettres,  notre  collaborateur,  vient  d'être  nommé  professeur 
de  littératures  modernes  comparées  à  l'Université  de  Montpellier 
(chaire  créée). 

La  Société  des  Langues  Romanes  adresse  ses  félicitations  les  plus 
sincères  aux  nouveaux  professeurs  et  à  M.  le  Ministre  de  l'Instruc- 
tion publique. 


Dans  sa  séance  du  jeudi  5  décembre  1901,  le  Comité  directeur  de 
la  Société  a  procédé  à  l'élection  de  son  Bureau  pour  1902:  M.  Max 
Bonnet,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres,  correspondant  de  l'Ins- 
titut, passe,  selon  l'usage,  de  la  vice-présidence  à  la  présidence. 
M.  F.  Fabrège,  l'historien  de  Maguelone,  a  été  élu  vice-président, 
en  reconnaissance  des  services  qu'il  a  rendus  aux  Etudes  méridio- 
nales et  de  l'hospitalité  si  gracieusement  offerte  aux  féhbres  et  aux 
romanistes  à  Maguelone,  lors  de  la  Santo  Estello  1900.  MM.  Lam- 
bert, Grammont  et  Pélissier  sont  continués  dans  les  fonctions  de 
trésorier,  bibliothécaire  et  secrétaire  de  la  rédaction.  En  remplace- 
ment de  M.  Chabaneau,  M.  Grammont  a  été  en  outre  nommé  secré- 
taire général  de  la  Société. 

M.  Chabaneau,  correspondant  de  l'Institut,  professeur  honoraire  à 
la  Faculté  des  lettres  de  l'Université  de  Montpellier,  a  été  nommé, 
par  acclamation,  président  d'honneur  de  la  Société  pour  l'étude  des 
Langues  Romanes. 


Le  Gérant  responsable  :  P.  IIamklin. 


LA  DANSE   DES  TREILLES 


NOTICE 


«  Les  Treilles  »,  aussi  haut  qu'on  peut  remonter,  ont  été 
dansées  à  Montpellier  en  1503,  devant  l'archiduc  Philippe, 
gendre  de  Ferdinand  le  Catholique,  quand  il  retournait  dans 
ses  Etats  de  Flandre,  avant  de  conclure  à  Lyon,  où  il  s'arrêta, 
un  traité  avec  Louis  XII.  Il  est  dit  dans  nos  archives  locales 
que  les  Consuls,  «  pour  festoyer  ledit  seigneur,  de  toutes 
sortes,  firent  danses  et  «  bails  de  la  Treille  »,  qui  fut  très  hien 
dansé  et triomphantment  ». 

On  les  a  aussi  dansées  en  1504,  pour  la  troisième  fête  de 
Noël,  en  présence  du  roi  Charles  IX,  de  passage  en  notre 
ville.  Dans  son  «  Recueil  et  discours  du  voyage  de  CharlesIX  », 
Abel  Jouan  dit  (et  le  fait  est  confirmé,  d'après  ce  que  nous 
communique  M.  Emile  Bonnet,  dans  les  Mémoires  manuscrits 
de  Serres  —  Bibliothèque  du  Séminaire) — ,  que  les  habitants 
de  Montpellier  «  donnèrent  plaisir  au  Roy,  en  un  grand 
carro}-  qui  estait  devant  son  logis,  d'une  danse  que  l'on  appe- 
lait «  La  Treilhe  » «  et  dansaient  au  son  de  trompettes, 

tenans  en  leurs  mains  des  cerceaux  tous  fioris,  et  les  dan- 
seurs   tous  masqués   et  revestus  qu'il   faisait  beau  voir » 

Abel  Jouan  parle  de  trompettes  ;  c'est  le  hautbois  qu'il  veut 
désigner,  car  la  musique  des  Treilles  n'a  sa  véritable  adap- 
tation que  sur  le  galoubet  augmenté  du  tambourin. 

En  1830,  on  les  a  aussi  exécutées  devant  la  duchesse  d'An- 
goulème. 

En  1852,  nos  Grisettes,q\ii  les  dansèrent  devant  le  prince 
Président,  eurentle  don  d'exciter  par  leur  charme  ses  applau- 
dissements et  son  sourire.  On  sait  qu'il  n'en  était  pas  pro- 
digue. 

Les  Treilles  constituèrent,  en  1878,  le  principal  attrait  des 
xlv.  —  Mars  1902.  7 


98  LA  DANSE  DES  TREILLES 

«Fêtes  Latines».  On  les  a  reprises  à  la  venue  du  Président 
Carnot,  en  1890,  à  l'occasion  de  la  commémoration  du  VIe 
centenaire  de  l'Université  de  Montpellier.  On  les  dansait 
récemment  à  Marseille,  à  Pézenas,  et  partout  elles  ont  le 
don  d'attirer  la  foule.  A  Toulouse,  on  les  appelle  la  danse  du 
«  Ramelet  »  ;  mais  on  ne  les  danse,  croyons-nous,  correcte- 
ment et  historiquement,  ajouterions-nous  presque,  qu'à  Mont- 
pellier, où  leur  caractère  exclusivement  bachique  et  lascif 
est  conservé,  par  opposition  aux  variations  et  déformations 
apportées  à  leur  simplicité  dans  le  but  d'en  embellir  l'en- 
semble. 

La  danse  du  Chevalet  ' 

Avec  moins  d'agitation  mais  non  sans  autant  de  grâce  et 
d'agilité,  vient  derrière  la  Danse  du  Chevalet.  Une  pieuse 
croyance  que  les  habitants  de  Montpellier  ont  conservée 
attribue  l'origine  de  cette  danse  célèbre  dans  tout  le  Midi, 
où  la  propagation  des  scènes  pittoresques  comme  aussi  du 
chauvinisme  est  si  rapide,  au  rapprochement  conjugal  de 
Pierre  II  roi  d'Aragon  avec  la  douce  Reine  Marie  de  Mont- 
pellier, issue  de  la  famille  des  Guilhem;  à  la  suite  de  ce  rap- 
prochement, vint  au  monde  Jacmes  le  Conquérant,  vainqueur 
des  Maures  et  des  Sarrazins  d'Espagne  2. 

1  La  Danse  du  Chevalet  est  inséparable  des  Treilles. 

Ce  divertissement  a  été  réglé  en  1325  par  une  ordonnance  de  Ray- 
mond de  Miintaner.  On  le  reprit  plus  tard  au  Louvre  pour  distraire  le 
roi  Louis  XV,  pendant  une  convalescence. 

Vingt-quatre  danseurs  partirent  de  Montpellier  pour  aller  exécuter 
cette  danse  devant  sa  Majesté  et  la  Cour.  Le  Mercure, qui  rend  compte 
de  cette  cérémonie,  assure  que  le  Roi  fut  très  satisfait. 

D'Aigrefeuille  dit  <- que  le  peuple  ne  manque  point,  dans  toutes  les 
réjouissances  publiques,  défaire  sortir  le  «Chevalet»,  c'est-à-dire  qu'un 
jeune  homme,  monté  sur  un  petit  cheval  en  carton,  proprement  équipé, 
lui  fait  faire  le  manège  aux  sons  des  tambourins  et  du  hautbois,  tandis 
qu'une  grande  troupe  de  danseurs,  avec  des  grelots  aux  jambes  et  des 
tambours  de  basque  à  la  main,  font  semblant  de  lui  présenter  de 
l'avoine  pour  le  détourner  de  son  exercice,  ce  qu'il  évite  avec  beaucoup 
d'agilité  et  toujours  en  cadence.  »  (Histoire  de  Montpellier.) 

2  La  plupart  des  auteurs  de  l'histoire  du  Languedoc  s'appuient  pour 


LA  DANSE   DES  TREILLES  99 

Sans  vouloir  toucher  à  une  légende  aussi  chère,  puisque  le 
nom  d'un  héros  et  d'une  reine  aimée  y  sont  attachés,  qu'il 
nous  soit  cependant  permis  de  signaler  que  la  Danse  du  Che- 
valet pourrait  bien  remonter  à  une  origine  plus  ancienne  et 
se  rattacher  aux  coutumes  du  paganisme.  On  a  retrouvé  dans 
les  fouilles  de  Délos,  il  y  a  une  trentaine  d'années,  et  l'on 
conserve  au  musée  de  Béziers',  un  vase  de  forme  élégante 
et  peu  commune,  composé  d'une  terre  très  fine,  d'un  ton  jaune 
clair.  La  peinture  en  est  rouge  et  noir;  on  distingue  très  bien 
ces  deux  tons  à  la  loupe.  Le  dessin  représente  un  cheval  pos- 
tiche porté  par  un  cavalier  armé  d'une  lance  :  «  Les  deux 
»  pieds  du  cavalier  s'appuient  à  terre,  dans  deux  espèces  de 
»  fourreaux  qui  ont  l'air  de  deux  jambes  de  cheval.  L'esprit 
»  humain  n'est  pas  tellement  inventif,  que  la  Danse  du  Che- 
»  valet,  c'est-à-dire  une  danse  dans  laquelle  figure  nécessai- 
»  rement  un  cheval   postiche  de  bois  ou  de  carton  n'ait  pu 


combattre  la  légende  de  la  naissance  de  Jacme  Ier  roi  d'Aragon,  sur  le 
silence  de  ce  roi  lui-même,  qui  n'en  dit  mot  dans  les  Mémoires  qu'il  a 
laissés  de  sa  vie.  D'autre  part,  on  trouve  dans  la  Description  historique 
de  quelques  parties  de  la  France,  par  Dulaure,  qu'en  mémoire  d'un  évé- 
nement arrivé  à  Lyon  en  1403,  on  y  dansait,  le  jour  de  la  Pentecôte,  «  Le 
Cheval  Fou  *.  Un  homme  portait» à  sa  ceinture  un  mannequin  en  forme 
de  cheval,  lequel  était  couvert  d'un  vaste  caparaçon  qui  descendait  jusqu'à 
terre  et  couvrait  ses  deux  jambes;  deux  autres  jambes  postiches  sem- 
blaient enfourcher  le  cheval,  et  l'homme,  avec  tout  cet  attirail,  paraissait 

faire  de  l'équitation Il  sautait,  gambadait,  se  trémoussait  en  avant,  en 

arrière,  de  manière  à  imiter  les  allures  d'un  cheval  qui  caracole. 

Il  est  plus  que  vraisemblable,  en  rassemblant  les  diverses  danses  où  le 
cheval  joue  un  rôle,  tel  le  «  Pouli  de  Pézénas  »,  dont  l'invention  n'excé- 
derait pas  la  naissance  d'un  poulain  dans  les  écuries  du  Prince  de  Conti, 
pendant  un  séjour  qu'il  fit  dans  cette  ville,  où  il  appela  Molière,  le  «  Chivau 
frus  d'Aix  »,  «  le  cheval  fou  »  de  Lyon  et  la  touchante  légende  de  1'  «  Ane 
deGignac  »,  que  l'origine  de  ces  démonstrations  quasi  aristophanesques 
remonte  à  des  causes  qui  nous  sont  inconnues. 

On  peut  lire  enfin,  dans  un  article  du  Journal  des  Débats  (2i  mai  1831) 
à  propos  du  Dictionnaire  philologique  publié  par  Noël  et  Garpentier,  qu'on 
exécutait  à  Naples,  une  «  Pantalonnade  »  rappelant  le  «  Chevalet  ». 

En  Angleterre,  au  dernier  siècle,  on  dansait  le  «  Hobby-Horse  »,  ou 
danse  mauresque,  «  Morris  dance;  »  le  cavalier  du  t  Hobby-Horse  »  por- 
tait son  cheval  tout  comme  dans  le  chevalet. 

'  Plume  et  Pinceau.  —  Par  M.  Jules  Troubat.  Lizeux,  Paris  1878. 


100  LA  DANSE  DES  TREILLES 

»  naître  à  des  époques  différentes  dans  plus  d'une  localité.  Il 
»  suffisait  d'une  circonstance  où  le  cheval  jouait  un  rôle  pour 
»  donner  lieu  à  une  manifestation  de  ce  genre,  et  il  a  pu  s'en 
»  produire  une  chez  les  Grecs,  à  l'occasion  du  fameux  cheval 
de  Troie.  » 

De  nos  jours,  le  ton  s'est  radouci;  le  Chevalet  n'est  plus  un 
instrument  de  guerre,  mais  un  poulain  modeste  quoique  astu- 
cieux, autour  duquel  marchenten  dansant,  dansenten  marchant 
«  sus  l'api,  sans  cauciga  lou  grelx  »  des  jeunes  gens,  nouveaux 
éphèbes,  qui  cherchent  à  lui  donner  l'avoine  dans  un  tambour 
de  basque  aragonnais...  2  Ah!  la  chose  n'est  pas  facile,  car  la 
bête  en  gaieté  remue  sans  cesse,  et  envoie  des  ruades,  présen- 
tant la  croupe  quand  on  essaie  de  lui  prendre  la  tête,  tandis 
que  les  chansons  s'égrènent  comme  d'un  chapelet  sans  fin  3. 


1  Expression  languedocienne  tellement  pittoresque  qu'elle  n'a  pas 
d'équivalent  en  français. 

2  On  sait  que  la  Maison  d'Aragon  a  longtemps  régné  à  Montpellier. 

3  Voici,  bien  que  l'usage  en  soit  passé,  la  chanson  très  primitive  que 
chantaient  les  danseurs  autour  du  cheval  :  Elle  n'a  pas  de  nom  connu 
d'auteur  : 

Dona  la  cibada  aou  paoure  chibalet 
Qu'es  mort  de  fam,  qu'es  mort  de  set 
La  flatta 
La  gratta 
Et  lou  riban  vert 
A  la  moda  de  Vaouvert 
En  sas  abadessas 
Et  sous  abbadis 
A  la  moda  de  Paris 


Si  Nimès  savien  dansa  lou  chibalet, 
Vendrien  pas  quèré  Dupounet  (célèbre  danseur) 

La  flatta 

La  gratta  etc.,  etc. .. 


LA  DANSE  DES  TREILLES 


101 


Cansou  de  las  Treilhas' 


Chanson  des  Treilles 


I 

Lh  !  io  tant  là  ! 
Passa  se  vos  passa, 
Passa  dejout  las  treilhas. 
Eh!  io  tant  là! 
Passa  se  vos  passa, 
Très  cops  sans  t'arresta  ! 

Il 

Cap  de  Jouvent, 

Que  vas  couma  lou  vent, 

Espéra  ta  poulida! 

Cap  de  Jouvent! 

Que  vas  couma  lou  vent. 

Espera-la  que  ven  ! 

111 

Lou  mes  de  mai 
S'espandis  fies  e  gaï, 
La  rosa  es  espélida! 
Lou  mes  de  niai 
S'espandis  fres  e  gaï, 
Tout  canta  mai  que  mai'. 

IV 

Lous  aucelous, 

Sus  lous  aubres  en  flous, 

Disou  sa  cansounetta  ; 

Lous  aucelous, 

Sus  lous  aubres  en  flous, 

Kendou  moun  cor  jalons. 


I 

Et  en  avant  !  —  Passe  si  tu 
veux  passer,  —  passe  sous  les 
treilles.  —  Et  en  avant!  —  Passe 
si  tu  veux  passer,  —  trois  fois 
sans  t'arrêter  ! 


II 
Chef  de  la  jeunesse,  —  qui 
vas  comme  le  vent,  —  attends  ta 
jolie  compagne!  —  Chef  de  la 
jeunesse,  —  qui  vas  comme  le 
vent,  —  attends,  la  voici  qui 
arrive  ! 

III 

Le  mois  de  mai  —  s'étend  frais 
et  gai,  —  la  rose  est  épanouie. 
—  Le  mois  de  mai  —  s'étend  frais 
et  gai,  —  tout  chante  à  qui  mieux 


mieux 


IV 

Les  petits  oiseaux  —  sur  les 
arbres  fleuris  —  disent  leur  chan- 
sonnette. —  Les  petits  oiseaux, 
—  sur  les  arbres  fleuris,  —  rendent 
mon  cœur  jaloux. 


1  Paroles  du  félibre  Louis  Rouinieux.  composées  pour  les  fêtes  latines 
de  1878.  Cette  poésie,  de  date  relativement  récente,  a  été  précédée  de 
plusieurs  autres,  où  les  auteurs,  tous  populaires,  mêlaient  la  politique  et, 
plus  d'une  fois,  la  critique  conjugale  à  la  manière  des  «  cours  coculaires  »  ; 
mais  comment  les  recueillir?  Ceux  qui  les  chantaient  sont  morts,  et 
elles  n'ont  jamais  été  imprimées. 


102 


LA    DANSE  DES  TREILLES 


Coum'elos,  ieu, 

Angeta  dau  bon  Dieu, 

Se  vos  de  poutounettas, 

Coum  'eles,  ieu, 

Augeta  dau  bon  Dieu, 

Que  n'en  fariei...  bon  Dieu  ! 


De  même  qu'eux,  moi,  —  petite 
ange  du  bon  Dieu!  —  Si  tu  veux 
des  baisers.  —  De  même  qu'eux, 
moi,  —  petite  ange  du  bon  Dieu! 
—  Que  je  t'en  ferais!...  bon  Dieu! 


VI 

Brave  galant, 

Sen  pas  au  jour  de  l'an, 

Gardas  vostras  brassadas, 

Brave  galant, 

Sen  pas  au  jour  de  l'an, 

Fourvia  vous  de  davan  ! 


VI 

Aimable  amoureux,  —  nous 
ne  sommes  pas  au  jour  de  l'an; 
—  gardez  vos  baisers  !  —  Aimable 
amoureux,  —  nous  ne  sommes  pas 
au  jour  de  l'an.  —  Ecartez-vous 
de  devant  moi  ! 


VII 

Au  mes  d'amour, 
Poutounejou  toujour 
Dos  amas  embrasadas, 
Au  mes  d'amour 
Poutounejou  toujour 
La  nioch  amaï  lou  jour! 

VIII 

S'acos  antau, 

Vendres  à  moun  oustau, 

Vous  ie  serai  proumessa. 

S'acos  antau, 

Vendres  à  moun  oustau, 

Moun  paire  es  pas  brutau  ! 


VII 

Au  mois  des  amours,  —  s'em- 
brassent toujours  —  deux  âmes 
enflammées.  —  Au  mois  des 
amours,  —  elles  s'embrassent 
toujours — la  nuit  comme  le  jour  ! 


VIII 

Puisqu'il  en  est  ainsi,  —  vous 
viendrez  à  la  maison,  —  on  vous 
promettra  ma  main.  —  Puisqu'il 
en  est  ainsi,  —  vous  viendrez  à  la 
maison,  —  mon  père  n'est  pas 
brutal. 


IX 

Ma  bella  enfan  ! 
Per  ameïsa  ma  fam, 
A  ici  la  taula  messa! 
Ma  bella  enfan, 
Per  ameïsa  ma  fam, 
De  qu'cspera  dernan  ! 


IX 

Ma  belle  enfant!  —  Pour  apai- 
ser ma  faim,  —  regarde  la  table 
est  mise!  —  Ma  belle  enfant!  — 
Pour  apaiser  ma  faim,  —  pourquoi 
attendre  à  demain. 


LA   DANSE  DES  TREILLES 


103 


Ses  pas  countent, 

Adissias,  beii  jouvent, 

Passas  bona  la  festa  ! 

Ses  pas  countent. 

Adissias  beii  jouvent! 

M'en  vau  qu'ai  pas  lou  temps  ! 

XI 

Oh!  jour  charmant  ! 
Mignota!  prend  maman, 
Pus  tard  veiren  lou  resta  ! 
Oh!  jour  charmant, 
Mignota!  pre a  1  ma  man 
Embé  moun  cor  aimant. 


Puisque  vous  n'êtes  pas  con- 
tent !  —  Bonjour,  beau  jeune 
homme!  —  Que  la  fête  vous 
légère!  —  Puisque  vous  n'êtes 
pas  content!  —  Bonjour,  beau 
jeune  homme  !  .—  Je  m'en  vais, 
car  je  suis  pressé*-! 

XI 


Oh!  jour  charmant!  —  Chère 
petite!  prends  ma  main,  —  plus 
tard  nous  parlerons  d'autres  cho- 
ses. —  Oh!  jour  charmant!  — 
Chère  petite!  prends  ma  main  — 
avec  mon  cœur  plein  d'amour. 


KXECUTION  CHORÉGRAPHIQUE  DE  LA  DANSE 
DES  TREILLES 

AVEC    FIGUKES    ET    PLANS    DESCRIPTIFS   * 

La  Danse  des  Treilles2  est  ainsi  appelée  parce  qu'au  début 
elle  a  dû  emprunter  sa  décoration  et  ses  accessoires  à  la 
la  vigne,  pendant  la  période  des  vendanges,  alors  que  les 
sarments  sont  verts,  chargés  de  pampres  et  de  fruits. 

Plus  tard,  quand  on  a  voulu  la  danser  à  d'autres  époques, 
au  printemps,   par  exemple,   on   a   substitué    aux   sarments 


1  Par  M.  Antoine  Troubat,  attaché  à  la  questure  du  Sénat. 

*  Nous  avons  essayé  de  résumer,  non  sans  considérer  combien  grande 
était  li  difficulté  de  paraître  clair  sur  un  sujet  des  plus  spéciaux,  les 
seignements  relatifs  à  L'exécution  de  la  Drmse  des  Treilles  que  nous  a 
fournis  un  modeste  et  intelli  ivrier  de  notre  ville.  Nous  le  remer- 

cions bien  vivement  ici  d  implaisance  et  de  son  obligeant  empres- 

sement. Son  goût  passionné  pour  celte  danse  locale,  qu'il  a  pour  ainsi 
dire  ressuscitée,  puis  fait  exécuter  aux  applaudissements  de  la  foule, 
i  Montpellier,  pendant  de  mémorables  fêtes,  soit  à  Marseille,  où  il 
fut  appelé  à  l'occasion  de  fêtes  de  charité,  a  mis  un  titre  de  plus  à  ceux 
qu'il  possédait  déjà  comme  maître  de  ballets  populaires. 


10  1  I.A   DANSE  DES  TREILLES 

des  cerceaux  enrubannés,  agrémentés  de  fleurs  naturelles  ou 
artificielles,  mais  le  nom  primitif  est  resté. 

Son  caractère  est  essentiellement  bachique. 

Elle  se  décompose  en  douze  figures,  aussi  gracieuses  les 
unes  que  les  autres,  précédées  elles-mêmes  d'une  introduction 
ou  marcbe  préparatoire,  d'un  ravissant  effet,  et  se  termine 
par  un  salut  final  aux  spectateurs. 

L'ensemble  de  son  exécution  doit  durer  de  quinze  à  vingt 
minutes. 

On  la  danse  au  son  du  hautbois  et  du  tambourin. 

Une  vaste  place,  propice  aux  évolutions  au  milieu  de  la 
foule,  est  indispensable  à  ses  mouvements  d'ensemble,  qui  ne 
peuvent  produire  d'effet  agréable  à  l'œil,  qu'à  la  condition  de 
s'effectuer  avec  ordre,  régularité  et  précision,  trois  qualités 
susceptibles  de  lui  assurer  de  la  giâce. 

Deux  groupes  ou  couples,  chefs  de  file  intelligents  et  bons 
danseurs,  un  en  tête,  l'autre  en  queue,  véritables  choryphées 
ou  entraîneurs,  sont  aus.-i  une  garantie  indispensable  de  succès. 

Enfin,  un  bon  chef,  directeur  de  l'ensemble  des  mouve- 
ments, agissant  seul,  en  dehors  du  groupe  des  danseurs,  est 
aussi  nécessaire,  pour  donner  les  signaux  de  départ  et  d'arrêt, 
préciser  les  mesures  d'accord  avec  la  musique,  en  somme 
pour  assurer  les  effets,  et  guider  l'ensemble  chorégraphique 
exposé  quelquefois  aux  bousculades,  et  qui  plaît  d'autant  plus 
que  le  nombre  des  exécutants  est  plus  nombreux. 

C'est  ainsi  que  le  nombre  des  danseurs  pour  les  treilles,  qui 
doit  être  au  moins  de  douze,  peut  être  porté  jusqu'à  cent. 


Introduction  et  marche  préparatoire 

Les  spectateurs  s'étant  rangés  en  un  vaste  cercle  autour 
des  danseurs,  pendant  que  ceux-ci  s'organisent  et  se  placent 
en  rangs  de  deux,  ou  par  files  convenues  et  numérotées 
d'avance,  le  tambourin  exécute  un  roulement  de  batterie. 

Le  hautbois  sonne  un  np/>e/,  deux  ou  plusieurs  fois  répété. 

Aussitôt  les  groupes  se  forment  comme  pour  un  cortège, 
le  danseur  à  gauche  la  danseuse  '•  droite.  Le  cavalier  saisit  la 
danseuse  à  la  taille  ;  celle-ci  appuie  la  main  gauche  sur  l'épaule 


LA    HANSE    DES   TREILLES  105 

de  son  conducteur  et  la  treille  est  élevée  jusqu'à  Inutcur  de  tète, 
tenue  par  la  main  gauche  du  danseur  et  la  main  droite  de  la 
danseuse*. 

Chaque  groupe  se  place  à  un  mètre  environ  de  distance  du 
groupe  voisin,  et  s'aligne  correctement.  La  musique  joue  un 
intervalle  de  quatre  temps,  pen  1  an t  lequel  les  danseurs  enla- 
cés, la  treille  tlottant  au  vent,  marchent  quatre  pas. 

Au  cinquième  temps,  la  colonne  entière  s'ébranle,  les  dan- 
seurs partant  du  pie  l  droit,  les  danseuses  du  pied  gaucfa. 

Chaque  danseuse  doit  relever  la  tête  et  fixer  son  cavalier 
'l'un  regard  aimant,  tandis  q'ie  celui-ci,  sans  perdre  de  vue 
sa  ligne  de  distance,  et  son  alignement  par  files,  simule  avec 
sa  danseuse  une  tendre  causerie. 

Ainsi  disposés,  les  groupes  constituent  de  vrais  types  de 
Watteau,  s>)  us  leur  costume  léger,  enrubanné  et  pastoral 
autant  que  possible. 

La  musique  in  lique  que  tout  le  ballet  doit  exécuter  ainsi 
quarante-trois  pas  de  marche  préparatoire.  Dès  que  ces  qui- 
rante-trois  pas  sont  exécutés,  et  au  moment  où  le  hauthois 
prend  une  allure  plus  vive  et  plus  sautillante,  précurseur  de 
la  véritable  danse  qui  va  commencer,  les  danseurs  changent 
la  treille  de  )/iain,  les  groupes  se  désenlaccnt,  tournent  sur  eux- 
mêmes,  et  forment  une  treille  plus  élevée  et  plus  largo  appelée 
Grande  Treille.  Ils  la  tiennent,  dès  lors,  très  élevée  pour  que  le 
passage  puisse  s'effectuer  librement  au-dessous,  par  les  dan- 
se 1rs,  chacun  à  leur  tour,  et  toujours  par  groupe  de  deux. 

Cette  première  introduction  bien  exécutée  forme,  nous  ne 
saurions  trop  insister,  un  tableau  délicieux  d'ensemble  qui 
dispose  favorablement  l'attention  des  spectateurs. 

Ce  mouvement  de  passage  sous  la  treille  commence  simul- 
tanément et  sans  interru[it:on  dès  que  le  dernier  groupe,  c'est- 
à-dire  le  groupe  de  queue,  a  formé  la  grande  treille.  Les  autres 
groupes  suivent  jusqu'à  ce  que  la  grande  treille  se  soit  refor- 
mée en  petite  treille  pour  l'exécution  d'une  autre  figure. 

1   Nous  avons  vu,  pendant  L'exécuti  m  d'une  />  <i nse  dus  Treilles,  certains 
groupes  porter,  par  un  mouvement  gracieux  cl  naturel  leur  cercle  enru- 
banné derrière  leur  tète,  appuyé  sur  leurs  épaules;  c'était   charmant  et 
rappelait  par  certains  cotés  le  groupe  gracieux  de  «  Pendant  l'oragi 
ilu  peintre  Cot,  originaire,  comnu»  on  sait,  de  Rédarieux. 


106  LA  DANSE  DES  TREILLES 

COUPLE    SOUS    LES   TREILLES  COUPLE   HORS    DES   TREILLES 

PETITE  TREILLE  GRANDE   TREILLE 


J#*1 


Planche  I  Planche  II 

Promenade  sous  la  grande  treille 

Disons  tout  d'abord  que  le  pas  invariable  de  cette  danse  se 
décompose  en  deux  mouvements  :  un  pour  poser  le  pied  à 
terre,  deux  pour  faire  un  léger  sursaut  sur  le  pied  quel  qu'il 
soit,  en  accélérant  l'allure  selon  que  l'indique  la  musique.  Au 
dernier  temps  de  l'introduction,  les  danseurs  tombent  du  pied 
droit,  les  jeunes  filles  du  pied  gauche,  les  groupes  se  meuvent 
en  avant  en  conservant  leurs  distances,  pendant  que  le  haut 
bois  joue  deux  reprises. 

Dès  que  le  guide  de  tête  est  passé  sous  toutes  les  treilles,  les 
bras  se  détachent  ;  chaque  groupe  fait  une  pirouette  en  avant, 
Toujours  en  marquant  le  pas  sauté,  et  garde  la  treille  dans 
lamême  main.  Par  ce  mouvement,  le  guide  de  tête  se  trouve 
placé  derrière  celai  de  queue,  et  ainsi  de  suite,  en  conservant 
autant  que  possible  les  distances  jusqu'à  ce  que  tous  les 
couples  soient  passés  sous  leur  propre  treille. 

Quand  la  colonne  entière  a  défilé  sous  la  treille  que  tien- 
nent élevée  les  guides  de  tête,  ceux-ci  reprennent  leur  marche 
en  avant,  suivis  de  tous  les  danseurs  qui  se  trouvent  de  nou- 
veau replacés  comme  avant  l'exécution  de  cette  figure,  c'est- 
à-dire  en  forme  de  cortège. 

Ce  mouvement  peut  être  renouvelé  par  les  guides  de  queue, 
comme  il  a  été  exécuté  par  ceux  de  tête  ;  l'évolution  se   fait 


LA  DANSE    DES  TREILLES  107 

alors  comme  dans  tous  les  mouvements  oh  la  gauche  devient 
tète  de  ligne. 

FIGURE   DU    PASSAGE    SOUS   LES  TREILLES 


^^V     » 


pi.  m 


Promenade   hors    des    Treilles 

Le  plan  chorégraphique  reste  le  même,  c'est-à-dire  toujours 
une  ligne  droite,  parallèle  à  une  rue,  un  boulevard. 

Nous  avons  laissé  les  danseurs  en  marche  sautée,  la  tète  de 
queue  gauche  en  avant  (en  supposant  que  le  mouvement  ait  été 
exécuté  par  la  gauche,  ad  libitum). 

Dès  que  la  dernière  file  est  passée  sous  la  treill  ,  le  chef 
directeur,  agissant  en  dehors  des  groupes,  laisse  terminer  la 
reprise  du  hautbois  et,  au  signal  qu'il  donne,  tous  les  groupes 


108  LA   DANSE  DES  TREILLES 

reviennent  sons  la  treille,  sans  changer  le  cerceau  de  main,  en 
donnant  le  bras  droit  à  leur  danseuse,  comme  cela  a  dû  se  faire 
dès  qu'ils  en  étaient  sortis.  La  colonne  fait  face  en  arrière,  et 
les  danseurs  se  trouvent  placés  comme  à.  l'introduction.  Seu- 
lement, au  lieu  d'être  enlacés  par  la  taille  et  sur  V épaule,  ils  se 
donnent  le  bras. 

Jusqu'à  la  fin  de  la  reprise  du  hautbois,  ta  colonne  continue 
de  se  porter  en  avant.  A  ce  moment  les  guides  de  tête,  rede- 
venus chefs  de  file,  ouvrent  le  passage  hors  des  treilles,  en  disjoi- 
gnant l  s  bras  sans  changer  la  tre  lie  de  mains,  par  un  demi- 
cercle  en  avant,  et  faisant  face  en  arrières,  afin  que  chaque 
danseur  puisse  passer  sous  la  grande  treille,  ainsi  reformée 
successivement  par  chaque  groupe  de  danseurs,  quand  ils 
sont  passés. 

Lorque  toute  la  colonne  a  ainsi  défilé,  chacun  ayant  grand 
soin  de  ne  pas  perdre  de  vue  le  guide  de  tète;  au  signal  que 
donne  celui-ci,  chaque  danseur  (end  de  nouveau  le  bras  droit  à 
sa  danseuse  et  se  porte  en  avant. 

A  un  nouveau  signal  du  chef,  tous  les  couples  font  face  en. 
arrière,  par  un  demi-tour  en  dedans,  changent  la  treille  de 
main,  et  chaque  cavalier  offre  de  nouveau  te  bras  gauche  à  sa 
danseuse. 

Le  guide  de  queue  redevient  guide  de  tête  et  se  porte  en  avant 
suivi  de  la  colonne  entière,  sans  jamais  interrompre  le  pas  sauté. 
A  la  fin  de  la  reprise  du  hautbois,  il  exécute  à  son  tour  (ad 
libitum  comme  pour  la  première  figure),  le  passage  des  treilles, 
gauche  en  tête,  dans  ce  cas,  opérant  cette  fois  le  mouvement 
de  gauche  à  droite  pour  les  danseurs  et  de  droite  à  gauche  pour 
les  danseuses,  hu  moment  de  sortir  de  la  grande  treille,  et  le 
contraire  pour  y  rentier. 

Quand  tous  les  groupes  ont  effectué  le  passage  hors  des 
treilles,  la  colonne  se  reforme  comme  elle  était  avant,  c'est- 
à-dire  que  le  guide  de  queue  se  retrouve  placé  chef  de  file  en  tête, 
attendant  soit  la  reprise  de  la  musique  pour  recommencer  la 
figure  quand  le  public  la  redemande,  ou  pour  se  porter  en 
a  vant  sur  un  signal  du  chef. 


LA  DANSE  DES  TREILLES 


109 


FIGURE   DU   PASSAGE   HORS    DES    TREILLES 


PI.  IV 


Double  cercle  en  forme  de  huit 

Cette  figure  très  gracieuse,  quand  elle  est  bien  rendue,  est 
celle  qui  présente  le  plus  de  difficultés  pour  son  exécution. 

Les  groupes  doivent,  autant  que  possible,  être  en  nombre 
pair,  soit  trente  groupes,  par  exemple,  pour  que  l'ensemble 
offre  un  caractère  suffisant. 

La  colonne  se  divise  en  deux  groupes  qui,  mentalement,  se 
numérotent,  celui  de  tète  et  celui  de  queue  formés  de  quinze  dan- 
seurs pour  chaque. 

Ils  se  formant,  d'abord,  en  cercle,  de  la  façon  suivante  :  Au 


no 


LA  DANSE  DES   TREILLES 


moment  où  tous  les  danseurs  sont  en  ligne  sous  la  treille,  le 
guide  de  queue  en  tête,  les  couples  nos  13  et  16,  lettres  A  et  B, 
pour  la  simplification  de  la  planche  que  nous  donnons  plus 
loin,  étant  au  centre  de  la  ligne,  opèrent  au  signal  du  chef 
leur  séparation,  et  forment  : 

Le  1er  groupe  de  tête,  de  1  à  15,  et  le  2e  groupe  de  queue,  de 
16  à  30.  " 

Le  guide  de  tête  fait  opérer  à  son  groupe  un  mouvement  de 
face  en  arrière,  les  danseurs  changent  la  treille  de  mains,  la 
prennent  de  la  main  gauche,  et  donnent  le  bras  droit  à  leurs  dan- 
seuses. 

Le  deuxième  groupe  exécute  le  même  mouvement  en  sens 
inverse,  et  la  séparation  est  formée  comme  dans  la  figure 
ci-dessous. 


SEPARATION  DE  LA  COLONNE  EN  DEUX  GROUPES 


té    jt 


w\ 


*5Çt    *&+    -A,     H- 


Pl.  V 


Dès  que  la  séparation  des  deux  groupes  est  opérée,  les  deux 
guides  de  chacun,  sans  trop  élargir  le  plan  chorégraphique,  se 
mettent  en  mouvement  d'une  façon  circulaire  par  une  conver- 
sion respective,  le  groupe  de  tête  par  la  gauche,  celui  de  queue 
par  la  dro  te,  et  marchant  à  la  rencontre  l'un  de  l'autre,  suivis 
des  files,  sans  cesser  toujours  de  sauter  en  cadence  en  mar- 
chant. 

Au  momentoù  les  deux  guides  se  rencontrent  et  se  coudoient, 
les  cercles  doivent  être  à  peu  près  formés. 


LA  DANSE  DES   TREILLES 


Il  1 


FIGURE   POUR   LA    FORMATION    I>KS    CERCLES 


* 


PI.  VI 

A  /«/r  rencontre,  choque  guide  vient  passer  par  le  centre  ju?- 
q  u'à  ce  que  chacun  ait  pris  sa  distance  respective,  derrière  la 
dernière  file  de  chaque  groupe. 

Au  point  de  contact,  qui  s'opère  par  cette  nouvelle  conver- 
sion vers  le  centre,  les  guides  peuvent  se  trouver  quelque 
peu  confondus  ;  mais  il  suffit  d'accélérer  ou  de  ralentir  l'allure 
de  part  et  d'autre,  pour  que  la  rencontre  s'opère  régulière- 
ment au  centre,  point  de  contact,  et  les  deux  cercles  se  trouvent 
formés  comme  dans  la  figure  ci-après. 


i 


DIVISION    DU   GRAND    CERCLE    EN   DEUX   EGAUX 


I 


^■i# 


***** 


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ç 


i 


* 


PI.  VII 


i 


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\J 


112  LA  DANSE  DES  TREILLES 

Au  moment  où  les  deux  guides  opèrent  leur  rencontre  au 
point  de  contact,  celui  du  groupe  de  têle  abandonne  les  files 
qui  suivaient,  entre  dans  le  cercle  du  groupe  de  queue.  Celui-ci 
(chef  du  groupe  de  queue)  opère  le  même  mouvement  dans  la 
treille  formant  la  dernière  file  du  groupe  de  tête,  et  ainsi  de  suite 
pour  tous  les  groupes,  jusqu'à  ce  que  la  figure  en  forme  de  8 
soit  formée  comme  dans  la  figure  ci-dessous  : 

FORMATION    DU    CHIFFRE   8 

k        j?  4       /*■ 


PI.  VIII 

Cette  figure,  très  gracieuse,  et  contre  laquelle  on  ne  saurait 
se  rebuter  à  cause  des  difficultés  qu'elle  présente,  plus  diffi- 
cile du  reste  à  expliquer  qu'à  exécuter,  étant  formée,  chaque 
groupe  doit  passer  au  moins  une  fois  sous  la  treille  du  même  pas 
toujours  sautillant  et  cadencé. 

Quand  l'évolution  de  tous  les  groupes  est  complète  et  que 
les  guides  de  tète  et  de  queue  sont  revenus  au  point  de  contact, 
ils  font  une  pirouette  en  avant  et  laissent  passer  sous  leur  treille 
le  groupe  qu'ils  rencontrent.  Chaque  file,  une  fois  passée,  fait 
les  mêmes  pirouettes  et  mouvement. 

Supposons,  comme  normalement  cela  devrait  être,  que 
celte  rencontre  au  point  de  contact  ait  été  faite  par  les  guides  de 
tête  et  de  queue,  après  un  tour  complet  de  chacun  dans  le  cercle 
de  huit,  en  arrivant  devant  le  guide  de  queue,  celui  de  tête  se 
détache  du  bras  de  sa  d  nseuse  sans  lâcher  la  treille,  s' écarte  suffi- 
samment pour  laisser  passer  le  groupe  guide  de  queue,  en  élevant 
suffisamment  la  treille  pour  faciliter  ce  passage,  fait  une  nou- 


LA  DANSE  DES  TREILLES 


113 


velle  pirouette  en  avant,  et,  quand  il  l'a  terminée  et  que  le 
couple  qu'il  avait  rencontré  est  passé  sous  la  treille,  chaque  couple 
guide  se  reprend  par  le  bras  et  continue  de  parcourir  le  plan  en 
forme  de  huit,  suivi  de  tous  les  couples  jusqu'à  ce  que  tous  y 
soient  passés. 

Les  deux  guides  arrivent  ainsi  à  se  rencontrer  encore  au 
point  de  contact,  et  la  figure  est  terminée. 

Les  Dais 

Pour  l'exécution  de  cette  figure,  les  deux  groupes  guide  de 
tête  et  guide  de  queue  se  trouvant  à  côté  changent  le  plan  et 
marchent  côte  à  côte  devant  eux,  suivis  de  toutes  les  files 
comme  dans  la  figure  suivante  : 

REPRISE   DE    LA    COLONNE    APRES    DEFORMATION    DU   HUIT 

Dès  que  les  groupes  bien  alignés  et  accouplés  par  deux  ont 
défilé  jusqu'au  moment  où  les  chefs  de  tête  et  de  queue  arri- 
vent à  une  même  hauteur  de  ligne,  ils  se  rompent  pour  se  placer 
en  forme  de  dais,  à  l'aide  des  treilles,  comme  la  figure  de  dessous 
l'indique,  de  quatre  en  quatre. 

FORMATION    DU   DAIS 


PI.   IX 


Pour  opérer  ce  mouvement  au  signal  que  donne  le  chef,  à  la 
fin  de  la  reprise  du  hautbois,  les  deux  guides  se  mettent  ensemble 
par  couples;  soit  : 

S 


114  LA  DANSE  DES  TREILLES 

le  couple  n°    1   avec  le  couple  n°  30 

—  15  —  16 

—  8  —  23 

—  2  —  3 
_  4  —  6 

—  6  —  7 

—  9  —  10 

—  11  —  12 

—  13  —  14 

—  17  —  18 

—  19  —  20 

—  21  —  22 

—  24  —  25 

—  26  —  27 
le  couple  n°    28   avec  le  couple  n°   29 

En  supposant  que  les  danseurs  sont  au  nombre  de  trente, 
et  ainsi  de  suite,  s'ils  sont  plus  nombreux. 

Figure  du  Serpent 

Puis  les  danseurs  se  remettent  en  colonne  double,  en  deux 
groupes,  comme  à  l'avant-dernière  figure  ci-dessus  ;  seulement 
ici,  le  groupe  de  queue,  ou  de  gauche,  doit  avoir  à  sa  tête  le  guide 
de  queue  et  en  queue  le  guide  du  centre;  le  groupe  de  tête,  ou  de 
droite,  doit  avoir  à  sa  tête  le  guide  d  i  centre,  et  en  queue  te  guide 
de  tête. 

FORMATION   DU    SERPENT 

2?*  jM  *<**,       k 


&    ^l   4         ^^ 


pi.  x 


LA   DANSE  DES  TREILLES 


115 


Les  danseurs  ainsi  placés,  le  chef  de  guide  ou  de  file,  de 
chaque  groupe,  fait  une  conversion  par  file  à  gauche,  suivi  des 
autres  groupes,  comme  dans  la  figure  suivante  qui  indique  la 
position  chorégraphique  au  moment  où  les  groupes  se  rencon- 
trent, pour  se  rejoindre  en  une  première  ondulation. 

Le  guide  de  queue,  ayant  continué  de  se  mouvoir  toujours  droit 
devant  lui,  suivi  de  toutes  les  files  de  danseurs,  il  arrive  un  moment 
où  la  colonne  se  trouve  placée  en  lige  droite  compté  e,  composée 
comme  dans  la  figure  ci-dessous: 

REFORMATION   DE   LA   COLONNE 


a,  % 


%  %  %  % 


PL  XI 


A  ce  moment,  le  chef  directeur  donne  un  signal:  chaque 
ieune  fille  change  la  treille  de  mains  et  vient  se  placer  derrière 
le  danseur  qui  la  précède,  très  rapprochée  de  celui-ci,  de  façon  à 
ce  que  les  couples  continuant  la  cadence  en  dehors  des  treilles  ne 
forment  plus  quune  seule  treille  ou  ligne  d'ensemble,  comme 
dans  la  figure  suivante  : 

FORMATION   DE   LA   TREILLE   EN   LIGNE 


PI.  XII 


La  danseuse,  guide  de  queue,  commence  alors  le  mouvement 
d'ondulation  du  serpent,  en  passant  sous  sa  propre  titille,  suivie 


116 


LA  DANSE  DES  TREILLES 


*» 


de  son  cavalier  ;  elle  pénètre  successivement  sous  chaque  treille, 
et  tous  les  couples  à  la  suite  exécutent  le  même  mouvement  qui 
offre  un  coup  d'oeil  des  plus  attrayants,  soit  : 


ONDULATIONS    DU    SERPENT 


-v&H< 


PL  XIII 

Aussitôt  que  la  jeune  fille  qui  a  commencé  les  ondulations 
arrive  après  le  guide  de  tête,  elle  se  place  à  la  suite,  pour  laisser 
passer  tous  les  autres  couples,  jusqu'à  ce  qu'après  le  passage 
complet,  elle  soit  redevenue  avec  son  cavalier,  tête  de  colonne. 
Quand  tous  les  danseurs  sont  passés  en  sautillant  sous  la 
treille  du  guide  devenu  tête  de  colonne,  le  cavalier  donne  le  bras 
à  sa  danseuse  et  revient  sous  la  treille.  Puis,  le  couple  va  droit 
devant  lui,  jusque  ce  que  la  colonne  soit  reformée  en  ligne.  Sur 
un  signal  du  chef,  ce  mouvement  se  répète  en  sens  inverse, 
et  c'est  le  guide  de  tête  qui  reprend  la  tête,  par  un  mouvement 
opéré  par  la  droite. 


Salut  final 

Quand  la  figure  du  serpent  est  terminée,  la  colonne  se  trouve 
reformée  en  ligne  droite  absolue  dirigée  par  le  guide  de  tête. 
Celui-ci  se  porte  alors  en  avant,  de  façon  à  passer  à  un  point  que 
lui  indique  le  chef,  soit  une  estrade,  ou  un  point  quelconque 
au  milieu  de  la  foule,  d'où  sont  partis  les  applaudissements  par 
exemple.  Tous  les  danseio*s  le  suivent,  et  pour  former  autant  que 
possible  le  fer  à  cheval,  il  va  rejoindre,  à  une  distance  évaluée 
selon  le  nombre  d'exécutants,  le  guide  de  queue. 

Quand  ces  deux  guides  sont  arrivés  à  se  trouver  sur  une 
même  hauteur  de  ligne,  le  plan  chorégraphique  présente  à  peu 
près  la  forme  d'un  hémicycle. 


LA  DANSE  DES  TREILLES 


117 


Le  hautbois  joue  ses  dernières  mesures...  Chaque  danseur 
fait  sur  lui-même  trois  pirouettes,  en  les  espaçant  selon  la 
cadence  de  la  musique,  et  sans  jamais  cesser  de  sautiller,  et 
termine  l'exécution  de  ce  charmant  et  délicieux  divertisse- 
ment, en  se  penchant,  les  treilles  levées,  comme  pour  un  salut, 
vers  le  point  à  honorer,  en  se  tenant  sur  un  pied,  l'autre  levé  et 
allongé  ! 

Ce  salut  termine  la  Danse  des  Treilles.  Les  danseurs  se  repla- 
cent en  bon  ordre  de  marche  en  un  groupe  resserré,  pour  aller 
recommencer  un  peu  plus  loin  leurs  évolutions,  et  la  danse 
du  chevalet  commence. 

Fernand  Troubat. 


MUSIQUE  DE  LA  DANSE  DES  TREILLES 

Notée  par  M   Coquelin,  ex-chef  de  musique  au  122e  régiment  de  ligne 


Tambourin 


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IIS  MUSIQUE   DE    LA   DANSE   DES   TREILLES 


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1  Cet  air  de  danse  n'a  pas  d"  nom  connu   d'auteur.    Il   nous  a  été 
communique  par  l'aimable  bibliothécaire  M.  Gaudin. 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


(Suite) 


185 

EN  PEIROLS 

(=  B.  Gr.  366,2) 

I.  (p.  177)  Atressi  col  cirues  ' 

[fai 
Can  vol  morir  chant 
Car  sai.  qe  plus  gent  mor- 

[rai 
E  ab  meignz  dafan 
5  Pro    magra    mortz    tengut 

[ellatz 

E  maingz  trebails  nai  suf- 

[fertatz 

E  pel  dan  caoras  men  ve 

Conosc  cane  mais  nô  for- 

[fei  re. 

II.  Doncs  2  cal  cosseil  penrai 
Saissi  muer  amanz 

Ni  ioi  non  atent  de  lai 
On  mei  sospir  van 
5  Jes  non  sen  part  ma  volun- 

[tatz 
Sitôt  men  siu  3  desesperatz 
Pensius  e  cossiros  me  ten 
La  bella  de  cui  me  soue. 

III.  Tant  bella  domna  nô  sai 
Deus  per  qe  val  tant 
Cant  ieu  ia  nô  lhauzarai 
Dire  mon  talan 

5  Gent  macueil  &  ha  bel  so- 

[latz 


E  del  plus  sui  mal  cosseilatz 
Qe  sieu  la  pregaria  4  de  re 
Adonc    crei    qesgardes   de 

[me. 
IV.   Pregar  lai  on  no  seschai 
Tornaz  enoig  gran 
Ses  parlar  la  preiarai 
Con  al  bel  semblant 
5  &  cel  mentenda  sil  platz 
Caissi  doblaral  dos  el  gratz 
Qant  vs  cors  ab  autre  saue 
E  cant  om  ses  qerre  fai  be. 
V.  Franchez  e  humiltatz  trai 
Amors  enant 
Caltz  paratges  la  dechai 
Quel  rie  son  truan 
5  Qel  miels  de  totz  vei  sor- 

[deiatz 
Per  qel  segles  es  sordeiatz 
E  dona  que  bon  pretz  man- 

[ten 
Nom  am  per  ricor  sais  noi 

[ve. 
VI.  Chanzos  a  la  bella  vai 
E  non  qweu  lheniant  5 
Beil  podetz  lo  meu  esmai 
Contar  ses  mon  dan 
5  Digatz  lim  qa  leis  ses  do- 

[natz 
Mos  coratges  e  autreiatz 
Sieus  soi  e  sieus  serai  iasse 
Morir  mai  per  ma  bona  fe. 


1  /.  :  cignes  —  5  /.  :  D.  e  —  3  /.  :  sui  —  4  pregaua —  !  /.  :  q.  1  re  mant. 


LE  CHANSONNIER  DE  BEHNAUT  AMOHOS  121 


Vil.    Domna  del  mon  qo  mais  me 

[platz 
Joi  si  ab  vos  on  qe  siatz 
Qeu  non  vos  auz  preiar  de  re 
Mas  seuals  pensar  o  puesc 

[be. 

186 

EN  PEIROLS 
(=B.  Gr.  306,11) 

I.    Deusa  la  razon  qeu  sueil 
Mer  a  chantar  per  usatge 
Qe  no  mora  ni  macueil 
Ma  don  el  sien  senjoratge 
5  Bem  trairon  sei  bel  oill 
Com  a  fais  messatge 
Can  me  meiron  en  coratge 
Samor  don  mi  dueil. 

II.  Sim  fai  tort  nim  mostror- 

[goeil 
A  mi  es  grieus  e  saluatge 
Per  '  si  là  e  la  veil 
Qieu  non   sai  penre  autre 
[gatge 
5  Qan  viest  e  qan  mi  despueil 
Consir  mon  dâpnatge 
E  conosc  qe  gran  follatge 
Faz  car  no  men  toil. 

III.  Tolre  nom  puesc  eu  ges  me 
Per  mal  qelam  fassa  traire 
Anz  mi  platz  sabetz  per  qe 
Conoissera  seu  lam  gaire 

5  Qiestiers    non   er    hom   ia 

[ben 
Vertadiers  amaire 
Tro  qe  non  sen  pot  estraire 


Per  neguna  ren. 
IV.   [p.  17$)  Tant  mi  plaz  per 

[bona  fe 
Cant  aug  de  mi   donz  rc- 
[ traire 
Lonor  el  pretz  qil  mante 
Cab  leis  son  so  mes  vejaire 
5  E  cant  eossir  mesdeue 
De  nul  autrafaire 
Samors  mo  ven  tôt  desfaire 
Neus  2  lo  pro  qem  ten. 
V.  Tant  nai  estât  consiros 
E  sufert  tan  grieu  martire 
E  grieu  trebail  angoissos 
Qe  del  esperanzam  vire 
5  E  ia   sauals  sieu  en  fos 

[ •]' 

Sai  ben  ca  prop  lo  dezire 

Forai  iois  plus  bos. 

187* 

EN  PEIROLS 
(=B.  Gr.  366,  5) 

1 .  Ben  *  no  val  hom    ioues  qe 
[nos  periura 
Per  saluar  plus  cant  er  tuel:i 
[sagramen 
E  sieu  per  mal  ni  per  paor 
[deuein 
Couenc  a  dieu  qeu  non  chan- 
ges aora 
5  Pos    nostre  temps  si  meil- 

[lura 
Trobarai  qefo  teicmespres 
[E  perdon  me  deu  fai7  mes- 

pres]. 


1  /.  :  P.  o  —  2  l.'i  Veus —  3  /.  :  Al  dereir  jauzire. 
*  Voyez  l'édition  donnée  par  M.  Chabaneau  dans  laRev.  d.l.  r.  IV. s.  t. 
IJ,p.  570  s.,—  *CA.:Ren?—  s  Gh.  I  .:eJ  tucl(  —  toi)?  —  «  Ch.  I.  .-es? 

-  t  Ch.  .-s"ai 


122  LE  CHANSONNIER  DE 

II.  En  respcig  son  dauer  bona 

;  Ventura 

Car  ades  ai  maltrag  e  mon 

[iouen 

Mais  anc  nom  plac  soiornz 

[entrauol  gen 

Per  cai  maint  iorn  e  mainta 

[noit  escura 

5  Suffert  e  chautz  e  freidura 

Që  loingnes  de  vilas  paies 

E  per  segre  com  pros  e  cor- 

[tes. 
III.  Jamais  nuls  hom  non  faria 

|  rancura 

De  mercadiers   so   sai  cer- 

[tanamen 

Se    vezion   con    gazaignon 

[largen 

Ni   cos   meton  e  '  mar   ad 

[auentura 

5  De  tôt  me  sui  donatz  cura 

Can  an  lor  temps  e  non  lan 

[ges 

Tôt  mo  tieng   a    soiorn  de 

[près. 

IV  Anc  la  bella  ben  faita  per 

[centura 

Non    desirei  mais  cara  per 

[un  cent 

Non  dezir  mais  e  garbir  2  e 

[ponent 

E  7  autres  venz.  con  i  si  fan 

[per  mesura 

5  E  net  port  a  gran  largura 

Com     conosca     can     son  3 

[temps  es 

En   blachas  non  sab  6  ies 

[qe  ses. 


BERNART  AMOROS 

V    Sanc    baordei  ni  anei  dam- 

[bladura 

Per  caual  pren  nostra7  nau 

[can  cor  gent 

E  per  escut  8   la  grant  vêla 

[al  vent 

E  per  lanza  lantenna  fort  e 

[dura 
5  Per  esperon  larsiura9 
Els  timos  prenc  per  fres 
E  per  sella  e  per  arnes. 

188 

EN  PEIROLS 
(=   B.    Gr.  366,  8) 

I.  Quora  camors  veilla 
Eu  chau 

Cautra  flor  ni  fueilla 
Nô  irai  gardan 
5  Ben  es  dreitz  qen  doilla 
Amant 

Sol  qen  grat  mo  cueilla10 
Sil  cui  ieu  mi  coman 
Perdut  ai 
10  E  cobrarai 

Jes  nô  recres  "  per  tan 
Caissis  val  segles  camian. 

II.  (p. 179)  Dieusmaiut  em  val- 

[lia 
Qantan 

Ai  damor  ses  failla 
Mas  non  ai  ogan 
5  Qeran  mou  batailla 
Tan  gran 

Al  cor  e  tradailla  12 
Dormen  e  veillan 


i  Ch.  :en  -  2  C/i..-garbin  —  *  Ch. 


Et  —  '  Ch.  :  can 


s  Ch.I.  .-bon? 

—  5  Ch.  :  sap  —  7  c.  en  :  uostra  —  8    Ch  :  estut,  l.  :  escut  —  n    Ch 
l.  :  amura?.  —  10|c  en  :  tueilla  —  "  /.  :  recrei  —  n  L  :  trabailla 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNANT  AMOROS 


123 


Per  co  fai 
10  Qal  miels  qeu  sai 
La  serf  &  blan 
Per  zo  vei  qe  mi  ai  dan. 

III.  Mos  cors  sail  e  trembla 
Soen 

Mamia  lo  membla 
Si  qeu  nô  o  sen 
Quil  marna  son  sembla 
Comen 

Qel  siens  digz  resembla 
Mon  pensamen 
Donc  dirai 
10  Qe  molt  mi  plai 
Suffrir  aquel  turmen 
Don  eu  tan  rie  ioi  aten. 

IV.  Nuls  hom  ben  nom  ama 
Ni  g-^n 

Qi  damor  se  clama 

Si  tôt  mal  li  en  pren 
5  On  plus  menliama 

Greumen 

E  mart  e  maflama 

Nai  meillor  talen 

Aisim  trai 
10  Mos  volers  lai 

El  fol  contenemë 

On    mes   maintas   ves  par- 
V.   Ben  bas  fora  meza       [uen. 

Valors 

Deportz  e  gaieza 

Si  non  fos  amors 
5  Qe  mante  proeza 

Totz  iorns 

E  fai  qe  corteza 

Car  prê  los  meillors 

Non  seschai 
10  Dôme  sauai 

Jall  venga  tant  donors 

Qe  damor  senta  dolors. 
VI.  Eraus  qier  amia 


Socors 

Qenanz  i  morria 
Qen  qezes  aillors 
5  Asatz  trobaria 
Dautors 

Vos  es  senz  fadia 
Una  de  las  genzors 
Mos  cors  gai 
10  En  gran  esmai 

Entre  sospirs  e  plors 
Ma  tôt  mes  ioi  e  douzors. 
VII.  Peirols  fai 
Fin  e  verai 
Lo  sonet  per  amors 
On  sos  cors  estai  totz  iornz. 

189 

EN  PEIROLS 
(  =  B.  Gr.  366,1) 

I.   Ab   gran   ioi  mou   maintas 

[vetz  e  comenza 

Zo  don  hom  pois  a  dolor  e 

[cossire 

Per  mi  o  die  cai  folla  conoi- 

[senza 

Dun  feing  semblan.  Abqem 

[trainet  gen 

5  Cil   on  anc  plus  mentendei 

[finamen 

Cadonc  fui  ries  qesser  cuiei 

[amatz 

Era  ses  fort  totz  mos  afars 

[cambiatz. 

II.  Amors  ab  pauc  de vera  man- 

[tenenza 

Non  o   pois  mais   celar  ni 

[escondire 

Li  fais    aman   qis    fan  '  en 

[ paruenza 


i  /.  :  f.  fin 


124  LE  CHANSONNIER  DE 

La  dechazon  per  lor  galia- 

[men 
5  E  las  donas  si  nan  colp  eis- 

[samen 

Capeoas  er  neguns  drutz  so 

[sapiatz 

Qe  non  engan  o  no  si  enga- 

[natz. 

III.  {p.  180)  Ma  doHam  fai  morir 

[per  tal  faillenza 
Qeil  sta  '  mal  seu  lo  auzaua 

(dire 

Cil  al  pechat  et  eu  la  pene- 

[denza 

E  ges  noil  trop  ochaizon  de 

[nien 
5  Pezam  car  ai  tam  bon  razo- 

[namen 

Trop  es  mos  dreitz  conogutz 

[e  prouatz 

Mais  2  fos  mensonja  la  ver- 

[tatz. 

IV.  Ai  tan  grieu  mer  saissi  pert 

[mentendenza 

Del  bon  esper  on  sueil  mon 

[cor  assire 

Pero    trop    nai    orgoilloza 

[temenza 

Cab  mal  talen.  lencolp  e  la 

[repren 

5  E  si  sai  damor.  ieu3  lo  meil- 

[Ior  sen 
Com  ia  de  ren  no  sen  fezetz 

[iratz 

Mais  qi  saubes  so   mal  suf- 

[frir  em  patz. 

V.   Contra  mi  donz  non  puesc 

[auer  temensa 

Qant  eu  lesgart  e  vas  mi  la 

[vei  rire 


BERNART  AMOROS 

Tota  mosta  lire,  la  maluo- 

[lenza 

La  so  amors  qim  destrein. 

[douzamen 

5  E  sanc  mi  fez  mal.  ni  aira- 

[men 

Qan  pais  mos  oils  glotos  sa 

[granz  beutatz 

Cuiatz  la  donc  li  voilla  mal 

[no  fatz. 

VI.  Solatges ;  es  qi  son  afar  bis- 

[tenza 

Nom  tenrai  mais  daizo  qieu 

[plus  dezire 

Mais  voil  qa   tort  ma  douz 

[amigam  venza 

Qe   per   mon   dreg  plor  ni 

[plagna  souen 

5  Merceil  qerrai  des  lo   sieu 

[faillimen 

Tôt  enaissi  con  er  sa  volun- 

[tatz 

Cab  lieis  nom  pot  nulsplaitz 

[essermaluatz. 

190 

EN  PEIROLS 

(  =  B.  Gr.  366/2'.») 

I .  Cant  amors  trobet  partit 
Mon  cor  de  son  pensamen 
Duna  renson5  massalit 

E  podez  auzir  comen 
5  Amies  peirol  malamen 
Vos  anas  de  mi  lanian 
E  pos  e  ml  ni  en  chan 
Non  er  vostre  entencios 
Digatz  pois  qe  valres  voz. 

II.  Amors  tan  uos  ai  seniit 


■  /.  :  estai  —  J  l.  :  M.  volgra  —  3  /.:  s.  ieu  damor  —  *  l.  :  Folatges. 
B  /.  :  tenson 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNART  AMOROS 


\>: 


E  nulspechat1  nous  en  prê 
E  vos  sabes  cani  2  petit 
Nai  aut  de  iauzimen 
5  Nous  oohaizon  de  uien 
Sol  qem  fassatz  derenau 
Bona  patz  als  nous  demanz 
Qe  nuls  autres  guizardos 
Nom  poiri  esser  tam  bos. 

III.  Peirols  mètres  en  oblit 
La  bona  dona  valen 

Qe  tan  gen  vos  acuillit 
E  tan  amorozamen 
5  Tôt  \>er  mon  comâdamr 
Truep  auez  leuger  talan 
E  non  era  gez  semblam 
Tan  gais  e  tan  amoros 
Eratz  en  vostras  chanzos. 

IV.  (p.  /<S7)  Amors  anc  mais  no 

[faillit 
Mas  ar  fail  forsadamen 
E  prec  dieu  qen  r>  guit 
E  qem  trameta  breumen 
5  Entrels  reis  acordamen 
Qel  secors  irai4  trop  tarzan 
&  auria  mestier  gran 
Qel  marqes  valenz  e  bos 
Nagues    mais    de   compai- 
[gnos. 

V.  Peirols  turc  ni  arabit 
Ja  per  vostres  vazimen5 
Non  laissaram  tor  dauit 
Bon  conseil  vos  don  e  gen 

5  Amas  e  chantas  souen 
Ires  vos  eil6  rei  noi  van 
Veias  las  guerras  qen  fan 
Et  esgardatz  dels  baros 
Cossi  trobon  ochaizos. 

VI.  Amors  si  li  rei  noi  van 
Del  dalfin  vos  die  aitan 


Qe  per  guerra  ni  per  vos 
NO  remanra  tant  es  pros. 
\  11.    Peirol  maint  amie  partran 
De  lue  amigas  ploran 
Qe  si  saladis  no  foz 
Sai  remazeron  ioios. 


191 

EN  PEIROLS 
(  =  B.  Gr.  404,4  ) 

I .    Lo  clar  temps  vei  brunezir 
Els  auzeletz  esperdutz 
Qel  fregz  ten  destregz  e  mutz 
E  non  an  soign  desiauzir 

5  Et  eu  qi  de  cor  suspir 
Per  la  genzer  res7  qanc  fos 
Tan  ioios 
Sui  qades  mes  vis 
Qe  foill  e  flors  reuerdis. 
II,    En  amor  son  mei  dezir 
Qa  lei  seruir  sui  rendutz 
E  pois  tan  rie  ioi  madulz 
A  mi  donz  o  dei  grazir 

5  Qel  miels  del  mon  sai  chau- 

[zir 
Si  feira  chascun  de  vos 
Volontos 
Si  vos  acuillis 
La  bella  cui  sui  amis. 
III.  Amis  8  sui  e  serai 
Aitan  qan  la  vida  dur 
E  nous  cudes  qeu  peiur 
Fmantz  me  meillurarai 

5  Qel  pais  on  ella  estai 
Mir  e  soplei  e  acli 
Ab  cor  fi 
E  vir  lai  souen 


1  /.  :  pietat  —  2  /.  :  cum  —  3  /.  :  qem  sia  —  '  l.  :  vai  —  $  l.  :  vostr  cnua- 
zimen—  8 1.  :  sil.  —  M  :  genzor  re  —  *  l.  :  Sos  amis 


126  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 

Los  oills  qe  als  non  enten. 
IV.    Haidieusqal  dostra  cham1 

[fai 
A  leis  vezer  ters 2  e  mur 
Mas  en  aizo  masegur 
En  un  messatgier  qeu  nai 
5  Mo  cor  qi  souen  lai  vai 
E  conorta  menaissi 
Qendreit  mi 
Nol  voill  ni  enten 
Amis  ni  precs  no  cossen. 
V.  E  seus  en  die  mon  conort 
No  mo  tengas  a  orgoill 
Qar  aitan  lam  e  la  voill 
Qe  sera  confes  de  mort 
5  Nô  qerria  dieu  tan  fort 
Qe  laissus  em  paradis 
Macuillis 
0  qem  dez  léger 
Duna  noig  ab  leis  iazer. 
VI.  (p.  182)  Tant  lai  assis  mon 

[confort 


Qe  pe?-  nuill  autra  nô  dueil 
Ni  autramor  nom  acoill 
Dont  ial  fassa  dreg  ni  tort 
5   Qar    la  bona  fez  qeil  port 
A  si  mon  coratge  pris 
A  deuis 

Qe  qant  siu  iazer 
La  cuig  e  mos  bratz  tener. 
VII.  Si  con  ieu  die  ver 

Mi  don  dieus  de  leis  poder. 


[192  (ca  132)] 

PEIROL  DALUERNIA 

(c  f.  86  r°) 
(=  B.  Gr.  366,  3) 

I.  Ben  dei  chantar  pois  amor 
mo  esegna 

Em  donaengein  qeu J  sapcba 

[bos  motz  faire 

Qar   sil  nô  fos  ia  nô  fora 

[chantaire 

Ni  conogutper  tantasbonas 

[gen 

5  Mas  era  crei  &  sai  certa- 

[namen  ' 

Qar  tôt  lo  ben  qe  ma  fait5 

[me  uol  uendre. 

II.  Seunô  soi  druzhom  no  me  6 
[pot  défendre 

Qa  tôt  lo  mens  no  sia  fis 

[amaire 

Francs  &  suffrenz  humils  e 

[merceiaire 

Ses  trop    parlar  e  de  bon 

[celamen 

5    En  aital  guisa  &  per  aital 

[conuen 

Mautrei  a  leis  qi  6  retener 

[nom  degua. 

III.  A  fors  damor  alen  qe  iois 

[me  uegna8 

E  pot  esser  mas  me  nô  es 

[ueiaire 

Tant  es  bella  &  pros  e  de  9 

[rie  afaire 


1 1.  :  destrecham  —  il.  :  tors. 

L.S.:  L'ordre  des  strophes  dans  L.  S.  est:  I:  1,  II:  5,  111:6,  IV  :  2, 
V  :  3,  VI  :  4  —  3  d.  gien  con  —  *  sai  e  conosc  ueramen  —  6  qanc  mi  fes  — 
«  d.  res  no  mo  —  '  M.  celei  qe  —  8  Esfors  de  me  non  a  ren  qun  reuei- 
gna  —  »  Qel  es  tan  bels  e  de  tan 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOHOS 


127 


Coinda  o  plasenç  en  fait  >X.' 

[en  '  paruen 

5   Per   qeu    sai  ben  samor  2 

[raison  enten 

Qil  non  degues  tan  bas  uas 

[me  descendre. 

IV.  Qe  farai  donc  recreirai  me 

[datendre 

Non  eu  mais  am   tôt   U'ps 

[perde  ;  mal  traire 

Qeu  non  uoil  reis  esser  Di 

[emperaire 

Per  qe  de  leis  ostes  5  mou 

pensamen 

5  Don   soi   ben   ries   sol  qeu 

[lam6  finamen 

Grans  honor  mes  qe  samor 

[me  destregna. 

V.  Relia  dôna  qalqe  fais  entre- 

[segna 

Mi  fesez  7    don   mallegre  e 

[mesclaire 

Pois  conoisez  qeu  8  no  men 

[puesc  estraire 

Ab  bel  semblan  paisetz  9  lo 

[mal  qeu  sen 

5  Qaissim  podez!0trainar  lonia- 

[men 

E  de  mô  cor  qauez  tôt"  un 

[pauc  rendre. 

VI.  Bona  domna  ben  lo1*  deuez 

[entendre 

Qeu  uos  am  tant  nous  aus 

[preiar  de  gaire 

Mas  uos  es  tan  franca  e  de 

[bon  aire 


(Jades13  naurez  merce  mon 

[escien 

5  Lo  meu  fin  cor  gardaz14  el 

[meu  talen 

Ja    de  uostra   richesa  nous 

[souegna. 

[193  (ca  133.] 

PE1ROL  DALUERNIA 

(c  f.  86  v°) 
(=  B.  Gr.  366,  19) 

I .  Manta  genz  me15  mal  rasona 
Qar  eu  nô  chant  plus  souen 
E  qi  daiso  mochaisona 

Nô  sab  jes  qan  loniamen 
5  Ma  tengut  en  greu  pensamen 
Cil 1C  qe  mon  cor  empresona. 
Per  qeu  perd  esbaldimen  17 
Tal  desconort  me18  dona. 

II.  Pero  sim19fo  dolça  &  bona 
Ma  domna  al  comensamen 
Mas  er  nom  acoil  nim  sona 
Mas  aisi  eu.20  lautre  gen 

5  Qar  conois  qeu  lam21  fina- 

[men 
A 22  cum  mal  me  ghider- 
[dona  23 
Amors  fara  fallimen 
Saqest  tort  li  perdona. 
III.  De  trastotioimi24  deslogna 
Ma  domna  e  nô  les  honors 
Qab   qalqe  plaçen    menço- 

[gna 
Me  pogra  far  rie  25  socors 


1  Pros  e  corteza  e  fai  tan  gen  —  *s8ma  —  a  giqirai  mi  —  "  t.  em  per- 
don  —  s  parta —  6  No  son  pro  ries  sieu  ben  am  —  7  Mi  l'ait/,  si  uals  — 
8  qe  —  9  paissetz  —  '«•  poiretz  —  n  tout  —  l2  o  —  12Perqe  —  i*  gardatz. 

L.  S.:  ie  mi  — i6Cel  —  i'  Non  a  point  de  chauzimen  —  i8  Grant  d. 
mi  —  1;'  Moût  mi  —  2o  Assi  con  —  21  Qieu  c.  be  —  "Ai  —  2;)  guizardona 
—  24  tola  ioiam  —  Jit;en 


128 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


7)  Er  sai  qe  non  es  mas  folors 
A  qesta  atendensa   longa1 
Don  ai  fait  tantas  clamors 
Qanta  mes2  e  uergogna. 
IV.  E  partirai  men  eu  3  nô  ia 
Qe  sos  preç  &  sa  ualors 
Mo  deueda  emo  calogna 
E    quant    en  *    cuid   amar 
[allors 
5     Per  tôt  lo  cormintra  lamors 
Si   cum  fai  laigua  en  les- 
[pogna 
Toz  têps  me  plairai  dolors 
Cum  qem  destregna  em  po- 

[gna. 
V.  Ades  uoil  qamors  massailla 
Noit    &  iorn5  maitin  e  ser 
E  ses  la  sua6  battailla 
Non  uoil  mais7  repausauer 
5     E  8  seu  nô  ai  tôt  mon  uoler 
Tais  es  cil  qaisim  trabailla 
Qel  mon  non  a  mais  9  pla- 
cer 
Que    lo    meu     mal    traitz 
[uailla. 
VI.  Lansengani  diuinailla10 
Denoios  nom  cal  temer 
Sol  pensars    de    leis   nom 
[failla 
Res  no  me  pot  dan  tener 
5    El  consirs  ont  eu  maleser  " 
Pais   me  miels  dautra1'  ui- 
[tailla 
Per  mal  qem  fassa  doler13 
Mos  cors  no  sanuaiila11. 


[194  (ca  135)] 

PEIROL  DALUERNIA 
(=  B.  Gr.  366,  13) 

I.  Dun   bon  uers    uau  pensan 

[com  lo18  feçes 

Qamors  madui16  lochaison 

[el  talan17 

Em  fai  estar  del  tôt  al  seu 

[coman 

Si  que  mon  cor  na  retengut 

[en  gage 18 

5    Trop19  demôstra  uas  me20 

[son  poderage  *' 

Qera   mauci   lo   trebail  on 

[ma  mes 

Per  tal  dôna  qen  dreit  meno 

[satagn. 2t 

II.  Aqestam  plaiz  mais  de  ne- 

[guna  res 
Alei  mautrei  liges  desere- 

[nan 

E  sil  nom  uol  mi  qen  qal 

[quatertan 

Serai  aclis  uas  lo  seu  segno- 

[rage 

5     Cum  seu  lagues  fait  certan 

[homenage 

E  serja23  granç  torç  qi  men 

[tolgues 

Lo  désirer  pos  tôt  lais  men 

[sofragn. 24 

III.  Ben25  uoil  samor  mais  qere 

[non  laus  26 


•  entendensa  lonja  -  2  nai-  3  Partir  men  ai  -  *  ieu  -  5  Em  guerrei 
—e  Contra  la  soa-  '  qier  ia-  »  Car  - s  n.  es  nuls  -  i»  Lausenja  m  deui- 
nailla  —  "  c.  maigre  paisme  —  i2  de  null  autra  —  »  Per  ren  qeu  nai 
em  poder  —  u  non  senuallia. 

L.  S.:**dei  pensar  cossil  —  «  madus  —  "  talen  —  «  gatge  —  19  Troep 
_  îo  e  mi  —  *'  poderatge  —  22  satain  —  "  faria  —  24  sofrain  —  2t  Truep 
—  ib  qerre  n.  1.  ges 


LE  CIIAXSuXXIEK  DE   BERNANT  AMOROS 


129 


Esters  qab  diz  '  cuber/  li 2 

[uau  parlan 

Mas    sil    uolgues  esgardar 

[mon  semblan 

Xô    calria  3    plus    uertader 

[mesagc 

5     Qa4  sol  lesgart  pot  homben 

[per  usage 

Lo  pensamen   conoiser  tal 

[uez 
E   membres     li  qassaz  qer 
[qis  côplagn. 8 
IV.  Ben  sai  qeu  lam  sil  amarme 

[uolgues11 

Mas  leis    nô  cal  Li  non  i  a 

[gran  dan  7 

Cuidaz  8  uosdonc  qe  sis  uai 

[/jerpensâ9 

De   sa  ualor  ni  de  son  rie 

[lignage 

5     Qe  nol  deia  esser  fer  e10  sal- 

[uadge 

Pero    ualer    sol    en    amor 

[merçes 

Vens"    lesperança    on    ma 

idolor  refragn.12 

V13.   Aqest  conorz   nô  es  mais 

[nescies 

Qar  enlv  amor  pos  trop  uai 

[trainan15 

Xon    deu    hom    pois    auer 

[fiansa  gran 


Qe  farai  donc  partrni  me1G 

(c  f.  88  r°)  de  follage 

5     Xon  eu  perqe    far  i  n   uoil 

[mon  dânago 

Aissi  com  cel  qal  iogai 

[emprea 

Qe  perd  &  perd  per  respeit 

[de  gadagn.  '* 

VI.  Tendra  me  donc  ia  pro19  ma 

[bon a  fes 

Qeu  non  am  ges  per  esqern 

[cum  sil 20  fan 

Qi    son   fegnet  21    galiador 

[truan 

Fais  mensonger  &  ab  22  uo- 

[ler  uoladge 

5     Anz  ai  en  lei  si  assis23  mon 

[coradge 


Qora 


2'i 


îorn  noit  an  set- 

[mana  e  mes 

En   un  désir25  son  ades  & 

[remagn.26 

Vil.  •"   Souen    a  hom  per  trop28 

[sen  gran  dfipnadge 

E  de29  foldaz    uen   mantas 

[ueiz  grans  bes 

Domna    en    aqest  auentura 

[remagn.  30 

VIII.  Domna  el   uers  entendez31 

[mon  coradge 

El  uostre  cors  francs  32  na- 

turals  cortes 


1  Pero  ab  motz  —  *  lien  —  3  Ja  noil  calgra  —   4  Qab  —  6  côplain  — 
*  Pregarala  si   ualer  mi  pogues   —   '  c.  de  mi   ni  apertain  —   8   Cuias 

—  9  can  sen  uai  apessan  —  10  sia  ben  f.  e  bon  —  H   Xeus  —  12  refrain 

—  '3  Les  str.  V  et  VI sont  interverties —  4,Quen  rie  — 1S  tainan  —  *6  par- 
tir mai —  "  Jeu  non  perqe  car  far —  18  respeig  de  gazain —  19  E  doncs 
ualra  mi  ia  —  ">  nom  chamgi  p.  ren  aissi  com  —  21  Fol  lauzengier  — 
il  hgnjedor  c  de  —  23  1.  assis  tôt  —  24  Ora  — 2S  Qcnun  talen  — 26  remain 

—  27  Les  deux  envois  sont  aussi   intervertis  —  28  h.  de  son  —    29  Per 

—  30  remain  —  31  entendatz  —  3*  gai  —  33  Sabra  ebauzir  so  qendreit 
me  satain. 


9 


130  LE  CHANSONNIER  DE 

Sapchan  triar  ço  qa  uos  sen 
[atagn. 


[195  (ca  137)] 
PEIROL  DALUERNIA 

(=  B.  Gr.  366,  26) 

I .  Per  dan  qe  damors  mauegna 
Non  laissera 

Qe  ioi  &  près  (afchan)  non 
[manteigna 

Tant  qan  uiurai  ' 
5     E  sim  sui  en  tal  esmai 
Non  sai  qen  2  deuegna 
Qe  sil  ou  mon  cor  estai 3 
Y  ci  camarnom  degna. 

II.  Neguna  bona  entresegna 
De  lei  non  ai 

Qe  iam  conor  t  ni  proni  '*  tegna 
Del  mal  qeu  trai 
5     Pero  si  lam5  preierai 
Qe  de  me  il  souegna 
E  samors  no  la  matrai 
Merçe  ian6  destregna 7 . 
IIP.  Bona8  domnaseus9  plaçia 
Fort  mamistaz 
Qal  merauilha  10  séria 
Se  mamauaz 
5     Mas  era  qar11  no  uos  plaz 
Se  iois  men  uenia 
Conosc  bë  qe  maier  graz 
Si  atagnaria12. 
IV.  La  nueg  me    trabailla43  el 
Nom  lais  en  paz  [dia 


BERNART   AMOROS 

Sim  destrein  M  cortesia 
E  sa  gran  beutaz 
5  Doncs  sofrirai  pos  leis  plaz's 
Qel,(i  désir  mauçia 
0  qa  lei  prenda  pietaz 
Qe  plus  francam  sia. 

V.  Tantaienleiferm  coradge'7 
Qe  dais  non  pês  18 

Et  ane  mais19  ses  cor  uo- 
Non  amet  res  [ladge 

5  Daisom  degra  uenir  bes 
Qe  an  boni  20  dàpnadge 
Gardaz  sen  amor  a  ies 
De  peior  usadge. 

VI.  Chanson  uai  tendreituiadge 
Lai  ou  21  il  es 

Qel  mon  non  a  mais  mes- 
Qe  il  2'2  trameses       [sadge 
5  E  pois  del  tôt  me  soi  mes 
El  seu  segnoradge 
Pregali  qe  non  agues 
Ver  mi  cor  saluadge.  23 

VII.  Qadousar  pot  petit  bes 
Lo  mieu  gran  dânage. 

[196  (ca  138)] 

PEIROL  DALUERNIA (c/\89r°) 

(=  B.  Gr.  366,  15) 

1 .    Ab  ioi  qem  dimora  24 
Voill  un  sonet  faire 
Qe  25  ben  uai  aora 
De  tôt  mon  afaire 


L.  S.  :  i  poirai  —  2  qem  —  3  Se  leis  on  mon  cor  ai  —  4  proni  — 
s  la  —  6  lam  —  '  Les  strophes  III  et  IV  sont  interverties  —  8  Bêla — 
s  sius  _  io  meraueilha  -"pos-12  Sentaigneria  -  '3  trabail  -  i*  Tan 
mangoissaU-  »  Las  qeu  farai  zo  qar  faz  -  '•  Trol  -  i'  T.  uos  am  de 
bon  coratge  -  18  penz—  >9  Cane  mai  miels  -  2°  E  ail  -  ^  ont  -  22  » 

L.  S.:2*demora-  -'  Car 


LE  CHANSONNIER 

5  Fin  amor  menora  ' 
Si  qal  meu  ueiaire 
Ges  tan  ries  non  fora 
Seu  fos  emperaire 
Qel  coradge  ou  nai 

11)  Jauçion  &  gai 
Pero  non  a  gaire 
Qera  mortz  desmai. 

II.  Plus  es  amor  bona 
Qeu  non  sai  retraire 
Qi  mal  la  raçona 
Non  es  fis  amaire 

5  Qe  gen  guierdona 
Si  tôt  fai  maltraire 
Qi  si  -  abandona 
Nil  es  merceiaire 
On  ijeu  mestei  çai  •' 
10  Mon  pensamët  ai  ' 
Vas  la  dolçe  s  repaire 
On  mi  dons  6  estai. 

III.  De  lei  son  qem  ;  mena 
Et  es  cortesia  8 

Qab  soa  ,J  catena 
Mestreing  fort  em  lia 
7)  Mos  mal  nô  refréna 
Mus  garitz  séria 
Sab  tan  dolça  pena 
Per  mi  dons  moria 
Ja  no  men  per  tirai 10 
10  Mais  tan  com  uiurai  " 
Si  totz  têps  uiuia 
Totz  têps  lamarai. 

IV.  Francha  res  cortesa 
Bella  douça  mia 
Amor  ma  uos  l2  mesa 


DE    BEKXAHT  AMOIIOS 


131 


El  cor  on  qeu  sia  " 
5  Gran  ioia  mes  presa  lv 
Daital  segnoria  l!; 
Qeu  sui  si  nous  pesa 
Vostr  hom  tuta  nia  ""' 
•Ja  ren  nous  qerai  l7 
10  Mais  uos  seruirai 
Pero  sius  plairia  18 
Reu  plus  nO  diria.  lfl 
V.  Seu  '-"  per  allegrança 

Sai  chantar  (al'  :  Voil  iugar) 
[ni  rire 
Dun  ioi  qe  menança 
Don  eu  soi  iausire 
5  Domna  ia21  doptança 
Non  aiaz  del  rire 
Qeu  nô  faiz  22  semblança 
Qe  endreit'3  uos  consire 
Ben  e  gen  me  sai 
10  Cobrir  qan  sui  lai  2i 
Seu  mos  oilz  uos  uire 
Tost  los  en  retrai. 
VI.  Som  re  mi  demanda 
De  mon  dolçe  2J  deçire 
Amors  mi  comâda 
Lo  uer  2C  contradire 
5  Ben  es  dreit  qeu  blanda 
Lei  cui  sui  seruirc 
Et  er  foldaz  granda 
Sil 27  fatz  don  28  maçire 
Segnors  cosim  29  uai 
10  E  cossi  mestai  30 
Zo  qim  3I  sol  aucire 
Maduz  ioi  uerai. 


1  amors  monora  —  2  Eisi  —  3  Mas  con  qeu  mestes  —  •  M.  coratge  ai 
lai  —  B  Ades  el  —  6  la  bell  —  '  Sieus  sui  qilmi  —  8  corteza —  8  suau — 
»°  partrai  —  "  A  ma  uida  mai  —  ,2  Al  cor  uos  ma  —  13  Amors  tota  uia 

—  "  preza  —  »5  compaignia  —  1G  Vostre  on  qe  sia  —  17  qerrai  —  i8  E 
si  nous  plazia—  i»  dirai  —  20  Sieu|—  21  Don  ai  ia  —  2Î  Q.  fassa  —  *3  de 

—  -"  q.seschai  — 25  douz  —  26  Uertat  —  "  Seu  —  28  qil  2a  Gardatz  com 
mi       ;i"  E  comen  estai  —  il  So  qem. 


132  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


197 

PEIRE  RA1MON  DE  THOLOZA 

(=B.  Gr.  355,  in) 

I.  Pensament  ai  e  consir 
Duna  chanso  faire 

Qar  lois  degues  abeillir 
Cui  soi  fis  amaire 
5  E  si  pogues  auenir 
En  bos  ditz  retraire 
Far  pogra  parer 
Qeu  plus  rie  ioi  esper 
Com  cane  fos  de  maire. 

II.  Lo  cor  el  sen  el  albir 
Ai  mes  el  veiare 

En  honrar  leis  e  seruir 
Car  es  la  belaire 
5  Com  pogues  el  mont  chau- 
vir 
Don  nom  puesc  estraire 
Ni  mon  cor  mouer 
Camors  mi  fai  tan  temer 
Lei.s  qals  non  am  gaire. 

III.  La  fina  vera  valors 
Plus  dautra  valenza 

El  pretz  el  fresca  colors 
Mi  platz  e  magenza 
5  Pero  sim  valgues  amors 
Tan  qe  mentendenza 
Mi  donz  abeillis 
Plus  rie  ioi  de  paradis 
Agra  ma  paruenza. 

IV.  Nul  autra  nom  pot  socors 
Far  ni  dar  guirenza 

E  ont  mais  en   sert1  dolors 
Plus  nai  souenenza 
5  Mas*  dire  mas  clamors 
Non  aus  per  ternenza 
Tant  li  sui  aclis 
Con  plus  vas  mi  safortis 


Mais  lam  sensas  faillenza. 
V.  E  fora  li  ben  estan 
Sim  des  alegranza 
Tan  qaleuges  mon  afan 
Ab  douz  cointanza  3 
5  Qeu  li  sui  sers  sens  enian 
E  non  ai  membranza 
Dais  mais  qe  fezes 
Tôt  qant  a  mi  donz  plagues 
Pero  pauc  menanza. 
VI.  (p.   1S3)     Cades    mi    vauc 

[conortan 
On  plus  ma4  pesenza 
Vas  leis  e  sufris  mon  dan 
Ab  bon  esperanza 
5  E  doblera  me  talan 
Sa  bella  semblanza 
E  gentils  cors  cor  tes 
En  prezes  de  mi  merces 
0  qalsqe  pitanza. 

198 

PEIRE  RAIMONZ 

DE  THOLOZA 

(=  B.  Gr.  355,  16) 

I,    Si  com  celui  qa  seruit  son 

[segnior 

Lonc  temps  el  pert  per  un 

[pauc  fallimeu 

Maue  per  zo  qar  eu  ai  lon- 

[iamen 

Fait  son  coman  de  ma  donna 

[e  damor 

5  E  ia  dest  tort  non  degro- 

[chaizonar 

Ni  mal  voler  ma  domna  seil 

[plagues 

Pero  ben  sai  cant  om  plus 

[sauis  es 


i  l.  :  sent-»  l.  :  M. 


ges  —  3  l. 


acoindanza  —  *  L:  nai. 


LE  CHANSONNIER  DE 

Adoncs    se    deu   miels    do 

[faillir  gardar. 

II.  Tant  tem  son  pretz  e  sa  fina 

[valor 
E  tant  ai  cor  de  far  tôt  son 

talen 

Mas  tant  me  fan  lauzeng<-r 

[espauen 

Per  qeu  nom    ans  de   leis 

[faire  clamor 

5  Ni   mo    ferm  cor  descubrir 

[ni  mostrar 

Mas  mil   sospirs  li  rent  qec 

[iorn  per  ces 

E  veus    lo   toit   de    qeu    li 

[soi  mespres 

Car  ieu  lauzei   tan  finamêt 

[amar. 

1 11    E  sil  plagues  qem  fezes  tant 


[donor 


Q  i  -enoillossopleianhumil- 

[men 

Son  gent  cors  car  gent  for- 

[matz  auinen 

El  douz  esgar  e  la   fresca 

[color 
5  Mi  laisassetzsospiran  remi- 

rar 

Qe  mai  ben  crei  noill  faillira 

[nuls  bes 

Car   tant    fort    ma    sa  mors 

[laissât  e  près 

Qe  dais  non  pens  nin  puesc 

[mon  cor  virar. 

IV.  De  paratge  ni  soi  ni  de  ricor 

Qe    iam  faisses    '    qem  fes 

[damar  paruen 

Mas  cant  ries  hom  sils  me- 

[nors  acueil  gen 

Dobla  son  pretz  e  creis  mais 

[de  lauzor 


BERNART  AMOROS  133 

5  I'er  qeil  fora  -  ma  dona  ben 

[estar 

Si  calqe   bel    semblant  far 

volguea 

()nru   tel  lo    mont  non    a 

mais  Quilla  res 

Qi  ia  senz  leis  mi  pogue- 

donar. 
V.  Ben  sai  a  escient  qeu  az  3 

[folor 

Car  ai   en  lai  mes  mon  en- 

[tendamen 

Mas  non  pusc  als  con  plus 

[li  vauc  fugen 

Nais  lo   dezirs  e  dobla  ma 

[dolor 

5  So  com  vol  fort  non  pot  hom 

[oblidar 

E  sa  près  cent  mais  tragz 

un  ben  nagues 

Ben  fora  ries  e  sol  ca  leis 

[nom  pez 

Arai  *li  tost  denan  merces 

[clamar. 

VI.  (p.  1S5)  Sa  gran  beutat  son 

[gent  cors  nou  e  car 

Son  pretz  sonor.  sain  dieus 

[el  ditz  cortes 

Qe  res  de  be  noil  fail.  mais 

[cant  merces 

Qe  sol  ab  tant  ia  non  tro- 

[bera  par. 

VII.  Chanzos  vai  me  tost  re traire 

[contar 

Ad  aura  mala  e  dim  al  pro 

[marqes 

Messer  conrat  qen  lui  a  tant 

[de  bes 

Per  com  lo  deu  sobre  totz 

[apellar. 


i  c.  en  :  taisses  —  '■  L  :  l'eira  —  3  /.  :  faz  -  '  /.  :  Irai. 


134 


LE  CHANSONNIER  DE 


199 

Peire  RAINCONZ  de  THOLOZA 
(=  B.  Gr.  132,8) 

1.   Pos    comgnhat    ai    de   far 

[chanzo 
De  mi  donz  cui  am  e  dezir 
A  leis  o  demi  om  grazir 
Seu  i  faz  bonz  motz  ni  gai 

[so 

5  Oc  e  seu  re  mais  ben  fazia 

Grazit  fos  '  ma  douz  amia 

Qe  de  leis  tein  vn  pauc  de 

[ioi  qeu  ai 

Pero  sil  plaz  anqeras  naurai 

[mai. 
II.   Ane  mais  hom  tan  cocha tz 

[no  fo 

Damors    e    no   men   puesc 

[partir 

Qen  pert  lo  solatz  el  dur- 

[mir 
El  ris  ni  als  no  mi  sab  bo 
5  Mais  pois  tornatz  soi  en  la 

[via 
De  chantar  de  cui  me  par- 

[ria  2 

Suna  vetz    chant  con3  mil 

[vetz  plorat  ai 

Be  se  coue  pos  a  ma  dona 

[plai. 

111.  Bella  domna  pos  vostrom  so 
Cautra  no  mi  pot  guarentir 
Laissaretz  mi  del  tôt  moiïr 
Don  vos  mi  podes  leu  far  do 
5  E  so  faitz  faretz  vilania 
E  pueis  er  uns  ramz  de  feu- 

[nia 


BERNART  AMOROS 

Qi  son  franc  home  liai  mu- 

[rir  fai 

De  dezirer  el  pot  gitar  des- 

[mai. 

IV.  Amiga  ia  dieus  nom  perdo 

Seu  nous  am  mais  qeu  non 

[sai  dir 

E  si  per  so   me  fais  lan- 

[guir 
Mais  am  en  vostra  sospeizo 
5  Estar.  qe  si  dautra  iauzia 
Jauzir  nom  cami  non  plai- 

[ria 

Qe  mi  non  pot  faire  iauzent 

[ni  gai 

Totz  lautre  monz  dona  de 

[vos  en  lai. 

V.  Non  sai  far  mon  dan  ni  mon 

[pron 
En  nulla  ren  tan  noi  mal- 

[bir 

Ni  noi  poiria  deuenir 

Seu   nous    bais  (p.  186)   la 

[bochel  mento 

5  De    vos    cui  hom  sui  senz 

[bauzia 

E  serai  e  no  men  partria 

Malgrat  vostre  vos  am  eus 

[amarai 

E  malgrat  meu  pos  amors  lo 

[matrai. 

VI.  Chanzos  vai  ten  e  ten  ta 

[via 
A  la  bellam  di  senz  bauzia 
Cautra  dôna  no  voil  ni  qeir 

[ni  ai 

Ni  vos  domna  non  sai.  si  vos 

[aurai. 


1  l.  :  fos  a  —  2  /.  :  partia.—  3c.  en  :  don. 


LE  CHANSONNIER  DE  BEHNART  AMOROS 


135 


[200  ('  116)] 
PEIRE  RAIMON   DE  TOL<m\ 

o 

(=  B.  Gr.  .T>:>,  5) 

1 .   Autresi  com  la  candela 
Qe  se  meteicha  '  destrui 
Per  far  clarlat  ad  autrui 
Chant  on  plus  trag  greu  m;ir- 

[tire 
5  Ter  conort  2  dautra  gent 
!■'.  car  adreit  esient :! 
Fa  s  tan  gran  follage 
Qe  aç  autrui  don  agradage 
E  a  mi  B  pena  &  turmen 
10  Nulla  re  se  mal  nien  pren 
Non  6  deu  plagner  del  dâ- 
[nage. 
II.   Qar  ben  conosc  per  usage 
Qe  lai  on  amor  saten 
Vai  foldaz  en  log  de  son 
Doncs  pos  tant 7  am  &  de- 

5  La  genser  qel  mon  se  mir 
Per  mal  qem  deg  s  auenir 
NO  9  taing  qem  recreia 
Qar  10  on  plus   mausi  den- 
ueia  M 
Plus  li  dei  12  ma  mort  gra- 

[sir 
lu  Sil  dreiz  damor  uulh  13  se- 

[guir 
Qestiers  sa  cortz  non  plai- 

[deia. 
III.   Doncs   pos   am    so  u   qem 

[guerreia 


Cniosc  qe  mer  a  blandir 
Ab  selar  &  al)  sofrir 
l.i  serai  nom  &  sernire 
5   Et  sai  sim  uol  retenir  '  ' 
Veg  "i.-  toi  al  Beu  plai 
!    -  fr  mes  ses  tota  bauç  i 

E  si  al)  aital    tiicharia 

Puesc  a  '■'■  sa  merçe  uenir1' 

10  El  mon  non  '-s  nuls  Baber 
Per  qeu  camies  ma  folia. 
IV.  Lo  ioru  (je  sa  cortesia 
Mi  mostret  nim  fez  aparer 
lu  pauc  damor  ab'8  placer 
Pareg  ben  qem  uolc  ausire 
5     Qins  el  cor  manet  sa 
E  el  cor  mes  mel 1B  deçir 
Qe  mausi  denueia 
lu  eu  com  fols  qe  folleia 
Fui  leus  a  gen  foletir  -° 
10  Qan  cugei  soper21  albir 
Qenqer    non   pes'-2  qesser 

[dei  a. 
V.  (cf.  77 r°)  Si   per  nulh  autra 

[qe  sia 
Me  pogues  mais  enriqir 
Ben  agra  en  cor  a  partir 
Mis   cum    plus    i    fort    mo 
[consire  23 
5     lui-'*  tant    qant  lo  mon25 

[per  pren 
Nô  sai  una  tant  ualen 
De  negun  parage 
Per  qeu  e 26  seu  senhoradge 
Rernang  tut  uencudamen  '" 
10  Qar28  non  trop  melhuramen 
Per  fortz  o  per  agradage. 


[L.  S.:]  '  mezeissa  —  2  plazer  —  :i  escien  —  ;  alegratge  —  b  me- 
f  xom_  "D.mas  eu —  8deia —  9Nos  —  ">  Anz  —  "  em  guerreia  —  ia  Li 
dei  miels  —  13  uoil  —  u  E  doncs  pos  so  —  '5  retener  — 1G  en  —  17  caber 

—  i«  damoros —  "  Lo  ci  s  lo  —  20  ad  efoletir  —  2i  Qar  zo  crezei 

—  22  Qeu  eis  n.  penz  —  -'■  M.  <ui  p.  eu  mo  albir  —  -'  Ai  —  25  monz 

—  *<>  P.  qe  el  —  2"  tôt  forzadamen—  :e  Pos 


U6 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


VI.  Chanson  a1  portdalegrage2 
On  preç  &  ualor  saten 

Al  rei  qe  sap  &  entcn 
Miras  en  araguon  dire 
5  Qe  anc  mais  tant  guauçens 

[no  fui 
Per  finamor  cura  er  sui 
Quab  rens3  &  ab  uela 
Poia4.  ades  so  qe  non5sela 
Pero  nocan6  fas  gran  brui 
10  Ni  nô  uulh  sapcha  hom  de 

[cui 

Mo  "    dig   plus    qe   dune  8 

[stella. 

VII.  Mais  nos  am  ges  una  mêla 
Nô  preç  qar  ab  uos  no  sui 
Pero  aç  obs  uos  estai 
Qem  siaz  guouerns  e  uela. 


[201  (ca  119)] 

PEIRE  RAIMON   DE  TOLOÇA 

(=  B.  Gr.  355,  14) 

1.    Pois  ueçem    bosc  &  broils 

[floriz 

El  praz   sunt  groc   uert  e 

[uermeilh 

El    chant  el   refrim    el  tro- 

peilh9 

Auçem  del  auçellet10  petitz 

5     Bens  taing  qun  nouel  chat 

[fabrec 
En  aqest  douç  M  temps  dra- 

[biil 
E  si  ben  sol12  mot  maestril 
Leu  seran  dentendre  adrec'3. 


II.  E  car  non  ueini  trop  ie  un14 

[desplec 
Mou  ferm  natural  sen  sutil 
Per    tant     non    clam   mon 
[saber  uilh 
Si    tôt    ancar    grans    non 
[prec15 
5     Qaisi  corn  fi  trobau  escritz 
Bons    motz     tan    genç    los 
[apareill 

[ ] 

Qen  chantan16  formes  meil- 

[lorditz. 

III.  Mas  un  gen  cors  franc  & 

[graçitz 

Qanc  tan  bel  nô  I7   uic  en 

[espeill 

Per  cui  pens   &  fremisc  & 

[ueilh 

Mes  en18  cor  tant  abeliz 

5     Qe  dal  ren    seruir  no  men- 

[brec 

Mas  ma  domna  ab  franc  cor 

[humil 

Per  qe  senz  tôt  enian  ma- 

[pilh 

Enamor  qen  recob  en  19  lec. 

IV.  Anc  hom  en  ben  amar  non 

[crée 

Tant   cum  en  mi  dons  don 

[ma  fil 

En  lei  seruir  qab  un  pauc  fil 

Ma  près  e  eug  qe  pauc  me 

[sec 
5     Pero    nô   tem  parlers  me- 

[riz  20 
Tantesperson  leial  conseilh 


i  Cliansos  al  —  2  dagradatge  —  3  Cab  rems —  *  pueg  —  5  a.  com  no 
sen  —  6  E  pero  no  —  7  Nin  —  8  com  del. 

L.  S.  :  9  trepeilh.— 10dels  auçelletz—  '*  a.  beldouz—  12  son  —  I3adtcc 
— 14  n.  truep  cab  on  —  •>  parec  16  chantant  —  17  nos  —  18  en  mon  — 
i''  qem  te  cob  «S;  —  2°  ni  criz 


LE  CHANSONNIER   DE   B  EUX  A  HT   AMOHOS 


137 


E  s'il  plaitz  qela  maconseilh 
Gent  serai  de  fin  ioi  guer- 

[nitz. 

V.    Ades  es  lai  mos  esperitz 

Ond  '  il  es  don  nô  merauilh 

Qaitan  qan  ferrai  2dc  soleill 

Nô   régna    tau  bon  3   aibs 

[cOplitz 

5    Nul  autra  nô  par  qab  lei  sec 

De    beutat    seran    dautras 

[mill 

Don   prec  mi  don  qe  non  v 

[auilh 

Si   mos  cor  uol  qautra  nô 

[dec. 
VI.  Tan  magreist  pér8  madom- 

[na  sec 

Chanson0   gen  format  cors 

[gentil 

Nô   uei  qeu   fora   mort  de 

gilh 
Tro  qun  pauc  mon  cor  ses- 

prec. 


[202  [F*  156)] 

JORDAN  BONEL 

(=  B.  Gr.  273,  \) 

Sira  damor  tengues  amie 
[iauzen 

Non  fora  cel  cui  meillz 
[ânes  de  me 

Qar  pen  e  dol  e  dan  e  ma- 
[rimen 

Hai  soflertat  pos  amei  e 
[conue 


5  Qeu   aial  mal  e   ma  dOpna 

lo  1)0 

E   sellas   uol   aissi    ab    me 

[deuire 

Qar  sap  e  ue  '  qeu  nol  ausi 

re  dire 

Anz  uuoill  mon  dan  sella2 

[uol  ez  amors 

Gardatz    sieu  [sui]  dels  fis 

[genz3  amadors 

II.  Aradiran  tut  li  ''  desconois- 

[sen 

Qe  cel   es   fols  qam  autrui 

[mais  qe  se 

Doncs  nô  sabon  5  qom  nô  ha 

[ges  de  sen 

Qant  en  amorses  empeintz,! 

[senes  fre 

5  Qe  chastiars  ni   blasmars7 

[noi  ual  re 

Ni  fis  amanz  8  non  ha  poder 

qes  uire 

Qab     ambas    mans    contra 

laffan  nos  tire  9 

Si  corn  eu  faz  e  10  qar  mi 

[fora  n  honors 

Cugei  passai'  totz  los   bos 

[suffridors. 

III.  Si  corn  laiga  suffre  la  nau 

[conçu 

Qant   12  es    tan    grantz    qe 

[nul[s]  homes  soste 

E  dun  clauel  pert  son  affor- 

[timen 

SofFrira  ,3  eu  mal  meillz  de 

[null  autra  re 

5  Mas  qant  de  lei  n  qem  de- 

[faill ,s  ab  merce 


i  ont  —  2  ferrais  —  3  bos  —  4  nom  —  s   magrist  —  6  Canson. 

L.  S.  :  '•  crei  —  8  si  lai  —  »  fegnens  —  io  Arain  d.  qeu  sui  —  n  sabetz 
—  6  espres  -  »  maltrair—  B  Ni  da  lamor  —  '■>  uol  rire  —  «o  mas—  ■  ' 
_  12  Pos  —  13  Sufert  —  "  E  plus  qe  lois  —  18  desl'aill 


138    LE  CHANSONNIER  DE  BERNARÏ  AMOROS 


Qez  on  mais  lam  meillz  a 

[cor  qem  azire 

Ez  on  jiiez  trac  plus  doblon 

[mei  martire 

El  dolz  esgartz  mes  co?»  la 

[blanca  flors 

Qe  pois  de  fruich  amarçis  ' 

[la  sabors. 2 

I\  .  E  fai  mal  dôna  mon  escien 

Pois  fai  semblan  don  pre- 

gar  sesdeuen 

A  caualier  nildonentendimen 

Qan  non  ha  cor  si  con  una 

[fes  me 

5  Qim  parla  piegz  qan  nom 

[au  ni  nom  ue 

E  sieu  fos  fais  engananz  ni 

[traire 

E  contra  leis.  aisin  fora  iau- 

[zire 

Mas   uas    amors    non    ual 

[forsa  ni  tors 

Ni  tem  mais  cors  de  uerais 

[amadors. 

V.  A  chaletz  uai  chanzos  a  mi 

[dor.z  dire 

A  na  guibors  cui   bos  pretz 

saup  eslire 

On    es    iouenz  e  beutatz  e 

[ualors 

Ca  leis  mi    clam   del    siens 

[mais  noiridors. 

VI.  E  potz  aitan  sus  en  sa  cart 

[escriure 

Qe  ia  bel  ditz  ni  semblantz 

[de  douz  rire 

Non  creirai  mais  ni  oils  ga- 

[liadors 

Qe  gardon  zai  e  plus  sou- 

[ent  ailhors.] 


203 

RAMBAUTZ  DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389,  36) 

I .  Pos  tais  sabers  mi  ven  en  3 

[creis 
Qe  trobar  sai  et  eu  '*  die 
Mal  estara  si  non  pareis 
E   si  mes  mal  car  no  meu 

5  Qe  qant  om  diz  ab  la  len- 

[gua 

So  com  ben   em  pos  5  non 

[tengua 

Nom  pot  auer  sordeior  dec 

Qe  dir  so  qe  nos  couengua. 

II.  E  qi  anc    iorn   |  damar]   si 

[feia 
Ara  nos  taing  qen  derasic 
Pel  nouel  temps  qes  despe- 

[reis 
Deu  auer  qecs  son  cor  plus 

[rie 

5  E  qi  no  sap  ab  la  lenga 

Dir.  so  qe  se  taing  apiëga 

Coissi  al  nouel  temps  saplic 

Caissi    vol    pretz.  qes    cap- 

[tenga. 

III.  Ar  ai  gaug  can    sabrandal 

fregs 
E  remanon  sol  li  abric 
E  dels  auseletz  e  lor  leis 
Oi  mais  de  chantar  non  se 

[trie 

5  Qe  qeigz  salegre   sa  lenga 

0  pel  6  nouel  temps  qil  so- 

[uenga 

E    dels    arbres    qeran    tue 

■ 


-traitz  e  marcis  —  ;  L.  S.  ha  di  più  queste  3  stanze  (IV.-VI). 
3  /.  :  cm  —  4  /.  :  eu  o  —  5  /.  :  en  pes  —  G  l.  :  Pel 


LE   CHANSONNIER    DE    BERNART   AMUROS  139 


La  flor  per  bracei1  se  renga. 

IV.  Estât  ai  lins  amies  adreitz 
Duna  qe  menganet  ab  trie 
E  car  une  samors  me  des- 

treia 
Totz  temps  maurai  mon  cor 

[enic 
5  Car   eu    non    veu  2  ab    la 

[lenga 
Auer  lo  dig  që  destrëga 
Ver  qe  autraui  ab  lieis  sem- 

|  brec 

E     qieu    qalz     so     qcl     en 

[prenga. 

V.  Ab  lei   remangal  inalavegz 
El  enianz  ^  ab  son  amie 

Cuns   tais   iois  nia   près  en 

merces 
Don  ia  non  creirai  fais  pre- 

dic 
5  Anz    voil    coin    me    tail    la 

[lenga 
Seu  ia  de  lieis  cre  lausenia 
Ni  de  samor  mi  desadec 
Sen  sabia  perdre  autenga.  3 

VI.  Domna    non    sai    far    lonc 

[plaides 
Mas  de  me   podes  far  men- 

[dic 
0  plus  rie  que  anc  no  fo  res 
Del  tôt  soi  al  vostre  castic 
5  Sol  që  digatz  ab  la  lenga 
Coissi  voletz  qem  captenga 
Qeu  ai  cor  qenaisi  estic 
Ni  qe  ia  dautra  non  fenga. 

VII.  {p.  1S 7)  Ben  taingqesia  fins 

vas  lieis 

Car  anc  mais  tant  enals  non 

[e  rie  ■ 


Car  uostre   seignier  el 

zeia 
Ab  pane  afar  no  Besbaic 
5  Ca  penas  sai  ab  la  Lenga 
Dir  aital  aital   ■  qe  deui 
La  gran  beutat  qen  lei  parie 
Non  taing  qautre  si  esj" 
VIII.  Domna  als  non  qer  la  lenga 
Mas  qen  baisan  vos  estre- 

[gna 
En  tal  luec  qeu  ab  vos  ma- 

[sec 
E  qe  de  mos  bratz  vos  ten- 

[gua. 

204 

REAMBAUTZ DAURENGA 

(=  B.  Gr.  389,  7) 

I .  A  moners  darai  fi  chanson 
Ab  leus  motz  et  en  leu  son 
Et  en  rima  vil  e  plana 
Pos  aissi  son  encolpatz 

5  Qan  fas  auols  motz  als  fatz 
E  dirai  so  qem  cossir 
Qi  qem  nan  7  mais  om  nazir. 

II.  Damar  tornom  8  en  tenso 
Cil  on  anc  a  mors  no  fo 
Plus  qe  me  obra  vilana 

E   diz    qeigz   en   teing   los 

data 
5  En  sai  maitz  qe  nuls  nom 

[natz 
Per  qem  platz  e  deuedir 
Daqo   qeu    als   moltz   naug 

III.  E  si  torn  en  ocaizo 

Cel  dig  qom  fai  plus  felo 


'  /.  :  branqil  —  -  c.  en.  :  veil  —  3  I. 
a.  voil.  —  6  /.  :  mo  uers  dirai  —  '  /.  :  nain  —  *  L 


-  '  /.  :  n.  cric  —  s  1 

l<'mon 


HO  LE  CHANSONNIER  DE  BERNARï  AMOROS 

No  mo  tengatz  ad  ufana 


Qar  per  trop  es  autreiatz 
5  Qal  niais  aug  dir  e  non  platz 
Qe  dona  si  vol  aucir 
Qe  rie  orne  deignia  auzir. 

IV.  Qeigz  a  dreig  qe  sarazo 

Mas  vers  venz  qi  bel  des- 

[pon 
E  ieu  die  paraula  sana 

Qe  meils  deu  esser  amatz 

5  Ries  hom  francs1  ensegniatz 

Qil  pot  pro  e  bel  chaucir. 

Per  dôna  cauz  prez  soffrir. 

V.  Mas  donna  cama  lairo 
A  semblan  de  tracion 
Non  deu  ges  esser  aurana2 
Mas  em  baz  luec  sasolatz 

5  Siqe  sia  coïdatz 
E  qei  posca  esdeuenir 
La  nueg  el  iorn  ses  dezir. 

VI.  Ane  donna  qi  qen  salmo 
Per  null  rie  ome  no  fo 

Ni  tornet  de  pretz  sotrana 
Et  eu  sai  et  es  vertatz 
5  De  pron  caualier  priuatz 
Vistas  tais  dôna  delir 
Com  sen  degra  sebeillir. 

VII.  E  dirai  en  mais  eu  no 
"Ara  en  aqesta  sazo 

Mas  se  neguns  hom  se  vana 
Cap  me  sencontrast  iratz 
5  Adonc  mauziretz  viuatz 
Celetz 3   motz    per  me    ses 
[mentir 
Com  non  poiria  cobiïr. 
VIII.  [p.  188)  Dieus  retenc  lo  cel 

[el  tro        I 
A  sos  ops  ses  compaignio 
Et  es  paraula  certana 


Qa  mi  donz  laisset  em  patz. 
5  Ca  seignoriu  vas  totz  latz 
Qe  totz  monz  li  deu  seruir 
E  sos  volers  obedir. 

IX.  Ja  de  mort  ne  de  preizo 
Nom  gar  dieus  ni  gaug  nom 

[don 
Se  mi  donz  qem  re  '  sescana 
Noval  pro  mais  cautrasatz 
5  Segon  qieu  cre  e  sapiatz 
Qe  totz  hom  qe  leis  remir 
Senten  ab  mi  al  partir. 

X.  Domna  eu  vos  deg  grazir 
So  qe  sai  be  far  e  dir. 

XI  E  som  datz  ab  loue  dezir 
Lo  ben  qen  degnias  soffrir. 

205* 

REAMBAUTZ  DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389,  30; 

I.  Joglar  fe  qe  deu  dei 

A  dieu  ni  a  ma  donna  ni  a 

[mei 
Qazutz  son  en  esfrei 
Qarmatz  ab  cor  non  vei 
5  Lieis  a  cui  totz  mautrei 
Per  ar  e  per  totz  temps. 
II.  E  serein  mais  ensems 

Eu  sai  qo  tal 5  ma   domna 
[qar  trop  tems 
Lun  6  oil  men  fus  remdemps 7 
Qeu  nom  temsessa.  tremps 
5  Sol  vos  senera  semps 
Meins  no  men  presasetz. 
II.  Cancfams  ni  sons  ni  setz 
Nom    destreis    tan    vns    ni 
[tuig  millia  vet 


'  L:  f.  et  —  2L:  aulana  —  3  /.:Talz  —  *  <:.e?i:  te. 

'  Voyez  l'édition' de  M.  Appel,  dans  la  Iiev.  d.  I.  r.,  IV  s.,  I.  X,p.  112  ss. 

-  5  Appel  :  toi  —  6  A..  :  S'un  —  1  A.  :  redemps 


LE  CHANSONNIER  DE  BEHNAHT  AMoRO* 


1  l  1 


Cô  fai  mos  telans  freigtz 

Qoin  breu  deuenter  abretz 

5  Car  vos  non  vei  cui  letz 

De  sofrir  nom1  perill. 

IV.  A  donnap  2  cor  volpill 

Gran  paor  ai  qeil  bocha  me 
[rouill 

Qar  del  col  tro  al  cuill 

Nous  bais  qi  qen  grondill 

5  Qeu  niria  en  eissil 

Enanz  cautram  baizes. 

V.  E  co  morrai  ades 

Sim  cochai  bes  qeu  naic.qel 

[luec  torncs 

A  domnal  plus  confes 

i  Mue  qez  auc  âmes 

5  A  cortes  si  qe  près 

De  vos  sia  mos  cors. 

VI.  Ai  talens  car  no  mors 

E  seignier  dieus  gitasses  lo 

[tost  fors 

0  qil  semblés  ma  sors 

A  cels  qe  sabol  destors 

5  Si  qe  nostre  demors 

Fos  per  totz  acuillitz. 

Vil.   Dôna  nom  faz  marri tz 

Per  qem  degnia  de  vos  per 

[eschernitz 

Mas  qat 3  lur  falz  critz 

Dels  enoios  traitz 

5  Terne  tant  son  eissitz 

Del  bon  sen  cauer  soill. 

VIII.   (p.  189)  Per  lespauent  mi 

rdoill 

E  pel   grau   be    qaut  '  nai 

fait  orgueill 

Si  qieu  non  deing  mon  oill 

Girar  ves  autre  foill 

5  Qar  mos  cors  no  macoill 

Qieu  ves  vos  mi  renei. 


IX.  Dôna  si  lai  on  soill 

N mis  vei  breu  cm  renei. 
X.   Far  men  podes  orgoill 
Qaut  morrai  qem  renei. 


206 

REAMBAUTZ  DAURENGA 

(=B.  Gr.  389,  20) 

I.  Ben  seschai  qem  bona  cort 
Chaut  iji  chantai'  sap 
Et  eu  atendrai  o  B  mon  gap 
Dont  me  tenrai  plus  per  lort 

5  Qe  sabrun.  li  cet  6  eil  sort 
Qieu  naurai  pretz  qi  qe  sen  7 

[jap 

Del.-;  vint  qe  serem  el  trap. 

II.  Donc  lendeman  del  beort 
Leuarai  el  cap 

La  gran  corona  del  drap 
An  mita  ab  louas  cort 
5  Et  qi  lapella  reg  bort 
Lau  qe  la  lenga  liarrap 
Qemais  fols  motz  noil  escap. 

III.  Aissi  ai  bastit  en  gaug 
Mon  cor  nou  e  fresc 
Qades  sort  e  sail  e  tresc 
Si  qapenas  vegl  ni  aug 

5  E  sapchal  donz  de  thalaug 
Qeu  no  son  cel  qe  paresc 
Qe  en  autre  sen  mantrebresc. 

IV.  E  qis  vol  corn  crit  a  flaug 
Damor  pos  eu  enqes  8 
Sobre  totz  qals  qen  fol  pesc 
Qeu  am  des  lue  tro  az  an  g 

5  La  iensor  e  men  pelaug 
Tôt  hom  qautra  per  fadesc 
Qan  leua  ab  leis  en  paresc. 


1  .1.  :  mom  —  -  A.  :  domn'  ap  —  3  c.  en  :  qar  —  *  A.  :  qu'aiit 
5  /.    atendrai  —  6  c.  en  :  cec  —  7  l.  :  qi  qen  —  8  l.  :  cresc 


1    IL' 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Y.  Per  mi  donz  ai  cor   estolt 
Et  humil  e  baut 
Car  sa  lieis  no  foz  dazaut 
Eu   moestor  '  en  loec   dun 

[vult 

5  Qe    dais    no  pessera   molt 

Mas    mangera    e    tengram 

[caut 
E  agra  nô  raubalt. 2 

VI.  E  qi  vol  apenre  escolt 
Damar  ben  cum  sait 

E  sail   plus    qe    nuls    nom 

[aut 
El    ianglos    feul  3    per    so 

[molt 
5  Sol  qel  sapil  e  sacolt 

Cuia  ab   lauzeniar.  despaut 
Dir  so  don  ma  dôna  raut. 

VII.  (p.  190)  Macansosno  vueil 

[qe  sait 

Per  cels  mais  de  cui  mazaut 

Per   enseniament  mazaut 

De  moltz   qem    fan  de  lur 

[chaut. 

VIII.  Joglars  per  qem  desazaut 

Ma    dôna    e    vos    mi   faitz 

[baut. 


207 

REAMBAUTZ    DAURENGA 

(=B.Gr.  389,  1) 

I .  Ab  nou  cor  et  ab  nou  talen 
Ab  nou  saber  et  ab  nou  sen 
Et  ab  nou  bel  captenemen 
Vueil  un  nou  verset  comen- 

[sar 
5  E    qi   mos  nous   bos  motz 

[entent 


Ben    er   plus    nou    a    son 

[uiuent4 

Com  veilz  5  sen  deu  renoue- 

[lar. 

II.  Qieu  renouel  mon  ardimen 

Cai  nouel  al)  veil  [pessamen 

Franc  de  noueil  abrieilpar- 

[uen 
E]   cant   em   al  nouel  tëps 

[clar 
5  Qel   nouols  foils  nais  dont 

[deisen 

Lo    nouels    critz    don    iois 

[sempren 

Dels  ausels  qintronenamar. 

III.  Don  amars  mi  fai  alegrar 
Qeu  am  si  com  non  pot  com- 

[dar 
Tam  ben  con  eu  amni  pen- 

Tsar 

Qieu  am  la  gensor  ses  cotent 

5  Si  dieus   mam  e  noi   mère 

[cuiar 
Qal  miels  damar  lam  saup 

[triar 
Amors  qe  nos  aiustet  gent. 

IV.  Damor  me  deg  eu  ben  lau- 

[zar 

Mais  qas  amor  guizardonar 

Num  pose    qamors  ma  sim 

[ten  car 

Dat  amors  pe»'  son  chauzi- 

[men 

5  Mais  qamor  nô  pot  estimai7 

A  sos   obs  amors  ni  douar 

Ad  autrui  con  ai  cor  rizen. 

V.  Rire  dei  eu  sim  faz  souen 

Qel  cors  me  ri  neus  en  dur- 

[men 
E  mi  donz  ri  tan  douzamen 


i   l.  :  mester  —  2  /.  :  raembalt  —  3  /.  :  sail. 

*Z.  :  iuuent  —  *c.e?i:  veslz  —  |;/.:  met—7  c.  en:  estuiar 


LE  CHANSONNIER  DE 

Q>  lis   de  so  ui  mes 

[soin  par 

5  Don  me  fa  sos  ris  plus  iau- 

[zen 
Qe  sem  rizion  qatre  cent 
Angel    qem    deurion    gaug 

Far. 

VI.  Gaug  ai  eu  tanqe  mil  dolen 

Seriô  del  meu  gaug  manen 

Car  de!  meu  gaug  tuig  meu 

[pareil 

Viurion  ab  gaug  [ 

5  .  . .  .  ]  '  &  eisainent 

Lami    don/,   qel  mi   pot  tôt 

[dar. 

\  II.  Domna  dais  non  ai  aparlar 

Mas  de  vos  dona  qe  baisar 

N  >s  cuig  domna   <jant  aug 

[nônar 

\  "s  dona  qe  sos  2  vestimen 

5  E  mon  cors  dôna  vos  esgar 

Qadee  miusvegni :i  donastar 

Vostre  bel  nou  cors  couiuen. 

VIII.  (p.  191)   De  mon  nou  vers 

[vueil  totz  pregar 

Qeil  manon  de  nouel  chan- 

[tar 

A  lieis  qam  senes  talen  var 

Deus  mabais  &  amors  seim 

1 1 1 oit  * 

5  Qautre  ris  me  semblon  plo- 

[rar 

Sim  të  ferm  en  gaug  sens 

[laissai1 

Mi    donz    cautre    drut    nô 

[cossêt. 

IX.  Ja   dieus   mais    dôna   nom 

[prezent 
Sol  gart  ma  dr>na  e  mô  ri- 

glar.8 


BERNART  AMOROS  1  i  :; 

X-   Deus   gart  ma  dOna  e  mon 

[viglar* 

E  ia  niais  dôna  nom  prezent. 

208 

REAMBAUTZ  DAURENGA 
(=B.  Gr.  389,  19) 

1 .    Ben  sai  qa  cols  séria  fer 
Qem  blasmonqar  tant  souent 

[chant 
Selur  costauon  mei  chantar 
Miels  mestai 
•r)  l'os  lieis  plai 
Qem  ton  gai 

Qieunon  chant  miglia.  sen 

per  aur  5 

Qe  nentend  en  autrui  plazer. 

II.    B    per   als    men  cog   plus 

[anqer 
Car  tan  souen.  con  en  chan- 

[tan 
Non    la    puesc    auzent    tôt 
(nomnar 
E  pois  ai 
5  Tan  gran  gai 
Qenqers  brai 

So    qieun    die   qadonc  eug 

[tener 

Dieu  o  lieis   dont   me   nos 

[temers  G. 

III.  Bon  sapqide  mi  donz  men- 

[qier 

Qieu    noi  faz    ges    feignit" 

[semblan 

E    creis    men  gaugz    cant 

[naug  parlai- 

Ne  us  de  lai 

5  On  nosfai 


1  /•  :  g.  ses  manjar  Que  ieu  ai  gaug  —  2Z.  :  ses  —  3  /.  :  inz  —  4  l.  ;  sieu 
men  —  :■<?.  en  :  iuglar  —  e  /.  :  ni  ia  per  auer  —  '  l.  :  uol  teincr 


I  u 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART    AMOROS 


Nos  métrai 

Qant  diretz  de  lieis  tal  plazer 

Cossius    nera    datz    grans 

[auers. 

IV.  Gran   eiïors  fai  dieus   qem 

[suffer 
Cab  se  nolan  puega  baizan 
Mas    no    vol   tolre  mi  tort 

[far 
Ni  seschai 
5  Qe  nesmai 
For  eu  fai  ' 

Pos  lieis  non  pren  nol  cal 
[temer 
Qe  ia  tant  plasa  teners. 

V.  Si  de  ben  amar  lieis  mes- 

[mer 
Qeu  sai  qe  si  pel  non2  ses- 

[pan 
Qautras  men  faran  fachurar 
Don  mesglai 
5  Qen  fai  ai 
Cobrirai 

Anz    donc   mon    gran    ben 

[gauzen  ven  3 

Hoc  si  mera  mieus  lo  po- 

[ders. 

VI.  [p.  192)  Mas  totz  temps  fo 

[e  totz  temps  er 

Qe    granz    amors    nô    ten 

[garan 

Grans    merauillias   son  da- 

[mar 
Qen  dirai 
5  Samors  gai 
Qar  va  un  bai 
Ailas  ia  nomo  lais  vezer 
Cel  dieus  qem  na  datz  jauzer 

[sers. 
VII.  Qaisi    tiron    ves    man    es- 

[qer 


Cil  rie  qe  plus  cortes  sen  fan 
Qades  poignion  en  lauzen- 

[gier 
Eil  verai 
5  Son  emplai 
Qar  i  atrai 

Gels  qe  semblon  sens  ferm 
[poder 
Par  cortes  si  noncaz  e  vers. 
VIII.  Domna  vostre  domini  ser 
Crezes    me   qieus    am    ses 
[engan 
E  membreus  plus   qe   len- 
[cuzar 
Li  doutz  bai 
5  Ar  morai 
Sin  die  mai 

Ai  cun  fail    qan   pens    del 

[douz  ser 

Lo    sens    e    lauzirs  el  ve- 

[zers. 

IX.  Qan  la  chandelam  fes  vezer 
Vos    bazan    rizen    a    cars 

[sers . 

X.  Joglar  ades  lo  iorn  el  ser 
Me  tirai  cors  vostre  vezers. 


209 

REAMBAUTZ  DAURENGA 

(=  B.Gr.  389,5) 

I.   Als  durs  crus  cozens  lau- 

[sengiers 

Enoios  vilans  malparliers 

Darai  un  vers  qe  mai  pensât 

Qe  ia  dais  noi  aura  parlât 

5  Qa  pauc  lo   cors  no   mes- 

[clara  ; 
Per  so  qeu  ai  vist  e  aï5 


i  /.:  sai.  —  M.:  mon  —  a  c.  en:  ver.—  * /.  :  mesclata  —  5  /.:  e  proat 


LE  CHANSONNIER   DE    BERXART   AMOROS 


145 


De  ioi  mal  serua1  barata. 

II.  El  dirai  vos  de  lor  mestiers 
Aisi  con  cel  qc  nos  2  cosou- 

[siniers3 

Dausir  e  de  sufoir'»  lur  glat 

Sim  pesa  mas  non  ai  laisat 

5  Qeu  de  mal   dir  vos  com- 

[bata 
&  ia  del  plus  nom  sapchon 

-rat 

Car  mos  cors  totz  non  los 

[mata. 

III.  Lauzeniador  fai  on5encom- 

[briers 
Als    cortes   &   als   drechu- 

[riers 
&  a  celas  qau  6  cor  a  saur  7 
E  qecs  per  aqel  eu  8  mer- 

[chat 
5  A  lautre  cobri  &  aplata 
Son  vergonios  auol   batot9 
Aisi  sô  deser  ,0  eschata. 

IV.  Perqei  fal  totz  pros  caua- 

jliers 

Qels  cre  qus  voulios  "  pla- 

[zentiers 

Mas    per  qen    traia    miels 

["sonat 

Qil  penson  ist  mal  amat  12 

5  Pos  dais  non  vais  vna  rata 

De  qal  saras13  sa  voluntat 

<>il  dizlauzenias  ol  grara  '*. 

V.   (p.  193)  Dautres  ni  a  qei  van 

[estiers 
Qes  far 15  qers 16  cortes  uffa- 

[niers 


Qe  per  oltra  euzamen  17  fat 
0  cuia  auer  meil  gazainiat 

5  Cel  qe  plus  la  lenga  lata 
En  dir  de  partir  lamistat 
De  cels  en  cui  iois  Baflata. 
VI.  Qcl  plus  pros  el  plus  galau- 

[biers 
Veg  de  luuzeniar  presentiers 
B  pens  me  domen  qaia  amat 
Com  pot  far  amador  irat 

5  Mas  ges  qi  qen  crit  on  glata 
Non  amon  tug  cil  qan  baisât 
So  sap  si  donz  na  lobata. 

VII.  Tais  cui  esser  cortes  entiers 
Qes  vilas  daus  qatre  ladrers 
E  al  cor  dins  mal  enseigniat 
Plus  qe  feutres  [....J18 

5  Ni  tros  de  beou  escarlada  l9 
Non  sabon  mais  qei  van  tur- 

[bat 
E  qeis  cos  pot  galafata. 

VIII.  Pos  non  aus  mos  durs  de- 

[zirs  20 

Dir  ta  tem  qei  danz  fos  do- 

[bliers 

Mas  dirai  ios  21  en  luec  dau- 

[rat 
&  dieus  qan  fara  charitat 
5  Los  maldiga  els  trabata 
Sai  e  pois  lai  e  nei  romprai22 
On  recebran  de  nauata. 
IX .  Pailhairet  non  ies  granz  pail- 

[liers 
Daqest  vers  umplis  tos  pa- 

[ners 
En  porta  tôt  ton  col  cargat 


1  l.  :  lor  maluasa  —  *  c.  en:  nés  —  3  /.  :  costumiers  —  *Z.  :  sufrir  —  3  /.  : 
*an  —  ,;  /.  :  qan  —  '  c.  en:  asaut,  l.  :  ausat  —  **  /.  :  eis  —  ;'  c.  en:  batat 
/. :  barat  —  '*'  /.:  de  fera  —  "  c.  en:  non  lies  —  12  l.  :  aurat  —  13  c.  en  : 
qeil  taras —  "  c.  un  :  jrrata  —  ' ••  /.  :  fan  —  IG  c.  en  :  ries  —  1'  c.  en:  Qerir  o. 
euzamen  —  '"  /.;  f.  semlila  sendat —  19  c.  en  :  escarlata  —  -0/.  :  deziriers 
—  il  t.  :  uos —  **  /.  :  on  es  comprat 

10 


140 


LE  CHANSONNIER  DE 


An  girart  de  cui  ai  peccat 
5  A  perpinian  part  leuochata 
E  dir  pe>"  qe  maia  coinprat 
Qen  chant  qi  qe  sen  debata. 
X.  Ben  chant  qi  qe  sen  debata 
Dels  lauzengiers  qan  ioi  bais- 

[sat 
Del  suc  4  tro  en  la  sabata. 
XI.  Joglar  seu  ia  cautz  sabata 
Qi  nous  ve  pauc  a  caualgat 
Ni  sap  per  qe  se  debata. 


210 

REAMBAUTZ    DAURENGE 

(=  B.  Gr.  389,  32) 

I.  Non  chant  per  auzel  ni  per 

[flor 
Ni  per  neu  ni  per  gelada 
Ni  neis  per  freg  ni  per  cha- 

[lor 
Ni  per  reuerdir  de  prada 
5  Ni  per  nuil  autr  esbaudimen 
Non   chan  ni  no  soi  chan- 

[  taire 
Mas   per   mi    donz    en    cui 
[menten 
Car  el 2  del  mon  la  belaire. 
II.   Ar  soi  partitz  de  la  peior 
Cane  fos  vista  ni  trobada 
Et  am  del  mon  la  belazor 
Donna  e  la  plus  prezada 
5  E  tarai  o  al  meu  viuen 
Qe  dal  res  no  soi  amaire 
Car  eu  cre  qil  a  bon  talen 
Ves  mi  segon  mo  veiaire. 
III.  (j).  194)   Ben  airai  3   donna 
[grant  honor 


BERXART  AMOROS 

Si  ia  de  vos  mes  iutiada 
Onranza  qe  ses  cobertor 
Vos  ténia  nud  embrassada 
5  Car  uos  uales  las  meilliors 

[cent 
Qeu  non  soi  sobre  gabaire 
Sol  de!  pez  '*  ai  mon  cor  iau- 

[zen 
Plus  qe  sera  emperaire. 
IV.  De  mi  donz  fas  donne  segnior 
Cals   ce  sial  destinada 
Car  eu  begui  del  amor 
Qe  iaus  deg  amar  celada 
5  Ab  tris  tan  can  lail  det  izeus 

[gen 
E  bêla  no  sap  als  faire 
Et  eu  am  per  aital  couen 
Mi    donz   dont   nom   puesc 
[estraire. 
V.  Sobre  totz  aurai  gran  valor 
Saitals  camiza  mes  dada 
Con  yseus  det  a  lamador 
Cane  mais  non  era  portada 
5  Tristan   molt    prezes    gent 

rprezent 
Daital  soi  eu  enqistaire 
Sil  me  dona  cil  qeu  menten 
Nous  teing  enueia  bel  fraire. 
VI.  Veiatz  donna  con  dieus  acort 
Donna  qe  damas  5  sagrada 
Qizeus  istet  en  gran  paor 
Pois  fo  breumens  conseil- 

Tliada 

L 

5  Qil  fes  a  son  marit  crezen 
Canchomqenasqes  de  maire 
Non  toqes  en  lieis  mantenen 
Atrestal  podes  vos  faire. 
VII.    Caris tia  e  fauzimen  G 
Aportes  adaizel  repaire 


i  /.  :  lue  -  l.  :  es  —   3  /  :  aurai  —  4  /.  :  prez  —  5  /.  :  damar  —  6  L:  C. 
esiauzimen 


LE  CHANSONNIER   DE  BEllNART   AMOROS  J47 


Ont  es  mi  donz  qem  ten  gau- 

[zent 

Plus  qeu   .-is  non  sau  '  re- 

[traire. 

211 

(=  B.  Gr.  29,  18) 
RAEMBAUTZ  DAURENGA 

I .  Sols  soi  qi  sai  lo  sobrafar  2 

[qim  sortz 

Al  cor  damor  sufren.  per  so- 

[bramar 

Qarmos  volers  es  ta  m  ferais 

[et  entiers 

Cane  non  sesduis  de  seleis 

[ni  sestors 

5  Cui  en  cubicel  prim  vezer.  e 

[pois 

Cades    sens  leis    die   a  lei 

[cent  bos  motz 

Pois  can  la  vei .  no  sai  tan 

[lam  qe  dire. 

II.  Dautras    vezer  soi   secs  e 

[dauzir  sortz 

Qan  sola  lieis  veg  e  aug  e 

[esgar 

E  ies  daiso  noil  soi  fais  pla- 

[zentiers 

Qe  mais  la    vol  non  ditz  la 

[bocal  cors 

5  Qeu  nô    uau    tan  câpres  3 

[valz  ni  planz  ni  pojs 

Qeu  v  vn  sol  cors  trop  aissi 

[bos  aibs  totz 

Qen  lieis  s  vole  deus  triar  & 

[eslire. 

III.  Ben  ai  estât  ad  autras  bonus 

[cortz 


Mas  sai  ab  lieis  trop  •  mais 

[qe  lauzar 

Mesure  sens  &  autrez  bos 

[mestiers 

Beutat  iouë  bos  faitz  e  bêla 

[damor 

5  Gent  cortesia  laduis  7 

Tant  ai  de  si  totz  faitz  «le 

plazentz  ros 

De  lieis  non  crei  aies  8   de 

[be  sia  dire 

IV.  (p.  195)  Nuls  iauziinenz  nom 

(sia  breutz  ni  cortz 

De  lieis  cui  prec  co  uoilha 

[deuinar 

0  ia  per  mi  non  o  sabria  es- 

[  tiers 

Sil  cors  qes  dins  nos  pre- 

|  senta  defors 

5  Qe  ges  lo  reis  per  aiga  qi 

[lengros 

Non  a  tal  brui  qui  cor  plus 

[larga  dolz 

Non  faz  estanc  amors  tan  la 

[désire. 

V.  Jois  e  solatz  daltram  par  fais 

[e  bortz 
Cuna  de  pretz  a  lieis  nos  pot 

[egar 

Qel  seus  sols  es  dels  autres 

[pretz  sobrers 

Aisi  non  lai  las  tan  mal  ma 

[qeu  mor 

5  Pos  lasauz9  mes  deportz  ris 

[e  iois 

Car  en  pensan  soi  de  lieis 

[letz  e  glotz 

A  dieus  sija   serai  de  lieis 

[iauzire. 


1  /.  :  sai.  —  2/  .-  sobrafan —*/..•  camps — ic.  en  :  Qen — B /.  :  l.loa  — 
6  /.  ;  trop  pro  —  H.  ;  G.  lenseignet  c.  e  lados  —  s  l.  :  res.  —  9  /  :  Pero  lafanz 


148 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


VI.  Ane  pois  sous  pliu  nom  plac 

[tan  treps  ni  bortz 

Ni  re  al  cor  tant  '  ioi  nom 

[pot  dar 

Cou  fes  aqel  donc  anc  feing 

[lauzengiers 

No  ses  brugic  cami  sols  son 

[trésors 

5  Trop  2  eu  uo  sol  liei  non  sia 

[enois 
Bella  per  dieu  lo  parlar  e  la 

[voz 

Vol  perdre  mais  qe  dire  ren 

[qieus  tire. 

VII.  Ma  chanso  prec  qe  nous  sia 

[enois 

Qar  si  volez  grazir.  lo  se 3 

[els  motz 

Pauc   pretz    arnaut   cui  qe 

[plassa  o  qe  tire. 


212 

RAEMBAUTZ  DAURENGA 

{—  B.  Gr.  389,  16) 

I.    Er  sespan  la  flors  enuersa 

Pels  trenchans  rancs  e  pels 

[tertres 

Cals  fregz  nieus  giels  e  con 

[glapis 

Qe  cos  e  destreing  e  trenca 

5  Don    vei    mortz    qels   critz 

[braitzchiscles 

E  foilleran  et  engiscles 

Mais  mi  ten  vert  e  iauzent 

[iois 
Er  can  vei  secs  los  dolens 
[crois. 
II.  Car  enaissi  o  enuersa 


Qeil  bel  plan  me  semblon 

[tertre 
E  teing  per  flors   lo  con- 

[glap> 

El  cautz  mi  par  qel  freitz 

[trenqe 

5  E  trop  mi  son  chant  e  chis- 

[cle 
E  parom  foilljat.  li  giscle 
Sim  soi  lassatz  e  ferms  ad 

[ioi 
Qe  re  non  vei  qem  sia  croi. 

III.  Mas  una  gent  fada  enuersa 
Qem  semblo   nirit   en   ter- 

[tres 
Me  fan  trop  peigz  qel  con- 
[glapis 
Cusqecs  ab  sa  lenga  trêca 
5  E  parlon  bas  &  ab  chiscles 
E  noi  val  bastos  ni  lisches 
Ni  menassas  anz  lor  es  iois 
Can  fan  so  per  com  los  te 
[crois. 
IV.    (p.  196)  Qar  en  baisan  nous 

[euersa 
No  mo  tolon  val  ni  tertre 
Dôna  ni  gel  ni  conglapi 
Mas  nompoders  trop  en- 
[tronqe* 
5  Dona  per  cui  chant  e  giscle 
Vostre  bel  oill  mi  son  giscle 
Qem  chastion  sil  cor  ab  ioi 
Qeu  non    aus    auer    talant 

[croi. 

V.  Anait  ai  com  causa  enuersa 

Totz    temps   cercan   vais  e 

[tertres 

Mariïtz  con  hom    cui  con- 

[glapi 

Destreing  e  mal  entrenca 


1  /.  :   tant  de  —  2  l.  :  Die  t.  —  3  /.  :  son.  —  *  l.  :  entrenqe. 


LE  CHANSONNIER  DE    BERNART  AMOROS 


149 


5  Cane  nom  conqes  chanz  ni 

[chiscles 

Plus    qel  fel    clers   conqcv 

[giscles 

Mas  er  lausdeu  malberga 

fiois 

Malgrat  dels   fais   lauzen- 

[giers  crois. 

VI.  An  mos  chanz    caissi   en- 

[uersa 
E  nol  teignion  val  ni  tertre 
Lai  on  om  no  sent  conglapi 
Ni  a  poder  freigz  qe  tren- 

[che 

5  Amidonz  lo  chant  el  chiscle 

Clar  qins  el  cor  lhentrol  gis- 

[che 
Cels  qil  sab   gent  chantar. 
[ab  ioi 
Qe  nos  fai  a  chantador  croi. 

VII.  Dousa  donna  amors  e  iois 
Non    ten    ensems   malgrat 

[dels  crois. 
VIII.  Joglar  ganre  nai  meins  de 

[ioi 
Car  nous  vei  en  fas  semblan 

[croi. 

213 

REAMBAUTZ  DAURENGE 
(=  B.  Gr.  389,  40) 

I .   Una  chansonetta  feira 
Volontiers  leuet  a  dir 
Don  tem  qe  mer  a  morir 
Qe  far  lai  tal  qi  sen  cela 
5  Bë  la  poira  leu  en  ten 'Ire 
Sitôt  ses  en  aital  rima 


Li  mot  seran  descubert 
Alqes  de  razô"  deuiza. 
II.  Hom  sap  car1  mapodera 
Mos  cors  qe  non  pot  suffrir 
De  mou  talan  deBeubrir 
Cades  poi  a  plena  vêla 
5  Cui  qe  veia  is  2  disendre 
Per  qe  noi  pos  nul  escrima 
Trobar  tant  ai  trop  suffert 
De  far  parer  ma  conqiza. 

III.  Pos  ma  dona  mes  tan  vera 
Trop     miels     qeu    noil   sai 

[grazir 
Sien    qier    als    totz    temps 
[mazir 
A  dieu  ni   ian  mer  3  chan- 
cela 
5  Om  fassa  qe   be  man  pen- 

[dre 
Et   per  sa   l   gola   ad   una 

[cima 
Per  5  ma    dat  si  lieis  nom 

[pert 
Dieus  e  pagar  6  a  ma  guiza. 

IV.  Ben  saup  lo  mel  de  la  cera 
Triar  elo  7  meilz  dcuezir 
Lo  iorn  që  lieis  pois  cauzir 
Plus  cazen  8  clardat  destela 

5  A  par  nos  fai  a  contendre 
Beutatz  dautra  si  belisma  9 
Qe  ia  nin  cort  de  la  sert 
Qes  cuida  aribar  ves  piza. 

V.  (p.    197)     Domna    cant   mi 

fcolg  al  sera 

La  noit  e  tôt  iorn  cossir 

Cous  pogues  en  grat  seruir 

Cant  em    penz    qim   sier ,0 

[nim  pela 

5  Nom  pot  far  en  als  entendre 


'  /.  :  Boni  car  tan  —  2  l.  :  ios  —  3  l.  :  met  —  i  l.  :  Per  la  —  W.  :  pr0 
6/.  :  pagat — 7  /.  :  el—  R  c.  en  cozen  —  *  /.  :  bes  lima  —  10  c.  en  :  fier 


lôO 


LE  CHANSONNIER  DE 


De  gaug  mos  cors  salegri- 

[ma 
Tant  ai  en  vos  mon  cor  sert 
E  ma  voluntat  azisa. 

VI.  Domna  si  no  salezera 
Mos  cors  lai  ont  eu  dezir 

Res  plustost  non  pot  aucir 
Sim  tarza   pensât   de  cela  ' 
5  Al  cors  2  nos  pot  défendre 
Qeil  uida  mes  aitan  prima 
Souenen  gaug  em  nespert 
Em  pens  mala  lei  enqisa. 

VII.  Non  ai  fag  tan  longa  espéra 
Caissi  men  degues  marrir 
Mas  us  iorns  mes  vis  qem 

[tir 
Un  an  lo  près  duna  mêla 
5  Min  3  tem  simo  pot  car  ren- 
dre 
Dreig   qe 4   mos  cors    men 
[ferma  5 
Cades  mis  tan  hoill  ubert 
Ves  cela  part  on  lai  viza. 
VIII.  Deu  prec  tan  de  mort  mes- 

[crima 
Donna  e  maia  suffert 
Tro  qieus  embraz  ses  cha- 
[miza. 
IX.  Qi  trob  amors  ses  escrima 
Ja  nom  deu  plagnier.  sim 
Falsa  ni  vaira  ni  biza.  [pert 

214 

REAMBAUTZ    DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389,  41) 

I .   Un   vers  farai  de  tal  mena 

Ont  vueil  qe  mos  cors  pa- 

[resca 


BERNART  AMOROS 

Mas  tant  ai  rich  entendensa 
Per  qe  nestauc  en  bestensa 
5  Qe  non  pusca  complir  mon 

[ë™g 
Canz  tem  cun  sol  iorn  nom 

[uiua 

Tant   es    mos    dezirs   faitz 

[lentz. 

II.  Ins  e  mon  cor  si  semena 

Uns  volers  e  eug  qen  cresca 

Dun  ioi  qen  mettal  crezenza 

Qe    dais   non  ai  souinensa 

5  Ni   res  qe   sagues    nom  fa 

[gaug 
Anz  lais  e  mos  cors  esquiua 
Autre  ioi  qe  de  me  non  asai.6 

III.  Per7  no  sai  que  tan  grant 

[pena 

Qinz   el    cor  mi   vais 8    em 

[tresca 

Non  trais  om  senes9  pene- 

[densa 

Con   eu   qe  bella  paruensa 

5  Noi  ai  fort  naduncs  10  perqe 

[nai  gaug 

Car  uns  volers  men  abriua 

Qem   diz  qez  in  altra  non 

[poin. 

IV.  [p.  198)  Be  ma  nafrat  en  tal 

[vena 
Esta  mortz  caram  ven  fresca 
Don  nuls  metges  de  proensa 
Nadius  nom  pot  far  valenza 
5  Ni  mezina  qen  faza  gaug 
Ni  ia  non  cre  qe  sescriua 
Lo  mal  qe  inz  al  cors  mes- 

[con. 

V.  Camors  ma  mes  tal  cadena 

Plus  dois  mes  qe   mels  de 

[bresca 


1  l.:  tela  —  2  /.  :  cor  qom  —  3  c.  en  :  Nian  —  W.  :  perqe  —  H.  :  cima. 
6  /.  :  sens  —  U.  :  Ren  —  «  /.  :  nais  —  »/.  :  ses  —  10/.  :  tort  donc 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


loi 


Can   mos  pensars  mon  co- 

[mensa 

Pois    pens    qe    désirs   non 

[vensa 

5  Loncs  perqe  torn  em   plor 

[mon  gaug 

I"  vauc  cosares1  pensiua 

Car  non   ans  mostrar  mon 

[bezoin. 

VI.  Bon  ai  ma  voluntat  plena 
Da  ta]  sen  qe   sentrebesca 
E  cug  qe  maia  temensa 
Car    nuls    honi    mais    per 

[pleuensa 
5  Nomen  poiria  faire  gang 
Dona  sun  2  fossetz  aiziua 
Tost  saubra   sen  fol    men 
[peroin. 

VII.  Mas  il  nô  sap  cal  estrena 
Ma   dada  nim  com  adesca 
Car  tan  sos  pretzsobregensa 
Qil  non  cre  qeu  per  temensa 

5  Auzes  ges  de  lieis  auer  gaug 
Car  es  tan  nomenatiua 


Tem  si  lio  die  qe  mon  ver- 

[goin. 

VIII.   Dus    bes 3    granz     talanz 

[afrena 

Mon  cor  car  sens  aiga  pesca 

Pois  noil   los    puesca   pre- 

[senza 

Dir   deus    lien    don   conoi- 

[sensa 

5  Alieis  tal  came  torn  en  j.r 

Qest  vers  farai  qem  caliua 

Dir  lai    on    ab    lieis    pretz 

[sajoin. 

IX.  Ries  soi  si  lenten  en  a  gaug 

Mas   eu   non    stai    perqem 

[viua 
Sil   coneis ;  e   pos    non    na 

[soin. 
X  .   Non   deg  entendre  mal  mon 

[gaug 
Qel  bos  espers  vol  qe  viua 
El  mais  mentra  don  non  ai 

[soin. 


i  /.  :  co  fa  res  —  -  L:  sim  —  3  /.  :  Cus  bos  —•»/.:  conois . 


I  DODICI  CANTI 

ÉPOPÉE    ROMANESQUE  DU   XVIe  SIÈCLE 


(Suite) 


CANTO  DUODECIMO 

F°133v°]l.     Signor,  fur  molti  nella  antica  etade 
A  quai  Fortuna  prospéra  promise 
Eterno  honor,  perpétua  majestade, 
Ne  lor  dalle  vettorie  ample  divise 
Finchè  mostrarno  lor  chiara  bontade  ; 
Ma,  quando  inertia  nel  lor  cor  si  mise, 
Persero  a  un  punto  sol  quel  ch'in  molti  anai 
Acquistato  havean  già  con  gravi  affanni. 

2,  Di  questi  un  fu  quel  gran  Cartaginese 
Ch'  a  Canne  tante  gran  vettorie  perse 
Per  non  seguire  l'honorate  imprese  : 
Vivendo  in  otio  il  suo  danno  sufferse  ; 
Et  quel  moderno  rigido  Francese 

Ch'  altresi  in  Puglia  ai  suo'  la  morte  offerse 
Col  troppo  soggiornar,  col  star  a  bada, 
Tenendo  al  fianco  l'ociosa  spada. 

3.  Et  quel  Thosco  gentil,  di  cu'i  figliuoli 
Aile  paterne  spese  hanno  imparato 
Soleciti  esser  per  fuggir  li  duoli 

Ch'  acquistô  il  padre  nel  castel  di  Prato, 
Et  render  libertade  ai  patrii  suoli, 
Cerca  tutt'  hor  in  questo  et  in  quel  lato  : 
Cosi  in  Durazzo  hora  Milone  il  duca 
L'otio  percuote,  distrugge  et  manduca. 


CANTO   DUODFXIMd  153 

4.  Licentiô  li  suo'  militi  el  sire 

Preso  ch'  hobbe  Durazzo,  et  con  la  moglie 
Già  consumati  tutti  i  suo'  desiiï 
Et  adimpite  le  bramose  voglie, 
Non  conoscendo  i  suo'  futur  martiri 
Ne  le  maligne  sue  venture  doglie 
Pensando  chc  nisc[i]un  mai  più  il  moleste 
Ne  l'alegrozze  sue  faccia  funeste. 

5.  Vivendo,  com'  io  dissi,  alla  Francesca 
Con  giostre  e  torniamenti,  et  lieta  fronte 
Facendo  in  corte  a  ognun,  gente  Turchesca 
Accetta  seco  e  al  fin  n'hebbe  pur  onte, 
Perô  ch'essendo  ancor  la  piaga  fresca 

Se  ne  duolse  Mongrana  et  Chiaramonte, 
Onde  ne  trasse  il  duca  la  famosa 
Origine  per  sempre  glorïosa. 

[F°134r0j6.     Naparro  sotto  il  nome  di  Torrindo 

Venne  a  Durazzo  coi  compagni  in  fretta, 
11  nome  dando  che  dal  paese  Indo 
Era  venuto,  aciô  che  men  suspetta 
Renda  la  gente,  et  Ottomanno  il  lindo 
Armato  entrô  con  tutta  quella  setta 
Et  da  Lamphibo  fu  accettato, 
Ch'è  Turco  altresi  mal  battizzato. 

7.  Da  Finadusto  fu  con  molto  honore 
Ricevuto  Naparro,  et  alla  corte 
Non  si  vuol  présentai-  di  cpuel  signore 
Cui  cerca  dare  con  gran  stratio  morte. 
Vi  va  quel  altro,  ma  non  scuopr'il  core, 
Et  mena  seco  le  sue  fide  scorte 

Dei  cavallier,  con  dir  ch'  ivi  andato  era 
Per  honorar  sol  quella  giostra  altiera. 

8.  Enteso  ho  dir  che  si  gettan  tre  acque  : 
La  prima  è  quella  che  dentro  al  mar  piove  ; 
La  seconda  (di  udir  non  mi  dispiacque) 

É  che  al  somier  il  capo  lava,  dove 
L'eterna  ingratitù  per  sempre  nacque  ; 
Et  délia  terza  più  gettata  altrove 
Non  si  vidde  di  quella,  ch'  el  Guidée 
Battezza  o  il  Turco  o  l'infido  Caldeo. 


154  I  DODICI  CANTI 

0.      Si  suol  dir  un  proverbio  assai  vulgare 

Ch'  un  mal  Giudeo  non  è  mai  buon  christiano. 
Chi  facilmente  questo  vuol  pruovare, 
Hor  ne  puô  haver  l'esperientia  in  mano. 
Finadusto  et  Lamphybo  i'  vi  vuo'  dare 
Per  testimoDi  che  '1  battesmo  in  vano 
Presero  per  tradir  più  cautamente 
Milone  il  duca  et  lor  patria  dolente. 

10.     Furon  costor  cagion  che  la  citade, 
Loi"  patria,  rovinasse  a  ferro  e  sangue, 
Et  vi  périsse  con  gran  crudeltade 
Molti  christiani,  e  il  re  Gniciardo  esangue 
Per  il  fratel  restasse  ;  che  pietade 
Non  truova  hora  Durazzo  ;  et  perô  langue 
Per  il  figliuolo  la  misera  madré 
Et  la  figliuola  per  pietà  del  padre. 

lF°134  v°j  11.     Quando  la  giostra  in  piazza  ordinata  era, 
Fassi  nella  cita  tumnlto  altronde. 
Finadusto  et  Lamphybo  con  l'altéra 
Persona  di  Napar  che  non  se  asconde 
A  loro,  ma  con  la  spietata  et  fera 
Malignità  cui  par  sempre  seconde, 
Truovan  christiani  et  donne  et  fanciullini 
Occidendo  dai  grandi  ai  picciolini. 

12.  Va  il  rumor  al  palazzo  ov'  è  Seferra, 
Quai  piglia  il  fanciullino  e  in  l'antro  scende. 
Invalidisse  in  la  cita  la  guerra, 

Col  duca  il  buon  Manfredo  l'armi  prende. 
Dal  basso  centro  fin  sopra  la  terra, 
La  gentil  maga  le  figure  orrende, 
Con  le  sue  arti,  trahe  nella  spelonca, 
Col  galetto  délia  Stigia  conca. 

13.  Manda  in  Constantinopoli  quell'  armi 
Che  Volcan  fece  al  sacro  imperatore, 
Per  un  di  quei  che  coi  magici  carmi 
Haveva  de  l'inferno  tratto  fuore, 

Quai  disse  :  «  Fa  che  nullo  unqua  se  n'armi, 
Se  non  chi  con  giostrarle  havranne  honore, 
Che,  se  altrimente  mai  tu  ne  facesti, 
Il  nome  di  esser  giusto  perderesti.  » 


CANTO   nUODEClMO  lï>5 

14.  Fu  a  un  principe  si  grande  grande  il  duono, 
Ma  il  dcmon  ch'el  porté»  che  in  forma  humana 
Se  le  mostrô,  come  un  balen  dal  tuono 

Via  si  parti  tornando  alla   gran  tana 
Onde  uscito  era,  et  l'imperator  buono 
Lo  fa  cercar  per  la  cita  sovrana, 
Volendol  meritar,  ne  si  ritruova, 
Onde  s'ammira  di  tal  cosa  nuova. 

15.  Et  viste  l'armi,  che  d'una  bellezza 
l'Iran  non  vista  mai,  l'hebbe  assai  care. 
Furno  stimate  ancor  di  gran  richezza 
Che  vi  eran  gemme  pretiose  e  rare. 
Havea  l'imperador  di  gentilezza 

Un  figliuol  pieno  et  di  virtù  preclare, 
Sol  d'anni  cinque,  et  fe  dissegno  darle 
A  quello,  onde  per  quel  fe  conservarle. 

16.  Milon  fu  fatto  eon  sua  cara  moglie 
Prigione  e  in  prigion  posto  ;  ivi  conviene 
Tanto  vi  stia  con  stenti  et  amare  doglie 
Ch'el  figliuol  creschi  et  poi  a  trarli  di  pêne 
Katto  ne  venghi,  et  le  sfrenate  voglie 

Del  zio  maligno  il  giovanetto  affrene, 
Che  con  Seferra  va  in  un  piccio[  1]  legno 
Pel  mar  fuggendo  di  Naparro  il  sdegno. 

[F0  135  r°]  17      Ma  la  Fortuna,  che  è  dei  buon  nemica 
Et  spesso  in  fine  al  cielo  i  tristi  estolle, 
Ne  l'onde  false  quel  legnetto  intrica 
Con  contrar  venti,  et  dal  camino  el  toile 
U'  condurlo  Sefferra  s'affatica, 
Per  far  le  voglie  sue  nette  satolle, 
Che  non  le  basta  i  genitor  turbare 
Ch'ancor  persiegue  il  figlio  in  mezzo  il  mare  ; 

18.     Perché  fu  preso  il  nobile  bambino 
Da  certi  predator  nel   mobil  regno 
Di  quel  che  già  si  converti  in  d^lfino 
Sol  per  Melantho,  et  del  fanciullin  degno 
La  fida  scorta  in  mar  col  capo  chino 
Sendo  gettata,  il  ciel  sempre  benegno 
La  rimutô  in  l'augel  ch'al  marin  lito 
In  bianchc  penne  è  passeggiando  unito. 


156  I  DODICI  CANT1 

19.     Doppo'  fu  comperato  il  fanciulletto 

Dove,  il  bol  monton  d'or  trasportando  Helle, 

Da  lei  caduta  Hellesponte  vien  detto, 

Et  quel  fu  trasmutato  in  chiare  stelle. 

A  Biza[n]tio  portato  il  pargoletto 

Fuggi  le  sorti  sue  crudeli  et  felle, 

Che  fu  nudrito  e  imparô  in  le  scuole 

Ciô  che  liber  fanciullo  imparar  suole. 

20.  Lungo  saria  il  volervi,  s'io  volesse 
11  tutto  corne  et  quando  racontarvi, 
Ma  bastami  servar  le  mie  promesse 
Et  sol  Thystoria  qui  manifestarvi 

Del  pro  Guerino,  et  poi  quel  che  successe 
Di  lui  più  a  pieno  spero  dichiararvi. 
Basta  ch'  io  dichi  como  acquistô  Farmi, 
Perche  dirlovi  haver  promesso  parmi. 

21.  Epydonio  fu  quel  ch'  el  fanciulletto 
Comprù  dalli  corsari  et  porto  seco, 
Trovando  una  nudrice  che  col  petto 
Li  desse  il  latte,  che  di  figli  cieco 

Era  egii  in  prima,  ma  il  motor  perfetto, 
Che  niscium  lascia  over  Latino  o  Greco 
De  l'opre  pie  senza  buon  guidardone, 
La  moglie  fecondô  d'un  bel  garzone. 

22.  Cosî  fur  nudricati  in  modo  taie 
Che  l'un  da  l'altro  non  si  conosceva, 
Ciô  è  quil  schiavo  da  quel  naturale 
Figliuol  ;  perô  Guerino  esser  credeva 
Figlio  a  Epydonio  et  a  quel  altro  uguale 
Certo  fratel  germano  si  teneva. 

Era  loro  un  vestir,  un  viver  solo, 
Corne  se  stato  anch'  ei  fusse  figliuolo. 

;  F°  135  v°]  23.     Perché  meschinamente  fu  truovato 
In  man  di  ladri  il  degno  fanciullino, 
Non  sapendo  che  fusse  battezzato 
Ribatezando  il  fe  chiamar  Meschino. 
Enidonio  il  figliuol  poi  fu  nomato, 
Ma  fu  di  aspetto  tanto  pellegrino 
Quel  prima  detto  comprato  fanciullo 
Ch'a  ogni  animo  gentile  era  trastullo. 


CANTO  DUODECIMO  Ï5' 

24.  Et  pervenuto  al  quintodeeimo  anno 
Cou  Enidonio  esscndo  andato  iu  corte 
Del  sacro  imperador  u'  sen/.  i  affanno 
Si  vivea  lieto,  le  toccô  per  sorte 

Giocar  a  lotta,  et,  non  senza  onta  et  danno 
Dei  lottatori,  tanto  destro  et  forte 
Si  demostro  che  venti  o  più  ne  vinse 
Nanzi  ch'  ei  si  straccasse  e  in  terra  spinse. 

25.  Onde  Alexandro,  al  degno  imperatore 
Vero  figliuol  di  sangue  et  di  costumi, 
Al  Meschin  puose  tanto  grande  amore 
Che  sempre  in  lui  tenea  firmati  i  lumi, 
Considerandol  tutto,  et  dentro  al  core 

Si  mise  per  lui  spender  molti  numi 
Comprandolo,  onde  ad  Enidonio  chiese 
Ch'  in  venderglelo  fusse  al  men  cortese. 

26.  Quai  le  rispose  non  posser  disporre 
Del  Meschin  senza  la  paterna  voglia, 
Ond'  Alexandro  ad  Epydonio  esporre 
Fe  il  suo  désir  et  lui  pregar  che  voglia 
Concederli  el  Meschin  et  tanto  tuorre 
D'argento  o  d'or  al  désir  le  accoglia, 

Pur  che  le  dia  il  Meschin,  che  sol  le  piace 
Sempre  haver  seco  per  sua  eterna  pace. 

27.  Enidonio  gentil  discreto  et  buono, 
Al  suo  signor  in  tutto  sempre  grato, 
Le  ne  fece  cortese  et  largo  duono, 
Narrando  corne  l'haveva  comprato 
Da  certi  ladri  che  di  voce  in  suono 
Le  disser  corne  l'havevan  predato 
De  Sefferra  che  n'era  curatrice 

Et  con  molto  oro  et  gemme  e  una  nutrice; 

28.  Et  corne  haveano  l'una  et  l'altra  donna, 
Ma  pria  la  vechia,  dentro  al  mar  gettata, 
L'altra  che  di  bellezza  era  colonna 

Da  tutti  i  marinar  sendo  stuprata, 
Ma  perù  a  forza,  in  fine  che  la  gonna 
Con  tutto  el  corpo  bel  fu  lacerata, 
Et  al  ciel  rasa  l'animetta  pura, 
Al  corpo  derno  il  mar  per  sepoltura. 


158  I  DODICI  CANTI 

[F°i36r°]29.     Il  tutto  ode  Guerin  che  era  présente 
Ciô  che  Epydonio  ad  Alessandro  dice  ; 
Dagli  ochi  il  pianto  et  un  suspir  rovente 
Da  1*  imo  petto  esala  et  se  infelice 
Chiamando  pria  ;  et  poi  di  quella  gente 
Quai  sia  diuianda  che  fn  prédatrice 
Di  lui,  quali  esser  Turchi  entese,  onde  ello 
Giurô  di  famé  un  di  crudel  macello. 

30.  Et  lo  successe  poi,  corne  odirete, 
Che  fu  de'  Turchi  capital  neraico, 
Et  felli  capitar  entro  una  rete 

Che  fu  a  lor  duro  laccio  et  grande  intrico 
Più  ch'  a  1'  imperio  il  sdegnato  Narsete 
Vedendo  il  cor  d'Augusta  esserli  oblico  ; 
Ma,  lasciando  ogni  cosa,  i'  vi  vuo'  dire 
Come  l'armi  acquistossi  il  gentil  sire. 

31.  Era  Alessandro  di  bella  statura 
Proportionato  et  di  cor  generoso, 
Cui  donô  il  padre  la  bella  armatura, 

La  roazza,  il  scudo  e  il  brando  luminoso, 
Che  le  piacevan  fuor  d'ogni  misura 
Per  la  bellezza  lor,  ma  gli  era  ascoso 
Ciô  che  in  quelle  era,  quai  il  sir  si  pruova 
Ne  ben  le  stanno  o  pur  se  armar  ripruova. 

32.  Quando  ha  più  volte  et  più  pruovato  il  sire, 
La  prima  volta  le  truovô  assai  strette, 
L'altra  si  larghe  che  non  son  ben  dire, 

Et  l'altra  corte  ;  et  quando  poi  si  mette 
In  pruova  di  volersene  vestire, 
Più  al  corpo  suo  le  ritruovava  inette, 
A  tal  che  se  ne  lagna  asai  et  le  spiace 
Non  potersi  vestir  quel  che  le  piace. 

33.     Et  cosi  quando  è  largo  et  quando  stretto 
O  quando  è  troppo  cupo  o  troppo  piano 
Il  vago,  bello  et  pretioso  elmetto, 
Il  che  par  caso  ad  Alessandro  estrano. 
Altresi  ancor  le  avvien  di  quel  perfetto 
Brando  non  fatto  per  oprar  humano, 
Che  quando  è  corto,  quando  lungo  et  quando 
Leggiero  et  quando  è  grave  il  degno  brando. 


i.ANTO    DUODECIMO  159 

34.     Similemen te  délia  mazza  et  seudo 

Avvien,  chequando  leggi  etquando  gravi 
Sono  al  campion  d'ogai  baldanza  igaudo, 
Onde  par  che  grao  doglia  il  sir  aggravi 
Che  servir  non  si  puà  di  quelle,  et  crudo 
Par  a  ciascun  il  caso,  et  alli  ignavi 
Fabri  de  1'  armi  par  cosa  impossibile 
E  agli  huaiaui  intelletti  anco  incredibile. 

[F"136  v°]35.     Prendoao  la  misura  al  sir  gentil'' 

Più fabri  eh'  ban  de  V  armi  il  nome  chiaro, 

Ne  alcun  sa  ritruovar  modo  ne  stile 

Di  guastar  quelle  o  a  quelle  farne  uu  paro. 

Era  illavor  si  bello  et  si  sottile 

Che  di  ponervi  man  tutti  dubbiaro, 

Ma  pur  pruovando  ruppero  i  scolpelli, 

lucudini,  tenaglie  et  più  martelli. 

36.  Non  si  ponno  guastar  per  quella  tempra 
Ch1  hebbero  prima  dal  suo  dotto  fabro, 

Che  ogni  altro  ferro  o  vi  si  frange  o  stempra; 
Perô  par  forte  il  caso,  duro  et  scabro 
Et  di  esserne  pur  donno  più  s'insempra 
11  gran  disio  nel  sire,  et  torce  il  labro 
Pel  sdegno  grande  che  nel  cor  s'imprime, 
Onde  a  guastarle  fa  pruovar  più  lime. 

37.  Una  si  spezza,  l'altra  perde  il  taglio. 
Straccanosi  li  fabri  intorno  a  quelle, 
Mirano  tutti  al  pretioso  intaglio, 

Le  frondi  et  ghiande  con  misure  belle. 
Di  piu  armature  a  quelle  fanno  aguaglio 
Ne  di  beltà  si  truovano  corne  elle 
Ne  di  fortezza  ancor,  perché  i  diamanti 
Che  quelle  assai  più  foran  franti. 

38.  Onde  Alessandro  si  perturba  et  dice  : 

«  Chi  sia  questo  Guerin  che  quivi  è  scritto  ? 
Mai  non  se  intese  ancor,  ma  ben  felice 
E  più  di  me  se  a  suo  comodo  dritto 
Posseduto  ha  queste  armi  ;  et  io  felice 
Tanto  son  più  di  lui  quanto  più  afflitto 
Sono  per  non  gioir  di  si  bel  duono 
Che  m'ha  donato  il  genitor  mio  huono  ». 


160  I  DODICI  CANTI 

39.  Le  fa  riporre  al  pristino  suo  Iuoco 
Con  pensier  di  truovar  chi  a  lor  simili 

Ne  faccia  ancor,  tornando  a  festa  et  giuoco 

Coi  suo  baron  magnanimi  et  gentili. 

Ha  il  Meschin  sempre  seco,et  sempre  in  fuoco 

Di  sdegno  accesi  l'aima  e  il  cor  virile 

Il  giovanetto  ha  sol  per  non  sapere 

Délia  sua  stirpe  le  certanze  vere. 

40.  Frâ  gli  al  tri  un  di  Alessandro  et  più  baroni 
Giocando  a  lotte,  a  pale,  a  tirar  pâli, 

Ch'  ivi  eran  de  diverse  regioni, 
Si  truovan  tutte  quelle  armi  fatali 
Ne  fuvi  alcun  in  tutti  quei  campioni 
Cui  stesser  ben,  perben  che  molti  uguali 
Erano  di  persona  al  bon  Guerino, 
Ma  sol  s'assettan  ben  sovra  el  Meschino, 

[P°  I37r°"41.     Vuolse  Alessandro  alhora  un  duono  farne 
Al  suo  Meschin,  ma  in  piè  nacque  un  tumulto, 
Che  ciô  non  si  dee  far  per  contentarne 
Un  sol,  che  fora  agli  altri  troppo  insulto 
Et  tanti  gentil  homin  scontentarne, 
Onde  uno  ad  Alessandro  dà  consulto 
Che  non  vuoglia  dispor  senza  del  padre 
In  ridonar  altrui  l'armi  leggiadre. 

42.  0  invidia  che  in  le  corti  sempre  pasci 
La  tua  ingordigia  et  dishonesta  famé, 
Che,  se  hoggi  muoiï,  diman  rinasci 
Quai  vivo  semé  sparso  inbuon  letame, 
Tal  che  mai  discader  tu  non  ti  Iasci 

Ne  a  te  rompeno  mai  le  Parche  il  stame, 
Ma  tu  pulluli  più  che  gramigna 
Perché  aile  corti  sei  fîda  matrigna. 

43.  Onde  Alessandro  al  sacro  impei  adore 
De  l'armi  raguagliô  la  cosa  intera. 
Per6  de  l'armi  vuol  che  sia  signore 
Chi  quelle  vince  con  battaglia  fera, 
Ricordatosi  corne  il  donatore 

Le  disse  già  che  a  chi  per  giostra  altiera 
L'acquistarà,  si  dessero  et  no  ad  altri, 
Ancor  che  fussin  valorosi  et  scaltiï. 


CANTO    DUODECIMO  ICI 

44.  Cosl  uno  editto  fe  che  ogmm  potesse, 
Pur  che  fusse  signor  o  cavalliero, 
Giostrar  qell'  arnai,  et  quel  che  le  vincesse 
Ne  andasse  di  elle  et  di  gran  fama  altiero; 
Ma,  se  per  sorte  alcun  se  prosumesse 

Ivi  giostrar  che  non  fusse  guerriero 
Famoso  o  sir  di  qualche  deguo  stato, 
Subito  preso  sia  decapitato. 

45.  Quando  entese  il  Meschin  la  conditione 
Con  quai  covien  che  tal  armi  si  giostri, 
Ne  l'animo  ne  prende  gran  passione 

Che  sol  chi  è  franco  cavallier  dimostri 
Quanto  egli  vaglia  fra  l'altre  pcrsone  ; 
Voltando  gli  ochi  alli  superni  chiostri 
Si  lagna  di  sua  cruda  e  amara  sorte 
Che  schiavo  l'habia  fatto  et  tolto  a  morte. 

46.  Non  ride  più,  non  giuoca  et  non  fa  festa, 
Non  si  ralegra  più  corne  egli  suole, 

Non  alza  più  la  delettevol  testa, 
Più  non  motteggia  con  grate  parole, 
Ma  sempre  più  la  fantasia  il  molesta. 
Piange  da  se,  suspira,  assai  si  duole, 
Perde  il  color  suo  solito,  et  la  mente 
Sempra  più  gramaet  più  turbata  sente. 

[F°137v°]47.     Vede  Alessandro  questo  et  sta  turbato, 

Perche  si  pensa  ch  'el  Mcschin  sia  infermo. 

Délia  cagion  l'ha  subbito  spiato, 

Ma  quel  non  scuopre  il  suo  proposto  fermo, 

Anzi  si  escusa,  et  di  essersi  mutato 

Non  creder  dice,  et  non  ne  puo  far  schermo. 

Pur  lo  costringe  sotto  giuramento 

Che  '1  ver  le  dichi  senza  haver  spavento. 

48.     Tanto  è  l'amor  ch'  Alessandro  le  porta, 
Che  giura  anche  egli  non  negarli  mai 
Cosa  ch'  ei  chicgga,  onde  si  riconforta 
Alquanto  il  buon  Meschino  et  dei  suo'  lai 
Al  suo  Alessandro  âpre  la  chiusa  porta, 
Et  dice  :  «  Signor  mio,  non  vorei  mai 
Essere  in  questo  miser  mondo  nato 
Poichè  '1  giostrar  de  l'armi  mi  è  vietato. 

11 


162  I  DODICI  CANTI 

49.  Non  che  la  cupidigia  mi  ci  tiri, 

Ma  sol  disio  d'honor  d'acquistar  fama 

Mi  dà  dentro  del  cor  crudel  martiri, 

Ch'  io  veggio  da  lontan  che  sol  mi  chiama 

Vittoria  a  questa  impresa,  et  con  suspiri 

Convien   ch'  io  mi  rimanghi,  onde  ogaor  hrama 

Mia  istessa  morte  il  mio  spirito  afflitto 

Dal  ciel  et  da  Fortuna  derelitto. 

50.  Viver  non  vuo'  più  in  questa  mortal  vita, 
Se  vita  si  puô  dir  questa  mia  sorte, 

Quai  giorno  e  notte  a  desiar  m'invita 

Sol  per  uscir  di  servitù  la  morte 

Che  certamente  per  sententia  trita 

E  men  di  servitù  crudele  et  forte, 

Che  mille  volte  il  di  vivendo  i'  moro 

Fin  ch'  io  son  schiavo  con  crudel  martoro. 

51 .  Vedendo  il  pio  Alessandro  cl.o  '1  Meschino 
Délia  sua  sorte  si  lamenta  et  piange, 
Tenendo  per  pietade  il  capo  chino 

Verso  la  terra,  dentro  del  cor  s'ange, 
Et  giurando  promette  al  poverino 
Che,  se  ei  vuol,  giostrarà.  Cosi  le  tange 
La  mano  con  gran  fede  et  con  amore 
Benchè  non  vogli  ancor  lo  imperadore. 

52.     Et,  se  ei  si  porta  nella  giostra,  ancora 
Soggiunge  il  sir,  corne  ei  bramando  spera, 
Libero  farlo  senza  altra  dimora, 
Et  honorar  la  sua  persona,  e  altiera 
Farla  fra  cavallier  in  poco  di  hora. 
Tanto  nel  dir  mostrô  grata  maniera 
Che  ritornô  al  Meschin  quel  color  vivo, 
Di  che  stato  era  per  più  giorni  privo. 

[F°i38r°]53.     Di  Grecia  in  ogni  luogo  si  divolga 
La  giostra  impérial  dever  si  fare 
Il  primo  di  di  Maggio,  et  ch'  ognun  tolga 
Il  tempo  a  proveder  corne  li  pare, 
Ne  vuol  lo  imperador  che  si  rivolga 
Lo  editto  suo  che  nisciun  puô  giostrare, 
Se  non  è  gentil  huomo  e  cavalliero 
Overo  che  habia  giusto  et  meroimpero. 


CANTO    DUODECIMO  163 

54.  Cosî  il  tempo  ne  viene  atto  alla  giostra. 
Si  adunano  i  guerrier  Greei  et  Latini 

Con  pompa  grande,  et  ciaschedun  si  moslra 
Con  belli  arnesi  et  corsier  pellegrini. 
Intendesi  fra'  Turchi  che  si  giostra, 
Ch'  al  Greco  imperador  presso  ai  confini 
Sono,  onde  li  figliuoi  d'Astiladoro 
Vivean  con  grande  pompa  et  con  molto  oro. 

55.  Huvevan  triegua  alhor  Turchi  et  christiani 
Greci  per  ducento  anni  insieme  tutti, 

Ne  coi  sol  Turchi  ma  ancor  con  gli  Alaui, 
Con  Mori  et  Saracin  malvagi  et  brutti, 
Onde  dalli  paesi  ancor  lontani 
Vennevi  gente  assai  per  corre  i  frutti 
Délia  virtù,  che  son  fama  et  honore, 
Loda,  gloria  perpétua,  immenso  amore. 

56.  Astillador  duo  figli,  de'  quali  uno 
Torindo  detto  et  Pynamonte 

L'altro  nomato,  et  si  superbo  è  ognuno 
Dei  duo  fratei  che  non  estiman  fronte 
D'altrui  et  nel  pensier  han  che  nisciuno 
Lor  tolga  il  pregio,  onde  per  valle  et  monte 
Cavalcan  con  gran  pompa  et  da  Gismondo 
Furno  acettati  con  il  cor  giocondo. 

57.  Di  Macedonia  il  principe  vi  venne 
Polydamante,  et  délia  Assiria  il  re 
Amphymonte  gentil,  et  quel  che  tenne 
Di  Lychaonia  il  scetro,  lo  quai  fe 

In  giostra  il  suo  dover  rompendo   antenne, 
Non  che  le  lance,  e  altrui  fastidio  diè, 
Brunante  detto  ;  et  d'Alessandria  il  vero 
Signor,  che  fu  nomato  Narpalero. 

58.  Amphylo  ancor  figliuoi  del  re  dei  Persi 
E  i  duo  Albanesi  zii  del  pro  Meschino, 
Che  i  genitori  suo'  tenean  sumersi 

In  oscura  prigion,  ma  più  meschino 
Vi  fu  Madarro,  che  coi  passi  persi 
Perso  la  vita  per  man  di  Guerrino, 
Come  udirete  suecessivamente, 
S'havrete  al  cantar  mio  l'orechie  atente, 


164  I  DODICI  CANTI 

[F0  138  v°]  59.     Pria  che  giostrasse  il  Meschin,  manumesso 
Fu  da  Alessandro  quai  fedel  chiïstiano, 
Benchè  farlo  doppo  gli  havea  promesso 
Libero,  ma  Epidonio  tutto  humano, 
Che  quel  ch'  amava  hebbe  al  suo  sir  concesso, 
Le  supplice  ch'  in  affrancar  lo  estrano 
Non  le  fusse  Alessandro  quai  havaro 
Non  li  essendo  ;  rogarne  fe  il  notaro. 

60.  Tre  cavai  sol  potea  ciasehedun  seco 
Menar  chi  a  questa  giostra  esser  volea, 
Cavallier  Turco,  Mor,  Perso,  lndo  o  Greco 
0  venuto  di  Persia  o  di  Galdea, 

Signor,  conte,  marchese,  e  duca,  bieco 
Non  havendo  egli  il  cor,  entrar  potea 
In  la  cita  ove  riceveva  honore 
Dal  magnanimo  et  sacro  imperadore. 

61 .  Tutti  i  signor,   che  già  di  sopra  ho  detto, 
Nella  regia  era[n]  con  araor  tenuti 

Per  fin  che  giunge  il  di  fra  gli  altri  elletto, 
Che  fu  il  primo  di  Maggio,  et  dagli  arguti 
Cavallier  si  prevenne  al  degno  effetto 
Délia  giostra  ove  fur  abbatuti. 
Vedendo  ciô  il  Meschin  per  sdegno  et  rabbia 
Quasi  piangendo  si  mordea  le  labia. 

62.         Con  Elisena  sopra  un  palcho  ito  era, 
Sorella  d'Alessandro  cui  serviva, 
Il  buon  Meschin,  che  quasi  se  dispera. 
Scendendo  a  basso,  ov'  è  Alessandro,  ariva 
Et  dicele  :  «  Signor,  già  Paîtra  sera 
Mi  promettesti  pur  a  voce  viva 
Ch'  io  giostrarei,  et  hor  si  giostra  et  io 
Stonimi  a  veder  con  pena  et  dolor  rio  ». 

63.     Un  poco  se  arossô  Alessandro  in  volto, 
Poi  seco  lo  mena  dentro  al  pallagio 
E  armollo  di  sua  man  d'armi,  che  molto 
Erano  sodé,  et  ragionando  ad  agio 
Seco,  le  disse  :  «  Honor  portando  et  sciolto 
Dagli  altri  torna  quivi,  che  malvagio 
E  tanto  il  padre  mio  che  certo  i'  dubbito 
Che  ti  faria  morir  sapendol  subbito.  » 


CANTO    DUODECIMO  165 

64.      Sopra  l'armi  un  a  vesta  da  villano 
Le  puose  il  sir  et  délie  un  caval  forte, 
Ponendoli  sul  capo  di  sua  mano 
Di  quercia  una  corona,  che  per  sorte 
Ivi  un  ramo  truovo  poco  lontano  ; 
Poi  sul  caval  il  pose  e  uscir  di  corte 
Lo  fece  dal  postico  in  giostra  intrare, 
E,  a  ciascun  che  lo  vede,  un  villan  pare. 

[F0  139  r°]  05.     Porta  di  faggio  una  ben  grossa  lancia, 
Sopra  postovi  un  fer  truovato  a  caso. 
Se  li  oppone  un  de'  zii  che  senza  ciancia 
Puonerlo  in  terra  s'  havea  persoaso. 
Madarro  è  questo,  a  cui  mezzo  alla  pancia 
La  ruzza  hasta  passé  rompendo  il  vaso 
Délie  intestine  et  più  d"un  palme  et  mezzo 
Dietro  passando  lo  lascio  al  dassezzo. 

66.  Ritira  l'hasta  a  se  cou  gran  valore. 
Lievasi  il  corpo  ch'in  sul  terren  jace. 
Chiede  di  gratia  al  magno  imperadore 
Nappar  giostrar  con  quel  villano  audace, 
Ne  gli  el  niega  ello,  et  con  molto  furore 
Ne  va  contra  al  Meschin  come  rapace 
Ancipitre  al  fagian  ;  pieno  di  sdegno 
Vendetta  spera  contra  il  guerrier  degno. 

67.  Al  primo  iscontro,  il  nobile  Meschino 
Diede  in  l'helmetto  al  suo  secondo  zio, 
Et  le  giovù  che  di  tempra  era  flno, 
Che  come  l'altro  con  tormento  rio 
L'harebbe  posto  a  l'estremo  dirnino 

Di  morte  orrenda,  ma  pur  pagô  il  fio 
Délia  superbia  sua  ch'ello  e  il  cavallo 
Caddero  al  colpo  senza  altro  intervalle 

68.  Et  la  eaduta  fu  si  cruda  et  fella 
Che  se  le  roppe  la  sinistra  spalla, 
Maledicendo  la  sua  fera  Stella. 

Ne  si  torce  il  Meschin  punto,  o  traballa, 

Anzi  murato  par  sopra  la  sella 

Del  destrier,  che  ne  fa  dritto  et  non  falla. 

Se  représenta  con  la  lancia  in  mano 

Cui  il  popol  [grida]  :  «  Viva  hora  il  villano!  » 


166  I  D0D1CI  CANTI 

69.  Amphylo  Perso  in  su  l'armata  coscia, 
Di  sdegno  pien,  con  l'hasta  s'apresenta, 
Pensando  a  quel  Mesehin  donare  angoscia, 
A  quel  Mesehin  che  di  nisciun  paventa. 
Arestano  le  lance  ambi  duo'  et  poscia 
Menando  i  spron  tengon  la  briglia  lenta. 

Si  ferono  amendua,  ma  il  colpo  adverso 
Fa  col  cavallo  andare  in  terra  il  Perso. 

70.  Già  l'hora  tarda  per  quel  di  fin  puone 
Alla  giostra.  Alexandro  se  ne  torna 
Verso  el  palazzo  et  aspetta  il  campione 
Che  con  vettoriosa  palma  s'orna 

Le  chiare  tempie  più  che  di  corone 
D'oro  li  régi  ;  et  mentre  che  soggiorna 
Alessandro,  il  Mesehin  ritorna  dove 
Quello  lieto  l'aspetta  et  non  altrove. 

[F0  139  v°]  71.     Et  da  lui  fu  di  peso  scavalcato 
Con  tanto  amor,  con  tanta  ligiadria, 
Poi  di  sua  propria  mano  disarmato. 
Non  par  che  schiavo  mai  stato  le  sia, 
Anzi  maggior  fratel  sempre  honorato, 
Che  non  si  satia  mai  di  cortesia 
Pieno  et  da  se  et  da  lui  sempre  honorarlo 
Abracciandolo,  e  in  faccia  di  basciarlo. 

72,     Si  pongono  alla  mensa  i  giostratori 
Et  del  vettorioso  si  dimanda. 
Serve  il  Meschino  a  tutti  quei  signori 
Portando  a  questo  e  quel  l'ampia  vivanda. 
Al  fine  del  cenar  fansi  rumori 
Di  quel  villan  che  '1  suo  nome  non  spanda. 
Si  meraviglia  ognun  poichè  vettoria 
Havendo  non  vuol  dar  di  se  memoria. 

73.     L'imperador  ad  Alessandro  chiede 
Se  sa  chi  sia  quel  cavallier  valente. 
Nol  niega  et  di  saperlo  non  fa  fede. 
11  Mesehin'  od'  il  tutto  ch'  è  présente, 
Cui  Alessandro  il  giudicar  concède 
Chi  lîionor  habia  havuto  apertamente. 
Quel  villan  disse  :  «  L'honor  ha,  perch'  io 
Non  giostro  corne  glialtri,  o  signor  mio.  » 


CANTO    DUOnrcCIMO  107 

74.  Disse  Alessandro  :  «  Donrjue  ti  dà  il  core, 
Se  tu  giostrasti  cou  'sti  cayallieri, 
Portarue  gloria  et  sempiterno  honore.  » 

Cui  «  Si  »  rispose.  Alhora  quei  guerrieri 
Risero  tutti  e  il  sacro  imperadore 
Rise  altrosl  ;  et  Alessandro  i  veii 
Successi  havendo  visti,  fa  partira 
lndi  el  Meschin,  doppoi  cominciô  a  dire  : 

75.  «  0  sacro  imperadm-,  s'io  la  podésta 
Havessi,  i'  vorrei  far  costui  giostrarc 
Per  far  più  bella  giostra  et  lieta  festa 
Et  per  voler  l'animo  suo  pruovare.  » 

El  magno  imperador  con  la  modesta 
Voce  rispose  non  voler  ciù  fare, 
Che  in  le  giostre  u[n[  tal  non  dee  mostrarsi 
Chi  sir  o  cavallier  non  puô  pruovarsi. 

76.      Non  replica  Alessandro  al  degno  padre, 
Ma,  levata  la  mensa  a  canti  et  suoni, 
S'invitan  cavallier  donne  legiadre 
A  veder  recitar  farse  et  bufFoni. 
Stanvi  Elisena  et  l'inclita  sua  madré, 
Signor,  conti,  marchesi  e  altri  baroni. 
Lascianli  solazzar  finchè  vediamo 
Il  bel  giuoco  d'Astolfo  et  de  Aleramo, 

[F°140r°]  77.     Vi  dissi  già,  signor  mio  caro,  corne 
Cavati  dal  giardin  fur  da  Sylvana 
Et  condotti  al  palazzo  del  gran  nome 
Che  fatto  fu  senza  alcuna  opra  humana. 
Il  giuoco  è  ch'un  anello  entro  aile  chiome 
Con  mille  nodi  avolto  in  foggia  estrana 
Tiene  una  Fata,  et  senza  nodo  sciorre 
Se  lo  guadagni  sol  chi  lo  puô  torre. 

78.     Ha  in  se  tanta  virtù  l'anel  richiusa, 
Che  chi  lo  porta  in  deto  a  ognun  fa  grato, 
Et  chi  in  bocca  tenerlo  in  viaggio  usa 
Non  è  da  famé  o  sete  unqua  assaltato, 
Et  ogni  tradimento  scuopre  a  accusa 
Se  al  destro  braccio  si  porta  legato, 
Et  chi  in  laccio  di  seta  el  tiene  al  collo 
Mai  non  riccve  dai  nimici  crollo. 


168  I  DODICI  CANTI 

79.  Si  pruova  et  si  ripruova  il  duca  Englese 
Di  trar  l'anello  fuor  di  tanti  nodi, 

Ne  possendo  ei  dar  luogo  fu  cortese 
Ad  Aleramo  che  con  più  et  più  modi 
Pruova  et  ripruova,  et  stan  tutte  suspese 
L'altre  Fate  a  mirar  che  si  disnodi 
Dai  capei  d'oro  et  pur  l'anel  sta  sodo, 
Ne  di  cavarlo  alcun  ritruova  il  modo. 

80.  Astolfo  ripruovarsi  vuol  da  capo 
Ch'  ha  de  l'anello  entesa  la  virtute, 
Onde  si  acosta  al  bel  dorato  capo 
Riponendo  allô  anel  le  deta  acute, 
Ma  non  ritruova  via,  modo  ne  capo 
Ch'al  desïo  infermo  suo  presti  salute. 
La  Fata  vuol  s'ei  puô  quei  nodi  sciorre 
Non  rompendo  capel,  sel  possa  tuorre. 

81 .  Discioglie  un  nodo  Astolfo,  et  si  ranoda 
Lo  biondo  crine  in  più  nodi  et  più  stretto, 
Il  che  fa  che  [1']  Englese  più  si  roda 
Dentro  del  cor  et  prendesi  dispetlo. 
Tanto  è  la  treccia  délia  Fata  soda 

Che  non  si  prende  Astolfo  ommai  diletto 
Più  dello  anel  trar  fuor,  onde  si  tira 
In  dietro  e  a  quella  col  bieco  ochio  mira. 

82.  Invitasi  Aleramo  al  gran  partito. 
Doppo  che  puô  con  mano  i  nodi  sciorre, 
Tien  volentier  il  degno  et  largo  invito, 
Et  poi  se  ingegna  con  industria  tuorre 
El  pretioso  anel  dal  crin  polito, 

Et  al  suo  desiderio  il  ciel  concorre 
Che  gli  presta  favor  et  gran  prestezza 
A  sciorre  il  crin  con  molta  gentilezza. 

[F°i40v°]83.     Si  sdegnô  Astolfo  e  non  diraostra  fuore 
La  rabbia  ch'  el  pensier  dentro  l'ofïende. 
Conosce  ciô  Sylvana  et  con  amore 
Délia  spietata  invidia  lo  riprende 
Con  dir  che  duo'  compagni  d'un  sol  core, 
D'un  solo  animo  in  tutte  lo  facende 
Deveno  sempre  mai  vivendo  insieme 
Servarsi  fode  et  in  l'un  l'altro  haver  speme. 


CANTO   DUODEC1MO  169 

84.  Poi  ambi  prende  per  la  man  la  Fata 
Ht  qninci  et  quindi  pel  palazzo  mena, 
Mostrali  dentro  et  fuor  la  stanza  grata, 
La  stanza  tutta  di  vaghezza  piena, 

Ne  la  più  bella  vidder  ne  più  ornata 
Allronde  i  cavallier  ne  tanto  amena. 
Vi  veggono  figure  agli  ochi  vive 
Che  paion  solo  dello  alitar  prive. 

85.  La  sala,  in  che  vi  dissi  che  Sylvana 
Truovor  mutata  in  serpentil  figura, 
D'una  imensa  grandezza  et  si  sovrana 
Viddero  et  ornata  di  vaga  pittura 
Che  l'opéra  gentile  più  che  humana 
Giudicarno  i  guerrier,  che  la  natura 
Escedea  dei  pittori,  et  a  mirarla 
Puosersi  e  intentamente  a  contemplarla. 

86.  Vedevano  ivi  quoi  alber  di  Giove 
Che  tenean  dei  pastori  incoronati 
D'oro  et  di  gemme,  corne  i'  dissi  altrove, 
Al  ciel  acetti,  agli  humani  ochi  grati, 

Di  quai  vedevansi  anche  le  gran  pruove, 
E  i  gesti  loro  aperti  et  denudati, 
Uno  hedifficar  ponti  et  sacri  tempi, 
L'altro  procéder  coi  mutati  tempi. 

87.  Havea  quel  primo  sotto  il  scalz  -  piede 
Dilibri  et  di  scritture  un  poggio  fatto, 
Ma  a  quel  secondo  chiaro  vi  si  vede 
D'armi  un  gran  monte  et  un  tempio  disfatto 
Più  bel  rissorgere  ove  si  concède 

Per  quello  indulto,  et  farsi  indi  ritratto 

Di  speme  che  ritorni  il  secol  d'auro 

Che  tutto  opresso  havea  li  Hispano  thauro. 

88.  Vedevasi  un  leon  schiantare  un  ramo 
Délia  honorata  quercia  et  crollar  quella 

Per  dar  le  ghiande  a  un  porco  magro  et  bramo, 

Et  alegrarsen  quella  donna  bella 

Ch'  el  sposo  suo  poi  vidde  mesto  et  gramo, 

E  adolorata  ogni  sua  damigella, 

E,  che  libéra  fu,  soggetta  farsi 

La  cupidigia  astrinse,  et  aise  et  arse. 


170  I  DOD1CI  CANTI 

[F0 141  r°]89.     Dalla  crollata  quercia  pullularsi 

Vedean  le  ghiande  più  vaghe  et  più  belle 
Et  quella  più  ne  l'aer  dilattarsi, 
Multiplicar  le  foglie  corne  stelle; 
Et  nella  terra  sue  radici  farsi 
Più  grosse  et  ferme  ;  et  nascer  sopra  quelle 
Uu  tropheo  di  vettoria  a  gigli  ornato, 
Già  da  principi  molti  desiato. 

90.  Ivi  un  altro  pastore  incoronato, 
Simile  ai  primi,  in  s'un  carro  di  fuoco 
Da  terra  in  fine  al  ciel  tutto  elevato, 
Quale  spandendo  il  manto  a  poco  a  poco 
Copria  de  Italia  il  più  famoso  lato 

E  a  duo  gentili  giovani,  in  quel  luoco, 
Porger  duo'  lembi  del  bel  manto  d'oro, 
Poi  il  car  firmarsi  nel  céleste  choro. 

91 .  Paulo  Terzo  havea  scritto  nel  diadema 
Quel  coronato,  et  un  dei  giovanetti 

Col  destro  pie  par  ch'  una  scritta  priema 
Cui  inscritto  era  :  «  Allessandro  delli  eletti 
Cardini  sacri  in  chi  virtù  non  scema 
Alcun  di  modi  soi  sacri  et  perfetti.  » 
11  secondo  «  Ranuccio  »  haveva  scritto 
Un  epytaffio  infra  il  piè  manco  e  il  dritto. 

92.  Al  piè  del  gran  pastor  un  altro  vi  era, 
Pur  giovanetto,  che  del  sacro  manto 

Si  godeva  anco  a  l'ombra,  et  alla  spera 

Del  bel  fuoco  del  carro  sacrosanto, 

Et  dimostra  il  pastor  grata  maniera 

A  quelli  e  a  questo  che  portano  il  vanto 

Di  eterno  honor,  et  il  nomme  ivi  si  legge 

Dol  terzo  :  «  Guid'  Ascanio  adempi  il  gregge.  » 

93.  Stavan  costoro  a  contemplar  suspesi 
Cosi  l'hystorie  corne  le  figure, 

Quale  vive  parean  coi  volti  accesi  ; 
Di  color  vaghe,  con  arte  et  misure 
Ben  liniate,  i  riguardanti  intesi 
Rendevan  si  che  et  ei  parean  sculture. 
Pur  ridrizando  un  oltra  più  gli  ochi 
Vidder  cose  da  saggi  et  non  da  sciocchi. 


CANTO    DUODFXIMO  17  1 

04.     Un  pastorel  con  una  pietra  viva 
Rompea  la  fronte  ad  un  gigante  elato 
La  Buperbia  di  cui  ciaschedun  schiva, 
Vedendolo  esser  forte  et  bene  armato  ; 
Ma  pur  el  pastorel  di  vita  il  priva 
Et,  col  grave  coltel  che  tenea  a  lato 
Tagliatali  l'altiera  e  orribil  testa, 
Riportarla  fra  i  suoi  con  gioia  et  festa. 

[F0  141  v°]  05.     Cosi  un  griffon  superbo  e  altiero  tanto 
Quanto  altro  mai  quel  degno  paslor  doma, 
Et  riduce  a  piotoso  et  mesto  pianto 
Una  altaet  gran  collonna  apresso  Ruina; 
Poi  l'una  etl'altra  m  an  premendo,  quanto 
Huoppo  le  par,  su  l'una  et  l'altra  chioma, 
Non  le  lassa  ricor  pur  i  cappelli 
Ch'  [h]anno  su  gli  ochi  lagrimosi  et  felli. 

06.  Ad  un  dei  descendent!  di  Guerino 
Crollar  la  quercia  da  l'orato  gbiande. 
Lo  istesso  coronato  Camerino 
Tollendoli  si  vede,  et  farsi  grande 

Di  quello  Ottavio  in  prima  fanciullino, 
Genero  alla  grande  aquila,  che  spande 
I  vanni  altier  da  l'uno  a  l'altro  polo, 
Cercando  inverso  il  cielo  alzarsi  a  volo. 

07.  Ma  quel  seguendo  le  vestigie  e  i  modi 
Del  suo  progenitor  céder  si  vede, 

Per  non  schiantar  ma  conservar  quei  nodi 

De  l'alber  suo  pieno  d'amore  et  fede, 

A  ciô  que  meglio  in  terra  il  pie  si  assodi  ; 

A  chi  il  pastor  poi  mansueto  riede 

Di  modo  che  li  dà  di  sua  famiglia 

Una  faneiulla  saggia  a  meraviglia. 


Poi  di  ducal  galero  *. 


08.     Che  a  guisa  délia  bella  unica  Psyché 
Era  servata  per  divin  mistero, 
N  •  a  lei  simil  infra  moderne  o  antiche 


1  Ces  mot?  sont  le  reste  d'une   stance  ainsi  indiquée  en  marge,  mais 
donl  il  n'a  été  écrit  que  ce  premier  hémistiche. 


172  I  DODICI  CANTI 

Altra  mai  fu  d'ingegno  acuto  e  altiero. 
Le  Gratie  con  le  Muse  a  quella  aruiche 
Seco  seder  parean  nel  magistero 
Del  gran  pittor  che  quella  sala  pinse 
Et  non  nati  anco  naturali  efflnse. 

99.     Mentre  stan  fisi  i  duo  guerrier  fregiati 
L'hystorie  a  contemplai"  a  loro  ignote, 
Altronde  da  Sylvana  ritirati 
Si  rivoltaro  ad  ascoltar  le  note 
Che  sentivan  di  canti  honesti  et  grati 
Délie  voci  sonore  hor  piene,  hor  vote, 
Con  dolci  acenti  et  soave  harmonia, 
Da  suscitar  chi  è  di  morir  in  via. 

100.     Questo  lo  fece  industriosamente 
La  gentil  Fata  per  non  rivellare 
La  cosa  a  lor  futura  a  lei  présente 
Di  quel  che  lor  non  tocca,  et  perô  trare 
D'indi  li  cerca  assai  fervidamente, 
Et  ov'  è  l'harmonia  quelli  menare 
S'ingegna  ch'una  caméra  vicina 
Chiudeva  in  se  la  musica  divina. 

[F0 142  r°]101.      Et  sopra  un  letto  riccamente  adorno 
Li  fa  posar  la  Fata  et  ella  parte. 
Non  era  giunto  ancora  al  mezzo  giorno 
Di  Phebe  il  carro,  quando  in  quella  parte 
Lasciolli,  et  io  li  lascio  etfo  ritorno 
Dov'  Orlando  lasciai  dal  fero  Marte 
Tutto  infiammato  contra  Rio-Castello, 
Vincer  volendo  il  suo  tyranno  fello 

102.  Se  vi  ricorda  ben,  dissivi  sopra 

Ne  l'altro  canto  corne  giunse  Orlando 
A  Rio-Castel,  per  adempir  quella  opra 
Lodevol  tanto  con  il  forte  brando 
Contra  el  tyranno,  in  cui  favor  se  adopra 
Tutto  il  suo  stuol  sentendo  il  corno,  quando 
Hebbero  incarcerato  Sacripante, 
Compagno  alhora  del  signor  d'Anglante. 

103.  Doppo  il  lungo  sonar  del  degno  corno, 
S'armano  tutti  i  cento  cavallieiï 


CANTO   DUODECIMO  173 

Et  verso  il  conte  sol  cinquanta  andorno 
Ch'eran  fra  gli  altri  più  gagliardi  et  feri, 
Et  gli  altri  in  guardia  del  castel  restorno, 
Ma  Sarpedoute  fra  quegli  primieri, 
Ch'usci  con  lor,  rimaste  morto  in  terra, 
Ne  perô  terminossi  alor  la  guerra. 

104.  Perché  i  cinquanta  alhora  vendicare 
Volendo  il  suo  signor,  posti  in  battaglia, 
Contra  del  conte  mossi  a  contrastare, 
Tutti  Orlaudo  gli  affetta,  ancide  et  taglia, 
Tal  ch'un  non  si  puù  vivo  conservare 

Per  buona  piastra  o  pur  per  fina  maglia 

Che  egli  habia  in  dosso,  et  cosi  in  quel  contrasto 

Fe  il  glorioso  conte  il  terzo  guasto. 

105.  Quel  giovanetto  ch'el  consiglio  diede 
Contra  al  bon  vechio,  che  delli  cinquanta 
Rimasti  in  guardia,  perché  in  lui  havea  fede 
Quel  tyranno,  era  capo,  non  si  vanta 

l'iù  corne  prima,  perché  aperto  vede 
11  gran  valor  del  conte  etforza  tanta 
Esser  flaggel  di  Dio,  et  se  li  rende  ; 
Quai  gratamente  per  la  mano  il  prende. 

106.  Il  benigno  lo  accetta  pur  con  patto 
Che  se  abandoniet  arda  lo  empio  luoco, 
Et  sia  in  quel  proprio  giorno  quel  disfatto 
Per  viva  forza  d'avarapato  fuoco, 

Né  fra  loro  altrimente  vuol  sia  fatto 
Alcuno  acordo  o  per  molto  o  per  poco, 
Ma  pria  si  renda  Angelica  e  a  Roberto 
Sylvia  et  sia  dov'  è  il  Re  il  carcere  aperto. 

[F0 142  V]  107.     Non  puô  Gelarco,  che  cosi  detto  era 
Colui  che  tanto  araava  Sarpedonte, 
Contravenire  alla  proposta  altiera 
Di  quel  vettorioso  et  degno  conte, 
Ma  pur,  perché  il  thesoro  ottener  spera 
Di  quel  morto  tyrano,  lieta  fronte 
Facendo,  le  due  donne  et  Sacripante 
Liberamente  diede  al  sir  d'Anglante. 

108.     Più  di  sei  cento  donne  in  Rio-Castello 

Ferdinand  Castf.ts. 


VARIETES 


Les  noces,  d'argent  de  Mistral  et  l'Allemagne 

La  Bibliothèque  de  la  Société  des  Langues  Romanes  a  reçu 
de  M.  Auguste  Bertuch  uu  intéressant  document:  un  exem- 
plaire de  l'adresse  que  les  visiteurs  et  hôtes  allemands  de 
Mistral,  philologues  et  romanistes,  professionnels  ou  ama- 
teurs, ont  fait  imprimer  et  lui  ont  offerte  à  l'occasion  de  ses 
noces  d'argent. 

En  1900,  au  banquet  de  la  Santo  Estelo,  à  Maguelone,  on 
avait  projeté  de  célébrer  cet  anniversaire  par  une  grande  fête 
félibréenne  ;  mais  l'idée  n'eut  pas  de  suites;  et  les  amis  alle- 
mands du  maître  de  Maillane  sont  les  seuls  à  s'être  souvenus 
officiellement  du  27  septembre  1876. 

Voici  le  texte  de  cette  adresse  qui  atteste  la  popularité  de 
Mistral  en  Allemagne  : 

Au  mèstre  venera  Frederi  Mistral,  pèr  la  fèsto  de  si  noço  argentalo 
emé  Na  Mario,  nascudo  Rivière,  lou  27  de  setèmbre  1901. 

MÈSTRE   VENERA, 

Festejasau-jour-d'uei,  perla  gràci  de  Dieu,  lou  vint-e-sieisen  retour 
doû  jour  ouate  vous  sias  amouiera. 

Aquelo  fèsto  se  deù  dire  uno  fèsto  de  famiho,  ounte  es  la  coustumo 
que  lou  roudelet  entime  di  parent  e  dis  ami  s'acampon  à  l'entour  d'a- 
quéli  que  festejon,  pèr  ié  pourgi  tourna  mai  lou  testimôni  courau  de 
la  part  que  de-longo  prenon  emai  an  presso  i  gau  e  peno  d'aquéli  que 
soun  tant  estrechamen  uni  per  li  nous  doû  maridage. 

Permetès  que  naùtri  peréu  venguen  nous  apoundre  à-n-aquéu  rou- 
delet famihau  e  jougne  nôsti  vot  de  bonur  i  vot  d'aquéli  qu'eston  lou 
mai  proche  de  voste  cor  1  Naùtri  peréu  avèn  passa  lou  lindau  de  voste 
oustau  amistous  à  l'oste  d'aquel  oustau,  toco  doû  roumavage  pèr 
toûti  lis  ami  de  la  pouësio  prouvençalo  revieûdado  pèr  vosto  obro,  e 
que  soun  charme  misterious  nous  a  tambèn  touca  ;  e  dins  lis  ouro  que 
nous  fugue  douna  d'esta  au  vostre,  avèn  près  uno  visto  em  'uno  cou- 
neigudg  inoûblidablo  di  fôrti  fondamento  ounte  repauso  lou  bonur  de 


VARIATES  17  o 

voste  oustau,  mounte  une  superbo  tradicioun  de  i'amiho,  uno  coumu- 
niou  entimo  e  afeciounado  dis  espous  dins  li  pensié  e  li  pantai  dam- 
Ledous  e  la  pïouso  ousservanço  dis  usage  tcrrenau  an  créa  un  si;ni  e 
segur  recatadou  di  Muso,  fach  à  meraviho  pèr  enaura  vosto  obro 
pouëtico  counsacrado  a  la  pichoto  patrlo  e  pourgi  pèr  aquelo  obro  uno 
perdurablo  jouïssenço  a  toûtijlis  ami  de  la  blouso  e  veraio  pouësio. 

Posque  este  jour,  ounte  vous  e  vosto  venerado  mouié  vesès  en- 
rèire,  dins  la  fierta  de  vosto  joio  entimo  uno  vido  famihalo  longo  e 
benesido,  posque  este  jour  s'escoula  pèr  vous  en  touto  gau,  e  posque 
lou  bonur  que  fin  qu'aro  vous  es  esta  larga  tant  aboundous  demeura 
vostre,  franc  de  touto  àuci  e  de  tout  trebau,  dius  uno  longo  tiero  de 
bèllis  annado. 

Lou  27  de  setèmbre  1901. 

Vostis  oste  e  amiraire  di  pais  de  la  Lengo  d'Alemagno 

Heinrich  Ahnkn,  Echternach. 
Cari  Appel,  Breslau. 
August  Bertuch,  Frankfurt  a.  M. 
Marie  Bertuch,  — 

Eduard  Boehmer,  Lichtenthal. 
Ludwig  Brautigam,  Bremen. 
Suzanne  Brautigam-Romane,  Bremen. 
Johannes  Fastenrath,  Koln  a.  Rh. 
Cordelia  Haltexhoff,  Genf. 
Oskar  Hexmcke,  Bremem. 
Eduard  Koschwitz,  Marburg. 
Wilhem  Kreiten,  Kirchrath. 
Emil  Levy,  Freiburg  i.  B. 
Henricb  Morf,  Zurich. 
Karl  Sachs,  Brandenburg. 
Siegfried  Samosch,  Berlin. 
Hermann  Suchier,  Halle  a.  Saale. 
Heinrich  Vierordt,  Karlsruhe. 
Nicolaus  Welter,  Diekirch. 
Julius  Wolf,  Charlottenburg. 
Marie  Wolf,  — 

Cette  adresse  a  été  composée  avec  le  plus  grand  soin  et  un 
goût  parfait,  par  MM.  Breikopf  et  Hartel.  —  Elle  forme  une 
plaquette  in-quarto  de  huit  pages,  tirée  en  deux  couleurs  et 
imprimée  en  caractères  archaïques,  et  constitue  en  elle-même 
une  véritable  œuvre  d'art. 


BIBLIOGRAPHIE 


Romania.  —  XXX.  1  (janvier  1901).  —  P.  1.  Ferdinand  Lot. 
Nouvelles  études  sur  la  provenance  du  cycle  arthurien.  —  XI.  Arthur 
en  Cornwall.  —  XII.  Sources  cornouaillaises  de  Gaufrei  de  Mon- 
viouth  ;  Cador  dux  Cornubia?  et  Gorlois  dux  Cornubire.  —  XIII.  Kel- 
liwlc,  résidence  d'Arthur.  —  XIV.  Le  blanc  porc  dans  Guingamor.  — 
XV.  La  bataille  de  Camlan.  —  XVI.  Deux  localités  arthuriennes,  Cara- 
digau  et  Dinatiron.  — XVII.  La  forêt  de  Calisse.  — XVIII.  Enide.  — 
P.  22.  Arthur  Piaget.  La  Belle  dame  sans  merci  et  ses  imitations.  I. 
[Voici  les  conclusions  de  cet  intéressant  article:  «  Alain  Chartier 
est  né  vers  1385;  il  est  l'aîné  des  frères  Chartier  ;  il  est  bien  l'auteur 
de  la  rédaction  latine  du  Cariai.  »].  —  P.  49.  Alfred  Morel-Fatio.  Le 
débat  entre  Anton  de  Moros  et  Gonzalo  Davila.  Série  de  neuf  pièces 
satiriques,  d'un  ton  assez  grossier,  dont  cinq  d'un  irobador  inconnu, 
Anton  de  Moros,  et  quatre  réponses  de  Gonzalo  Davila,  dont  on  con- 
naissait une  petite  pièce  galante  insérée  dans  un  chansonnier  du  Musée 
Britannique.  —  P.  65.  Salverda  de  Grave.  Les  mots  dialectaux  du  fran- 
çais en  moyen-néerlandais.  [  Mémoire  plein  de  faits  et  d'idées,  qui  forme 
le  pendant  du  précédent  ouvrage  de  l'auteur  intitulé  :  Essai  sur  quel- 
ques groupes  de  mots  empruntés  par  le  néerlandais  au  latin  écrit  (Am- 
sterdam 1900),  et  qui  amène  l'auteur  à  cette  conclusion  :  que  la  plupart 
des  mots  français  empruntés  par  le  néerlandais  au  moyen  âge  lui  sont 
venus  du  Hainaut,  province  dont  les  comtes  ont  longtemps  régné  sur 
toute  la  Hollande  et  dont  les  villes  avaient,  à  cette  époque,  une  grande 
importance. 

Mélanges.  —  P.  113.  Ov.  Densusianu.  Primus  et  *antaneus  en  rou- 
main. —  P.  115.  A.  Dauzat.  Amaiza.  [Ce  mot,  qui  signifie  «  fourmi  » 
dans  le  centre  de  la  France,  viendrait  d'un  primitif  germanique 
(imait  -,  par  l'intermédiaire  d'un  diminutif  hypothétique  amaizïdï]. 
—  P.  119.  A.  Dauzat.  Urgere.  [M.  D.  a  noté  dans  la  bouche  d'une 
vieille  femme,  à  Vinzelles  (  Puy-de-Dôme),  le  mot  dourze,  «  pousser, 
ramener  (le  bétail)  vers  l'étable  »,  qu'il  tire  avec  raison  de  urgere 
avec  un  d  prosthétique.  Il  aurait  pu  comparer  moulze  =  mulgere 
(passim)  ].  —  P.  120.  R.-J.  Cuervo.  Canoa  —  Sabana.  —  P.  127. 
F.  Lot.  Le  cri  de  la  bête  dans  le  Daniel  du  Stricker.  [Démonstration 
de  l'origine  celtique  de  cet  épisode.  ] 


BIBLIOGRAPHIE  177 

Comptks  rendus.  —  P.  13').  G.  Schlessinger,  Die  altfranzœsischen 
Wcerter  in  Machsor  Vitry  nach  der  Ausgabe  des  Vereins  Mekize  Nir- 
damim  (L.  Brandin  :  utile  contribution  à  l'étude  des  glosses  nébi 
romanes,  mais  l'auteur  n'a  que  des  Dotions  insuffisantes  d'ancien 
français).  —  P.  132.  G.  Paris,  Orson de Beauvaia  (H.Suchier:  grands 
éloges;  quelques  petites  corrections,  dont  M.  G.  P.  conteste  une 
partie  et  accepte  les  autres  avec  sa  bonne  grâce  habituelle,  ajou- 
tant deux  rectifications  suggérées  par  M.  A.  I.ongnon.  ).  —  P.  138. 
II.  Berger,  Canchons  h  ml  Partures  des  altfranzœsischen  Trouvère  Adan 
de  le  Haie  le  Bochu  d'Aras  A.  Jeanroy  et  G.  Paris  :  les  deux  rappor- 
teurs sont  d'accord  pour  blâmer  le  style  amphigourique  et  la  subtilité 
ainsi  que  la  prolixité  du  commentaire,  souvent  erroné,  tout  en  rendant 
justice  à  la  grande  érudition  de  l'auteur  et  à  la  somme  de  travail 
dépensée.).  —  P.  149.  Potanine,  Vostotchnye  motivy  v  sredneviekovi  \rn 
evropeislcom  epoesie.  (Les  motifs  orientaux  dans  l'épopée  du  moyen  âge). 
(E.  Anitchkof  :  matériaux  précieux,  mais  thèse  inacceptable  tant  par 
les  philologues  que  par  les  folkloristes). 

Périodiques.  —  P.  151.  Ze'dschrift  fur  romanische  Philologie, 
XXIV,  4.  (A.  Thomas  et  G.  Paris).  —  P.  154.  Siebenter  lahresbericht 
des  Instituts  fier  rumœnische  Sprache  zu  Leipzig  (M.  Roques).  —  P.  1 55 . 
Chronique.  —  P.  158.  Livres  annoncés  sommairement. 

XXX,  2-3  (avril-juillet,  1901).  —  P.  161.  M.  Roques  et  G.  Paris. 
L'élément  historique  dans  Fierabras  et  dans  la  branche  II  du  Corone- 
nieut  Looïs.  [I.  Fierabras. —  M.  R.  croit  aune  contamination  des  évé- 
nements de  846  (arrivée  des  Sarrasins  à  Rome  par  le  Tibre,  pillage  des 
trésors  de  Saint-Pierre  et  défaite  des  Sarrasins  par  le  marquis  Gui, 
sans  doute  le  duc  de  Spolète)  et  la  délivrance,  par  le  Normand  Robert 
Guiscard,  du  pape  Grégoire  VII,  assiégé  dans  le  Château-Croissant 
(Mole  d'Hadrien)  par  l'empereur  Henri  IV  après  la  prise  de  Rome,  et 
du  portique  de  Saint-Pierre.  Robert  Guiscard  serait  le  prototype  du 
Richard  de  Normandie  de  la  chanson. —  II.  Couronnement  de  Louis,  L'in- 
vasion sarrasine  racontée  dans  la  branche  II  de  cette  chanson  de 
geste  a  pour  base,  comme  la  première  partie  de  Fierabras,  l'attaque 
de  846  contre  Rome  et  non  le  siège  de  Capoue  (Chape),  qui  n'est  qu'un 
épisode  antérieur  auquel  il  est  fait  allusion  au  début.  Le  nom  de 
Guafier,  fait  prisonnier  à  Chape  et  devenu  roi  de  Salerne,  le  souvenir 
des  luttes  soutenues  par  les  villes  campaniennes,  sont  venus  s'ajouter 
au  récit  du  siège  de  846,  mais  ne  forment  pas  l'élément  historique 
essentiel  du  poème.  M.  G.  Paris  déclare  être  arrivé  à  des  conclusions 
très  voisines,  quoique  un  peu  moins  précises,  dans  une  leçon  faite  au 
Collège  de  France,  en  décembre  1396.]  —  P.  184.  R.  Weeks.  Études 
sur  Aliscans(à  suivre).  Des  nombreuses  inconséquences  intérieures  du 

12 


1T8  BIBLIOGRAPHIE 

poème  et  de  ses  contradictions  avec  les  poèmes  apparentés  du  Cove- 
nant  Vivien  et  de  Faucon  de  Candie,  M.  \V.  conclut  que  «  là  où  A  liscans 
et  les  autres   poèmes  sont  en  désaccord,  ce  n'est  pas  à  Aliscans, 
comme  l'ont  dit  la  plupart    des  critiques,   qu'il    faut   demander    la 
légende  la  plus  ancienne,  mais  plutôt  à  ces  poèmes.  »  Lorsqu'il  y  a 
désaccord  entre  ces  derniers,  c'est  dans  Foucon  de  Candie  que  se  trouve 
la  légende  authentique,  au  moins  pour  tout  ce  qui  touche  à  la  bataille 
d'Aliscans].  —  P.  198.  A.  Longnon.  La  procession  du  bon  abbé  Ponce. 
M.  L.  établit  le  caractère  historique   de  cette  chanson  en  bourgui- 
gnon du  XIIIe  siècle  et  en   identifie  le  héros  avec  Ponce,   abbé  de 
Saint-Seine,  dont  on  a  des  chartes  de  1241,  1242  et  1243.  —  Au  v.  49, 
chamois,  dont  M.  L.  dit  qu'il  peut  désigner  une  bête  de  somme,  est 
tout  simplement  le  pluriel  de  chameil,  chameau)  ;  cf.  Orson  de  Beau- 
vais,  1501,  etc.  L'emploi,  peut-être   abusif,  de  ce  mot   s'expliquerait 
par  le  caractère  burlesque  de  la  pièce].  —  P.  213.  R.  Philipon.  Mor- 
phologie  du   dialecte  lyonnais  aux  XIIIe   et  XIV0   siècles.  [Savante 
étude,  [tour  faire  suite  à  la  Phonétique  lyonnaise  au   XIV"  siècle,  du 
même  auteur,  publiée  dans  la  Romania,  t.  XIII,  pp.  542-590,  mais 
basée  sur  un  plus  grand  nombre  de  textes].  —  P.  225.  Paul  Meyer. 
Notice  du  ms.  10295-304  de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique  (Légen- 
des en  prose  et  en  vers).  [Manuscrit  sur  papier  de  la  première  moitié 
du  XVe  siècle,  contenant  (outre  YYsopet  de  Marie  de  France,  Ylmage 
du  monde  et  la  traduction,  par  Renaud  de  Louhans,  de  la  Consola- 
lion  de  Boece),  un  poème  didactique  et  moral  inconnu,  la  Bible  des 
laies  gens   et   41  Vies  de  saints,  dont  plusieurs   ne  se   trouvent  pas 
ailleurs.  A  signaler  surtout  une  Vie  de  sainte  Madeleine,  qui  s'écarte 
des  vies  latines    sur   plusieurs   points,    en    particulier  en   ceci  que, 
«  dans  le  miracle  connu    sous   le  nom    de  «  Miracle  du  seigneur  de 
Marseille  »,  la  ville  où  habitait   ce  seigneur  est  non  pas  Marseille, 
comme  dans  la  plupart  des  textes  latins  ou  français,  non  pas  Ballatn, 
Barlate,  Balete,  comme  dans  YAbbreviatio  in  vitis  sanctorum  et  textes 
dérivés,  non  pas  Aquilée,  comme  dans  une  des   versions  françaises, 
mais  Arles,  ville  qui  est  ici  appelée  Arles  le  blanc.  »  Est-ce  que  ce 
choix  d'Arles  ne  viendrait  pas  d'une  erreur  de  lecture  de  Barlate  = 
Arlate  dans  un  texte  latin  ?]  —   P.   A.  Piaget.  La  Belle  dame  sans 
merci  et  ses  imitations  (suite).  —  IL  Le  Parlement  d'amour  de  Bau- 
det H  er  eue  (deux  fois   imprimé).  —   III.    La  dame  loyale  en  amour. 
[Ce  fascicule  contient  les  111    premiers  huitains  de    ce  poème  ano- 
nyme, qui  est  une  réponse  au  Parlement  d'amour.  La  fin  sera  publiée 
prochainement].    —   P.    352.  G.   Paris    et  M.  Schwob.    Villoniana. 
.M.  G.  Paris,  à  l'occasion  delà  récente  publication  qu'il  a  faite  d'un 
livre  sur  Villon    dans    la   collection  des  Grands  écrivain*  français  de 
la  librairie  Hachette,  donne  une  revision  minutieuse  et,  naturellement, 


BIBLIOGRAPHIE  17'.' 

des  plus  intéressantes,  de  l'édition  de  M.  Longnon  (1892).  11  y  joint 
quelques  notes  de  M.  Marcel  Schwob  sur  le  Testament  (c'esl  ainsi 
qu'il  convient  d'appeler  le  Grand  Testament,  eu  laissant  au  Petit  Tes- 
tament le  nom  de  Lais,  que  lui  a  donné  le  poète)  ]. 

Mélanges. —  P.  303.  P.  Meyer.  C  et  (1  suivis  cFA  eu  provençal. 
M.  P.  M.  complète  sur  quelques  points  (Alpes-Maritimes  et  Basses- 
Alpes)  les  recherches  qu'il  a  publiées  en  1895  sur  ce  sujet  [Momania, 
XXIV,  520  sqq.),  et  fait  cette  constatation  curieuse,  que  la  pronon- 
ciation ca,  ga  gagne  du  terrain  sur  cha,  ja,  comme  paraissant  plus 
élégante.  M.  A.  Thomas  avait  déjà  t'ait  une  observation  semblable 
pour  la  Haute-Auvergne].  —  P.  308.  A.  Thomas.  Ls  suffixe  -esimus 
en  français.  [M.  T.  constate  que,  dans  la  région  orientale,  où  Ve  long 
entravé  se  diphtongue,  on  trouve  assez  souvent  pour  les  noms  de 
nombre  ordinaire  des  formes  eu  oime,  aime.  Ce  suffixe  n'a  pas  eu 
d'influence  directe  sur  le  suffixe  actuel  en  ième]. —  P.  400.  P.  Meyer. 
Provençal nadui.  [Naclui  dans  Flamenca,  3680,  doit  être  lu  nadiu  = 
nativus,  et  signifie  «  drap  du  pays  »] —  P.  401,  A.  Delboulle.  Davoisne. 
[Le  v.  8530  du  Roman  de  la  Rose  (éd.  Marteau),  Beloces  d'Aves- 
nes,  jorroises,  doit  être  lu  :  Beloces,  davesnes,  jorroises.  Davesnes 
=  c?^^âT//r/vov,  gr.  mod.  pour  <?aftaffj£»ivov  (prune  de  Damas).  La  da- 
voine  est  une  espèce  médiocre  île  prunes  très  commune  en  Normandie]. 
—  P.  103.  A.  Delboulle.  Un  proverbe  altéré.  A  beau  (bon)  deman- 
deur, beau  (bon)  refuseur,  est  pour  :  A  baut  demandeur,  haut  refit. 
seur.  —  P.  404.  Eug.  Ritter.  Romancium  et  Gallicum.  [Dans  un 
document  genevois  de  1460,  romancium  désigne  le  parler  local,  galli- 
cum le  français  de  France].  —  P.  404.  G.  Paris.  Mayence  et  Nimtgue, 
dans  le  Chevalier  au  Cygne.  [Bien  qu'où  ait  le  plus  souvent,  dans  les 
manuscrits,  substitué  Nimègue  à  Mayence,  la  version  proprement 
française  de  la  légende  plaçait  à  Mayence  le  débarquement  du  Che- 
valier au  Cygne  et  son  combat  judiciaire,  inséré  plus  tard  dans  le 
récit.]  —  P.  400.  E.  Muret.  Un  fragment  de  Marco  Polo  [C'est  un 
feuillet  d  mble,  servant  de  reliure  à  un  cahier  de  comptes,  de  la  fin 
du  XVIe  siècle,  à  la  bibliothèque  de  Vevey  (Suisse).  La  première 
moitié  correspond  à  la  fin  du  ch.  121  et  au  ch.  122  presque  en- 
tier de  l'éd.  Pauthier,  la  seconde,  à  la  fin  du  ch.  134  et  aux  ch. 
135,  136,  137  et  aux  premières  lignes  du  ch.  138. 

Comptes  rendus.  —  P.  415.  O.  Densusianu,  Histoire  de  la  langue 
roumaine,  fasc.  I  (G.  Paris  :  Grands  éloges). —  P.  418.  W.  Meyer- 
Lùbke.  Die  Betonung  im  Gallischen  A.  Thomas  :  Eloges  avec  quel- 
ques réserves  et  rectifications  de  détail).  —  P.  423.  F.  Noack.  Der 
Strophenausgang  in  seinem  Verhœltnis  zum  Refrain  und  Strophengrund- 
stoch  in  der  refrai nhaltigen  altfranzœsischen  Lyrïk  (A.  Jeauroy  ;  utile 


ISO  BIBLIOGRAPHIE 

pour  le  grand  nombre  de  faits  réunis  et  classés,  non  sans  quelques 
erreurs;  nombreuses  corrections  aux  66  chansons  à  refrain  publiées 
en  appendice  pai  M.  E.  Stengel).  —  P.  430.  H.  E.  Todd.  La  Vie  de 
sainte  Catherine  d'Alexandrie  (G.  Paris  :  utile,  nombreuses  correc- 
tions au  texte).  —  P.  432.  Kr.  Nyrop.  Observations  sur  quelques  vers 
de  la  farce  de  Maître  Pierre  Pathelin  (G.  Paris  :  éloges,  quelques 
additions  et  corrections).  —  P.  334.  Jean  Ducamin,  Libro  de  Buen 
Amor,  de  Juan  Ruiz,  archiprètre  de  Hita  (II.  Menéndez  Pidal  :  tra- 
vail définitif). —  P.  440.  Leite  de  Vasconcellos.  Estudios  de  philologia 
mirandesa  (A.  Dauzat  :  grands  éloges). 

Périodiques.—  P.  444.  Zeitsehrift  fur  romanische  Philologie,  XXV , 
1-3  (G.  Paris).  — P.  448.  Archivio  glottologico  italiano,  t.  XII  (1890-2) 
et  t.  XIII  (M.  Roques).  —  P.  454.  Literaturblatt  fur  germaniscJie  und 
romanische  Philologie,  XXI  (1900)  (E.  Muret).  —  P.  457.  Revue  de 
Philologie  française  et  de  Littérature,  p.  p.  Clédat,  t.  XIII  (1899)  et 
t.  XIV  (1900) '(P.  Meyer).  —P.  459.  Bulletin  de  la  Société  des 
anciens  textes  français,  1900.  —  Bulletin  historique  et  philologique 
(Comité  des  travaux  historiques),  1899.  —  Bulletin  archéologique  du 
Comité  des  travaux  historiques  et  scientifiques,  1897-1900  (P.  Meyer).— 
P.  462.  Chronique.  —  P.  4G9.  Livres  annoncés  sommairement. 

XXX,  4  (octobre  1901).  —  P.  481.  F.  Lot.  Date  de  la  chute  des  in- 
tervocales en  français.  [Le  dépouillement  des  Chartes  de  Cluny,  actuel- 
lement en  cours  de  publication,  et  des  chartes  du  pays  de  Langres  ont 
permis  à  l'auteur  de  ce  mémoire  de  conclure  que  la  chute  du  d  inter- 
vocal était  un  fait  accompli  dès  le  début  du  Xe  siècle  (et  non  à  la  fin 
du  XIe  seulement,  comme   on   le  croyait),  au  moins  dans    la   région 
de  Langres  à  Mâcon  ;  il  en  est  de  même  pour  le    t  intervocal.]    — 
P.  489.  Paul  Meyer.   Fragment  d'un  vis.    d'Aie   d'Avignon.  [Il  s'agit 
de  320    vers   trouvés   dans  une  reliure  des  Archives  de  Vuillafans 
(Doubs),  par  M.  Jules  Gauthier,  et  qui  correspondent  aux  vers  1765- 
2087  de  l'éiition  P.  Meyer  et  Guessard.  Le  ras.  du  fragment,  supérieur 
comme  langue  au  manuscrit  de  Paris  (qui  est  unique,  à  part  les  courts 
extraits  de  Fauchet  et  les  fragments  de  Bruxelles  et  de  Venise  issus 
d'un  même  manuscrit),  et  plus  ancien   d'environ   un  demi-siècle,  lui 
est  cependant  souvent  inférieur  pour  les  leçons  et  en  est  indépendant.] 
—  P.  504.  Otto  'Âlob.  A  Vida  da  sancto  Amaro,  texte  portugais  du 
XIVe  siècle. —  P.  519.  Hermann  Suchier.  La  fille  sans  mains.  [M.  H. 
S.  commence  par  une  version  catalane,  tirée  du  ms.  delà  Bibliothèque 
nationale,  fs  espagnol  632,  l'impression  des  matériaux  réunis  par   lui 
sur  ce  conte  populaire,  dont  il  a   traité   dans  son    introduction  aux 
Œuvres  poétiques  de  Beaumanoir  (et  de  quelques  autres  textes  décou- 
verts depuis;,  et  promet  de  revenir  .sur  les  questions  générales   qu'il 


BIBLIOGRAPHIE  181 

so ni  ève.  Celte  version  peut  être  intitulée,  d'après  la  rubrique  :  La  Tsto- 
ria  de  la  filla  de  l'emperador  Contasti  (Constantin)].  —  P.  539.  Lazare 
Sai  néan.  Les  éléments  orientaux  en  roumain  (Pr  article). 

Comptes  rendi  3.  —  I'.  567.  Miscéllanea  linguisticainonoredi  Gra- 
ziadio  Ascoli.  [M.  G.  Paris  rend  compte  des  23  articles  (sur  35  que 

contient  ce  beau  recueil]  qui  intéressent  les  études  romanes.  A  l'indi- 
cation de  son  propre  article  (ficatum  en  roman),  il  joint  quelques 
observations  que  lui  ont  adressées  à  ce  sujet  divers  savants.] —  P.  578. 
F.  Geo.  Mohl.  Les  origines  romanes.  La  première  per*<>unr  du  pluriel 
en  gallo-roman.  [G.  Paris:  critique  aussi  juste  que  Bévère  de  ce  livre 
systématique,  écrit  pour  illustrer  par  un  exemple,  certain  aux  veux 
de  1  auteur,  la  règle  qu'il  avait  «  érigée  en  principe  »  dans  un  premier 
ouvrage  (voy.  ci-dessous)  :  «  Toute  désinenct  latine  semblable  à  la 
désinence  celtique  correspondante  est  régulièrement  contaminée  par  celle-ci 
dans  les  pays  gaulois.  »  M.  G.  P.  émet  le  vœu  «  que  M.  Mohl  se  décide 
à  mettre  au  service  de  la  méthode  vraiment  philologique  les  vaste- 
îaissances,  la  belle  imagination  et  la  puissance  de  combinaison 
dont  ses  écrits  nous  donnent  tant  de  témoignages.  »  —  P.  588.  E. 
Stengel,  Dos  alffranzoesische  Rolandslied  édition  critique),  I  (Texte) 
[L.  Bran  lin:  vifs  éloges  de  cette  œuvre  patiemment  élaborée  avec 
une  compétence  exceptionnelle].  —  P.  590.  Raccolta  cli  studii  critici 
dedicata  ad  Alessan<lr<>  éTAncona,  festeggiandosi  il  XL  anniversario 
del  suo  ensegnamento.  [G.  Paris  rend  compte  avec  éloge  de  22  des 
52  mémoires  contenus  dans  ce  recueil].  —  P.  597.  Carmina  de  Mensibus 
di  Bonvesin  de  la  Riva,  a  cura  di  Leandro  Biandene.  [G.  Paris  : 
l'éditeur  attribue  à  tort  à  Bonvesin  bien  des  fautes  de  versification  qui 
sont  le  fait  du  scribe,  et  d'autres  qui  étaient  admises  par  la  prosodie 
du  moyen  âge  et  qui  ne  sont  nullement  dues,  comme  il  le  croit,  à 
l'influence  de  la  versification  rythmique.] 

Périodiques.  —  P.  603.  Zeitschriftfùr  romanisch  Philologie,  XXV, 
1  G.  Paris].  —  P.  608.  Archivio  gloitologico  italiano,  t.  XIV  et  XV, 
1  et  2  [Mario  Roquesj.  —  P.  617.  Supplementi periodici  ail'  Archivio 
glottologicn  italiano...  ordinati  da  G.  J.  Ascoli,  I-VI  [M.  Roques].  — 
P.  620.  Chronique.  —  P.  024.  Livres  annoncés  sommairement. 

Léopold  Coxstans. 

I.Durrieuz  (A.).  —  Dictionnaire  étymologique  de  la  langue  gasconne, 
Audi,  G.  Foix,  1"  vol.  1899  [372  p.],  2'  vol.  1901  [544  p.]. 

Il  i  a  un  personnage  d'Alphonse  Daudet  qui  a  appris  à  faire  tutu- 
panpanen  écoutant  chanter  le  rossignoou,  M.  Alcée  Durrieux,  avocat 
à  la  cour  d'appel  de  Paris,  en  fréquentant  des  «  Gersois  Parisiens  » 


182  BIBLIOGRAPHIE 

a  découvert  que  le  gascon  n'est  autre  chose  que  du  grec  ou  plutôt 
du  eelto-grec.  Le  latin  aussi  sort  du  grec,  ô  Philaminthe,  &  un  peu 
du  gascon.  Pour  le  français,  ce  n'est  qu'un  maleureux  enfant  trouvé, 
bâtard  du  Gaulois  &  du  Gascon,  abandonné  justement  par  ses  pères, 
mais  qu'une   insolente  fortune  a  élevé  du  rang  de  vil  patois  à  celui 
de  langue  littéraire  &  presque  national'.  Cette  importante  trouvaille 
a  valu  à  M.  Durrieux  dix  ans  et  plus  de  travail  et  de  patientes  recher- 
ches, qui   viennent  d'aboutir  à  deux  volumes  d'aspect  matériel  assez 
avenant.  Le  contenu  ne  manque  pas  non  plus  de  gaîté.  Ainsi  dans  le 
premier  tome  on  nous  démontre,  en  citant  l'autorité  d'Ammien  Mar- 
cellin,  que   les  filologues  &  les  linguistes  sont  des  ânes   bâtés.  Le 
second  volume,  dans  lequel  l'auteur  dresse  sou  édifice  sur  les  démo- 
litions &  les    ruines  accumulées  dans   le  premier,    n'est  pas  moins 
réjouissant.  Le  grec  qu'on  i  lit  n'est  pas  de   Démosthène,  mais  d'un 
avocat  plus  moderne  :  il  faut  bien  suivre  le  progrès.  Le  «  Celte  », 
ah!  mes  amis,  si  vous  voulez    vous   en  faire  une   pinte..,  voyez  ce 
«  Celte  ».  Le  sanskrit,  M.  Durrieux  nous  prévient  qu'il  n'est  pas  de 
lui  ;  il  n'a  pourtant   jamais   retenti   sur   les   rives    du  Gange  ou  de 
l'Indus;  c'est  une  plante  qui   ne  pouvait  pousser  qu'aux  bords  de  la 
Garonne.  Quant  aux  étimologies,  elles  ne  sont  pas  aussi  nombreuses 
qu'on  aurait  pu  le  craindre,  mais  pour  la  plupart  bien    gasconnes  & 
portant  avec  elles  un  parfum  de  cassoulet  &  de  blanquette1. 

II.  Laurent  D)  et  Hartmann  (G.).  —  Vocabulaire  étymologique  de  la 
langue  grecque  &  de  la  langue  latine,  Pco'is,  Delagrave,  1900  [xxvm, 
498  p.]. 

L'ouvrage  de  M.  Durrieux,  fait  par  un  amateur  sur  un  patois  qui 
n'intéresse  que  des  amateurs  &  quelques  spécialistes,  publié  chez  un 
éditeur  de  la  région,  ne  sortira  évidemment  jamais  du  cercle  des 
amateurs.  Loin  qu'il  puisse  nuire  à  quelqu'un,  ce  livre  est  une  aubaine 
pour  les  receveurs  d'enregistrement,  les  avocats  sans  causes,  les 
abbés,  les  capitaines  retraités,  et  toute  cette  armée  de  désœuvrés  à 
qui  l'insuffisance  oula  monotonie  de  leurs  occupations  laisse  en  même 
temps  que  de  nombreux  loisirs  un  besoin  d'activité  qu'il  faut  à  tout 
prix  satisfaire.  Ils  vont  trouver  là  une  mine  inépuisable,  &  à  force 
de   la    creuser  &  d'i  consacrer   cette  énergie  qui  ne  trouvait  pas  à 

1  Cet  article  était  achevé   quand  «  La  terro   d'oc   »   est  venue   nous 
annoncer  la  mort  d'Alcée  Durrieux;  nous  nous  associons  au  deuil  de  ses 
amis  en  ce  qui  concerne  l'homme;  mai-;  nous  devons  leur  faire  observer 
que  c'est   mal  servir  le  «  savant  »  que  d'apporter  à  l'appui  de   sa  tes. 
une  pièce  de  Charlemagne  qui  es!  du  XIII    siècle. 


BIHLI0GRAPH1E  183 

s'employer  ailleurs,  ils  feront  d'importantes  découvertes  dont  débor- 
deront les  colonnes  des  feuilles  &  des  revues  locales.  En  définitive 
tout  cela  est  bien  inoffensif  &,  comme  me  le  disait  l'autre  jour  un  de 
mes  amis  qui  aie  travers  d'être  antialcooliste  :  «  Après  tout,  il  vaut 
mieux  que  ce  -là  fassent  ça  que  d'aller  au  café  ». 

Le  livre  de  MM.  Laurent  £  Hartmann  n'est  pas  dans  les  mêmes 
conditions;  il  porte  Bur  deux  langues  classiques,  le  grec  &  le  latin,  il 
répond  à  un  besoin,  puisqu'il  n'i  a  en  France  ni  dictionnaire  étymo- 
logique grec  ni  dictionnaire  étimologique  latin,  il  parait  chez  un 
éditeur  classique,  dans  un  format  classique,  avec  une  reliure  clas- 
sique. Or  ce  livre  n'est  qu'un  ramassis  de  tous  les  rapprochements 
1rs  plus  ineptes  qui  aient  jamais  été  proposés  par  les  étimologistes 
les  plus  ignorants,  les  plus  imbéciles  ou  les  plus  fumistes.  On  lit 
à  la  p.  vin  que  le  sanskrit,  le  grec  et  le  latin  «  sont  trois  langues 
irs  »  &  par  conséquent  ne  sortent  pas  l'un  de  l'autre,  ce  qui  esl 
i  3  juste  ;  maison  voit  aux  p.  xxi  &  xxn  que  la  voyelle  a  (la  voyelle 
du  sanskrit)  se  «  dégrade  •»  en  e,  o,  a,  û,  i  en  grec  &  en  latin;  que 
dans  les  mômes  langues  les  gutturales  se  «  dégradent  »  en  labiales, 
les  labiales  eu  dentales,  les  dentales  en  liquides  &  en  sifflantes, 
&  c'est  toujours  le  sanskrit  qui  est  le  point  de  départ.  Voulez-vous 
des  étimologies?  p.  xx  Xeîfra  en  face  de  sk.  lip\  (Sk.  lip-,  qui  est 
eu  védique  rip-,  signifie  «  oindre  »  et  est  apparenté  à  gr.  Hnoç 
«  graisse  »  ;  lt!.n<o  «  je  laisse  »  correspond  à  sk.  rie-,  rinàkli  u  lais- 
ser»); p.  xxi  sk.  dahatam  en  face  de  lat.  centum,  &  p.  xxm  le 
même  dacatam  (mais  avec  un  c)  en  face  de  viginti  !  (Lat.  centum  cor- 
respond à  sk.  çatâm  &  viginti  à  sk.  vimçati-;  dakatam  ou  dacatam 
n'existe  pas  en  sanskrit).  Tenez-vous  à  sortir  de  la  préface  &  de 
l'introduction  pour  pénétrer  dans  le  dictionnaire  proprement  dit? 
Reprenons  les  mêmes  mots  ;  '/;7ro;  «  graisse  »  nous  renvoie  à  une 
racine  ghar  a  mouiller  »,  Xsuru  «  je  laisse  »  nous  renvoie  non  plus  à 
lip  mais  à  une  racine  ragh  «  séparer  »!  En  face  de  la  racine  ghar 
v  tus  trouvez,  p.  290,  yâpoçu  sauce  »,  xXû£a>«  je  lave  »,  yXvxûç  «  doux  », 
y/'.vo;  «  érable  »,  lat.  cloaca  «  égout  »,  dtdcis  «  doux  »,  arundo 
«  roseau  «,oliva  «  olive  »,  etc.  En  face  de  la  racine  ragh  vous  trouvez, 
p.  336,  Xfy<îoç«  mortier»,  Xqx'jOoç  «  burette  »,Xsxt0oç«  purée  »,Xa^at'vw 
"  creuser  »,  \éyiw  «  frange  ».  A17Ç  «de  travers», lat.  ricinus  «  tique», 
ruga  «  ride  »,  pollex  «  pouce  »,  lama  •  bourbier  »,  lanx  «  plat  »,  Iocub 
«  lieu  »,  lacerna  «  ventre  »,  luxu-t  «  excès  »,  limen  «  seuil  »,  liceor 
«  acheter  »,  etc.  Nos  lecteurs  nous  en  voudraient  de  poursuivre.  Ils 
en  ont  assez  pour  se  demander  avec  effroi  ce  que  c'est  que  ces  raci- 
nes, ce  que  c'est  que  ce  sanskrit,  ce  que  c'est  que  ce  cauchemar.  Et 
dire  (pie  cet  ouvrage,  lancé  par  un  éditeur  classique,  va  pénétrer  dans 
les  classes    supérieures    de  nos  licées   pour  achever    de  dérouter  & 


iS4  BIBLIOGRAPHIE 

d'aùrir  nos  maleureux  enfants  !  Dire  qu'aux  concours  d'agrégation 
les  examinateurs  chargés  des  questions  de  grammaire,  filologie  & 
istoire  des  langues,  &  que  l'on  choisit  trop  souvent  parmi  les  profes- 
seurs qui  ont  fait  preuve  de  la  plus  aute  incompétence  en  ces 
madères,  vont  trouver  dans  ce  ramas  une  source  intarissable  de 
«  colles  »  ingénieuses  à  poser  aux  candidats  ! 

La  publication  d'un  pareil  livre  en  France  &  en  1900  est  un  scan- 
dale et  une  action  coupable  ;  l'éditeur,  qui  n'en  est  du  reste  pas  à 
son  coup  d'essai  puisque  c'est  déjà  chez  Delagrave  qu'avaient  paru 
les  élucubrations  ethnologiques  de  l'abbé  Espagnolle,  mérite  d'être 
flagellé  sans  réserve.  Quant  aux  auteurs,  ils  n'ont  qu'une  excuse,  une 
seule,  c'est  que  s'ils  avaient  fait  un  bon  livre  au  lieu  d'un  monstre, 
ils  n'auraient  pas  trouvé  pour  lui  d'éditeur. 

Maurice  Grammont. 

A.  Macé.  —  Essai  sur  Suétone.   Paris,  Fonlemoing,  1900. 

Nous  avons  cherché  en  vain  par  où  rattacher  l'examen  de  ce  livre 
à  l'étude  des  langues  romanes.  Si  du  moins  il  contenait  un  chapitre 
sur  la  langue  de  Suétone  !  Mais  même  sous  ce  titre  :  La  prose  métri- 
que et  le  style  de  Suétone,  il  n'y  a  guère  que  des  observations, 
curieuses  d'ailleurs,  sur  sa  prose  métrique,  et  des  renvois  à  quelques 
remarques  éparses  sur  son  style.  Disons  donc  simplement,  puisqu'on 
nous  demande  un  compte  rendu,  en  quoi  l'ouvrage  consiste.  D'une 
part,  M.  Macé  épluche,  avec  une  grande  prodigalité  d'hypothèses  et 
une  prolixité  effrayante,  les  maigres  données  biographiques  que  nous 
possédons  sur  Suétone.  De  cette  discussion  le  résultat  le  plus  nou- 
veau est  que  l'historien  serait  né  neuf  ans  plus  tôt  qu'on  ne  l'admettait 
jusqu'ici.  D'autre  part,  et  ceci  est  une  matière  autrementriche,  M.  Macé 
passe  en  revue  les  nombreux  écrits  de  Suétone  et  essaie  d'en  déter- 
miner la  chronologie,  l'objet,  la  valeur  historique,  scientifique  et  litté- 
raire. Cette  seconde  partie,  relativement  plus  brève,  sinon  plus 
concise,  et  qui  témoigne  de  même  que  l'autre  d'une  grande  somme 
de  travail,  n'épuise  pourtant  pas  le  sujet,  il  s'en  faut.  Mais  elle  est 
plus  utile,  peut-être. 

T. 

Lewis  F.  Mon.  —  The  Provençal  Lyrik.  New-York,  William  R. 
Jenkins,  1901,  in-8°.  57  p. 

Les  Américains  ont  peu  contribué  jusqu'ici  à  l'étude  de  l'ancienne 
littérature  provençale.  Le  présent  travail,  écrit  par  un  professeur 
d'anglais  de  l'Université  de  New-York,  a  été  lu  devant  la  Société  de 
littérature  comparée  de  cette  ville   :    il  n'apprendra  rien  de  nouveau 


1JII5L10GHAPHIE  185 

aux  provouçalistes  :  c'est  un  agréable  résumé  des  caractères  de  la 
lyrique  provençale.  Quelques  traductions  viennent  B'iutercaler  dans 
le  texte.  Nous  souhaitons  qu'elles  inspirent  aux  compatriotes  de 
l'auteur  —  qui  ont  montré  tant  de  goût  pour  le  provençal  —  le  désir 
de  connaître  de  pics  l'aucienue  littérature  provençale . 

J.  Angla.de. 


LIVRES  ANNONCES  SOMMAIREMENT 

Levi  (Ugo;. —  I  monumentipiù  anticlii  del  dialetto  di  Chioggia, 
Venezia,  1901  [84  p]. 

Les  monuments  les  plus  anciens  du  dialecte  de  Chioggia  sont  les 
trois  «  Mariegole  »  di  S.  Nicolado  dei  Galafadi,  di  Sl°  Croce,  di  San 
Marco  dei  Calegheri.  M.  Levi  les  publie  ;  les  deux  dernières  étaient 
inédites.  11  fait  suivre  ces  textes  de  leur  «  illustrazione  glottologie;i  », 
c'est-à-dire  de  tableaux  où  il  réunit  les  principales  particularités 
fonétiques,  morfolujriques  et  sintaxiques  qu'il  i  a  remarquées.  Il  ter- 
mine par  un  glossaire. 

Cette  brochure   n'est   que    la    première    d'une  série  d'études  que 

l'auteur  se  propose  de  faire  paraître  sur  les  patois  du  golfe  de  Venise, 

à  savoir:  celui  de  Chioggia,  celui  de  Sottomarina,  celui  de  Pelés  trina, 

celui  de  Lio  Mazor  et  celui  de  Burano. 

M. G. 


Notice  sur  l'abbaye  de  Quarante  (Montpellier,  Imprimerie  de  la 
Manufacture  de  la  Charité,  1891',  in-S°,  66  p.).  —  Sous  ce  titre, 
M.  l'abbé  Vabre,  curé  de  Quarante,  a  écrit  une  intéressante  mono- 
graphie sur  une  abbaye  qui  a  eu  quelque  importance  dans  la  région 
narbonnaise.  En  s'appuyant  sur  des  textes  déjà  connus  ou  sur  de8 
documents  mis  obligeamment  à  sa  disposition  par  M.  Camille 
Laforgue,  il  a  pu  refaire  l'histoire  de  cette  abbaye  depuis  le  Xe  siè- 
cle j usqu'à  la  Révolution.  M.  Vabre  prépare  d'ailleurs  une  histoire 
de  Quarante  depuis  les  origines  (le  village  date  des  premiers  siècles 
de  notre  ère)  jusqu'à  nos  jours.  La  plupart  des  documents  seront 
empruntés  à  la  riche  bibiothèque  de  M.  Laforgue. 


Mélanges  d'étymntugie  française,   par  Antoine  Thomas,   professeur 
de  littérature  du  moyen  ;rjr  et  philologie  romane  a  la  Faculté  (tome  XIV 
de  la  Bibliothèque  de  la  Faculté  des  lettres  de  l'Université  de  l'un 
1  vol.  gr.  in- 8°  :  7  francs  (Félix  Alcan,  éditeur,!. 

L'auteur  a  réuni  dans  cet  ouvrage  259  notices  étymologiques.  S'il 
lui  a  donné  le  titre  de  Mélanges,  c'est  qu'aucun  dessein  prémédité  n'a 


185  CHRONIQUE 

présidé  au  choix  des  mots  qu'il  a  étudiés.  Les  mots  français  n'y  sont 
pas  en  majorité,  et  c'est  surtout  à  l'ancien  français,  à  l'ancien  pro- 
vençal et  au  fonds  si  riche  de  nos  parlera  provinciaux  qu'il  a  demandé 
les  mater. aux  de  son  travail. 

Le  nombre  des  notices  paraît  peu  considérable  en  comparaison  de 
ce  que  nous  ignorons  encore  ;  mais  si  l'on  songe  à  la  somme  de  recher- 
ches qu'a  nécessitées  la  moindre  d'entre  elles,  aux  précautions  de 
toutes  sortes  que  doit  prendre  l'étymologiste  pour  éclairer  sa  marche, 
on  se  rendra  compte  de  l'importance  de  ce  travail.  M.  Antoine 
Thomas  s'est  principalement  appuyé  dans  ses  recherches  sur  la 
phonétique  et  sur  la  sémantique,  qui  sont  inséparables  de  tout  travail 
étymologique. 

Une  table  index  des  auteurs,  des  index  géographique,  lexicogra- 
phique  et  grammatical  terminent  l'ouvrage,  et,  à  côté  de  l'intérêt 
qu'ils  offrent,  donnent  la  mesure  de  la  quantité  de  documents 
étudiés  pour  arriver  aux  résultats  présentés. 


CHRONIQUE 


M.  Ed.  Huguet,  professeur  de  philologie  à  l'Université  de  Caen,  a 
pris  l'initiative  très  louable  de  la  fondation  d'une  Société  consacrée 
à  l'étude  des  auteurs  français  modernes.  11  nous  adresse  le  programme 
suivant,  que  nous  nous  faisons  un  plaisir  d'insérer  et  de  recommander  : 

<(  On  sait  quels  services  rend  depuis  vingt-cinq  ans  la  Société  des 
anciens  textes  français.  Une  «  Société  des  textes  français  modernes  » 
pourrait  rendre  des  services  analogues  en  réimprimant  celles  des 
œuvres  des  quatre  derniers  siècles  qui  sont  rares,  coûteuses  ou  mal 
éditées.  Elle  aurait  surtout  à  publier  des  œuvres  du  XVIe  siècle 
et  du  XVIIe,  mais  elle  ne  s'interdirait  pas  la  publication  de  textes 
plus  récents. 

«Elle  pourrait,  par  exemple,  faciliter  beaucoup  l'étude  de  la  période 
romantique,  si  elle  réimprimait  des  poésies  devenues  presque  introu- 
vables, et  des  articles  qu'il  est  souvent  difficile  d'aller  chercher  dans 
le  journal,  la  revue  où  ils  ont  paru. 

«  Il  est  impossible  de  dresser,  dès  maintenant,  une  liste  des  œuvres 
que  cette  Société  pourrait  se  proposer  de  publier.  C'est  la  collabo- 
ration des  sociétaires  qui  établirait  cette  liste  avec  le  plus  de  sûreté, 
chacun  indiquant,  pour  la  période  qu'il  étudie  particulièrement,  les 
lacunes  qu'il  est  urgent  de  combler.  Le  principe  que  l'on  pourrait 
adopter  au  début  serait  de  ne  pas  s'occuper  des  auteurs  dont  on  peut 
se  procurer  facilement  un  texte  au  moins  passable. 

•  Le  premier  soin  de  la  Société  devrait  être  de  donner  les  textes  eux 
mêmes  ;  elle  commencerait  donc  par  publier  des  éditions  presque  sans 


CHRONIQUE  1*7 

notes,  indiquant  seulement,  au  bas  de  chaque  page,  les  variantes 
indispensables  La  qualité  essentielle  de  ces  éditions  serait  d'être 
correctes  et  bien  imprimées.  Plus  tard,  il  serait  possible  d'entre- 
prendre une  nouvelle  série  de  publications,  el  de  donner  des  éditions 
accompagne.  -  d'études  biographiques,  dénotes  et  de  glossaires. 

«  I.a  cotisation  annuelle  pourrait  être  de  10  francs.  Les  membres 
delà  Société  recevraient  gratuitement  tous  les  volumes  publiés.  » 

M.  Eugène  Ri  gai,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  l'Univer- 
sité de  Montpellier,  veut  bien  se  charger  de  recevoir  et  décentraliser 
les  adhésions  pour  notre  ville  et  pour  la  région  de  Languedoc. 


M.  Angelo  de  Guberuatis,  le  savant  professeur  italien  dont  le  nom 
est  bien  connu  de  dos  lecteurs,  nous  adresse  un  chaleureux  appel 
en  faveur  d'une  Société  dont  il  est  le  fondateur,  et  dont  le  but  est 
«de  développer  la  civilisation  latine,  de  la  faire  mieux  connaître,  et  de 
iriser  le  progrès  de  tous  les  intérêts  moraux  et  idéaux  des  peuples 
latins.  » 

La  Société  des  Langues  Womanes,dans  un  domaine  plus  circonscrit, 
mais  mieux  délimite  et  plus  scientifique,  poursuit  depuis  trop  long- 
temps une  oeuvre  analogue,  pour  ne  pas  encourager  cette  tentative 
nouvelle,  encore  qu'elle  semble  un  peu  flottante  dans  son  programme, 
et  peut-être  bien  ambitieuse:  mais  ces  vastes  ambitions  n'en  sont  pas 
en  somme  moins  dignes  d'intérêt.  Nous  ne  saurions  donc  mieux  faire 
cpie  de  reproduire  le  manifeste  même  de  la  nouvelle  Société,  la  Socit  ta 
Latina.  Nous  ne  le  traduisons  pas  :  la  langue  italienne  est  familière 
à  nos  lecteurs  ;  ce  serait  trop  risquer  de  trahir  la  pensée  de  l'auteur 
(pie  de  vouloir  la  traduire,  et  d'ailleurs  ce  morceau  de  littérature  cha- 
leureuse et  entraînante  a  sa  valeur  propre.  Le  voici  donc  dans  son 
texte  original  : 

SOCIETÀ  LATINA 

RESIDE  N  TE     IN     KO  M  A 

PKR    PROMUOVKRE   TUTTI   GLI    INTERESSI    MORALI    ED    IDEALI 
de'popoli  LATIN I 

Sta  per  fondarsi  in  Roma  una  nuova  Società,  che  prenderà  nome  di 
Latina,  oggetto  délia  quale  sarà  promuovere  ogni  forma  di  attività, 
ogni  energia  spirituale  fia  i  popoli  latini,  farne  conoscere  gl'  intenti, 
le  opère,  gli  studii,  rendere  piii  diffuse  e  popolari  tutte  le  scoperte  e  le 
nuove  indagini  nel  campo  délie  Ietterature  neo-latine,  dovute  a  studiosi 
specialisti,  l'opéra  meritoria  dei  quali  è  troppo  ignorata,  rivclare  in 
tutti  i  suoi  aspetti  più  nobili  il  moto  présente  del  genio  latino,  riunire 
le  forze  intellettua'i  ad  uno  stesso  scopo  civile,  al  risorgimento  con- 
sapevole  délia  nostra  gente. 

La  Società  verra  regolarmente  constituita  eiucomincierà,eoadiuvaîa 
da  unautorevole  Consiglio,  isuoi  lavori, appena mi  saranno  pervenute, 
dalle  varie  regioni  italiane  e  dalle  varie  nazioni  latine,  corne  dai  cul- 


188  CHRONIQUE 

tori  délie  lingue  neo-latine  dî  ogni  paese,  non  meno  di  trecento  ade- 
sioni  di  soci  che  avranno  nome  di  fondatori  e  promotori. 

Ho  buona  fîducia  che,  dentro  il  gennaio,  si  possa  dare  principio  ai 
lavori  délia  Società,  la  quale  non  si  propone  già,  in  alcun  modo,  e  mi 
preme  di  avvertirlo  subito,  di  osteggiare,  suscitando  contro  di  essa 
sentimenti  ostili,  alcun'  altra  razza  civile,  ma  solamente  coordinare 
tutte  le  forze  latine  ai  più  alti  scopi  ideali,  renderne  piu  armonico  il 
lavoro,  dare  un  accento  più  vivo  ad  ogni  loro  affermazione  artistica, 
letteraria  e  scientifica. 

Se  dalla  Francia  giungono  già  a  noi  desiderate,  sollecite  e  frequenti 
notizie  (e,  per  mezzo  délia  Società  Latina,  si  faranno  anche  più  copiose 
e  vivaci)  lo  stesso  non  avviene  per  Topera  intellettuale  e  civile  che  si 
compie,  lentamente  e  più  oscuramente,  in  altri  paesi  latini,  la  Spagna 
ed  il  Portogallo,  il  Belgio  e  la  Svizzera  romanza,  i  Grigioni  e  la  Sviz- 
zera  italiana,  le  regioni  italiane  dell'Impero  austriaco  e  la  Romania, 
lontana,  ma  pure  congiunta  all'ltalia  e  specialmente  a  Roma,  l'aima 
Muter,  con  strettissimi  vincoli  d'affetto,  e  finalmente,  in  tutta  l'America 
Latina,  dove  già  tanta  parte  d'Italia  si  è  versata,  tanto  nuovo  popolo 
latino  sorge  operoso  e  fecondo  a  nuova  civiltà. 

La  Società  attenderà  specialmente  all'opera  sua,  civile  e  pacifica, 
per  mezzo  di  un  periodico  quindicinale,  che  s'intitolerà  Cronache  délia 
Civiltà  Latina,  e  con  l'aiuto  di  conferenze  che  si  terranno,  almeno  una 
vol  ta  al  mese,  in  Roma  dal  primo  gennaio  alla  fine  di  giugno  d'ogni 
anno,  per  diffondere  meglio  e  più  largamente  la  conoscenza  délie  cose 
latine,  promuovendo,  inoltre,  secondo  i  mezzi  di  cui  la  nuova  Società 
poti'à  disporre,  tutte  le  più  gentili  e  più  nobili  manifestazioni  dell'idea 
latina. 

Le  Cronache  si  publicheranno  in  lingua  italiana;  ma  vi  s'accoglie- 
ranno  pure  note  in  lingua  latina,  francese,  provenzale  e  spagnuola, 
quando  alcuno  de'  collaboratori  latini  non  possa  servirai  délia  lingua 
italiana;  una  parte  délie  Cronache  riguarderà  il  mondo  antico  latino, 
un'altra  parte  il  mondo  neo-latino,  e  la  terza,  in  modo  più  largo  e 
necessariamente  più  vivo,  il  mondo  latino  moderno  europeo  ed  ameri- 
cano. 

Tutti  i  Soci  fondatori  e  promotori,  avranno  diritto  di  ricevere  gra- 
tuitamente  le  Cronache  délia  Civiltà  Latina  e  di  assistere  pure  gra- 
tuitamente  aile  conferenze  che  saranno  tenutein  una  sala  da  destinarsi 
in  Roma  ;  altre  potrà  promuoverne  essa  stessa  in  altre  città  italiane 
o  straniere,  dove  si  fonderanno  puie  speciali  sezioni  corrispondenti 
délia  Società  Latina  résidente  in  Roma,  quando  ogni  sezione  pos.*a 
con  tare  su  venti  soci. 

Un  Consiglio  composto  di  uomini  eminenti,  scelti  fra  i  più  cospicui 
uomini  di  scienza,  tra  gli    uomini   politici  e  diplomatie!  residenti  in 


CHRONIQUE  189 

Roma,  che  sentono  più  fortemente  la  latinità  e  il  bisogno  di  stringeré 

i  vincoli  délie  varie  società  latine,  si  riunirà  ogni  mese  in  Roma,  e 
veglierà  al  buon  andamento  délia  Società. 

Ogni  socio  fondatore  e  promotore  pagherà,  d'anno  in  anno,  senz'altri 
obblighi  ed  impegui,  dieci  lire,  al  ricevimeuto  del  primo  fascicolo  di 
ogni  anuata  délie  Cronache. 

Tali  sono  le  basi  fonda  mentali   sopra  le    quali  la  nuova   Società 

intende  ordinarsi.  Io  non  d  ubito  che  quanti,  anche  non  latini,  amano 

la  gloria  latina,  quanti  mirano  ad  espandere,  non  già  l'impei'o  mate- 

riale  latino,  ma  l'efficacia  dell'opera  géniale  e  civile  del  genio  latino 

nel  mondo,  godranno  ci    tro\arsi  associât!  in  un' opéra,  la  quale  ren- 

derà  meglio  manifesta,  e,  in    modo  costante  e  simpatico,  a  ciascuno 

di  noi  la   virtù  latina,  e    contribuendo  pure    ad  allargarne  in  noi    la 

coscienza,    ringagliardirà  la    nosti'a  fibra,  non  ancora   dégénère,  ne 

infiacchita,  e  la  renderà  forse  più  capace  di  opère  gagliarde  e  di  nuovi 

lieti  portenti. 

Angelo  De  Gubernatis. 

A  ce  noble  manifeste  est  jointe  une  formule  d'adhésion  dont  voie 
la  traduction  :  «  Le  soussigné,  ayant  pris  connaissance  du  premier 
manifeste  par  lequel  est  annoncée  la  constitution  d'une  Società  Latina, 
déclare  qu'il  désire  collaborer  à  ses  intentions,  aux  conditions  ci- 
dessus  décrites,  et  demande  à  être  inscrit  au  nombre  des  membres 
fondateurs  et  promoteurs.  » 

Les  noms  des  trois  cents  premiers  membres  fondateurs  et  promo- 
teurs seront  publiés  dans  le  premier  fascicule  de  Cronache. 

La  Société  des  Langues  Romanes  se  chargera  volontiers  de  trans- 
mettre à  M.  de  Gubernatis  les  noms,  s'il  s'en  trouve,  des  adhérents 
montpelliérains  et  languedociens  de  la  Società  Latina.  On  peut  les 
adresser  directement  à  M.  le  professeur  de  Gubernatis,  via  san 
Martino  al  Macao,  11,  Rome. 


Le  Litteralurblatt  fur  germanische  und  romanische  Philologie  de 
novembre  1901  contient  un  intéressant  article  du  professeur  K.  Sachs, 
sur  quelques  publications  provençales  nouvelles1.  M.  S.  compare  les 
revendications  félibréennes  aux  revendications  des  Flamands  pour  se 
soustraire  «  au  joug  du  Français  »  en  Belgique.  La  comparaison  est 
plutôt  défectueuse.  La  question  flamingante  a  pris  un  caractère  poli- 
tique,—  et  par  certains  côtés  international — que  n'a  jamais  eu  laques- 
tion  félibréenne.  Il  est  aussi  quelque  peu  exagéré  de  dire  du  livre  de 
M.  Gaston  Jourdanne  (Histoire  du  Félibrige)  qu'il  est  sehr  oft  h'ôchst 
unzuverlâssig ;  les  félibres  de  Cannes  qui  l'ont  assuré  à  M.  K.  Sachs 

i  Armnnn  Prouvençau,  Armana  Marsihès,  Reglamen  de  l'Escolo  de 
Lerin,  etc. 


100  CHRONIQUE 

ont  parlé  en  Méridionaux:  et  puis  il  y  a  peut-être  par  là-bas  quelques 

petites  chapelles 

A  noter  çà  et  là  quelques  inexactitudes:  Antonin  Perbos  est  mécon- 
naissable (c.  382)  sous  la  forme  Anlonïus  Ferbosc.  Les  separatis- 
tiche  Beslrcbungen  signalées  c.  382  n'existent  que  dans  l'imagination 
des  étrangers.  Félix  Gras  est  mort  et  Y  Aïoli  a  cessé  de  paraître. 

Quelques  Montpelliérains  apprendront  avec  plaisir  —  d'après  le 
même  article  —  que  Y  Aube  Méridionale  paraît  à  Montpellier,  10,  rue 
du  Four-Saint-Eloi. 


Nos  lecteurs  connaissent  le  beau  Libre  nouvial  dans  lequel  M.  La- 
forgue a  réuni  les  hommages  adressés  à  sa  fille,  Mme  la  vicomtesse 
d'Armagnac,  lors  de  son  mariage.  Une  publication  analogue  doit  con- 
sacrer le  souvenir  du  mariage  de  la  seconde  fille  de  M.  Laforgue 
avec  M.  le  baron  de  Rivières.  Nos  lecteurs  nous  saurons  gré  de  leur 
donner  la  primeur  de  quelques  aimables  vers  en  provençal  du  Xile 
siècle  adressés  aux  nouveaux  époux  par  M.  le  professeur  Léopold 
Constans,  de  l'Université  d'Aix-Marseille  : 

Pour  les  noces  de  M.  le  baron  de  RIVIÈRES 
et  de  M""  Marie  LAFORGUE 

AS  HKLS  NOVIS 

A  mors  vola  en  lonc,  en  lare, 
Per  l'aire  suau  qu'encan  ta, 
Pois  s'en  ven  dreit  a  Quaranta. 
Sobtan  a  bandât  son  arc  : 
La  sageta  d'aur  isnela 
Ieis  e  vola  coma  vent 
E  fier  el  cor  la  donzela 
E  lo  donzel  avinent. 

Sotz  un  albespin  en  flor, 
Lo  rossinholet  salvage 
Canta  dedinz  lo  boscatge 
Lo  triomphe  de  l'Amor  : 
Ieu  al  nôvi,  a  la  novieta, 
Pel  dolz  liam  estreit  liguatz, 
Man  mon  vot  a  votz  discreta  : 
«  Bon  aùr,  joi  e  solatz  !  » 


AUX  NOUVEAUX  EPOUX 

L'Amour  vole  de  çà,  de  là,  —  dans  l'air  doux  et  enchanteur,  —  puis 
s'en  vient  droit  à  Quarante.  —  Tout  à  coup,  il  a  bandé   son   arc:  —  la 


CHRONIQUE  1  '.'  1 

flèche  d'or  agile  —  part  el  vole  (rapide)  comme  le  vent  —  et  frappe  au 
cœur  la  jeune  fille  — el  le  jeune  homme  charmant. 

Sou-;  une  aubépine  en  fleur,  —  le  rossignol   solitaire  —  chante  dans 
le  ïk >ls  —  le  triomphe  de  l'Amour  :  — el  moi  à  l'époux,  à  la  jeune  épouse, 

—  par  le  doux  lien  étroitemenl  liés,  —  j'envoie  discrètement  mes  vœux  : 

—  «  Bonheur,  joie  et  reconfort  !  •> 

Léopold  Coxstans. 


I.a  ville  d'Asti  se  prépare  à  célébrer  le  centenaire  de  la  mort 
du  poète  Alfieri,  au  mois  d'octobre  1903.  Dès  à  présent,  elle  a  con- 
stitua un  Comité  d'honneur  dont  la  présidence  a  été  offerte  au  plus 
grand  poète  italien  vivant,  Giosué  Carducci.  Carducci  l'a  acceptée  par 
ce  télégramme  lapidaire:  «  Troppo  grande  onore  ma  insieme  è  dovere. 
Asti  commémorera  degnamente  chi  colP  Allighieri  e  il  Macchiavelli 
è  il  nume  indigete  d'  Italia».  Par  une  délicate  attention  de  la  patrie 
d'Alfieri  à  l'égard  de  la  ville  de  Montpellier,  à  qui  sont  parvenues  tant 
de  reliques  du  poète,  le  maire  de  Montpellier  a  été  nommé  membre  de 
ce  Comité  d'honneur.  Et  l'on  a  fait  à  deux  érudits  français,  M.  Charles 
Dejob  et  M.  Léon-G.  Pélissier,  l'honneur  de  les  inscrire  aussi  dans 
ce  comité,  composé  d'ailleurs  exclusivement  d'Italiens.  Ils  y  rencon- 
treront le  ministre  de  l'Instruction  publique  italienne,  le  maire  de 
Florence,  M.  Villa,  président  de  la  Chambre  des  députés,  les  séna- 
teurs Saracco,  Visconti-Venosta,  Borgnini,  l'ancien  ministre  Boselli, 
MM.  Médici,  Ottolenghi,  Giovanelli,  de  Gubernatis,  et  l'éditeur  de  la 
vie  d'Alfieri,  le  professeur  Emilio  Teza.  Ou  sait  que  M.  Dejob  est 
l'infatigable  président  de  la  Société  des  études  italiennes,  et  (pie 
M.  Pélissier  s'occupe  depuis  longtemps  de  l'étude  des  relations 
d'Alfieri  et  de  la  comtesse  d'Albany  avec  les  artistes  et  les  lettrés 
de  leur  temps,  et  de  la  publication  des  manuscrits  inédits  du  fonds 
Alfieri  à  la  Bibliothèque  municipale  de  Montpellier. 


Nous  avons  le  plaisir  d'annoncer  à  nos  lecteurs  et  confrères  que 
l'Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres  et  Arts  de  Besançon  vient 
de  décerner  le  prix  Xavier-Marinier  à  notre  éminent  collaborateur  et 
excellent  ami,  M.  Maurice  Grammont,  professeur  à  la  Faculté  des 
Lettres  de  Montpellier,  ancien  président  de  la  Société  des  Langues 
Romanes,  pour  son  livre  sur  le  Patois  de  la  Franche-Montagne  et  en 
particulier  de  Damprichard  (Franche- Comté). 


le  mois  de  «  deloir  »  (décembre) 

Dans  un  de  nos  précédents  numéros  nous  avions  reproduit,  d'une 
manière  trop  brève,  la  note  présentée  par  M.  A.  Thomas  à  l'Académie 
des  Inscriptions  et  Belles-Lettres.  Cette  note  se  trouve  reproduite 
dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Charte*  (juillet-août  1901). 
pp.  349-355.  Natalis  de  Wailly.  à  la  suite  de  Barbazan  et  de  Roque- 
fort, voulait  qnc  l'on  écrivit  de  l'oir{=  de  l'héritier,  du  Fils  de  Dion). 
Bourquelot  avait  déjà  fait  remarquer  qu'on  trouve  généralement  la 


\  §  î  CHRONIQUE 

formule  de  cleloir.  M.  Thomas  cite  d'autres  exemples,  français  et  pro- 
vençaux, où  le  mot  deloir,  delors,  dater  es  précédé  de  de.  Phonéti- 
quement, le  mot  ne  peut  venir  que  de  "  delêrus  pour  delïrus.  Pour 
calmer  les  scrupules  de  la  sémantique,  M.  Th.  suppose  ingénieuse- 
ment qu'il  y  aurait  là  un  souvenir  du  mois  des  Saturnales.  (Notons 
que  la  graphie  delerus,  deleirus  existe  en  ancien  latin,  cf.  Georges, 
Lat.  Wb.  s.  u.) 


Dans  le  même  numéro  de  la  Bibliothèque  de  V École  des  Chartes, 
M.Léopold  Delisle  publie  une  notice  (accompagnée  d'extraits)  sur 
un  manuscrit  récemment  entré  au  Musée  Condé  (Chantilly)  et  conte- 
nant le  Livre  Royal  d a  Jean  de  Chavenges.  L'auteur  parait  être  un 
clerc  champenois  et  le  poème  a  été  écrit  dans  la  première  moitié  du 
XIVe  siècle. 


La  Revue  Forézienne  a  publié  dans  son  numéro  de  décembre 
1901,  une  intéressante  étude  félibréenne,  intitulée  Les  spectacles  de 
Vêlé  :  à  Pompadour;  Félibrige  et  Théâtre. 

Le  pseudonyme  Aimeric  des  Millières  cache  un  nom  bien  connu 
des  lecteurs  de  Lemouzi. 

* 

Analogie.  Elle  continue  à  s'exercer  dans  la  langue  française, 
chacun  le  sait.   Voici  une  de  ses  dernières  créations:  «  Les  impurs 

s'empaièrent  de  l'Egypte  entière,  et  Pharaon ne  reconquérit  son 

royaume  qu'après  treize  ans  écoulés».  (Journal  des  Débats,  1er  jan- 
vier 1902,  feuilleton  col.  3),  signé  :  G.  Maspero. 


Le  Congrès  des  Sociétés  savantes  en  1900.  —  Sous  ce 
titre,  M.  Gabriel  Haon  vient  de  publier  (Alais,  imprimerie  J.  Brabo), 
un  compte  rendu  des  principales  communications  intéressant  le  Midi. 


Le  Gérant  responsable:  P.  BÎameliN. 


REFRAINS  INÉDITS  DU  XIIIe  SIECLE 


On  entend  par  «refrains»  dans  notre  ancienne  poésie  lyri- 
que, de  très  courts  morceaux,  empruntés,  comme  j'ai  essayé 
de  le  démontrer  ailleurs  ',à  des  rondets  ou  chansons  à  danser. 
Laplupait  de  ces  refrains  ne  présentent  pas  un  grand  intérêt  : 
beaucoup  ne  sont  que  de  banales  effusions  ou  protestations 
d'amour,  insignifiantes  broderies  sur  un  canevas  bien  usé. 
Mais  il  en  est  quelques-uns  en  revanche  qui  se  rattachent  à 
des  thèmes  populaires,  trop  dédaignés  des  poètes  «  courtois  », 
et  sont  ainsi  le  dernier  écho  d'une  poésie  naïve  et  simple, 
perdue  sans  retour.  C'en  est  assez  pour  rendre  le  genre  tout 
entier  digne  de  notre  attention  ;  il  serait  fort  désirable  qu'on 
en  réunît  tous  les  spécimens  connus  dans  un  recueil,  où  il 
n'y  aurait  pas,  sans  doute,  que  des  perles,  mais  où  on  trouve- 
rait au  moins  quelques  perles  d'un  rare  éclat,  et  la  variété 
de  ce  recueil  contrasterait  heureusement  avec  la  lamentable 
monotonie  des  collections  de  chansons. 

En  attendant  l'apparition  de  ce  Corpus,  et  pour  en  faciliter 
la  préparation,  il  y  a  intérêt  à  publier  tous  les  refrains  que 
l'on  rencontre  çà  et  là.  Ceux  que  je  donne  ici  ont  tous  été 
recueillis  dans  les  chansonniers  décrits  par  M.  G.  Raynaud2. 
C'a  été,  on  le  sait,  une  mode  dans  tout  le  cours  du  XIIIe  siè- 
cle de  term  iner  les  couplets  de  chansons  par  des  refrains;  les 
chansons  de  cette  sorte  sont  plus  nombreuses  qu'on  ne  l'avait 
cru  au  premier  abord  3.  C'est  d'elles  que  proviennent  tous  les 
refrains  ici  publiés,  et  tous  appartiennent  à  des  chansons 
inédites.   Ils  sont  loin  pourtant  d'être  tous  inédits,  car  un 

i  Les  Origines  de  la  Poésie  lyrique  en  France,  première  partie,  ch.  V. 

8  Dans  son  excellente  B ibliographie,  dont  je  conserve  naturellement  les 
sigles. 

a  J'ai  déjà  publié  [Origines,  p.  102,  n.  2.)  une  série  d'additions  à  la  liste 
de  M.  Raynaud;  on  verra  que  je  n'avais  pas  réussi  alors  à  être  tout  à 
fait  complet. 

xlvi.  —  Mai  1902.  13 


191  REFRAINS   INEDITS    DU  XIIIe  SIECLE 

grand  nombre  se  retrouvent  ailleurs  ;  c'est  seulement  la  leçon 
ici  publiée  qui  a  droit  à  cette  épithète  et  c'est  en  ce  sens  qu'il 
faut  entendre  le  titre  inscrit  en  tête  de  ces  lignes  '. 

A.  Jeanroy. 

I 
N°  145.  Texte  de  Pb3  163;  pas  de  variante  notable  dans  Pb11  126. 

1 .  Ce  seroit  folie  se  je  n'amoie, 

2.  Car  de  bien  an:er  me  vient  ma  granz  joie. 

3.  Adès,  adès  servirai 

Bone  amor  tant  con  vivrai. 

4.  On  doit  bien  mieus  valoir  de  bêle  dame  amer. 
.").    Por  Dieu,  car  m'amez,  bêle  très  douce  amie  : 

Ja  vos  aim  je  plus  que  nule  rienz  qui  soit. 
6.  De  par  moi  li  diras  ceste  cbançon  :  a  Cornus, 
Quant  bone  amors  faudra,  li  siècle  iert  perdus  ». 

II 
N°  150.  Texte  de  Pb  l2  107;  var.  de  B2  15. 

1.  Por  vos  grief  tlo'our  sent,  belle  douce  amie. 

2.  Li  très  dous  malz  m'ocit,  que  ne  m'i  lait  durer. 

3.  Dame,  merci,  que  la  mort  sent 
Se  de  moi  pitiet  ne  vos  prant. 

4.  Sa  bocbete  vermoillette  m'a  mis  en  prixon. 

5.  Je  Tarn  sens  repentir  :  jai  ne  m'en  partirai. 

2.  B-  ki  ne  me.  —  5  manque  dans  Pb  I2. 

III 
N°  839.  Texte  de  Pb  :i ,  127  ;  var.  de  Pb  »  24  et  R1  73. 
1 .   S'ele  me  voloit  amer,  je  n'averoie  mal. 

1  Dans  cette  publication  fragmentaire,  il  ne  m'a  pas  paru  nécessaire 
de  comparer  cette  leçon  aux  autres  déjà  publiées,  ni  même  d'y  renvoyer. 
Elle  est  critique  dans  ce  sens  seulement  que  j'essaie  de  retrouver  par  la 
comparaison  des  mss.  la  leçon  du  refrain  qu'a  voulu  citer  l'auteur  de  la 
chanson.  —  Quelques-unes  des  variantes  ici  publiées  ont  été  recueillies 
par  mes  amis  H.  Guy  et  H.  Teulié,  que  je  tiens  à  remercier  ici  de  leur 
obligeance. 


REFRAINS  INÉDITS   DU  XIIIe  SIECLE  195 

2.  Ma  dame  me  garira 

De  mes  maus  quant  li  plaira. 

3.  Adès  désir  a  veoir 
Celé  qui  me  fet  doloir. 

4.  De  bone  volenté  la  serf  sans  repentir. 

5.  Vilaines  gens,  vos  ne  les  sentez  mie, 
Les  douz  malz  que  je  sent. 

6.  Ne  vosrepentez  mie  de  loiaument  amer. 

1.  Pb"  n'aroie.  —  2.  R'quele  bien  me  garira  «le  chest  mal  q  1. 
p.  —  4.  K1  j'atendrai  de  bon  gré  merchi.  — 5.  IV  donne  icile  refrain 
4  :  en  b.  v.  etc.  —  G.  manque  dans  K1. 

IV 

N°  1240.  Texte  de  Pb:1  176;  var.  de  Pd  206,  Pb',  09,  Pb"  95, 
Pb"  176. 

1.  J'ai,  j'ai 

Amoretes  au  cuer  qui  me  tienent  gai. 

2.  A  la  plus  saverousete  del  mont  ai  mon  cuer  doné. 

3.  Amouretes  ai 
Jolietes,  s'amerai. 

1     Tout  le  cuer  me  rit  de  joie  quant  la  voi. 

1.  Pb\jai  jai  jai;  PbH  ki  tiegnent.  —  2.  Pb"ka  la  p.  —  3.  P 
Pb6  jolivetes.  —  4  manque  dans  Pb3  et  Pb  u. 

V 
N»  157.   Texte  de  Pa  328  ;  var.  de  Pb*  157,  Pb6  190,  Pb17  206. 

1 .  Nus  ne  set  qu'est  biens  s'il  n'aime 
Ou  s'il  n'a  amé. 

2.  A  la  plus  savoreusete 

Del  mont  ai  mon  cuer  doné. 

3.  J'ai,  j'ai  amoretes  au  cuer 
Qui  me  tienent  gai. 

4.  Mesdisanz  crèveront, 
Ja  ne  savront 

La  joie  que  j'ai. 

5.  Hé  bêle  très  douce  amie,  aiez  de  moi  merci! 


196  REFRAINS   INEDITS   DU  XIIIe   SIECLE 

6.  Je  ne  vivrai  mie  longuement  ensi. 

3.  Pb  4  amorestes.  —  4.  Pb  *  mesdisant.  — 6.  Ce  refrain  et  le  cou- 
plet qui  le  précède  ne  se  trouvent  que  dans  Pb  '*. 

VI 

N°  803.  Texte  de  Pb  «  36  ;  var.  de  Pb  »  167. 

1 .  Amoretes  ai 
Jolietes,  s'amerai. 

2.  N'i  osaler,  s'i  envoi  un  très  doue  pensé. 

3.  Je  proie  Amors  que  nus  n'ait  amie 
S'il  ne  la  désert. 

4.  Ma  loiaus  pensée  tient  mon  cuer  joli. 

5.  Hareu  !  je  inuir  d'amouretes  ! 
Biaus  dous  cuers,  alegiés  m'ent  ! 

6.  Je  senc  amouretes  au  cuer  nuit  et  jour. 

2.  envois  .  —  3.  si  ne. 

VII 

N°  391. Texte  de  Pb  '"  220  ;  var.  de  Pb  '«  162  et  Pb  6  182. 

1.  Vos  le  lerez,  lerez,  l'amer, 
Mais  je  nel  lerai  mie. 

2.  J'aim  trop  melz  que  ne  soloie 
S'en  sai  mon  cuer  meilleur  gré. 

3.  Hé  Dex,  li  dous  Dex,  con  s'amor  m'atalenle  ! 

4.  Mes  cuers  s'iert  sans  fausser 
Celé  a  qui  mes  fins  cuers  bee  ; 
Me  puet  bien  joie  doner. 

5.  Or  oies,  que  volez  vos? 
Ne  me  puis  tenir  d'amer. 

1.  lerez  lerer]  Pb  17  lerez  lelez;  nel  lerai]  Pb  fi  Pb  17  nen  1.  ;  Pb  v 
nen  1ère.  —  2.  melz]  Pb  4  meuz  ;  gvé  manque  Pb  4.  —  3.  Li  dons  dex 
manque  Pb  *.  —  5.  Pb  4,  Pb  6  oés  ;puis]  Pb  4  pu. 

VIII 
N°  444.  Texte  de  Pb  3  152  ;  var.  de  R  «  74. 
1.   Sire  Dex,  cornent  dure 


REFRAINS  INEDITS   DU  XIIIe  SIECLE  1  97 

Fins  cuers  qui  n'aime  par  amors  V 
2.    La  joie  qu'atent  de  li 

Me  tient  inignot  et  joli. 
•'!.   Toz  li  cuers  me  rit  de  joie  quant  la  voi. 
4.   Ne  ja  ne  m'en  départirai, 

Ains  la  servirai 

Tant  que  merci  troverai. 

2.  R1  mi  tient.  —  3  manque  R  '. 

IX 

N°  452.  Texte  de  Pb 5  76  (ms.  unique). 

Je  les  sent,  Dex,  je  les  sent, 
Les  m  ius  d'amer  doucement. 

Ce  même  refrain  est  répété  après  tous  les  autres  couplets. 

X 
N°  459.  Texte  de  Pb  l7  230  ;  var.  de  Pa  333  et  Pb  »  171. 

1 .  En  non  Dieu,  ce  sont  amors 
Qui  dient  :  «  Merci  avrés.  » 

2.  D' amors  vient  toute  ma  joliveté. 

3.  De  debonairetez  vient  amors. 

4 .  Diex,  je  n'i  os  aler  :  avrai  je  ja  merci  ? 

5.  Ma  dame  a  qui  je  sui,  souvei^ne  vos  de  moi. 
G     Hé,  amors,  très  douces  amors, 

Cornent  me  partirai  je  de  vos  ? 

1 .  en]  Pb  1T  e  ;  dient]  dans  Pb  '*  di  a  été  ajouté  après  coup  en  marge; 
Pa  dien.  —  2.  vient  manque  Pb  '".  —  3.  Pb  ,f  debonaireté.  —  5.  Pb  * 
soviengne.  —  6.   Pb  l  c.  départirai  je. 

XI 

N"  503.  Texte  de  Pb  3  120  ;  var.  de  Pb  "  120. 

1 .  Autrement  n'os  a  vous  parler 

Fors  qu'en  chantant  :  merci  vous  quier. 

2.  Je  ne  sai  si  loing  aler 

Que  vous  puisse  entr'oublier. 


198  REFRAINS  INÉDITS  DU  XIIIe  SIÈCLE 

3.  Ce  mJocit  que  je  ne  vous  voi 
Plus  sovent,  doce  amie. 

4.  Dame  de  fin  cuer  amee,   merci  ! 

5.  Dame,  amer  ne  porroie 
Nule  autre  que  je  voie. 

2.  Pb 3  que  je  vous.  —  3.  Pb  "  ke  je  ne. 


XII 

N°  548.  Texte  de  Pb  »  208  ;  var.  de  P8  331,  Pb*    159,  Pb  s    120, 
Pb»  135. 

1.  Li  très  douz  chans  des  ois  elons 
Me  fait  a  bone  amor  penser. 

2.  A  ma  dame  servir  ai  mis  mon  cuer  et  moi. 

3.  Grant  joie  a  mes  cuers  quant  je  pens  a  li . 

4.  A  qui  les  donrai  je  donc 
Mes  amoretes,  s'a  vos  non  ? 

5.  Nuz  ne  doit  lez  le  bois  aler 
Sans  sa  conpaignete. 

1.  Pb  v,  Pb  5,  Pb6  oiseillons...  mi  ;  Pb  5  en  bone  a.  —  4.  Pb  5  donré. 
—  5.  Pb  5  ne  doit  les  beax  bois  passer. 

XIII 
N°  672.  Texte  de  Pbs  91  ;  var.  de  P»  166,  Pb11  90,  Pb  "  111. 

1 .  Ja  por  mesdisanz  ne  lairai  l'amer. 

2.  La  bêle  qui  mon  cuer  a  me  tient  joli. 

3.  Ensi  me  confort  Amors  con  je  l'aing  leaument. 

4.  Dame,  merci  !  Vos  m'ociez. 

5.  La  bêle  m'ocit  :  Dex  !  qui  m'en  garira  ? 

1 .  Pb  u  ne  lerai  a  amer. —  3.  Pb  u  conme  Pb  *,  Pb  '''  loiaument.— 
5.  Pb  5  diex  manque;  me. 

XIV 

N°  806.  Texte  de  Pb  4  101  ;  var.  de  Pa  210,  Pb  6  126. 

1.  Hé  Dex,  verai  Dex,  n'i  porrai  durer. 

2.  Dex,  la  reverré  je  ja 


REFRAINS  INÉDITS  OU  XIIIe  SIÈCLE  199 

Celé  qui  tout  mon  cuer  a  ? 
3.   Sanz  aminé  sui  ge  pas, 

Non  ère  je  ja,  n'onques  ne  fui. 

1.    Pb  6  he  des,  he  dex,  n'i  puis  d.  —  3.  Pb  6  sanz   amors. 

X»  912.  Texte  de  Pb  3  15G;  var.  de  Pb  "   148.  La  rubrique  porte 
Sire  Adaru  et  non,  comme  le  dit  M.  Rayaaud,  Adam  de  Givenci. 

1 .  Soviegne  vos  de  moi,  bêle  : 
Je  ne  pens  ja  s'a  vos  non. 

2.  Quant  pluz  sa  merci  désir,  pluz  est  crueus  envers  moi. 

3.  D'araors  trop  lointainne  n'ateut  nul  confort. 
1.   Quant  ces  amors  me  fau  Iront  que  j'ai, 

Ja  mais  n'amerai. 
5.   S'ele  me  daignoit  amer,  je  n'averoie  mal. 

4.  ja  mais]  Pb"  ja    puis. 

XVI 
N°  979.  Texte  de  Pb8  120;  var.  de  Pb8  156,  Pb"  211. 

1.  En  simple  plaisant  brunete  ai  tôt  mon  cuer  mis. 

2.  J'aing  la  bêle,  la  blonde,  la  sage, 
Tôt  mon  cuer  li  ai  do  né. 

3.  Hé  Dex,  donez  moi  de  mes  Unes  amors  joie, 
Ausi  vraicment  conme  grarit  mestier  en  ai. 

4.  Ma  leaus  pansée  tient  mon  cuer  joli. 

5.  Nus  n'i  a  pooir,  fors  ma  douce  amie 
A  la  grant  dolour  que  j'aie  alegier. 

1.  Pb8  pleisant  doucete  ;  tôt  manque,  —  2.  Pb8  je  li  ai  mon  cuer 
donné  ;  Pb17  si  li  ai  m.  c.  donné.  —  3.  Pb8  vrais  diex  donnés  moi  de 
mes  amouretez  j.  issi  vraieraent  eon  je  m.  e.  a.  (ce  refrain  dans  Pb* 
suit  le  couplet  4)  ;  Pb5  veraiement;  Pb"  si  veraiement.  —  4.  Ce  refrain 
dans  Pb%  suit  le  couplet  3.  —  ~>.  Pb5  a  ma  dolour  alegier  (avant  ce 
mot,  le  scribe  avait  écrit  d'abord  raso,  début  de  rasoagier,  qu'il  a 
ensuite  légèrement  barré  ;  au  lieu  de  ce  refrain  Pb9  donne  le  suivant  :  Et 
douce  baiselete,  vous  m'ocirrés  se  vous  volés. 


200  REFRAINS  INEDITS  DU  XIIIe  SIECLE 

XYII 

N°  1286.  Texte  de  Pb4  126;  var.  de  P»  256,  Pb  6  114  (et  non  144), 
Pb8  93  (qui  ne  donne  que  les  refrains  1,  3,  5),  Pb17  173. 

1 .  Por  Tamor  que  j'ai  a  li 
Tien  je  mon  cuer  si  joli. 

2.  Por  Deu,  ne  m'en  blasmez  se  mes  cuers  pense  a  li. 

3.  Est  il  donc  droiz  qu'Amors  m'ocie?  Nenil,  voir. 

4.  Nule  riens  a  bêle  dame  ne  se  prent. 

5.  Ja  Diex  ne  me  doint  corage  d'amer  mon  mari 
Tant  com  j'aie  ami. 

2.  m'enjPb4  me.  —  3.  PbG  m'ocient.  — 4.  &  manque  Pa.  —  5.  P», 
Pb6  coume. 

XVIII 

N°  1367.  Texte  de  Pb'7  201  ;  var.  de  Pb*  152,  Pb«  167,  Pb»  158, 
Pb17  201. 

1.  Espringuiez  et  balez  liement, 

Vos  qui  par  amors  amés  loiaument. 

2.  Il  n'est  mie  jor,  savoreuse  plaisant, 
Si  me  conseut  Dex,  l'aloete  nos  ment. 

3.  Douce,  très  douce,  douce  amie 
Pour  Dieu,  ne  m'oubliez  mie  : 
Je  ne  vos  puis  oublier. 

4.  Trop  vos  ai  fait  maus  endurer, 
Dous  ami,  pardonés  le  moi. 

5.  Ma  dame  a  qui  je  sui,  soveigne  vos  de  moi. 

1.    Le  deuxième  vers  manque  Pb8.   —  2.   Pb '*  s.  et  plesant.   — 
3.  Le  troisième  douce  manque  Ph%. 

XIX 

N°  1301.  Texte  de  Pb1   144;  var.  de  B2  179,  P»   303,  Pbs  157, 
Pb17  192. 

1 .  Ore  a  la  bone  eure 

Ce  sont  amoretes  qui  mi  queurent  Seîure. 

2.  Se  j'aim  plus  haut  que  ne  doi, 
Amors  en  blasmez,  non  pas  moi. 


REFRAINS    INEDITS   DU  XIIIe   SIECLE  201 

3.   Dex  !  bon  sera  nez  qui  besera  sa  bouchetc  ! 
Saderala,  dureau,  duron, 
Saderala,  durau,  dureté. 

1.  P*,  Pb6  qui  nos.  —  2.  non  pas     Pb6  ne  pas.  —  3.  B2  de  bone 
houre  seroit   n.    ki   baixeroit...    saderoza  deroza   dure    sai  dei« 
deroza  durelle;  Pb*  sadera  ;  Pb8  duro,   dureau;  Pb17  duriau,  du- 
riau  ;  P'  duriax,  duriax. 

\.\ 
N°  1382.  Texte  de  Pb*  169;  var.  de  1'»  349,  Pb»  159,  Pb17  228. 

1.  Je  l'avrai  l'amor  la  bêle,  ou  je  morrai. 

2.  Amors  l'ait  en  sa  baillie,  qui  tout  entièrement  m'a. 

3.  Mes  cuers  sans  tricherie  toz  jorz  vos  servira. 

4.  Jolivetez  me  semont  de  chanter. 

5.  Sire  Dex,  comment  dure  fin  cuer 
Qui  aime  par  amors? 

6.  Si  proie  qu'ele  soit  m'amie 
Et  je  Tain  de  cuer  entier. 

1.  Pbs  lamour,  lamour  ;  Pb17jc  laurai  la  bêle  sarnor.  —  2.  Les 
quatre  derniers  mots  manquent  Pb8.  —  4.  Pb8  jolie tement.  —  5. 
Pb17  con  dure;  par  amors     I'b17  loiaument.  —  6  n'eut  que  dans  Pb8. 


XXI 

N°  1390.  Texte  de  Pb4  52;  aucune  var.  notable  dans  P-  162,  Pb  5 
118,  Pb  u  88  (sauf  que  dans  ce  ms.  le  dernier  refrain  manque)  Pb  l7 
109. 

1 .  Je  sui  jolis  pour  ce  que  j'aim. 

2.  Dame,  merci  !  Vous  m'ociez. 

3.  Sa  biauté  m'a  mort. 

4.  Bone  amour  que  j'ai  me  tient  gai. 


XXII 

Nn  1449.   Texte   de  Pb17  225;  aucune   var.    notable  dans  P"  345, 
Pb'*  167,  Pb6  130. 

1.   Fins  cuers  ne  se  doit  repentir  de  bien  amer. 


?0  2  REFRAINS    INEDITS    DU  XIIIe  SIECLE 

2.  Biaus   très  douz  cuer,   sans  faindre    touz    jors   vos 

servirai. 

3.  De  ma  dame  vient  la  grant joie  que  j'ai. 

2.  biaus  manque  Pb17. 

XXIII 
N°  1503.  Texte  de  Pb*  176;  var.  de  B2  201,  Pb"  133,  Pb  12  71. 

1 .  Amors  font  de  moi  lor  voloir 
J'endur  les  maus  por  joie  avoir. 

2.  Se  je  l'aim,  ne  m'en  blasmez  mie; 
Mes  fins  cuers  ne  pense  aillors. 

3.  Encor  soient  ci  mi  oeill 
S'est  mes  cuers  la  ou  je  vueill. 

4.  J'ai  tôt  perdu  por  loiaument  amer, 
N'onques  n'en  eu  ne  soulaz  ne  déport. 

5.  Aler  m'estuet  el  douz  pais 
Ou  je  laissai  m'amie. 

1.  joie]  Pb3bion.  —  4  manque  Pb  12  ;  amer]  B2  servir  ;  nonkesnos 
(noi?)  de  li  confort.  —  5.  Pb  u  pais  ou  je  morrai  d'envie;  B2  del 
dous  paix  m'estuet  partir  a  deu  cornant  m'amie. 

XXIV 
N°  1660.  Texte  de  Pb3  156;  var.  de  Pb  "  170. 

1.  J'ai  tant  servi  et  servirai  qu'il  m'iert  meri. 

2.  Je  ai  traï  a  escient 

Celui  qui  m'amoit  loiaument. 

3.  Je  tieg  volentiers  mes  ex 

A  li  esgardor  quant  je  ne  puis  mieuz. 

4.  Si  mesdisanz  ne  me  nuisoit 
Pressui  de  ma  grant  joie  avoir. 

5.  Qui  loiaument  sert  s'amie 
Bien  li  doit  sa  joie  doubler. 

6.  La  painne  m'agrée  que  trai  por  li. 

1.  kil  niait.  —  3.  jou  tieug  m.  iex  a  li  esg.  —  4.  ne  m"i.  —  5.  dou- 
blée. —  6.  la]  ma. 


REFRAINS    INEDITS    DU   XIIIe  SIECLE  203 

XXV 

N°  1G69.  Texte  de  Pb"  107;var.de  Ba  II,  I"  158,  Pb*50,  Pb'«71  ; 
pas  de  var.  notable  dans  Pb(i  131. 

1.  Je  ne  m'en  puis  conforter 
Por  baler  ne  por  joer  : 
Ce  me  font  li  mal  d'amer. 

2.  Je  sui  feme  a  droit, 

Car  je  n'amai  onques  celui  qui  m'amoit. 

3.  J'ai  plus  menti  que  voir  dit  celui  qui  m'aime. 

4.  Ja  ne  mi  marierai, 
Mes  por  amors  amerai. 

5.  Ne  venés  plus  sa,  talent  de  bien  faire  : 
L'en  vos  clorroit  l'uis. 

1.  m'en  Pl>l;  me;  B*  porjueir  ne  porballeir;  P',  Pb  '•  pour  baler 
pourjoer.  —  2.  Pbuqui  m'ama.  — 3.  P",  Pb  u  qui  j'aime.  —  4.  ja] 
P»je.  —  5.  l'en]  B2  Pbu  com. 

XXVI 

N°  1725.  Texte  de  Pb  l7  228;  pas  de  var.  notable  dans  Pb  •  340,  Pb  '* 
169. 

1.  J'ai  apris  a  bien  amer,  Diex  m'en  doint  joïr. 

2.  Biau  douz  cuer,  ne  créés  mie  mesdisant  félon. 

3.  J'ai  trové  ce  que  j'ai  longement  quis. 

xxvu 

N°  1740.  Texte  de  Pb*  98;  var.  de  P*  203. 

1.  Quel  que  part  que  li  cors  aut, 
Li  cuers  remaint  a  m'amie. 

2.  Car  l'en  dit  en  reprouvier: 
Qui  bien  aime  a  tart  oublie. 

3.  Mes  «'autrement, 

N'ai  de  vous  alegement, 
Je  sui  mis  a  grant  martire. 

4.  Quant  me  souvient 

Que  départir  me  couvient, 
Ci  a  dure  départie. 


20  t  REFRAINS  INEDITS  DU  XIIIe   SIECLE 

5.   Or  me  fet  apercevoir 

Por  poi  het  qui  n'aime  mie. 

4.  qua  d. 

XXVI11 

N    1820.  Texte  de  P»  172;  var.  de  Pb4  82,  Pb  fi  98,  Pb  lv  46,  Pb  l' 
P23. 

1.  Je  sui  le  mains  amez  du  mont 
Et  ain  plus  que  tuit  cil  qui  sont. 

2.  Gardez  bien  vos  amoretes, 
Les  moies  m'ont  mort. 

3.  Vous  avez  mon  cuer  et  j'ai  vostre  amor 
En  ma  prison. 

4.  Dex  !  qui  set  pour  coi  il  m'enchace? 

Di  je  donc,  faz  je  donc  chose  qu'autre  ne  face? 

5.  Dex!  de  mon  cuer  n'ai  mie, 
Ainz  l'a  ma  douce  amie. 

1.  ain]  Pbvj'aim,  Pblv  et  si  aing.  —  2.   Pb4  gardez  vos  bien  d'à. 
—  3  il]  P"  el  ;  Pb  '',  Pb  14  me  chace.  —  5.  manque  Pb  !'\ 

XXIX 
N°  1852.  Texte  de  Pb17  190  (ms.  unique). 

1 .  Eu  non  Dieu,  je  m'en  dueil  et  débris  d'amer. 

2.  Li  vers  glaiolais  m'a  tolu  mon  ami. 

2.  et  li  v. 

XXX 

N°  1895.  Texte  de  Pb»  107  (ms.  unique). 

1 .  Elle  m'i  tient,  en  sa  prison  ; 
Quant  li  plaira,  si  m'ochirra. 

2.  M'a  trop...  li  malz  d'amours 
Dont  ja  mon  cuer  ne  partira. 

3.  En  bien  amer  ai  mon  cuer  mis  : 
Son  plaisir  la  belle  en  fera. 

4.  Dame,  corn  fins  amans  vous  pri  : 
Aligiez  moi  ma  dolour. 


REFRAINS  INEDITS  DU  XIIIe  SIECLE  205 

5.   En  vous  ai  je  tout  mon  confort: 
Quant  vous  plaira,  j'avrai  merci. 

2.  Pas  de  lacune  indiquée;  supp.  navré (?). 

XXXI 
N°  1896.  Texte  de  Pb3  122;  var.  de  Pb  "  121. 

1 .  S'onques  nus  lion  morut  por  bien  amer, 
Dont  ne  vivrai  je  mie. 

2.  J'aim  celé  qui  pas  ne  m' ai  m  me, 

N'est  pas  cis  gieus  drois  partis. 

2.  Pb11  j'aim  celi.  Dans  Pb  3,  comme  souvent  dans  ce  ms.,  un  blanc 
a  été  laissé  pour  des  couplet*  qui  n'ont  pas  été  copiés. 

XXXII 
N«  1943.  Texte  de  Pb  G  125  ;  var.  de  Pb4  100  et  P»  209. 

1.  J'oi  le  rosignol  seur  l'arbre  flori 
Joie  mener. 

2.  Celé  qni  j'ai  m'amor  donée 
Tient  mon  cuer  joli. 

3.  En  non  Dieu,  ce  sont  amors,  —  autre  mal  né, — 
Qui  me  sont  parmi  les  euz  el  cuer  entre. 

4.  J'ai,  j'ai 

Amoretes  au  cuer  qui  me  tienent  gai. 

5.  Dex,  tolez  moi  quanque  je  ai, 
Si  me  rendez  m'amie. 

1.    Pb  *  soi-  l'abre  ;   P*  Pb  r'  fueilli.  —  3.  Pb  '*  touz  maus  me  font 
ara.  a.  m.  n.  etc.  —  5.  Pb  '  si  men. 

XXXI II 
Ne  1963.  Texte  de  Pb  9  3  (ms.  unique). 

1.  Se  j'ai  amé,  j'ai  choisi 
Del  mont  la  plus  bêle. 

2.  Puis  que  Diex  fait  de  mon  fin  cuer  sa  chambre, 
Joie  en  ai  grant,  cora  raison  le  comande, 

3    Je  n'i  voi  cui  je  doie  amer,  fors  une. 


206  REFRAINS  INEDITS   DU  XIIIe   SIECLE 

4.  Se  de  lui  ne  me  vient  joie, 
D'autrui  ne  la  quier  avoir. 

5.  Ne  vous  repentez  mie  de  ceste  dame. 


XXXIV 

No  1975.  Texte  de  B  2  183  ;  var.  de  Pb1*  140.  Un  couplet  déjà  im- 
primé dans  Eist.  litt.,  XXIII,  826. 

1 .  Mes  amors  et  les  vos  ne  départiront  mie. 

2.  Jai  par  longue  demoree 
N'iert  fine  amor  obliee. 

3.  Je  ne  me  plaing  pais  des  mais  ki  m'ont  greveit 
Por  la  grant  joie  ou  je  bei. 

4.  Ki  loiaulment  sert  s'amie, 
Bien  li  doit  sa  joie  doubler. 

5.  J'ai  bien  assise  m'araor, 
K'elle  est  a  ma  devise. 

1.  Pb  12et]  ne.  — 3.  ki]  B2  si.  — 5.  Pb  ,2  ja  se  bien  mis  mes  amors 
ke  sont  a  m.  d.  —  Les  couplet*  2,  3,  4  manquent  dans  Pb  12,  mais 
en  revanche  ce  ms.  en  contient  un  autre,  écrit -postérieurement,  dont 
voici  le  refrain:  Deus  ains  (corr.  doint)  ke  j'aie  s'amor  :  s'iert 
ma  joie  acomplie. 

XXXV 

N°  2035.  Texte  de  B  2  47  (ms.  unique)  ;  le  ms.  de  Sienne,  qui  con- 
tiendrait aussi  cette  chanson,  selon  M.  Raynaud,  donne  (fol.  36)  une 
autre  pièce,  dont  le  premier  vers  est  identique. 

1.  Souffrir  l'estuet  et  endureir 
Ki  joie  veult  de  bone  amour. 

2.  Je  ne  m'i  puis  conforteir 
Por  jueir  ne  por  chanteir, 
Si  me  tient  li  mais  d'ameir. 

3.  (Manqué). 

4.  Hé,  très  doulces  amoretes,  a  tort  m'ocieis. 


REFRAINS  INEDITS  DU  XIIIe  SIECLE  207 

XXXVI 

N°  2039.  Texte  de  Pb12  102  (ms.  unique). 

2.  Alegiez  moi,  dame,  les  maus  que  j'ai. 
4.  Ne  bien  ne  me  puet  venir 

Ne  joie,  se  n'est  par  li, 

Ne  d'autre  n'en  quier  avoir. 

Les  couplets  1  et  3  ne  sont  pas  suivis  de  refrains. 
4.   Ce  refrain  est  altéré;  voy.  une  forme  plus  correcte  au  n°  XXXIII, 
refr.  4. 

XXXVII 

N°  2064.  Texte  de  Pb  »  231  ;  var.  de  Pa  356  et  Pb  *  173. 

1.  J'ai  trové  loiaus  amoretes 
Jolietes 

Por  amer. 

2.  Hé,  Dex,  verrai  je  ja  le  jor 
Que  soie  amis? 

3.  Ma  loial  pensée  tient  mon  cuer  joli. 

4.  Hé  amors,  très  douces  amors, 
Cornent  me  partirai  je  de  vos? 

5.  Hé,  biaus  cuers  dous,  a  vos  sont  mi  pensé. 

1.  je  manque  Pb  *.  — 5.  Pb  *  eu  vos. 

XXXVIII 
N°  2072.  Texte  de  B2  21  (ms.  unique). 

1.  K'  en  ferai? 

C'est  la  fins,  coi  ke  nuls  die, 
J'amerai. 

2.  S'amor  sospris  m'ait,  elais, 
Jai  cist  mais  ne  me  lairait. 

3.  Bien  fussiés  vous  onkes  née, 
Gentils  damoiselle  ! 

4.  Loiaul  amor  ai  trovee, 

Ne  m'en  pertirait  riens  née. 

1.  coi]  ms.  caie. 


CORRECTIONS 
A  QUELQUES  TEXTES  PRÉCÉDEMMENT  PUBLIÉS 


(Revue,  XXXIX,  pp.  241-68  et  XL,  pp.  350-67) 


Je  dois  la  plupart  de  ces  corrections  à  l'obligeance  de 
MM.  G.  Paris  et  A.  Mussafia,  qui  me  les  ont  envoyées  par 
lettre  ;  j'en  emprunte  quelques  autres  à  un  compte  rendu  de 
M.  P.  Meyer  (Romania,  XXIX,  p.  301).  Les  auteurs  sont 
désignés  par  leurs  initiales. 

TOME  XXXIX  (CHANSONS  INEDITES  DU  MANUSCRIT  DE  MODÈNE  ) 

P.  245,  n°  1,  v.  3:  mis]  corr.  Guis  (?)  (G.  P.) 

—  —    18,  v.  4:  rien  à  corriger;  «  foisonner  »  =  suffire,  être  de 

force  à  résister  (G.  P.) 

—  —    20,  v.  7:  les]  corr.  la.  (G.  P.) 

P.  247,  note,  ligne  5  :  au  lieu  de  encor  m'en  met,  lire  en  cou  m'en  tien  : 
ligne  7,  au  lieu  de  reprent,  sosjient. 

P.  248,  n°  I,  v.  18:  lire  se  no  (=  nel,  ne  li)  ai.  —  Dirai  li?  Non. 
(G.  P.  et  A.  M.) 

—  —        v.  21  :  ne  voil]  lire  nen  os  (ms.  neuos).  (G.  P.) 

P.  250,  n°  II,  v.  41  :  faisoimes;  lire  probablement  faisoiems.  (G.  P.) 

—  —     —    44:  en]  conserver  a.  (A.  M.) 

P.  251,  n°  III,  v.  13  et  14:  point-virgule  après  ces  deux  vers.  (G.  P.) 

—  —       v.  20  :  la  lacune  est  après  ce  vers,  non  après  le  vers  21 . 

(G.  P.) 

—  —       v.  35:  por  amors]  corr.  de  cuer  vrai  (?)  (G.  P.) 
P.  252,  n°  IV,  v.  5:  effacer  les  deux  points.  (G.  P.) 

—  —        v.   9:  en  si]  lire  si  en.  (G.  P.  et  A.  M.) 

—  —        v.  17:  deux  points  à  la  fin  du  vers.  (G.  P.) 

—  —        v.  22:  triciers  etfaus]  lire  tricieres  faus .  (G.  P.) 

—  —        v.23:  conserver  torteus  (tortosus).  (A.  M.) 


CORRECTIONS 


209 


P.  253,  n°  V,  v.  1G:  La  vie  u]  lire  la  ujo.  (G.  P.  et  A.  M.) 
— ■     —       v.  21 .-  m'amors]  lire  ma  mors.  (G.  P.) 

—  —  v.  22:  remaist]  coït,  renaist.  (G.  P.) 
P.  254,  n°  VI,  v.  2:  cantent]  coït,  cante.  (G.  P.) 
P.  255,  n°  Vil,  v.  9:  son']  corr.  sans.  (G.  P.) 

P.  256,  n°  VIII,  v.  32:  conserver  la  leçon  du  ms.  (G.  P.  et  A.  M.) 

—  —        v.  38:  q'en]  corr.  me. 

P.  257,  n°  IX,  v.  16:  va]  corr.  fait.  (G.  P.) 

—  —  v.20:  grand]  lire  grant 

P.  258,  n°  IX,  v.  36:  granz)  lire  grant.  (G.  P.) 

—  —  v.  39:  talanz]  lire  talent.  (G.  P.) 
P.  259,  n°  X,    v.  18:  n'est)  m'est. 

—  —         v.29:  sui  [je].  (A.  M.) 

P.  263,  n"  XII,  v.35:  dites)  corr.  di  bien.{G.  P.) 

—  —  v  36:  guardez]  corr.  guarde.  (G-  P.) 
P.264,  n°XIII,  v.22:  U]  corr.  si.  (G.  P.) 

—  —  v.  24 :  firent)  corr.  fièrent.  (G.  P.) 

—  —  v.  26:  mot]  corr.  met.  (G.  P.) 

P.  265,  n°  XIII,  dernier  couplet  :  point  après  35,  point  d'interro- 
gation après  40.  (G.  P.) 
P.  266,  App.  1,  v.  30:  apertement,  corr.  apartenant.  (G.  P.) 
P.  267,  app.  II,  v.  11  :  lire  Cui  de  nous  prïnt  tes  pi  tés.  (G.  P.) 

—  —     —        v.  23-4:  conserver  la  leçon  du  ms.  ;  v.  26,  au  lieu 

de  mire,  miere.  (G.  P.) 
P.  268,  note,  str.  VI:  les  vers  3-4  entre  parenthèses.  (G.  P.) 

TOME   XL   (JEUX   PARTIS    INEDITS) 


P.  354,  n°  I,  v.20:  le  ms.  a  sail  =  s'a  il.  (P.  M.) 

—  —       v.  21:  ms.  plus  c'un.  (P.  M.) 

—  —        v.27:  correction  inutile.  (P.  M.) 

—  —        v.30:  ni]  ni.  (G.  P.) 

—  —        v.  39:  M.  G.  Paris  corrige  :  ausi  a  bien  cil  ens  u  cors. 

C'est,  selon  M.  P.  Meyer,  ce  que  donne  le  ms. 
P.   355,   n°  I,  v.   54-5:  virgule   après   traire,  point-virgule  après 
dehors.  (G.  P.) 

—  —        v.  72:  part)  corr.  péri.  (G.  P.  et  P.  M.) 
P.  357,  n°  II,  v.  16:  point  après  ce  vers.  (G.  P.) 

—  —        v.22:  point-virgule  après  ce  vers.  (G.  P.) 

—  —        v.27:  lire  et  se  set  g  Me  mater. (G.  P.) 
P.  358,  n°  II,  v,  51  :  lire  envi.  (G.  P.  et  P.  M.) 

—  —       v.53:  point-virgule  après  ce  vers.  (G.  P.) 

14 


210  CORRECTIONS 

P.  360,  n°  III,  v.22:  n'avez]  m'avez  (P.  M.) 
P.  362,  n°  IV,  v.  14:  lui]  li  (G.  P.) 

—  _         v.  25:  car]  corr.  qui;  virgule  après  perdans  (G.  P.) 
P.  304,  n°  V,  v.  24:  tant]  cant  (?)  (G.  P.) 

—  —        v.30:  sachiez]  fâchiez  (?).  (G.  P.) 

P.  306,  n°  VI,  v.27:  lire  nus  navrait  tel  vie  (?)  (G.  P.) 
p.  307;     —      v.  49:  conserver  la  leçon  du  ms.  (G.  P.) 

—  —      v.51  :  lire  a  tel[z]  poeste[z\.  (G.  P.) 

—  __      v.53:  point  après  ce  vers.  (G.  P.) 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


(Suite) 


si  no  son 
Tsobrans 


dis 


215* 

REAMBAUTZ    DAURENGE 
(=  B.  Gr.  389,  37) 

I.  Pos  trobars  plans 
Es  volguz  tan 
Fort  mer    grei 
Car  ben  pareis 

5  Qal l  mot  fai 

Cane    mais  non   foron. 

[eantan 
Qe  cels  com  tôt  iorn  ditz  e 

[brai 
Sapcha    sis    vol    autra   vez 

II.  Mos  ditz  es  sanz  [dir. 
Don  gap  ses  dan 

Per  tal  ioi  soi  coindes  e  uans 
Qe  mais  val  neis 
.">  Désirs  qieu  nai 

Qe2  anc  nom  ac  semblan 
Peis  a  sainz  comqer  en  uer_ 
[zelai v 
Dautre  ioi  com  puesca  iau- 

[zir. 
III.  (p.  199)  Son  ben  aurans 
Car  per  talan 

Solamen  fo  5  francs   et  hu- 

[mans 
De  dir  ves  leis 


5  Ben  nun6  fa7  gai 

Qem  val  si    per  lieis8  trag 

[mal  gran 

Si  lo  mal  qen  trac  no    sap 

(lai 
Mi  eis  voil    daitan  escarnir. 
IV     Ben  so  trafans 
Qeu  eis  mengan 
Car  die  aiso  tan  qe  vilans 
Cals  pros  me  creis 
5  Sien  mal  trai 

Per  leis    sil   no  sapia  lafan 
Nomes  don.-s  pros  ebe  non9 

[vai 
Sim  pens  qe  tan  rie  ioi  désir. 
V.  Mos  volers  cans 
Qem  sal  denan 
Me  fai  creire  qe  futz  es  pans 
Tan  aut  mespeis 
5     Mon  cor  car  s  ai 

Qe  en  fol  maurei  don  faz 

[lafan 
Tôt    voll    cant   vei    respeit 
[segrai 
Respeitz    loncs    fai    omen 
VI.    Sains  vilians  10  [périr. 

Con  vauc  torban 
Soi  serrazis  o  crestians 
Qals  es  ma  leis 


*  Voyez  l'édition  de  M.  Appel  dans  la  Rev.  d.  I.  r.  IV.  s.,  t.  X,p.  414 
ss.  —  •  c.  en:  Qi  tal  —  *  Appel  :  Duna  qe —  3  A.  L:  Pels  —  4  A.  :  e  uuerze- 
lai  —  «  A.  :  so  —  IJ  c.  en  :  nim  —  ~'  A.:  fas  —  8  A.  :  lieis  — 9  A.  :  nom  — 
10  A.  L  :  iubanz. 


212  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 

5     Nonsai  qe  iai  II.   Tôt  mes  nou 


Non  sai  qe  iai 
Ivfe  posca  de  so  qil  deman 
Et  atrestan  tost  dieus  sil 

[plai 
Co  fes  vin  daiga  esdeuenir. 
VII .   Pauc  soi  certans 
Ves  qeus  reblan 
Dôna  de  vous  so  niolt  lon- 

[dans 
Ane  nô  destreis 
5     Amors  tan  mai 

Per  qieu  non  creiria  dun  an 
Caissius  âmes  pernegun  plai 
Si  bes  no  men  degues  aue- 

[nir. 
VIII.Astrius    e    ma   chanso    vos 

[man 

Qe    dos   sautz  sis  ries,    ar 

[es  sai 

Lo  ters  aut  on  plus  pot  om 

[dir. 

216 

REAMBAUTZ  DAURENGE 
(=B.  Gr.  389,  3) 

I.    Aissi  mou 

Un  sonet  nou 

On  ferai  e  laz 

Chanson  leu 
5     Pos  vers  plus  greu 

Fan  fors '  dels  fatz 

Car  er  vist 

Pos  tan  mes  qist 

Com  son  senuatz 
10  Si  com  sol 

Fora  mos  cors  veiatz 

Mascamiatlai.posqers  vol. 


Can  veg  sim  mou 

Fin  amistatz 

Far  pos  greu 
5     Vos  dig  leu 

Mas  voluntatz 

Tan  ai  aqist 

Or  ai  ben  vist 

Tant  poia  gratz 
10  Qal  meu  vol 

For  eu  fort  aut  poiatz 

Conqeirer   mos  cors    lai  on 

III.  Tantuipam2  [sol. 
Mon  cor  qant  rim 

Qe  sius  datz 

Tein  de  loin 
5     Mas  de  près  poin 

Con  fos  amatz 

Per  ol  3  ioi 

Dont  sat1  ni  croi 

Nou  un  3  solatz 
10  Trop  de  rené 

Car  die  qil  mam.  qassatz 

Fai   sim  sofre  qeu  lam   so- 

IV.  Amors  rim  [uenc. 
Can  6  volet  prim 

Mas  mes  de  latz 

Ab  qe  poin 
5     Cab  colp  de  loin 

Som  près  nafratz 

Tôt  mes  croi 

Can  dautre  ioi 

Sol  me  toqatz 
10  Si  nous  venc 

Amors  mala  fin  7  natz 

Qeu  posca  amar  e  mens  non 
Y.  (p.  200)  Ges  un  cen  8       [ten\ 

Nom  [ires  cant  plou 

Sim  soi  moilljatz 


1  /.  :  sorz  —  ^  i. 


:  prim 


3 


e.  en  :  cil  —  4  Z.  :  fat  —  5  c.  en  :  an  —  6  c. 


en:  Com  —  i  c.  en  :  fui  —  8  /.  :un  ou 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNART  AMOUOS 


213 


Freg  ni  nieu 
5     Tant  can  pens  breu 
Dest  ioi  qem  platz 
Mas  per  crist 
Pos  mi  fa  trist 
Can  pens  iratz 
16  Car  ai  fol 

Car  am  sols  sens  solatz 
Aissi  torn  mon  bon  penz  en 
VI.   Era  plou  [dol. 

Ou  sai  mieu  i 
Tenc  anz  fas  datz 
Ar  uinc  breu 
5     Vei  cazer  nieu 
Anz  es  estraitz 
Tant  ai  trist 
Mon  cor.   per  crist 
Totz  son  chamjatz 
10  Car  ai  dol 

Et  ai  2  ai  gang  viuatz 
Veus  me  sabi  e  veus  me  fol. 
VII.  Cant  nous  vim 
Se  près3  al  cim 
Mos  cors  auzatz 
Pois  dais  on  ; 
5  Non  ac  ni  gon  5 
Ves  autre  bras 
Per  qem  coi 
Cal  res  mi  voi 
Trop  lam  no  fas 
10  Non  la  tent 6 

Em  tant  com  al  cor  plaz 
Cane    pos    la    vi    dais    noj 
[souenc. 
VII I.  Sus  daut  cim 

Son  car  vos  vim 
Jos  daualatz 


Si  nous  iom  7 
5  So  atzis  om 
Sotz  son  liatz 
Lui  no  voi 
A  mors  prom  coi 
De  lieis  pensatz 
10  Nous  souenc 

Ane  dol  esmai.  me  ditz  8 
La  mort  car  veires  qe  nom 
IX.  Trop  me  tenc  [tenc. 

Car  lai  no  son  anatz 
Saber   damor  sanc  lien  so- 
[uenc. 
X.  Nom  souenc 

Ane  de  liei  so  sapehatz 
Mas  una  ves    qem    ten  em 

[tenc. 

217* 

REAMBAUTZ  DAURENZA 
(  =  B.  Gr.  389,23  ) 

I .   Car  vei  qe  clars 
Chanz  sabriua 

Dels   aucels    el   prims   fre- 

[mirs 

Tu  9    es   douz  e    bels    lor 

[auzirs 

5  Tan  qe  no  sai  coisim  viua 

Sens    chantar.    per   qe    co- 

[menz 
Una  chansoneta  gaia. 
II.    El  sols  blancs  clars 
Veg  qeraia 

Cautz  greussecs.  durs  et  ar- 

[denz 


*  c.  en  :  un  ou  —  2  ?.:  ar  —  3  /.  :  Se/npres —  *  l.  :  dais  soin  —  s  l.  :  nis 
ioin —  G  L  :  tenc  —  7  /.  :  ioin  —  8  c.  en:  datz. 

*  Voyez  l'édition  donnée  par  M.  Con;tans  d'après  les  deux  mss.  de 
Chdtenham  dans  la  Revue  d.  l.r.III  s.,  t.  F,  (1881)  p.  272  $s.  —  »  c. 
en  :  Mi 


214 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Qem  o  frain  totz  mos  bons 
[talons 
5  Mas  una  voluntatz  gaia 

Dun  franc  ioi  qem  mou 
[dezirs 

No    uol    cap    flacs    volers 

III.  Ges  no  mes  clars         [viua. 
Ni  mesqiua 

Est  iois  don  faz  les  sospirs 
Ni  sai   sant  >   mi   valc  mos 

[dirs 
5  Ni  mi  noc  e  tem  qem  viua 
Enaisi  trop  loniamen 
Lamors     qeil     tenc    meina 
[gaia 

IV.  (p.  201)  Mos  cors  es  clars 
E  sesmaia 

An  sui  a  mestz  grantz  iau- 

[zens 

Plens  e    voigz   de   bel   co- 

[mens 
5  Qe  luna  meitatz  es  gaia 

E  li  autrama  dorm.  cossirs 

Ab  voluntat  mort  e  viua. 

V.  Cus  volers  clars 
Qem  caliua 

Mes  peing  enant  e  failli rs 
Mostra  tems.  qe  iauenirs 
5  Val  pro  mais  a  loin  qe  viua 
Qe    cortz    gaugz.  per  qes- 
[pauentz 
Satempra  ab  voluntat  gaia. 

VI.  Vostr  amies  clars 
Nous  essaia 

Dona  [nius  mostra  paruens 
Cores  en]  vos  totz  sos  sens 
5  Ni  sap  sil  es  dur  o  gaia 
Tant    vos    tem    qel   descu- 

[brirs 


Lieis  chars    e    no  sap  qes 

VII.  Qe  non  es  clars  [viua. 
Ab  complita2 

Amies  ni  ab  genz  mentirs 
Si  nô  tem  so  camatirs 
5  Ieu  3    deu    venir    anz    qel 

[viua 
Com  non  ama  finamenz 
Ses  granz  alqes  gaia. 

VIII.  Ai  francs  cors  clars 
Res  veraia 

Dôna  valliam  chausimenz 

.[ J4 

5  Qem    sapehatz    per  fondât 

[gaia 
Dir  so  qe  vol  mes  suffris 
Nom  dan  si   voles  qe  viua. 
IX.   Domnal  meilher  res  qe  viua 
De  loing  ses  fueemes  com- 
[pres 5 
Era  donas  voluntat  gaia. 
X     Ai  donsa  res  coind  e  gaia 
Aram  péris  mara6  morirs 
Si    nom    datz    socois    coin 
r, 


viua. 


218 

REAMBAUTZ    DAURENGA 

(=  B.  Gr.  389,  13) 

I.  Ar  mer  tal  un  vers  faire 
Qe  ia  nom  feira  fraitura 
Qar  es  sauais  mi  escura 
Cilqem  faimal  ses  ben  traire 

5  A  dolen 
Faillimen 
Fuz  "  qem  ven 
Ben  a  ela 8  donc  pauc  de  sen 


1  /.  :  sanc —  2  c.  e?i:  compliua  —  3  c.  en:  Leu  —   4  /.:  Seu  non  sui  tâhl 
asapiens —  5/.  :  m'escompren  —  6  /.  :  proismara. 
7  c.  en.  :  Fitz  —  8  /.  ;  ac  la 


LE   CHANSONNIER  DE  BERNART   AMOROS 


215 


Seu    atic   fui  vas  leis  ban- 
caire. 
II.   Seignier  dieus  con  aug  re- 

[traire. 
Tan  gran  ma  desauentura 
Mais  dol  non  ac  hanc  mesura 
Qan  trastornal  cor  enqaire 
5  Si  espren 
Aspramen 
Mon  talen 
Ira  qe  mon  marrimen 
Gant   cl   cuit  far  de  gai  te 
[fraire 

III.  (p.  202)  Em    plorant    serai 

[chan  taire 
('ai-  nuls  gaugzno  masegura 
Pos  mos  '  respeigz  peiura 
Qem  val  mos  chantars  qar 

[laire 
5  Sol  termen2 
Vau  seguen 
Per  paruen 

Fils  3  non  ai  mais  pessamen 
E  dol  e  dolor  e  braire. 

IV.  Desastrucsnasc  dema  maire 
Per  qe  totz  mais  maiura* 
Ben  es  fols  qui  mal  mazura 
Peigz   com    pose   auer  pe- 

[chaire 
5  Neus  qim  pen 
Aut  al  ven 
Anz  presen 

Qe  tenrai  per  ben  volen 
Cels  qels  oils  mi  voira  traire. 
V.    Dona  dousa  debonaire 

Nom   getet  tant  a  nomeura 
Neus  qe  tôt  aias  dreitura 
Qab   merces  cors  nous  es- 
[claire 
5  Qeu  atent 


Chausimen 
Sius  es  gen 
Si  no  far  mes  pened.'ii 
Issi  fors  de  mon  repaire. 
VI.  Qe  per  larma  de  mon  paire 
Sil  vostre  durs  cors  satura 
Nom  tenramurs  ni  clausura 
Qeu  non  esca  de  mon  aire 
5  Mantenen 
Ves  tal  sen 
Don  fort  len 

Me  veiran.  mais  mei  paren 
Mis  vos  no  mo  presatz  gaire. 

VII.  Domna   dieus  qens  es  inni- 

[iaire  5 
Perdonet  gran  forfaitura 
Acel  so  diz  lescriptura 
Qez  era  traitres  e  laire 
5   Lissarnen 
Es  crezen 
Sil  non  men 
Qi  non  perdona  corren 
Ja  dieus  non  lier  perdonaire. 

VIII.  Per  vos  am  don  ab  cor  vaire 
Las    autras    tan    col   mons 

[dura 

Car  son  e  vostra  figura 

Qe  per  als  no  son  amaire 
5  Neus  la  gen 

Pauc  valen 

Mal  volen 

Nam  cel  qeus  vezon  souen 

Mas  no  1  >r  nauz  far  veiaire. 
IX.  Domna  pren 

Ab  couen 

Auinem 

Si  mais  paz  comandamen 
5  Ja  nô  perdonz  neus  veiaire. 
X.   E  sius  men 

En  couen 


1  /  :  m.  bos 
1  /.  :  iutiaire. 


2  /.  :  Fol  tormen  —  3  c.  en  :  Sais   —  '■>  l.  :  mapeiura  — 


21<î 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Qeus  prezen 
Ogan  sieu  m 
5  En  tuisse  guatz  ab  varaire. 


Ogan  sieu  malamen 


219 

RAEMBAUTZ  DAURENGE* 

(  =  B.  Gr.  389,  9  ) 

I.   Anz  qe  haura  bamas  cal1 
Girun  vers  damon  daual 
Qistmen  guerrer.  mal  adreg 
Si  fan  de  gabar  vassal 
5  E  caio  se  qest  canal 

Cai  perdut  maion  destreit. 

II.  [p.  203)  Ja  per  so  uns  non 

[guabei 
Sim  perdem  de  nostrat  nei 
Qemqeras  em  tug  el  bal 
Ancogan  del  autre  freih 
5  Farai  tornar  tal  neueih 
Al  mestier  bernnrt  del  gai. 

III.  Segnior  eu  no  soi  ges  dur 
Ni  no  veg  can  tenc  sol  duz 
Ni  de  lôp  ni  de  lairon 

Nos  pot  gardar  desast:  ucs 
5  Qon  sai 2  cel  qe  esle  sucs 
Tost  a  emblar  coinogutz. 

IV.  Ben  sap  cel  de  me  solio 
Sieu  fas  en  tant  con  el  fo 
On  bertran  dels  bauz  on  vx 
Jamais  non  tengram  blizon 

5  Mas  fait  cuion  auer  pron 
Car    ni   von  caut  con  sam- 
[bux. 
V.  Ane  pois  nols  tinc  per  on- 

[ratz 


Pol  camps  fo  desamparatz 
Per  els  senes  colp  de  bran 
Qel  caualer  la  meitatz 
5  Degron  tener  les  valatz 
Qil  eron  be  seis  aitan. 

VI.  Segnior  ben  fai  3  qen  estan 
Auia  penre  un  sol  dan 
Mas  ar  soi  outra  passatz 
Et  estortz  daqel  afan 

5  Per  qeu  nauera  doptan 
Ar  serai  a  ben  donatz. 

VII.  Ane  pos  a  ma  dona  plac 
Qem  volgues  mal  gaug  non 

Ni  iamais  nom  deu  parer 
Bes  pos  eu  mezeis  mestrac 
5  E  qi  nom  tengues  per  fiac 
Tôt  ioi  laissera  caser. 
VIII.  Mas  dieus  no  saub  hant 4 

uoler 
Com  de  tôt  se  desesper 
Per  qem  tenc  e  si  mesmac 
Donna  car  ben  cud  sabor 
5  Qe  iamais  nous  an  veser 
Mas  ges  per  tant  non  5  es- 

[trac. 
IX.  Trobat  per  so  nom  estrac 
Car  mos  cors  si  ben   nés  - 

[mac 
No  men  van6  a  poder. 
X.  Espérât  ai  et  esper 

Merce  sius  ven  a  plazer 
Donna  per  qe  nom  nestrac. 


*  Texte  déjà    imprimé  par  M.Klein,  dans  sa  publication  Die  Dichtun- 

gen  îles  Monchs  von  Montaudon  [dans:  Ausg.  u.  Abh.  aus  d.  Gebiete  -I. 

rom.  Philol.  VII,  Marburg,  1885,  p.  94  s.).  —  '  c.  en  :  lhaura  brunas  cale 

2  c.  en:  fai —  3  c.  en  :  sai —  4  e.  en  :  banc—8  l.  :  nom  — 8  «.  en  •  ,\:,n. 


LE  CHANSONNIER   DE    BERNAUT  AMOltOS 


217 


220 

RAMBAUTZ    DAURENGA 
(=B.  Gr.  389,21) 

I.  Brais  chanz  qils  critz 
Augdels  auzelspels  plaisa- 

[duz  ' 

Oc  mais    nols    entrât  2    nj 

[uols  deign 

Cun  iram  cem  3 

5  Lo   cor    on   dois    ma    près 

r.iziz 
Per  qen  sofer. 

II.  (p.  204)  Trist  e  raarritz 

Y.v  mos  chantars  aisi  fenitz 
Pertotz  temps  mais  tro  que- 
[lal  deign 
Ni  pel  seu  mantein 
5  Ki a  bos  mas  ères  delitz 
Pos  nol  sofer. 

III.  Jois  me  fo  gnitz 

Un   pauc  mais,  tost    me  fo 

[faillit/ 

Sanc  me  vole  arma  eu  des- 

[deing 

Corn  non  estieing 

5  Can  prec   ni  merces  ni  es- 

Re  non  conqier.  [triz 

IV.  Mos  cors  me  ditz 

Per  qe  soi  per  leis  auelitz 

Car  sap  qeu  null  autra  nô 

[deign 
Per  som  cïestieign 

5  Morrai  car  mos  cors  enfol- 

[litz 
Mais  gës  nom  qer. 

V.   Co  soi  traitz 

Bona   donnab  talant  voutitz 

Ali  cor  daral   vueil   ar  nol 

degn 


VI. 


VII. 


VIII 


IX 


Mesclat  ab  gein 
Volres   qen    torn   folz   ea- 
[dormitz 

0  qem  esmer. 
Trop  son  arditz 
Dona  mos  serz  es  abozitz 
Ma  faitz  dir  fols  motz  qieu 
[non  deign 
Contra  mi  reign 
Tan    son  fors  de  mo  sens 
[issitz 
No  sen  qun  -1  fer. 
.M  ilt  es  petitz 

Donal  tortz  qer  sai  ser  au- 

[zitz 
Per  qe  vos  maues  en  des- 

deign 
Faz  nesdeneing 
Pendutz  fos  aut  [>er  la  ser- 

[uitz 
Qi  a  moilher. 
,  Humils  ses  giein 
Vostre  sers  fais  faillitz 
Merce  nos  qer. 
Pos  pretz  non  sobrans.  ses 


[tegitz 


K  vos  ier. 


221 

RAMBAUTZ  DAURENGA 

(=  B.  Gr.  389,  28) 

I     Kscoutatz  mais   no   sai   qe 

[ses 

Segnior.  so  qieus  voil    co- 

[mensar 

Vers  estribot  ni  siruentes 

Non  es  ni  non  lo  sei  trobar 

5  Ni  eu  no  sai  cousil  fezes 


i  /.  :  plaisaditz  —  2  c.  en  :  entent —  3  c.  m  :  tem  —  '•  /.  :  qim. 


218  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Saital  nol  podia  cabar. 

Cane  hom  dautal  miga  non 

nausis  far.  ad  home  ni  ad 

femna  en  aqest  segle  ni 

en  laltre  qe  nés  passatz. 

11 .    Si  tôt  mo  tenes  a  soles  ' 

Jes  per  aisso  nom  dei  lais- 

[sar 

[■ •   -I2 

Cades   nom  cudon  chastiar 

5  Tôt  qant  er  nom  prez  im  3 

[poies 

Vas  so  cades  vei  et  esgar. 

E  sai  vos  ben  dire,  perqe 
car  seu  uos  dizia  paraula 
e  non  la  trasia.  a  cap  sai 
qe  tenrias  men  per  fat.  qe 
mais  am  auer  seis  diners 
el  poign.  qe  mil  sols  al 
cel. 

III.  (p.  205)  Ja  ten4  nom  tema 

[far  qun  s  pes 
M  os  amies  aissol  voil  pre- 

[gar 
?al  obs  nom  vol  valer  mânes 
Pos  im6profer.  a  lonc  tanz 

[ar7 
5  Plus   tost  de   lieis    qe    ma 

[conqes 
Non  potnulla  res  enianar. 
Tôt  aiso  dir8  per  una  dona 
qem  fai  morir  ab  lonc  res- 
peig.  etab  bellas  paroulas 
pot  mi  donc  bon  esser 
segniors. 

IV.  Qe  ben  a  passât  qatre  mes 
E  a  mi  a  cent  anz.  som  par 
Qe  ma  autreiat  e  promes 


Qem   dara  so  qem  es  plus 

[car 
5   Donna  pos  bon  cor  maues 

[mes 

Adol  sai  9  me   del   dolz  la- 

[mar. 

222 

REAMBAUTZ  DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389,  22) 

I.    Clars  douz  e  fis  ,0 

Del  bazeresc  11 

Mes  sos  bas  chanz 

Vas  cui  mazerg 
5  Cap  ioi  sespan 

Viu  ho  noire 

El  temps  qe  grill 

Prob  del  silure  12 

Chanton  el  mur 
10  Jois  le  caire13 

Qes  compassa  esqaira  ll 

Sa    uois.   cha   plus    leu    qe 
[siura 

Cora  nuls  non  si  asigura  15 

Mal16  grils  en  la  bazeresca. 
Il .    Clars  iois  e  gens 

Ses  fuec  grezesc 

Els  paucs  enfanz 

Bosc  e  coderc 
5  Qe  nul  enian 

Noi  emploire 

Mas  los  borcill 

Noi  vi  auer  ploire  '" 

Dom  mi  rancur 
10  Qeil  blanc  vaire 

Tant  amistat  pichenaira 


1  c.  en  :  foies  —  -  /.:  Que  ieu  mon  talan  non  disses  —  3  l.  :  un  —  4  c.  en  : 
ren  —  3  l.  :  qim  —  6  /.  :  mo  —  '  /.  :  tarzar  —  »  /.  :  die  —  9  /.  :  Adolsas  — 
1IJ  /.  :  feinz  —  ll  e.  en:  bazetesc  —  12  /.  :  siure  —  13  c.  en  :  raire  —  u  /.  : 
e  sesqaira  —  IS  L:  azerga  —  lf;  /.  :  Mas  —  17  /.:  pliure 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


210 


Sauis  er  fols  qi  si  pluira  ' 
Qe    grieu    er  qe    les    con- 
[derga 
Fis  iois  ses  flama  grezesca. 

III.  Glars  brunz  c  tenz 
Motz  entrebesc 
Pensius  e  pensais  2 
Enqier  en  serg 

5  Corn  sim  lam 3 
Pogues  roire 
Lestrain  roill 
Vil  fer  tuire  u 
Don  mon  escur 
10  Cor  esclaire 

Tôt  cant  iois  gen  esclaira 
Maluestatz.  toi  e  tiura 
Et  enclau  iorien5.  el  sorga6 
Por  qira  ioi  entrebresca. 

IV.  Cuz7  naus  ni  leing 
Ni  Munis  on  pesc 
Nom  es  enanz 
Car  vei  soi8  borg9 

.")  Anz  vau  trobaa 
Com  vis  doire 
Qe  mont  el  cill 
Al  fol  vire  '" 
Tant  vei  pretz  dur 
10  Per  qe  laire 

Lauzengiers  conten  e  latra" 
E  sos  auars  digz  enivra 
Prez  per    qe    iois  fraing  e 
[borga  i2 
Qis    vol    critz    qel   pren    e 
[pesca. 
V.    Caurs  es  empeing 
Cane  non  es  presc 
Vidal  costanz 
Mardi  domerg 


5  Nom  pueis  sc<  bran 

Dois  decoire 

Per  qen  torrill 

< !ab  un  guiure 

De  mal  aur 
10  No  istral  paire 

Don  lo  fils  sofris  e  paira 

Malvestat     qel     nafre     el 
[guiura 

E  fai  costancha  domerga 

De    domnei    4e    noils    les 
[presca. 
VI.  (p.  206)  Car  petit  meinz 

Qe  no  paresc 

Als  paucs  semblanz 

Del  menor  derg 
5  Qem  van  duptan 

Aur  per  coire 

Car  al  perill 

Don  ieta  luire  13 

Veig  un  tafur 
10  Qi  ner  fraire 

Qel  nezirs  maluatz  sa  fraira 

Lai  on  lo  francs  fils  se  liura 

E  non    crel  iois    plus    aut 
[derga 

Qel  crims  nais  an  qel  pa- 
[resca. 
Vil.   Caurs  on  argens 

Esmer  e  cresc 

Ab  ditz  verais  u 

Con  hom  fai  clers  13 
5  Vau  chastian 

Près  lo  goire 

Mas  per  un  fill 

Pot  reuiure 

Vas  cui  matur 
10  De  bon  aire 


1  /.:  pliura.  —  2  /.  :  pensans  —  3  /.  :  lan  —  *  l.  :  Nil  fer  tuire  —  K  c. 
en:  iouen  —  6  /.:  serga  —  7  c.  en  :  Carz  —  »  /.  :  ioi  —  3  c.  en  :  berg  — 
i°  /.  :  iure  —  «  l  :  laira  —  '2  l.  :  berga  —  l3  L:  liure  —  '*  /.  :  Ab  durs 
colps  granz  —  1S  /.:  clerc 


2  2  0 


LE  CHANSONNIER  DE  BEKNART  AMOKOS 


Si  col  uenz  vai  sus  en  laira 
Lo  siens  noms  viu  e  reuiura 
Pretz  e  ioi  qel  mergueitf 
[clergua 
Dieu  prec  caital  baron  tres- 

[ca.  ' 
VIII.  Cel  qi  fal  vers  sacompaira 
Ah  les  qe  ia  non  escrima 
Qe  non  tem  correg  ni  verga 
I,o  fuecs  qes  compren   ses 
[esca. 
IX.   Raembautz  torn  e  repaira 
Lai  on  pretz  viu.  e  reuiura 
Al  conte  cui  dieus  azergua 
On  sabers  e  honors  cresa.  ' 


223 

RAEMBAUTZ    DAURENGE 

(=  B.  Gr.  389,  14) 

I.  Eu  non  sui  ies  mais  e  as- 

[  trucs 

Anzson2mal  astrucs  adreitz 

E  pos  malastrucs  ma  eleitz 

Farai    vers     malastruc     e- 

[freitz 

5  Qeu    non     trop    malastruc 

[adreitz 

Qil    malastruc   cap    empe- 

[zeitz. 

II.  Car  per  tos  temps'sui  mal- 

[astrucs 
Per  un  grant  malastrc  qem 

[ve 
E  qi  per  malastruc  nom  te 
Dieu  prec  de   malastre  les- 

[tre 

5  Qe  mil  malastruc  foran  pie 

De  malastre  qieu  ai  eu  me. 


111.   Donna  per  vos    soi   malas- 

[trucs 
Qar    per   malastrem   voletz 

[mal 
E  sis3  ben    malastruc  ior- 

[nal 

Cane   nuls    malastrucs    nol 

[fes  tal 

5  Malastrucs    truep  i    maues 

[égal 

Per  qe  de  malastre  non  cal. 

IV.  Ar  auias  con  sui  malastrucs 

Cant  vi  del  malastre  mouer 

Eu  sui   plus   malastrucs  en 

[ver 
Qem  malastrem  laisse  cha- 

[zer 

5  E  pois  vinc  malastre    qerer 

Doncs  autre   malastruc  es- 

[per. 
V.  Sicu   ia  trobes  dos   malas- 

[trucs 
Canessen  mais  astres  qe- 
Anera  malastrngamen  [ren 
Gadoues  for   eu  malastrucs 

[gen 
5    Mas  non  truep    malastrucs 

[valen 
Came  de  malastres  prezen. 

VI.  [p207)  Sieu  soi  aitan  *  mal- 

[astrucs 
Qe  de  malastre  port  la  flor 
E  ai  ben  malastruc  honor 
Le  ui  malastrus  de  segnior 
5  Ni  chantes  malastre  ab  pîor 
Daqest  malastruc  amador. 

VII.  Cans  es  malastrucs   de  se- 

[gnor 
Et   ieu  sou  malastrucs  da- 

1  mor. 


'  /.:  cresca.  —  *  l.  :  son  ben  -  •  I.  :  fis  —  *  /.  :  aitan  fort 


LE  CHANSONNIER    DE    BERNART  AMOROS 


221 


224 

REAMBAUTZ     DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389, 12) 

I.  Ara  non  siscla  ni  chanta 
Rossigniols 

Ni  cridairols  ' 
En  verrier  ni  dinz  forest 
5  Ni  par  flora  groia  ni  blaua 
B  siin  nais  iois  e  chanz 
E  creis  en  veillians 
Car  nomiven  consol  somne- 

[janz. 

II.  Car  a  mi  donz  atalenta 
Qem  loing  dois 

E  serai  be  fols 
Seu  totz  temps  ab  leis  non 

[rest 

5   Pos    frain    ma    dolor    plus 

Si  qe    fais  ni   afanz    [braua 

Nom  pot  esser  dan/ 

Ni  maltraigz  nom  dol  panes 

[ni  granz. 

III.  Ca  pauc  le  cors  nom  na- 
Qeschirols  [uenta 
Non  es  ni  cabrols 

Tan  lieus   corn   eu   sui  qel 

[test 
5  Mes  la  ioia  qeu  cercaua 
Don  son  iais  entrepainz 
E  serai  tôt  lanz 
Pos    ma     dona    vol    mons 
[enanz. 

IV.  Jes  nocam  espauenta 

Lura  estols 
Dels  fels  fais  e  mois 
Lanzengiers   cui   deus  tem- 

[pest 


5  Sim  prent  mi  don/  c  men- 

traua 
Per  jamais  a  mil  anz 
Tôt  al  seu  cornanz 
Qen  als  cors  non  col  qeu 
[meslanz. 
V.  Ja  deus  qel  iornz  fes  qaran- 
Dals  mon  sols  [ta 

Es  tornet  fillola 
Don  mi  a  don  ni  aprest 
5  Mais  reis  si  leis  mi  Baluaua 
Anz  li  laisel  talanz 
Lo  mon  e  mil  tan/. 
Contra   leis  qem     toi     totz 
[enianz 
VI.  Cap  con  2    cor   qel  mieu  si 
Sai  qem  tols  [planta 

Car  donar  o  vols 
Dona  au  3  iois  pais  e  vest 
5  Tôt  lenian  qa  me  portaua 
Gen  Ion  trais  a  sain  iuhan 
Ar  men  creis  talanz 
Don    caira    el    sol    ab   las 
[mainz 
Vil.  Ai  dôna  prezanz 

Ar  penz  qeus  a  col  cm  bai- 

VIII.  Joglar  vostrenauz         [zanz 

Voil  e   dieus  lo  vol  mil  ai- 

[tanz. 

225* 

RAEMBAUTZ  DAURENGA 
(=  B.  Gr.  389,  ï) 

1 .    (;;.  20S)  Al   prim  qeil   rim  * 

[sorzen  sus 

Pel  cun  ■'   prim    fueilla.  del 

Lbrancail 


'  /.  :  crida  lauriols  —  2  c.  en  :  son  —  3  /.  :  cui. 

*  Voyez  Céditionde  M.  Appel  dans  la  Rev.  d.l.  /•..  IV.*.  t.  X  p.    i09  s. 
—  *c.  en  :  tim  —  5  c.  en  :  cim 


0  ■)  0 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Sagues   raizoïi  feir  un  bon 

[vers 
Pos  ma  dona  no   uol.  qeu  ' 

chan 
5  Mais  de  leis.  nil   ven  a  ta- 

[lan 
E  chanz  si  damomones  faitz 
No  ual  plus  con  ses  douma 
[amars. 
II.  Con  a  lei  platz  non  die  plus 
Senes  tôt  marnes  ill 
E  per  dieu  si  es  ben  en  vers 
Qe  non   auz  chantar   dere- 

[nau 
5  De  leis2  vas   cui    sui  voitz 

[denjau 

E    eels  qieu  pietz  voil   fers 

[estraig 

Er  donc  oimais  voigz  mos 

[chantars. 

III.  Eaig  virol  segle  de  mon  us 
Lauzengier  fais  defaig  uol- 

[pill 
Ai   can   nauran   ia    damors 

[ters 
Ab    lur  chan.  parlar  deui- 

[nan 
5  Per  lur  ditz.  van  dônas  dup- 

[tan  3 

Qan  '*  mortz  drutz  ses  colp 

[atraig 

Souen.  per  lur  fais  deuinars. 

IV.  Cant  cist  fut  mil  5  maluatz. 

per  us 
Chanton  de  solatz.  emperil 
Qe  dizon  de  tort  en  trauers 
De  cels  qe6  lur  er  en  sem- 

[blan 


5  Domnes   vers  qieu   entenda 

[tan 
Cil  domna    cuig  en  tôt  tra" 

[saig 

Qe6  sos  amies  aia  espars. 

V.   Ricshom  toma  tost  en  raus 

Can  sufre.  com  se  merauill 

Qe  nom  saus  sa  maizon  fair 

[fers 

De  cels  qi  venon  corteian 

5  Ges  non  an  colpa  cil  co  fan 

Qel  segnier  nés   de  tôt  for- 

[fagtz 

A  cui  en  couen  castiars. 

[  Arglmento] 

Gaubertz  de  poicibot  si  fo  gen- 
tils bom.  e  fo  del  vescat  de  lemozi 
fils  del  castellan  de  poicibot.  e  fo 
mes  morgues  cant  era  enfas  en  un 
inoster  qe  a  nom  san  leonart.  e 
saup  be  letras  e  ben  chantar.  e  ben 
trobar  e  per  voluntat  de  fêna  issi 
del  monester.  e  uenc  sen  a  celui  on 
venian  tuit  aqil  qe  per  cortezia 
volian  honor  ni  benfait  an  sauaric 
de  malleon  et  il  li  det  arnes  de 
ioglars  vestirs  e  cauals  e  pois  anet 
el  per  cortz  e  trobet  e  fes  bonas 
chaiizos  et  enamoret  se  duna  don- 
zella  gentil  e  bella  e  fazia  fa  s  ' 
chanzos  délia  e  ella  nol  vol  amar 
si  non  se  fezes  caualers  e  nô  la 
tolgues  per  moillier.  [p.  209)  &  el 
o  dis  an  sauaric  con  la  donzela  lo 
refu  saua  donc  sauaris  lo  fes  caual- 
ler  eil  donet  terra  &  renda  e  tolc 


1  Appel:  qu?i  —  2  A.:  lei  —  :<  A.  :  duplan  —  *  A.:  E  an  —  b.l.  :  mit  — 
A.  :  que 

'  c.  en:  sas.  Le  second  texte,  écrit  au  folio  32  verso  de  lu  dernière  partie 
du  manuscrit ,  n'offre  que  la  seule  variante  :  las. 


LE  CHANSONNIER  DE   BERNAHT  AMOROS 


003 


la  donzela  per  mullier  e  tenc  la  a 
grant  honor  et  auenc  si  qel  anet  en 
espalgniae  ladonzelaremas&  uns 
cauallera  dangleterra  si  eutendia 
eu  ella.  e  l'es  tant  e  diz  qe  la  mena 
via  e  tenc  la  longa  aaizo  pi  r  druda 
e  pois  la  laissa  malauient  anar. 
Gaubertz  torna  despaignia  &  al- 
berga  uua  sera  en  la  ciutat  ont 
ella  era  &  el  anet  de  foras  pe/-  volô- 
tal  de  femna  &  entret  en  larberc 
duna  paabra  femna  qeil  fo  deit  qe 
la  entre  auia  una  bella  donzela  e 
trobet  la  sua  moilher  e  qant  e  la 
ni  &  ella  lui  fo  granz  dolois  entre 
lors  e  granz  vergogna  ab  lei  estet 
la  noit  e  lendeman  son  anet  con 
ella  e  mena  la  en  una  mongia  on 
la  tes  rendre  e  per  aqella  dolor 
laisset  lo  chantai-  el  trobar. 


226 

JAUBERTZ  DE  PUIGCIBOT 

(=B.  Gr.  173,  14) 

I.  (jp.  212)   Una  granz   amors 

[corals 
Mi  destreing  en  '  te 

Si  qeu  non  sai  ren  dir  als 

Mais  clamar  merce 

5  E  car  me  dais  non  soue 

Sembli  malfat  entre  las  genz 

Em  par  menre  ma  sabenza 

Dont    amors    qem   forz   em 

[venz 

Degra  venzer  ma  clamors 

10  Cal  venzedor  es  honors 

Qe  merces  lo  ueuz a. 


II.  Amora  vostre  noms  es  fais 
<  îar  non  amatz  me 

'v»ieu  vos  soi  fis  e  leials 
E  voa  am  anc  se 
5  E  pos  aissi  sesdeue 
Qieu  vo  ibedienz 

Damor  e  de  bon  volenza 
E  vos  mes  mala  e  cozens 
Sens  benfait  e  sen  socors 
lu  Per  dreit  sei  û  u  amora 
E  *  malvoleuza. 

III.  Donc  pos   non   val  car  soi 

ta!  ■ 
Com  a  drut  coue. 
Sim  trouaua  desleials 
Auriam  ia  be 
5  Ben  leu  i  torneral  fie 

Mas    non    dei    so   ditz   mos 

[senz 
Far  per  faillimeut  faillenza 
Per  qieu  voil  mais  ab  tor- 

[menz 
Esser  dels  fiz  amadors 
10  Cab  los  fais  galiadors 
Far  damor  paruenza. 

IV.  A  tort  mi  ven  de  vos  mais 
E  non  sai  per  qe 

Mais  daitant  amors  siuals 
Mi  venjarai  se 
5  Qacels  qi 3  sabon  re 

[;    • ]4 

Dirai  vostra  captenenza 

Don  vos  parez  meinz  valenz 

E  naurez  meîs  seruidors 

10  Qi  sabra  mas  granz  dolors 
Te  cels  3  et  temenza. 

V.  Vostrusatges  es  aitals 
Ca  celui  queus  cre 
Merme  de  ioi  sos  captais 


1  l.  :  em  —  2  /.  :  E  vos 
senz  —  »  c.  en  :  Recels 


J  /.  :  qi  no  —  *  /.  :  Coiia  vos  est  desconois- 


£24     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Car  de  vos  non  ve 
5  Mas  enians  sas  tota  fe 
E  danz  ses  totz  iauzimenz 
E  ses  tôt  plazer  cozenza 
Pro  fait/,  dautres  faillimenz 
Mas  callar  mi  fai  paors 
10  Orgoils  ez  granz  folors  ' 
Qi  a  plus  fort  tenza. 
VI.   Pros  vescomtessa  plazens 
Dalbusson  tant  vos  agenza 
Pretz  per  qieus  taing  grazi- 

[menz 
Part  las  autras  el  auzoï  s 
5  Qen  vos  a  son  luec  valors 
Ses  tota  faillenza. 


227 

GAUBERTZ   DE   POICIBOT 

(=  B.  Gr.  173,  6) 

I  Merces  es  en  chazimenz 
Dumil  creisser  et  aussar 
Et  orgoil  sobrebaissar 
Don  faill  amors  vostre  senz 
5  Cant  me  crez  *  trobatz  ven- 

[cut 
Humil  e  de  bona  fe 
Dechaetz  anc  se 
E  leis  qui  vira  lescut 
Vers  vos3  sus  me 
10  Qi  nous  tem  ne  vos  blan 
Non    voles  destregnier  tan 
Qe  lorgoil  baisses 
[En  uer  uos  sumelies]. 
II.    (p.  213)  Pero  raizos  es  plus 

[gentz 
Perdre  per  humeliar 


Qe  per  orgueil  gazagniar 
Qe  lergoillos  si  ben  veuz 
5  Na  blasme   per  tôt  saubut 
El  humil  son  tôt  lo  te 
Vil  e  bas  sotz  se 
Sivals  adreit  conogut 
Dont  mes  miels  so  cre. 
10  Qumelia  * 

Feenganar5.  quab  engan 
Mi  don  galies 
Qe    qel 6    tortz  reman    seu 
[ades. 

III.  Tort  ai 7  cai  dit  granz  ardi- 

[menz 
E  car  lan  auz  encolpar 
Non  pas  tang  qeu  dei  amar 
Oui  es  doues  lo  fallime»z 
5  Meu  caram  &  a8  reperdut 
Lei  qi  non  taing  ni  coue 
Non  es  ges  per  qe 
Car  eu  non  ai  mais  pogut 
E  nô  o  fan  ges  ben 
10  Qi  meu  va  forzan 

Amors  qi  men9  forza  daitan 
Car  vol  qieu  lames 
Forze...  qe  leis  non  forces. 

IV.  Pero  car  lauzor  10genz 
Fai  amor  ver  si  clamar 
Crei  cai  fan  n  leu  pot  forzar 
Lei  a  far.  so  mandamenz 

5  Per  cai  lonc  temps    atêdut 
Et  encar  nomen  recre 
Qel  seu  dur  cor  pie 
Dorgueil.  mostres  sa  uertut 
Amor  per  merce 
10  E  fara  honor  grau 

Sami  cui  verz  serz  12  afan 
Verzer13  se  laisses 


1  l.  :  g.  e  f.  —  2  c.  en  :  qez  —  3  l.  :  v.  e  -  4  /.  :  Qieu  umelian  —  »/.  : 
Si  imganatz  —  s  /.  :  Qel  —  M.  :  Tort  —  8  /.  :  cara  ma  —  9  /.  :  qim  — 
—  1U/.  :  las  auzors  -    u  l.  :  caissi  —  i2/.  :  venz  senz—  ^l.:  Venzur 


LE  CHANSONNIER   HE  BERXART  AMOROS 


225 


E  lei  qes  defen  uenqes. 

V.  A  mors  non  es  tan  sabenz 
Daitan   vos  pose  ensegniar 
Qe  del  seu  merteia  malme- 
nai- 
Es  desmesura  e  nonsenz 
5  Nol  ten  per  descrezut 
E  qes  tang  ni  don  saue 
Qe  hom  celui  malme 
Caura  pel  seu  retengut 
Per  mi  non  die  re 

10  Mas  c  ir  mes  semblan 
Qê  fassas.  vostre  dan 
Qanc  hom  qi  greues 
Lo  seu  no  fo  noi  perdes. 


Akgumento* 

Pons  de  capdueil  si  fo  del  ves- 

cat  don  fo  guilliers  de  saint  lai- 

dier.    ries    hom  fo    molt  gentils 

baros  e  sabia  ben  trobar  e  violar 

e  chantai*,  bos  caualers  fo  darmas 

e  gen  parlanz.  e  gen  dôpneianz  e 

iiz  e  bels   e  ben  enseguatz  e 

fort    escars    dauer    mas    si    sen 

cobriaab  gent  acuillir  &  ab  honor 

de  soia  persona.  et  amet  per  amor 

ma  dona  alais  de  mercueir  muller 

den  ozil  de  mercueir  que  fo  filha 

den  bernait  danduza    dun    onrat 

baron    qera    de    la    marcha     de 

proenza  molt  lama  &  lauza  e  fes 

m  tintas bonas  chanzos  délia  e  tât 

qant  ella   visqet  non  amet  autra 

dona  e  cant  ella    fo   morta  el  se 

croza  e  passet    outra   mar  e   lai 

moric. 


228 

EN  PONZ  DE  CAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  379,2) 

I  (p  214)  Si   ai    perdut  mon 

[saber 
Ca  penas  sai  on  mestau 
Ni  sai  donc  venc  ni  on*»vau 

_  l    ••• I1 

5  E  son  daital  captenenza 

Qe  non  vueil  ni  pueisc  dor- 

[mir 

Nim  plas  viure  ni  morir 

Ni  mais  ni  bens  no  magenza. 

II.   E  per  pauc  non  desesper 
E  nom  rent  monges  a  lau 
0  nom  met  dinz  vna  frau- 
E3  com  nom  pogues  veser 
5  Car  traitz  son  en  crezenza 
Per  cella  queu  plus  dezir 
Qem  fai  sospiran  languir 
Car  mi  frais  ma  couinenza. 

III    Jamais  non  eug  ioi  auer 
Ni  estar  vn  iorn  suau 
Pos  mi  donz  ma  solaiz  bran 
Nim  torna  e  nonchaler 
5  Nen  sai  on  maia   guirenza 
CO  plus  ieu  penz  e  consir 
Coil  pogues  en  grat  seruir 
Adoncs    creis    sa  maluolli- 

'enza. 

IV.  A  gran  tort  mi  fai  daler  * 
E  si  eu  pendutz  en  trau 
Sanc  pois  segui  autresclau 
Pos  mat5  près  en  son  poder 
5  Ni  fiz  en  dreig  leis  faillenza 
Mais  sol  daitan  so  mallnr 
Car  la  tem  e  naus  bë  dir 


*  Le  même  texte  est  inscrit  une  seconde  fois  à  la  fin  du  ms.au  f.  '.j-\  V. 
1  l.  Ni  qem  fauc  lo  jorn  nil  ser  —  '2  c.  en:  fiau    -  3  c.  en:  En  —  *  L  : 
doler  —  ï<  /.:  mac 


15 


226  LE  CHANSONNIER  DE 

E  qar  li  port  ben  voillenza. 

V.   Per  reu  non  puesc  estener 
Per1  nom  lam  e  non  la  lau 
Car  la  genzer  corn  mentau 
Se  non2  anz  die  uer 
5  Ab  qe  prezes  penedenza 
Dels  tnnnenz  qem  fai  suffrir 
E  ses  degna  conuertir 
Er  complida  sa   ualenza. 
VI.   Eu  son  aicel  qi  non  tenza 
Ab  midonz  ni  no  mazir 
Ni  m  sai  de  ren  enardir 
Mas  de  zo  qa  leis  agenza. 

229 

EN  PONS  DE  CAPDOILL 
(=  B.  Gr.  326,  1) 

I .   Tôt  franchament.  dôna  veng 

[deuant  vous 

Penre  comiat.pertotz  temps 

[a  lezer 

E   granz    merces    car    anc 

[degnetz  voler 

Qeum 3    tengues   de   vostre 

[amour  plus  gai 

5[ ]l 

Ben   es  razos  qe  si  voletz 

[auer 

Drut  dautra  gent  qeus  sap- 

[cha  mais  valer 

Aissil   vos    salu.   ja   piegz 

[nous  en  voirai 

Qant  aurem  pois  bon  solatz. 

[entre  nos 

10  Et  estarem.  con  sant 5  pap- 

[iar  6  nô  fos. 


BERNART    AMOROS 

II.   (p.  2l5)Ma.s  vos  cuidatz  car 

[ieu  sui  adiros 

Caissi  del  tôt  njus  o  diga 

[de  ver 

Mas    derenant  vos   o  farai 

[parer 

Car  ai    chauzit  en  leis  cui 

[amarai 

5  E  uos   auetz  chauzit  si  con 

[leu  '  sai 

En  tal  amir8  qeus  fara  de- 

[chaser. 

&  eu  en  leis  qe  voil  pretz 

[mantener 

Don  sappcha  9  jouens  e  de 

[vous  vai 

Si  tôt  non  ses  de  locs  tau 

[paratios. 

10   E  la  es  ben  plus  bella  e  plus 

[pros. 
III.   Pero  domna  totz  temps  serai 

[euros  10 
Del    vostrafar    caisso    voil 
[retener 
Cane   nous    pogui   mètre  a 
[nonchaler 
Aissi  del  tôt  enanz  vos  ser- 
virai 
5  Fors  qe  iamais  vostre  drutz 
[no  serai 
Si   bem    deuetz  anqwra   Io 
[iazer 
Qê  promezetz  qan  nauriatz 
[lezer 
Nol  dig  pe?'  so  qe  negun  soin 
[non  hai 
Mas    seu   en  fos   agutz  anz 
[poderos 


1  /.  :  Qer  —  2  /.  :  non  i  ment. 

3  /.  :  Qeu  mi  —  '«  /.  :  Tant  quant  vos  plac  mas  aras  pois  nous  plai  — 
s  /.  :  sanc  —  6  c.  en  :  parlât  —  "  c.  en  :  ieu  —  »  l.  :  amie  —  9  /.:  sa- 
propcha  —  i|J  c.  en  :  cutos 


LE  CHANSONNIER   DE 

10  Tal  ora  us  '  qieu  -  fora  plus 

108, 

IV     E  si!  virars  3  ni!  pleuira  de 

[ii  is  dos 
Pot  al  partir  de!  amor  dan 

tener 

Metam  nos  ambs  en  la  man 

[dun  preuer 

E  soluetz  raen  qen  vos  en 

Bolverai 

5  E  pois  poirem   aradui  daqi 

[en  lai 
Plus  leialment  nostr  amor 
[mantener 
E  sanc  fetz  ren  qami 

[doler 

Eus  en  perdon  tôt  zo  qa  mi 

[neschai 

Tôt  de  bon  tor.  *  questier 

"non  er  la  5  bos 

10  Si  de  bon  cor  non  es  faitz 

[lo  perdos. 

V.   M  al  a   domna  tro  qera  fezes 

[gelos 


Ni  res  non  sap  lo  mal  qel 

^  gelos  trai 

5  Ni  ren  non  sap  gelos  qe  ditz 

'ni  fai 

Ni  nuls    gelos    non  pot  en 

[luec  caber 

Gelos  non  a  pauza  matin  ni 

Per  qe  vous  deu  plazer.  car 
[men  retrai 

Qassatz  va  miels,  a  celui 
[qes  lebros 


BERNA HT  AMOROS  827 

10  Qadonc  sauala  noi  son  tuit 

[adiroB. 
VI.   Fe  qem  deuetz  sitôt  sui  adi- 

[rotz 

Prendetz  comniat  de  mi  qel 

[pren  de  vos. 

230 
EN  PONS  DE  CAPDUEIL 

(=  B.  Gr.  372,  2) 

1.  Ane  mais  nuls  hom  non  fon 

[apoderatz 

.Mas  eu  o  sui.  e  ren  no  sai 

[per  qe 

Qestiers  mon  grat  am  e  sui 

[desamatz 

Et  enaissi  ai  o  tengut  anese 

5  Desqefuitratz'nisaup  esser 

[amaire 

E  foJlei  sols  et  eu  nô  puesc 

[estraire 

E  fuig  liiem8  pron.  totzjorns 

[e  sec  mon  dan 

E  fatz  esfortz  qant  eum  co- 

'nort  ni  chan. 

II.  [p   216)  Pero  tan  es  la  so 

[umilitatz 

E  la  lauzors  qe  tota   gens 

[en  te 

Qeu  anc  non  puec  tant  esser 

[sos  priuatz 

Cane  mi  valgues  ebauzimenz 

[ni  merce 

5  Ni   nul    conort  dom  mala- 

'Ldors  9  sesclaire 

Mas  brau  respos  cais    qeu 

lai  mort  son  paire 


1  /.:  vi  —  :  c.  en  :  qien  —  3  /.  :  iurars  —  W.  :  cor  —  5  c.  en  :  ja  —  6  lacune 
indiquée  dans  le  ms, 
1  l.  :  natz  —  *  l.  :  mon  —  9 1.  :  dont  ma  dolors 


258  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


E  qan  la  prec  élan  fai  un 

[semblan 

Qe   uo  menten  pins   qe  un 

[al  aman. 

III.  Pero  tantes  mos  pensamenz 

[onratz 

Qel    maltragz    val    dautre 

[soiorns  ganre 

Tarn  es  valenz.  cela  cui  mi 

[sui  datz 

Qe  nô  a  par  en  tant  quant  le 

[monz  te 

l>  La  genzer  es  qe  anc  nasqes 

[de  maire 

E  la  meiller  zo  nug  a  totz 

[re traire 

Per  qeu  non  lauz.  descubrir. 

[mon  telan 

Mas  per  solatz  can  li  autre 

[en  chan. 

IV.  Mas    seu   follei  per  lei   tôt 

[mes  viutatz 

E    voil    suffrir    lo    mal  em 

[patz  el  ben 

Com    non   es  finz    ni  drutz 

[enamoratz 

Ni  es  forsius.  qe  tan  Jeu  se 

[recre 

5  De    sa    domna    ni   no   sap 

[damor  gaire 

Cane  ses  afan  rie  gazain  no 

[vi  faire. 

Ai    las  qai  dig  sentirai    de 

[leis  dan 

Con  plus  mi  fai  languir  plus 

[la  reblan. 

V.  Al  valen  rei.  '  de  pretz  coro- 

[natz 


Sobrautres   reis  e  qi  miels 

[se  capten 

On  finz  iois  nais  e2  reuouel- 

[latz 

Joi  e  iouenz  ten.  vai  chanzos 

[de  se 

5  En  aragon  on  prendon  tuit 

[repaire 

Bon  faig  valen  qe  francs  reis 

[deia  faire 

E  saludan  de  perpigua  enan 

Cel    o    celas   qe  damor  an 

[talan. 

VI.   Pero  tant  es  bos  mos  pensa- 

[menz  honratz 

Qe   de   ren  al  mas   de  leis 

[nom  soue 

E  sos  près  es  tan  fis  e  tant 

[point/, 

Qesser  eug  reis  de  ioi  can 

[me  soue. 

231 

EN  PONS  DE  CAPDUE1LL 
(=B.  Gr.  375,13; 

I.  Lamoros  pensamenz 
El  ries  volers  auzatz 
Qeu  aidôna  valenz 

De  vostramor  mi  platz 
5  Mil  tanz  qe  neguns  dos 
Qautra  far  mi  pogues 
Car  ben  sai  quamors  mes 
Vengan  mi  danz  o  pros. 

II.  (p.  217)  Qals  digz  de  totas 

[gens 
El 3  vostre  cors  onratz 


1  /.  :  rei  qes  —  2  /.  :  cl.  es. 

*  Voyez  le  texte  publiè'jiar  M.  M.  v.  Napolski  dans  son  ouvrage:  Leben 
u.  Werke  des  Trobadors  Pons  de  Capduoill.  Halle  1880  p.  55  s. 
s  /.  :  Es 


LE    CHANSONNIER    DE    BERNA RT  AMOROS 


l'ros  dompnet  auiueus 
Tant  humils  tan  prezatz 
5  Tantfiz  tant  cars  tant  bos 
Tint  adregz  tant  cortes 
Qe  caps  es  de  totz  bes 
Sol  meïs  '  nù  fos. 

III.  Doncs  per  qei  es  iouentz 
N'a  lors  ni  gais  solatz 
Honors  e  pretz  e  senz 
Cortezi  e  beutatz 
5  Eil  lautraib  cabalos 
Et  anc  noi  fo  merces 
Pos  ieu  non  -  truep  ces 
Qi  fui  tant  fiz  vas  vos. 

IV '.   Qom  liais  o  temenz 
Sufriz  lafan  em  patz 
E  non  fui  recrezenz 
Nim  vir  uas  autres  latz 
5  Ni  no  fui  poderos 
Poa  i  aie  mon  cor  mes 
E  car  sui  vostre  prez 
Faitz  mi  bonas  preizos. 


232 

PONS  DE  CAPDUE1L 
(=  B.  Gr.    375,  4) 

I .    Hen  es  fols  cel  qi  reigna 
Loncs  3  temps  ab  seignjor 
Don  ia  bez  non  lauegnia 
Senz  mil  tanz  de  dolor 
5   E  qi  per  ben  mal  pren 
Tain  qe  iois  li  sofraignia 
E    granz  mais   lien  remai- 

gnia 
Saber  pot  veramen 
Casaz  a  de  qes  plaignia. 


II.  Per  bo  plaing  e  men  laignia 
E  qar  sui  lialmen 
Daraor  qim  fo  ■  nia 

Em  dais  malamen 
5  Sabetz  p<  r  qe  mair 
Qel  bon  qe  faig  mauia 
Mi  tolc  e  fei  4  bauzia 
Qom  non  dei  enreqir 
Lo  sien  e  pois  laucia. 

III.  Ben  ses  araors  traia 
Qamar  :i  e  seruir 
Et  onrar  la  sabia 
Miels  ibezir. 

5  E  celar  senz  enian 
Mas  mal  es  sacoindanza 
Qom  non  a  benananz  i 
Qe  pois  non  torn  a  dan 
Per  qieu  6  par  7  mesperanza. 

IV.  Tant  es  granz  la  rancura 
Per  qieu  8  sui  iratz 

Qe  bos  pretz  en  peiura 

E  gaiesce  solatz 

5  P<'/-o  ades  esper 

Se  tôt  mos  cors  sesmaia 

Câpres  lira  meschaia 

Tais  iois  qim  deig  plazer 

Sol  finamors  nom  traia. 

V.  Tant  pauc  voil  sacordansa 

Q  il>   dreig    leis    plus    non 

[blan 
Quna  gentil  qenanza 

Son  valen  pretz  prezan 

4  On  es  sens  e  beutatz 

Ab  gran  bona  ventura 

Si  qa  totz  iorns  meillura 

Mas  ab  tôt  so  noil  platz 

Namors  9  ni  non  a  cura. 

V]     p.    218)   Mon   andrieu  fai 

[valer 


1  1.:  m.  merces  —  -  /.  :  non  la. 

I.  :  Per  1.  — 4c.  en  :  fe —  :i  /.  :  Qar  amar  — ,;  c.  en:  qien  —  7  /.  :  part  — 
s  /.  :  q.en  —  ''  /.  :  Samors 


2  30  LE    CHANSONNIER   DE 

Fina  valor  veraia 
E  leis  qes  coind  e  gaia 
Las  qeu  non  auz  '  vezer 
5  Tan  tem  qamor  no  maia. 
VII.  Bem  puesc  damor  tener 

Qel  danz  qai  presmesglaia. 

233 

EN  PONS  CAPDUEIL 
(=  B.  Gr.   375,  7) 

I.  De  totz  chaitius  sui  eu  aicel 

[qi  plus 

Ai  gran  dolor  e  suffris  gran 

[turraen 

Per  qieu  volgra  mûrir  e  fora 

[gen 

Qieu  maucizes  pos  tan  sui 

[esperdutz 

5  Qe  viure  mes  marrimenz  e 

[esglais 
Pos  morta  es  ma  dôna  naa- 

[lais 

Greu  pensar  fai  lira.nil  dol 

[tal  dan 

Mors  traiheris.ben  vos  puesc 

[en  ver  dire 

Qe    non   poguest    el    mont 

[meillor  aucire. 

II.  Ai  con  fora  gueritz  e  ereu- 

[butz 

Sa    dieu   plagues    qieu    fos 

[premeiramen 

Morz    laz    chaitiu    no    noil 

[mail 2  loniamen 

Viure  après  lei  ren.  perdon.i 

[me  sus 

5  Siegnier  dreiturers  e  verais 


BERNART   AMOROS 

Sabiatz  la  crist  non  la  sobre 

[toillatz 

Larma  rendes  sain  peire  e 

[sain  ioan 

Qe  tuit  si  3  ben  i  son  com 

[puesca  dire 

E  de  totz  mais  la  pot  hom 

[escondire. 

III.  Seignier  ben  la  deuem  pla- 

[gner  chascuns 

Cane  no  fo  hom  veges  tan 

[auinen 

Qil  auia  tam   bel  captene- 

[men 

Que  val  beutatz  ni  bos  pretz 

[mentaubutz 

5  Ni  qe   val  senz   honors   ni 

[solatz  gais 

Gen  acuillirs  de  nuls  coites 

[esais 

Ni  que   valon  franc   dig  ni 

[faig  prezan 

Segle  dolen  de  bon  cor  vos 

[aire 

Moutvales  pauc  pos  lo  miels 

[nés  a  dire. 

IV.  Jois   e  deleitz  e  iouenz   es 

[perdutz 
E  totz  lo  morz  4  es  tornat/.  e 

[nii  n 

Qar  comt  e  duc  e  maint  baro 

J  valen 

Neran  plus  pron  ar  no    la 

[ve  negus 

5  E  mil  donas  valion  pe/-  lieis 

[mais 

Mas  ar  podem  sabercab  nos 

[sirais 

Nostre    segnier.  qi    la    fes 

[valer  tan 


'  l.  :  lauz  —  *  c.  en  :  uoil  mais  —  3  /.  :  li  —  4  /.  :  monz 


F,E  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS 


231 


Caissi  nos  vole  tolre  solatz 

[e  rire 

E  donar  mais  dafan  ede  cos- 

|  sir,'. 

V.  Ai  cala  danz  os  de  mi  d 

[lia/., liais 

Non  pusc  als  far  mas  de  totz 

[iois  mi  lais 

E  prenc  comniat  de  ebantar 

[dorenant 

E   plaing   e    plor   e    maint 

[coral  sospire 

5  Man  mes  per  lieis  en  engoi- 

[zos  martire. 

VI.   Amies  naudrieu  chamiatson 

[mei  dezire 

Ni  it   lamor  non  serai  mais 

[seruire. 

234 

[EN   PONS  DE  CAPDEIL] 
(==B.  Gr.  375,18) 

I.  (p.  219)  Qui  per  nescicui- 

[dar 
Fai  trop  gran  faillimen 
A  dan  li  deu  tornar 
E  sa  me  mal  ne  '  pren 

5  Ni  ma  donnam  det  iai  - 
Ben  tain  qar  tal  folia 
Ai  fai  g  per  qe  deuria 
Morir  dirae  desniai. 
II.   E  sien  per  sobramar 
Ai  teignat  3  follamen 
Ni  per  mi  donz  proar 
Si  nagral  cor  iauzen 

5  Sil  ferm  voler  qieu  ai 
De  leis  seruir  partira  ; 


Ai-  conosc  qeil  plairia 
IV  j  fol  essai. 

III.  Enaissim  fai  trobar 
Neis  tôt  lo  cor  el  sen 
Qe  can  cuig  ergoil  far 
Totz  nu"  torn  e  uien 

r>  E  gea  de  beo  ao  fai 
Cam  5  mos  cors  sumelia 
Orgueil  ni  cortezia 
Jois  de  lieis  non  matrai. 

IV.  Mas  ieu  non  i  ai  par 
Mon  cor  ni  mon  talan 
E  sautram  vos6  onrar 

<  rratz  e  merces  len  ren 
5  E  tostemps  o  farai 
Qi  es  tiers  ai  qi  mauciria 
Mon  fin  cor  nom  partiria 
Del  rie  luec  ont  estai. 
V.  Domnal  genser  qieu  sai 
Mais  vos  am  senz  bauzia 
No  fes  tristanz  samia 
E  nul  pron  non  7  ai. 


235 

EN  PONS  DE  CAPDUE1L 

(=  B.  Gr.  375,  22) 

I.    So  quom  plus  vol  e  don  es 

plus  cochos 

E  so    corn  a    dezirat  ni  ten 

[car 

Deuem  chascuns  relinqir  e 

[laissar 

Qar  ben  sabem  qe  luecs  es  e 

[sazos 

5  Qel  ries  seignier  qes  leials 

[perdonaire 


1  /.  :  en  —  *  L:  dechai —  3  /.  :reignat  —  *  /.  :  partria   —  5  l.  :  Can  — 
6  /.  :  vol.    —  "  /.  :  non  i. 


2  32  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Rei  de  merces.  dreturers  e 
[saluaire 

Anem  seruir  qel  nos  fes  de 

[nien 

E  suffri  mort  per  nostre  sa- 
[luamen. 

II.  Nos  podem  beasaber.  qelfes 

[per  nos 
Qel  si  laisset  despinas  coro- 

[nar 
Batre  e  sufrir  e  de  fel  abeu- 

[rar 

Et  nous  resems  del  sien  sanc 

[precios 

5  Ai  las  chaitiu  qa  mal  fan  lor 

[a  faire 

Al  '  que  noi  van  e  cuidan.  sai 

[sobstraire 

A  lur  vezinz  lur  terras  fal- 

[samen 

Paor  deuran  auer  al  iutia- 

[men. 

III.  Qui  remanra  non  er  sauisni 

j  pros 

Qe  sai  nos  pot  luns  en  lau- 

[tre  fîar 

Per  qe  ditz  hom   qe  nô  pot 

[plus  durar 

Segles  adoncs  remanranuer- 

[goignos 

5  Li  rie  baros  sil  segles  dura 

[gaire 

Ben  es  torbatz  lo  reis  e  lern- 

[peraire 

Si   remanon   guerreian.  per 

[argen 

Ni   per  ira  -  lor    fail    breu- 

[men. 


3 
IV.   (p. 220)  Qi  qe  remangamai 

[voluntiers  '• 

Qom    non   pot    ges   lo   ben 

[guiardonar 

Qe  dieus  na  fag  ni  los  tortz 

[emendar 

Per  qieu  li  prêt  5    aissi  com 

[es  pidos 

5  Qil  6  clam  merce.  aissi  con 

[fes  lo  laire 

E  uailha.  nos  la  soa  douza 

[merce  7 

E  sainzioanznos  vailhaeis- 

[samen 

Cossi    vêzâm    aqesta    falsa 

[gen. 

V.  Sil  qe  sabon  las  leis  et  las 

[leissos 

Els  mais  els  ben  noi  voillon 

[ges  annar 

Qieum  fai s  tal  un  qautreia9 

[deseretar 

Mais  crestianz  qe  sarrazinz 

Criions 

5  E  si  parlatz  diraus    vos  es 

[péchai  re 

E  cil    qes    fan  dels    autre 

[predicaire 

Deuon  e  si  predicar  eissa- 

[men 

Mas  cobeitatz  toi  lacleriel  ,0 

[sen. 

VI.   Cel    darragon    franc    rei    e 

[debonaire 

E  sei  nos  "  dieu  de  bon  ci  r 

[humilmen 

Esti    ab   vos  e  tuig   digum 

[amen. 


1  l.  :  cil  —  -  l.  :  terra  si  tôt  —  3  c.  en  :  r.  ieu  irai  —  *  l.  :  voluntos 
—  5  /.:  prec  —  G  /.  :  Eil  —  7  /.  :  maire  —  s  /.  :  sai  —  9  /.  :  qama  —  10/.  : 
clersial —  "  /.  :  E  serues. 


LE  CHANSONNIER  DE 
236 
EN  PONZ  DE  CAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  375,  1  i) 

I.  Leiala  amies  oui  amors  ten 

[ioius 

Deu    bon    esser   alegres   e 

[iauzenz 

Larca  et  adreigz.  arditz  el 

ii-os 

Era   qan   par    lo  gais   ter- 

[minis  gen 

5  Qi  fai  las  flore  espandir  ;  er 

la  plaigna 

El  rossigniol  chantar  iostal 

[ver  foilh 

Mas  ieu  non  am  sos  douz 

[chanz  tant  cansoil 

Poz  mi  donz  z  iois  mi 

[sofraigna. 

II.  Pero  ben  sai  qe  es  dreitz  e 

[razos 
Qe  ce)  qi   es  amoros  e  pla- 

[zen/. 

Deu  esser  brauz  e  de  plus 

[mal  respos 

Pos  non  li   val   merces   ni 

[chauzimeu 

5   Pos    ma    dona   mes    mala 

[e  estraignia 

Leu  j  ot  trobar  en  ::  e  mal 

[e  orgueil 

Ja  non  maura.  si  nom   vol 

[tan  can  voil 

Q?^n   ren   no    fai    semblan 

■  de  mil  taigna 

111.  Totz  malmenatz  sui  eu  ll/.iis 

e  bo.s 
E  vulgra  far  Lot  son  coman- 


BERNART   AMOROS  2  33 

Qel    siens   ries    c  rs  > 
'  meiller  can 
Sol  qe  vaa   mi    fos   fizel  ni 

.-•■h 
5  Qe    tarai   doncs,  seu    vauc 
[o  .si  remaTgna 
Amors  tostemps  ma 

trat  orgueil 

!  ois  es  qi  perl  per  /."  <j<'  no 

izaigna. 

IV.   [p.  221    Non  die  ieu  p-s  qe 

[tostemps  >i  us  nû  fos 

E   nô  fezea    t<>t   son  comâ- 

uien 
Si   tôt  non    tain    sos 

[cors  orgoillos 

Mas    si    tôt    es    amoros    e 

plazena 

5  Francs  e  humils  e  dauinen 

[compagnia 

•la  nom  aura  si  nû  vol  tôt 

[qant  voil 

Ail  <v.  qem    val    si  lam  o  si 

o  toil 

Qen   iê  non   fa  paruen.  (je 

de  mil  laignia. 

V.   Per    so   nestau    marri tz    e 

[consiros 

Qar  anc  lamei  ni  falli  tant 

mon  sen 

Car  per   vn  ioi   don  D 

poderos 

Soan  aillors  tôt  autre  iauzi- 

[men 

5  Aissi  non  sai  conseil  ab  qe 

[remaignia 

Qautra  nom  plaz   ez  il   mi 

icoil 

.M  .s  lieis  nô  qal  sim  pert  per 

qieu  nom  doil 


1   /.  :  donz  plai. 


23  4  LE  CHANSONNIER  DE 

Ni  de  samor  non  ai  cor.  qe 

[me  plaignia. 

VI.  Amors  lonc  temps  ai  estât 

[em  bretaignia 

E  faitz  pechat  qar  mi  mos- 

[tratz  orgoil 

Sien  plus  qe  tuit.  lautrama- 

[dor  vos  voil 

Ni  mais  vos   am    es    doncs 

[dreitz  qe  men  plaiprnia. 


237 

EN  PONS  DE  CAPDUEÎL 

(=  B.  Gr.  194,  6) 

I.  En  tantaguizam  mena  amors 
Qa  penas  sai  sim  dei  chan- 

[tar 
0  si  dei  plagnier  o  plorar 
Tant    mi     don  '     gaugz    e 
[dolors 
5  Perosel  volgues  dreitiutiar 
Mais  vai  -  mais  qe  bes    e 
[maiors 
Mas  tan  am  finamen 
Qel  mal  teing  a  nien 
E  grazis  e  enanz 
10  Los   bens    per    qem     platz 

[chanz. 
11.  Bona  donna  près  e  nalors 
E  corteziab  gent  parlai- 
Oils  rizens  amoros  e  clar 
E  beutat  ab  fresca  colors 
5  E  agrat  don  nô  aues  par 
E    totz    bos    autres    faigz 
[meillors 
Vos  fan  enteiramen 
Sobre  totas  valen 
Per  qieu  soi  ben.  amanz3 


BERNART   AMOROS 

10  Damors  dô  soi  clamanz. 

III.  Loigniat    maues    sospirs    e 

[plors 
Ab  pês  e  ab  merces  clamai" 
Per  zom  deuetz    tener  plus 

[car 
E   loigniar  fegniens.  preia- 

[dors 
5  Qe  domna  deu  ben  esquiuar 
Los  bruids  dels  fais  deuina- 
Car  per  un  maldizen  [dors 
On  fols  semblan  senten 
Si  leuon  bruid  tan  granz 
10  Camors  en  sembl  enianz. 

IV.  (p.   222)  Qes1  gent   de  tos 

[amadors 
Can  fan  zo  qes  tain  ad  amar 
Ni    hom    nos    deu    damor 
[doptar 
Qe  lai  on  blasmes  e  follors 
5  No  o  toi  sen  sobra  non  par 
Qe  greus  es  de  doas  colors 
Cors  ni  faitz  loniamê 
Sabetz  qem  vai  voluen 
Tem  qe  sial  talanz 
10  Lai  on  vei  los  semblanz. 

V.  Aissom  toi  enuegz  e  paors 
Qim  fazian  desesperar 

E  de  vos  partir  e  loigniar 
E  preiar  si  pogues  aillors 
5  Mas  tan  gent  sabesemendar 
El  sen  triar  de  las  follors 
Car  aman  e  sufren 
E  celan  e  temen 
Vos  conqerrai  enâz 
10  Cab  mal  ni  ab  bobanz. 
VI.  Na  maria  souen 

Magradal  pretz  valen 
Qe  mais  dei  trauetz  5  tanz 
Qe  noi  a  obs  mos  chanz. 


1   l.  :  dona  —  2  /.  :  nai  _  s  /.  :  s.  benananz^—  4  /.  :  Et  es  —  s  /.  :  daltrauetz 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS  235 


238 

EN  PONZ  DECAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  375,  1) 

I.  Aissi  mes  près  con  cellui  qi 

[cercan 
Yai  bon  srignior  en  e> 

[gan  re 
Qe  tuit  lonron  eil  fan  vol 

[tier  ben 

E  chauzis  nun  tôt  sol  qe  ren 

[nol  blau 

5  Nil  fai  honor  estiers  qar  la 

[voil  gen 

E  qar  lo  sab  sobre  totz  plus 

[val'Mi 

Ainal  mil  tanz  mais  em  per- 

[don  seruir 

Qals  autres  totz  de  qe  si  pot 

[iauzir. 

II.  E  es  razos  e  dreigz  al  naieu 

[semblan 

Com   lo   meillor  am    meils 

[per  bona  fe 

Si  tôt  noiî  val  fols  es  qi  sen 

[recre 

Mas  seruacles  '  e  ia  rê  non 

[deman 

5  Qe  ben  qier  hom  aseignior 

[conoissen 

Qi  lonrel  serdones  sien  lam 

[finamen 

Midonz  oui  son  bem  degra 

[iois  venir 

Qel  genzar  es  coin  puesc  i  1 

[mon  chauzir. 

111.  Si  tôt  maaci  de  bon  eor  senz 

[eniau 

Lim  rent  sil  platza  sa  fran- 

[cha  merce 


Cane  pos  la  ni    non  aie  po 
der  e  mo 
M  18   damar  licis  e  d.' 

[son  coma n 

5  Tant  can  la   vei   mi  tel  ve- 

zers  iauzen 

E  can  men  part   son  en  tal 

[pensam<  n 

Qen  châtâ   plor  em   vol    lo 

[cors  partir 

Enaissim   fai  samors   viure 


e  nionr 


IV.  (j>.  223)  Dieus  qe  la   fe 

belle  tan  prezan 

Li  salu  eil  gar  lo  bon  pretz 

[ijil  mante 

Qe  non  a   hum    tan  dur  cor 

[si  larex  2 

Noil    port  honor.   aissi    \ai 

[mellman 

5  Tôt  cant   cornes   ab  valor3 

[ab  sen 

Abeillir  fai  sos  faitzatota  gen 

E  als  meillors.  si  sap  miels 

[far  grazir 

En    totas   res    si    garda    de 

faillir. 

V.   Tant  fort  conois  tôt  can  les 

[benestan 

Per  qieu  soi  mortz  si  de  me 

noil  soue 

E  sâc  amors   ac    nuil  poder 

[en  se 

Pos     mi    destreing     forces 

[lieis  sol  dailau 

5  Qe  non  li  enueg   si   lenqier 

[humilmi  n 

Qe  nom  faza  mûrir  tan  lon- 

gamen 

Qil  chant  e    ri    e  ieu  plaïg 

[e  sospir 


1  l.  :  seru  ades  —  2  /.  :  la  ve  —  3  /.  :  coue  ab  v.  el 


236     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOMOS 


En  port  souen  lo  maniai'  el 

[dormir. 

VI.  Rois    cors   cortes  per    vos 

[lais  veramen 

Rie  ioi  daillors  e  de  uos  non 

[lateu 

E    ges   per    tan    non  paesc 

[mou  cors  partir 

Qe    mais    e   miels    vos  am 

qieu  non  sai  dir. 

VII.  Naudiartz  am  pel  bon  pretz 

[qieu  naug  dir 

Mon  '     andreu     rei 2     totz 

iorns  enantir. 

239 

EN  PONS  DE  CAPDUE1L 
(=  B.  Gr.  375, 19) 

I.  Sanc  fiz  ni  dis  mullja  sazon 
Ves  vos  euueg  ni  faillimen 
Ni    passei    vostre    manda- 

[men 
Ab  franc  cor  3  humil  e  bon 
5  Vos   mi    don  bella    douza- 

[mia 
Em  part  de  lautrui  segnio- 

[ria 
E  remanc  en  vostre  inerce 
Qalqem  fassatz  o  mal  o  be. 

II.  Per  aital  couen  vos  mi  don 
Qieu  non  ai  poder  ni  talen 
Qe  men  parta  al  mieu  viuen 
Camors  *  en  vostra  preizon 

5  Mas  qar  etz  la  meiller  qe  sia 
E  auetz  mais  de  cortezia 
Qel  plus  vil  as  es  can  vos  ve 
Cortes.  eus  porta  bona  fe. 
III.  Bem  pogras  trobar  ochaizon 


Mas  tant  vos  sai  doua  valen 

Franch  e  humil  e  conoissen 

Per    qiens   qis  franchamen 

[perdon 

5   E  tem    vos    tan    qals  nous 

[qerria 
Mas  senz  enian  esenz  bau- 

[zia 
Vos  am  eus  amarai  iasse 
E  tôt    qant  vos  plai   voil   e 

[cre. 

IV.  (p.  224)  Doncs  pos  nous  auz 

[qerre  mon  prou 

E  son  vostre    sers  leialmon 

Ben  faretz  mais  de  chauzi- 

[men 
E  doblares  lo  guizardon 
5  Sim    donatz    so    qieu   pl«.s 

[volria 
Senz  pi'eiar  qaital  conipal 

[gnia 
Nos  part  cant  senz.  prec 
[sesdeue 
Cans  5  fis  cors  ab  autre  saue. 
V.  A  penas  sai  dir  hoc  amors 
Can  no  vei  vostre  gai  cors 
E  humil  e  couinen  [franc 
Sim  espert  mon  nai  ben  ra- 

[zon 
5  Qe    totz   lautre    monz    non 

[poiria 
Tener  nul  pron.  si  nous  ve- 

[zia 
Ni  seus  vos  non  puesc  auer 

[be 
Ver  qieus   er    gen    sius  en 
[souc. 
VI.  Beutatz  e  valors  e  coindia 

Doua  creis  en  vos  chascun 

[dia 


i  /.  :  E  m.  —  2  7.  :  vei. 
3  /.  •  ,-.  e  —  '  /.  :  C.  ma  —  5  c.  en  :  Tans 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


237 


Iî   prec   dieu    qel    don  mal 

astre 
Totz  cels  can  loigniai  vos 
[de  me. 
VII.  Naudiartz  paru1  on  qe  sia 
Voil  sa  coindiae  sa  paria 
Câpres  faig  enaa  de2  raante 
Tôt  zo  qa  valen  pretz  coue. 

240 

EN  PONZ  DECÀPDUEIL 
(=B.  Gr.  375,  10) 

I.  Humils  e  francs  e  fiz  soplei 

[vas  vos 
Ab  leial  corbona  donna  va- 

[lenz 

Qar  etz  meiller  del  monteil 

plus  plazens 

E  plus  gentils  e  plus   fran- 

[che  plus  pros 

5  E  genser  e  plus  _ 

Per  qieu   vos    am  ia  altre 

[pro  noi  ai  i 

Tan  finamen  qe  daltre  nom 

[soue 

Neis  :!  eant  prec  dieu    donc 

[oblitper  vos  me. 

II.  E  mais   al   cor  vei  en  totas 

[sazos 

La  bêla  bocha  els  oils  clars 

[e  rienz 

El  gai  solatz  els  bels   digz 

nenz 

E  vostré  cors  ques  tant  cars 

[e  tant  bos 

5  Non  crezatz  quem  nestraia 

Cuns  douzdezirs  mi  ten  gai 

[e  rnapaia 


E  non  ai  plus  ni  non  i  trop 

[merce 

Mas  tant  valetz  qel   mais 

[val  dautr  ta  be. 

III.  Nui!    autramora    nom    pot 

faire  ioios 
Simpreiauon  dautras  d5na 

[sine  ceux 
Cab  vos  son  fadatz  lis  plus 

conoissenz 
Tan  son   cortes  li  semblan 

[eil  respos 
5  Qen  tan  qan  soleill  rai  a 
Non  a  dona  oui  tan  ries  fat/ 

[seschaia 
Ni    miels   fassa  zo  qa  bon 

pies  coue 

Doncs  son  astrucs  qar  vos 

am  e  vos  cre. 

IV.  (p.  225)  Adreitz  cors    genz 

[benestanz  amoros 

Nom  auciatz  vaillam  francs 

[chauzimenz 

E  leiautatz  e  fin  amors  qim 

[venz 

El  bens  qen  die  e  merces  e 

[perdos 

5  Nom  voilliatz  qieu  dechaia 

Qel  loncs  espers  el  dezirers 

[mesglaia 

Bona  dona  sol  en  dreg  bona 

[fe 

Mi  donatz  ioi  coin  peitz  trac 

[nom  recre. 

V.  Si    vais    daitan     son    bon  ,f 

[auenturos 

Car  sieu  en  muor.  autres  non 

[veria  rizens 

Anz   faitz   mentir   lo    bruig 

[dels  malsdizens 


1  c.  en:  pain  —  *  c.  en  :  enanc  e.  —  3  e.  en  :  Ueis—  '  /.  :  ben 


23S  LE  CHANSONNIER  DE   BERNART    AMOROS 


E    reman   fiz    vostre   pretz 

[cabalos 

5  Mal  grat  de  gen  sauaia 

Qar  totz   iorns  creis  vostra 

[valor  veraia 

Sobre  totas  e  sai  vos  dir  per 

[qe 

Car  valetz  mais  e  non  failletz 

[en  re. 

VI.  Vostrom  son  donna  gaia 

E  am  vos  mais  qe  landrics 

[no  fes  aia 

E  sobre   totz  port  las  clans 

[damar  be 

Per  qieu  aillors  nom  puesc 

[virar  mon  fre. 

241 

EN  PONS  DE  CAPDUEIL 
(=B.Gr.  315,11) 

I.  Ja  nom  er  hom  tan  pros 
Qe  non  sia  blasmatz 
Cant  es  a  tort  fellos 
Qel  ries  bar  e  lonratz 

5  Nés  plus  car  e  plus  bos 
Can  conois  sas  foudatz 
Qaissi  iutga  razos 
Las  valenz  els  prezatz 
i  aiscel  qe  sumelia 
10  De  son  grant  faillimen 
Deu  trobar  chauzimen 
E  lorgoillos  feunia 
Qar  qi  mal  fa  mal  pren. 
IL   Fols  es  si  tôt  les  gen 
Qi  es  enamoratz 
Carnors  vol  coin1  emë 
Los  autrui  tertz  2  empatz 

5  E  non  faza  paruen 


Qant  er  per  dreg  iralz 
Anz  sueffra  leialmen 
Or3  plus  er  malmenatz 
E  qar  eu  mi  seguia  '* 
10  Maier  guizardos 
Estauc  enamoratz1' 
Qar  mont  fai  gran  follia 
Qui  trop  am  en  perdos. 

III.  Domnaizo  die  per  vos 
A  cui  mera  donatz 

E  sai  qe  son  clamos 
A  tort  car  non  amatz 
5  Qel  vostre  taing  qe  fos 
Coms  o  reis  coronatz 
Ab  totz  aibs  cabalos 
Tant  es  sobrepoiatz 
Vostre  pretz  chascû  dia 
10   E  ab  ioi  e  ab  sen 
Qeil  pro  eil  conoiscen 
Vos  porton  seguioria 
Mais  qa  las  meillors  cen. 

IV.  (p.   226)  Mal  aia  sien    ian 

[meu 
Per  nul  mal  qê  voillatz 
Cane  mas  lacuillimen 
Nom  ac  el  gai  solatz 
5  E  sieus  ai  loniamen 
Bendig  ies  nô  desplatz 
Qar  es  tan  auinen 
Per  qieu  men  part  forsatz 
Qar  ges  lieu  non  poiria 

10  Esser  oblidos 

De  las  plazens  faizos 
Ni  de  la  cortesia 
Del  vostre  cors  ioios. 

V.  Las  mala  fui  iros 

Car  aissim  son  comiatz 
Qanc  pois  nô  fo  sazos 
Qwen  fos  gais  ni  pagatz 
5  Anz  son  tan  consiros 


1  c.  en  :  corn  —  2  /.  :  tortz  —  a  /.  :  On  —    '  c.  :  en  cnmi  se  guia  —   5/.  : 
desamoros 


LE   CHANSONNIER 

Qe  ren  non  sai  qeni  faz 
Pos  no  vol  qe  pirdoa 
Ni  raerces  ni  beutatz 
Mi  vailla  nim  penria 
10  Null  acordamen 
Bem  fui  lira  dolen 
Mas  lamors  maucira1 
Per  qieu  non  ai  talen. 

242 

EN  PONS  DE  CAPDEIL 

(—  B.  Gr.  375,  21) 

1.  Se  totz  los  gaugz  els  bes 
E  las  finas  lauzors 
Els  fagz  els  digz  cortes 
D.'  totas  las  meillors 
5  Pogues  dieus  tolz  complir 
En  una  solamcn 
Saber  cug  veramen 
Qe  cella  cui  dezir 
Na  ben  mais  per  un  cen. 

II.  E  mas  de  totas  es 
Caps  e  mirails  e  flors 
Se  tôt  no  men  ven  bes 
Sim  es  lo  granz*  honors 

5  Fassam  viure  o  mûrir 
Mais  [dus  1er  auinen 
Sim  tem  iai  e  iauzen 
Con  mais  me  fai  languir 
Eu  plus  lam  finamen. 

III.  Car  el  mont  non  es  res 
Sia  senz  o  follors 
Qem  penses  qil  plagues 
Nom  fos  gaugz  e  douzors 

5  Zo  qe  vol  mal  azir 
E  aui  cels  bon  amen 
Qe  son  sieu  benvolen 
Al  miels  qe  pot  chauzir 


DE    BERNART   AMOROS  239 

Sun  a  son  madame. 
1  V.   Enaissi  ma  conqia 
E  bj  nom  val  amors 
Vailliam  ma  bon  i  fea 
E  la  soa  ricora 
5  Sam  ors  nom  vol  venir 
El  sieu  bel  cors  plazen 
El  verais  pretz  valen 
Deu  garar  'le  faillir 
Qar  sieu  muer  non  1er 

V.  Gentils  cors  ben  après 
Sobre  totz  amadors 
Agratz  mon  fin  cor  met/ 
Ab  un  pauc  de  secors 

5  Qe  mort  man  li  sospir 
E  vos  per  iauzimen 
No  suffratz  mon  turmen 
Ni  volliatz  fais  auzir 
Cui  er  mal  si  bem  ptê. 

VI.  Na  biatriz  grazir 
Vos  fais  a  totas  gens 
E  entier  e  valen 
Pretz  e  quin  vol  ver  dir 

5  Del  bel  semblan  noi  men. 


243 

EN  PONS  DE  CAPDUEIL 
(=B.  Gr.  276,  1) 

I.  {p.  227)  Longasazon  ai  estât 

[vas  amor 

Humils  e  francs  e  ai  fag  son 

[coinaii 

En  tôt  qan  puesc  e  anc  per 

[nul  afan 

Qeu  en  suffris  ni  per  nulla 

[dolor 

5  De  leis  amar  nom  parti  mon 

[coratge 


1  /.  :  mauciria. 
*/.':  L'ratz. 


$10  LE  CHANSONNIER   DE 

A  cui  niera  rendutz  de  bon 

[talcn 

Tro  qieu  cognois  en  leis  un 

[fol  uzatge 

Al»  qem  dechai  e  macambiat 

[mon  sen. 

II.  A  eut  ma  ia  per  leial  serui- 

[dor 

Mas  tan    la    uei  adonar  ab 

[enian 

Per  qe  samors  nom  mi  plas 

[de  ren.  an 

Niim  ]  pot  far  be  qe  ia  ma- 

[gues  sabor 

5  E  paîtrai  men  qaissim  ven 

[dagratdage 

Pos  ellas  part  de  bon  pretz 

[eissamen 

E   ieu  maloing   tener  altre 

[viatge 

On  restaure  zo  dô  ma  faig 

[perden. 

III.  Ben  sai  sim  part  de  leis  nim 

[vir  aillor 

Qe   non  1er  greu  ni  nô  so 

[ten  a  dan 

Mas  si  cuig  ieu  saber  e  valer 

[tan 

Caissi  con  sueil  enanzar  sa 

[lauzor 

5  Li    sabria   perchassar    son 

[dâpnatge 

Pero  lais  men  endreit  mon 

[chauzimen 

Qar    assatz  fai    qi   de   mal 

[segnioratge 

Si  sap  partir  ni  loigniar  bo- 

[namen. 

IV.  Em  patz  men  part  mas  can 

[cossir  lerror 


BERNART  AMOROS 

El  dan  cai  près   el  destric 

[leis  coman 

Hai  corn  magra  trobat  sens 

[cor  truan 

Qeilscruira  etengra  en  dou- 

[zor 

5  Nô  pose  mudar  qe  nom  sia 

[saluatge 

Aissim  conort  qauzit  ai  dir 

[souen 

Cades   passom   primier  per 

[lo  folatge 

E   pois   taing  ben  qom  san 

[reconoiscen. 

V.    Hai  con  cuiei  fos  dinz  daital 

[color 
Con  aparec  de  foras  pe?-sem- 

[blan 
&    enaissi   con  il  a  beutat 

[gran 

E  con  val  mais  gardes  gen- 

[zeitz  sonor 

5  &  enaissi  con  es  de  bel  es- 

[tatge 

Degra  en  se  auer  retenimen 

&    enaissi  con   es    daussor 

[paratge 

Con  tra  son  pretz  temses  far 

[faillimen. 

VI.  Ja  non  degra  beutatz  far  son 

[estatge 

Ni   remaner  en  dona  altra- 

[nen  2 

Si  non  gardes  sonor  en  son 

[paratge 

Enô  agues  en  se  retenemen. 


1  c.  en  :  Niun,  l.  :  Nim.  —  3  /.  :  allramen. 


LE  CHANSONNIER  DE 
244' 
EN  PONS  DECAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  375, 24) 

1-  (p.  228)  Tant  mi   destrein 

[uns  desconortz  qim  ve 

Qab  paucnonmoiz  'desmai 

[e  de  cossiro 
Qera  nô  sap  qim  so  ni  vo\ 

[mom  be 
La  res  el  mon  qieu  plus  am 

[e  dezire 

5  Et   a   razon   cane  tan  gran 

faillimen 

No  fes.  nuls  hom  qames  tan 

[finamen 
Mas  per  paor  de  falsa  gent 

uaia 

Ai    estât  tan   de  vezer  son 

[cois  gen. 

II.  Pero  tan  sai  son  verai  pretz 

[valen 
Per  qai  respeig  qenqeras  mi 

[atraia 
Humiltatz  *  m.-rces  e  chau- 

[zimen 

Tan    es    valenz    e    bella  e 

[coinde  gaia 

5  Anqeraura  de!  sien  francha 

meree 
E    non    créa    son    cor  cab 
[leial  fe 
Serai    tos temps   sos  hom  e 

[sos  seruire 

Malgrat  dels  fais  qeil  dizon 

[mal  de  me. 

III.  Qe  coites  fai   cel  qi  conois 

[en  se 


BERNART  AMOROS  841 

Colpa  cant  la  per  qieu  noil 

ans  desdire 

Mas  -mi  midonz  ve  qe  nos 

il  en  re 

Nim    pot   auer  tort   e  vol- 

[gues  maucire 

5  Qen  leis  amar.  ai  mes  lo  cor 

[el  sen 
'•   si   lot  ill   nom  ama  nim 

[consen 
Si  vais  daitan  mi  reuen.  e 

[mapaia 

Qe   nulz    aman/  non   al  ioi 

[qieu  naten. 

IV.  Las  qe  farai  si  de  me   noil 

[soue 
Quar  si  nom  val  donar.  ma- 

[greu  martire 
E    il    sabran    lo  uer  si  no 

[mencre 
Qen]  telan.  ai  qe  me  mezeis 

[nazire 
5  Daital  gui/a  qil  naura  mar- 

[rimen 

\>  <r  senssamorteing  lommi 

[a  nien 

Ben  a  raizon  qem  confondem 

[dechaia 

l'an    teignia    vil    si  de   leis 

[mal  mi  pren. 

V.  (  hanzos  vai  ton  a  mi  donz 
[qim  mante 

E  digas  li  qeil  souligna  de 

[me 
Qar  mil  aitanz  val  mais  qieu 

non  sai  dire 

Honors  e  pretz  qant  sacord 

[ab  merce. 


^.sas-i.'ï^.tîtr.r^rH: 


16 


212     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


245 

EN  PONS  DE  CAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  375,  25) 

I .  Tuit  diten  qel  temps  de  pas- 

[cor 
Son  plus  alegre  plusiauzen 
Qan  lauzel  chanton  finamen 
E  vei  hom  de  maintas  colors 
5  Los  vergiers  florir  e  foilliar 
Ben  sen  deu  hom  miels  ale- 

[grar 

Qi  ama  sens  cor  tricha dur 

E  es  amatz  mas  cel  cui  non 

[apaia 

Jois  ni  arr.ors  noil  tem  pron 

[floi'S  ni  glaia. 

II.  [p.  229)  Pauc  val    totz    lo 

[mons  ses  amor 
Per  qieu  iai  mes  finamen 
Lo  cor  el  saber  el  talen 
Miels  de  negun  altramador 
5  Qar  simaem  poder  bempar 
Qieu  non  puesc  de  ren  als 
[pensar 
Per  som  fes  chauzir  la  gen- 

[zor 

Alei  de    si  '  ma   voluntatz 

[veraia 

Doncs  pos  tant  val.  non  crei 

[qel  sieu  dechaia. 

III.  Aissi  com  hom  tenc  per  sei- 

[gnior 
Alixandre  de  tota  gen 
Dizon  tuit  qil  es  veramen 
Sobre  tota  s  caps  e  valors 
5  Azautz  e  pretz  lam  fai  amar 
E  qi  ben  ama  deu  gardar 
En  amor  adzaut  et  honor 


Per  qieu  mill  ren  ia  plus  de 

[pro  nol  aia 

A    leis    dessi    ma  voluntat 

[veraia. 

IV.  Mais  voil  morir  qem  vir  ail- 

[lor 

Quns  francs    esgartz  doutz 

[e  plazen 

Qem  feiron  sei  bel  oill  rizen 

_  [ ] 

5  Sai ont  estauc  prez  conortar 

Qar  sol  mant  degnat  esga- 

[rar 

Man  gitat  desmai  e  derror 

Merceslin  rend  .carfaisem- 

[blan  qeil  plaia 

Mos  bes  el  danz.lhes  enois 

[el  esmaia. 

V.   H  ai  valens  domna  cui  adzor 

Pz-endaus  de  me  francs  chau- 

[zimen 

E  sanc  fiz  vas  vos  faillimen 

Merce    vos    clam    ab    gran 

[temor 

5  Qel  fiz    pretz    qeus    mi  f;ii 

[amar 
Vos  fassa  tan  që  voillatz  far 
Tal  perda2qaprop  ma  dolor 
Francha  merces  merce  ab 
[vos  matraia 
Qel  iois  qai  tant  dezirat  men 
[eschaia. 

246 

EN  PONS  DE  CAPDUEIL 
(=  B.  Gr.  155,  13) 

I .   Merauil mecom  potnnlshom 

[ehantar 


1  c.  en  :  fi  —  -  /.  :  perdo. 


LE  CHANSONNIER   DE   HKRXAKT  AMOROS  24  3 


Si  corn  eu  faz  per  leis  qem 

fai  dolor1 

Qe  ma  chaazo  nou  pose  apa- 

[reillar 

Dos  motz  oual  ters  nom  lais 

[marritz  chazer 

5  Car  no  soi  lai  on  estai  sos 

[cors  gens 

Douz  e  plazenz 

Qe  mauci  dezirant 

E  non  pot  far  morir.  tant  fin 

mt. 
II.   E  car  nom  puesc  nulla  ren 
[tant  atnar 
Jes  sa  lois  platz  non  deu  n 

[mort  voler 

Cane  pos  la  vi  nom  poic  dal 

[re  pensar 

(p.  230)  Mas  corn  pogues  far. 

[e  dir  soin  plazer 

3  Et  es  ben  dreitz  qel  laus  dels 

[conoissenz 

Es  plus  valenz 

Per  qieu  mais  nam  lafan 

De  leis  suffrir  qe  dautrauer 

[ioi  gran. 

III.    Maseunonlausmomessatge 

[enuiar 
Ni  tant  dardit  nO  ai  quea  lan 

[vezer 

E  non  o  lais  mas  qar  voil  far 

[cuidar 

Al  s  fais  deuinz  qaillors    ai 

[mon  esper 

5  Perol  decirs  mes  ades  plus 

[cozenz 
El  pensamenz 
Car  ieu  noil  son  deran  2 
Mans  ioins  aclins  per  far  tôt 
[son  coman. 


IV.   Mais  qen  traia  nom  poi  des- 

[conort.ir 
Tant  la  fai  pretz  sobre  totas 

vuler 

Ni  neguns  hom  nom  la  pot 

|  trop lauzar 

Deus  don  qil  voil  humiltat3 

[auer 
5  Si    con   en  leis  es    preezae 

[iouenz 
Beutatz  e  senz 
Cane  dona  non  ac  tant 
1 1 "nos  qal   tort  nai  pos  nul 
[autra  nom  blant. 

V.  Belladomna  tant  vos  am  eus 

[teing  car 

Qf  maintas  vetz  lo  iorn  non 

[pueis  tener 

Qa  mia  partnon  an  tôt  sols 

I plorar 

Si  qieu  nom  pueis  duna  pessa 

[mouer 

5  Tal  paor  ai  nS  valia  chauzi- 

[menz 
Car  plus  me  venz 
Vostramors  sospirant 
Qieu  non  sai  dir  ni  retraire 
[en  chantant. 

VI.  Qeus  sui  garens 
Plus  vos  am  ses  enian 
Non  fesyseutz  son  bon  amie 

[tristan. 


Fin  des  chanzos  de  pons  de 
[capdoil. 


'  /.  :  doler  —  2  c.  en  :  deian,  /.  :  denan  —  3  l.  :  humilitat. 


24  4  LE  CHANSONNIER   DE 

247 

LA  COMTESSA  DE  DIA 

(=B.  Gr.  46,2) 

I.   (v.  231)  Chantar1  merdaisso 

[qeu  non  volria 

Tan  me  rancur  de  lui  cui  sou 

[ami  a 

Car  eu  lam  mai?  de  nulla  l'en 

[qe  sia 

Ves  lui  non   val    merces  ni 

[cortezia 

5  Ni  mas  beutatz  ni  mos  pretz 

[ni  mos  senz 

Qautresi  suienganade  traida 

Corn  degresser  seu  fos  des- 

[auinenz. 

II .  Daisom  conort  car  anc  no  fiz 

[faillenza 

Amies  ves  vos  per  nulla  cap- 

[teneuza 

Anz  vos  am  mais  non  fes  se- 

[guis  valenza 

E  plaz  memoutqez  eu  damai' 

[vos  venza 

5  Lo  meus  amies  car  es  lo  plus 

[valez 

Mi  faitz  orgoil  en  ditz  &  en 

[paruenza 

E  sius   es  francs  vas  totas 

[autras  genz. 

III .  Meraueilme  con  vostrecors 

[sorgoilla 

Amies  vas  me. per  cai  raizô 

[që  doilla 

Non  es  ges   dreitz.  cautra- 

[mors  vos  mi  toilla 

Per  nulla  ren  qeus  <liga  nius 

[acuoilla 


BERVART  AMOROS 

5  E  me»ibre  vos  cals  fol  co- 
gneras a  me»  z 
De  nostramor  sa2  dame  deus 
[no  voilla 
Ca    ma    colpa   sial    depar- 
[timêz. 
IV.   Proeza  granz  qel  vostre  cor 

[saizina 

E   lo  ries  pretz  cauetz  më 

[ataina 

Cuna  nô  sailundana  ne  ve- 

[zina 

Sius  vol  amar    vas  vos   nô 

[si  aclina 

5  Mas  vos  amies  es  ben  tain 

[conoissenz 

Qe  ben  deuetz  conoisst  r  la 

[plus  fina 

E  nembra3  vos  de  vostres  v 

[couinenz. 

V.   Valermi  deu  mos  prez  e  mos 

[paratges 

E  mas  beutatz  e  plus  mos  fiz 

[coratges 

Per  qeus  man  lai  on  es  vos- 

[tre  estatges 

Esta  chanzon  car  mi  sia  mes  - 

[satges 

5  E   voil  saber  lo  meus  bel  s 

[amies  genz 

Per  qe  mi  setz  ta  fers  ni  tan 

[saluatges 

No  sai  si  ses  orgoilz  o  malz 

[talon/.. 

VI.   Mas  aitan  voil  digaus   plus 

,  lo  messatges 

Qe  trop  dorgoil  ten5  gran  dan 

[maintas  genz. 


M.  :  A  ch.  —  2  /.  :  ja  -  3  l  :  membre  -  4  c.  en  :  nostres  —  5  /.  :  an. 


LE    CHANSONNIER   DE   BEBNAHT  AMOROS 


2t5 


248 
LA  COMTESSA  DE  DIA 

(=  B.  Gr.    i<-,,  1  ) 

I.  (p.  232)  Ab  ioi  et  ab  iouen 

[mapais 
E  iois  e  iouenz  mapaia 
Qe  nios  amis  es  lu  plus  gais 
Per  (jeu  son  coind  e  gaia 

5  E  pois  eu  li  fui  '  verni  a 
1  !en  taing  qel  nie  sia  verais 
Cant 2  de  lui  amar  no  mes- 

Ni  ai  cor  që  nestraia. 
11.   Moût  mi  plai  car  fai 3  qeval 

[mais 
Sel  qeu  plus  dezir  que  maia 
K  cel  que  primes  lom  a  trais 
Deu  pree  que  gran  ioi  latraia 
5  E  qi  qe  mal  len  retraia 
Non  creza  fors  qiel  retrais 
Com    coil  maintas   ves  los 

'-liais 
Ab  qel  mezeis  si  balaia. 

III.  Domna  qen  '•  bon  pretz  sen- 

[teu 
Deu    ben     pausar    senten- 
[deuza 
En  nu  pro  caualer  valen 
Pois  il  conois  sa  valenza 
5  Qe  1  .uz  amar  a  prezenza 
E  dôpna  pois  ama  prezen 
Ja  pois  li  pro  ni  li  ualen 
N\m  diran  mas  auineuza. 

IV.  Qeu    nai   chauzit  un   pro    e 

[gen 

Per    cui    pretz    meillur    e 

geuza 

Lart  "  e  adreg  e  conoisser  " 


(  >u  es  Benz  e  conoissenza 
5  Prec  li  qe  maia  crezenz  > 
Ni  hom  voil  '  poBca  far  cre- 

/.ell 

Qeu  fassa  vas  lui  faillimen 
Sol  non  trop  en  lui  fallenza. 
Y.  Amies  la  vostra  valenza 

Sabon  li  pro  e  li  valen 

l'er  qieu  vos  qier  de  mau- 

[tenen 

Sius    platz    vostra    mante- 

[nenza. 

249 

NAIMERIC  DE  BELENOl 
(=  B.  Gr.  9,  7) 

I.  {p.    233)    Aram    destreing 

[amors 
Tan  amorazamen 
Qels  mais  qem  fai  nom  sen 
Anz  mes  lafanz.  douzors 
5  E  la  humils  paruenza 
Eil  fraucha  eaptenenza 
De  lieis  per  cui  ma  pies 
Amors  ma  si  conqes 
Qe  vas  on  qieu  estei 
10   Lai  on  la  ui  la  vei. 

I I .  Qe  qant  ieu  venc  dailliors 
La  gran  beutat  el  sen 
Truep  doblat  doblamen 
]*cr  qe  ineu  pren  temors 

5  Qe  merces  no  lam  venza 
Mais  daizo  ai  pleuenza 
Qe  anc  ergueils  nos  mes 
En  tan  franc  luec  som  pes 
Pero  com  qem  guerrei 
10  Amors  so  tais  com  dei. 

III.  Sa  couinenz  colors 


1  c.  en  :  sui  —  -  /.  :  Cane  —  3  c.  en  :  sai  —  *  /. 
s  /.  :  conoissen  —  7  /.  :  noil. 


l[e     .'li 


/.  :   Lare  — 


246  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOllOS 

Eill  oill  clar  e  rizen 

EU  douz  esgar  plazen 

El  onrada  valors 
5  Mes  tant  e  souinenza 

Per  qe  totz  iornz  magenza 

Qe  mos  leials  cors  mes 

Mirails  de  totz  sos  bes 

Qe  eant  aillors  cortei 
10  Pensant  ab  lieis  dompnei. 
IV.  Tant  es  granz  sa  ricors 

Qieu  n5  laus  far  paruen 

Com  là  forsadamen 

Qieu  non  aten  socors 
5  Mais  de  sa  conoisenza 

Qieu  lam  ab  tal  temcnza 

Qesgardar  non  laus  ges 

Qelam  veia.  ni  res 

Qe  tant  garda  ves  mei 
10  En  lesgart  me  recrei. 
V.    Pos  aissim  venz  temors 

La  bella  cui  mi  ren 

Naia  bon  chauzimen 

Qel  mon  non  es  dolors 
5  Mastruep.  longatenedenza1 

Per  qieu  fas  tal  sufrenza 

Qe  si  nom  val  merces 

Ab  leis  e  bona  fes 

Paor  ai  qe  desrei 
10  E  car  o  die  folei. 


Nil   per  para 3  ges    no  fai 

[esfort  grant 

Pero  non  die  qazautimenz  * 

[non  sia 
5  Qi  als  granz  obs  son  amie 

faconia 

Soin  parria  esfors  e  benes- 

[tanza 

E    séria    complida    lamis- 

[tanza. 

II.  (p.  234)  Per  vos  domnaqem 
[promesest  o  die 

Vostre    socors   ab    amoros 

[semblâz 

Qieu    mestaua   suau  e  senz 

[afanz 

Aram  auetzem  fe  et  emparia 

5  Emblat   mon  cor  e  sufretz 

[qieu  maucia 

Dun  douz  dezir  plen  de  des- 

[mesuranza 

Dont  a  mes  iorns  non  par- 

[trai  mesper;tnz;i. 

III.  En  vos  si5  mes  e  de  mi  si 

[partie 

Qan  vos  traisses  las  blan- 
[chas  mas  dels  ganz 
E  remas  lai  mos  cors,  dom- 
[nenG  liam 
Ries   e  ioios  en  vostra  se- 


250 

NAIMERIC  DE  BELENOI 

(=  B.  Gr.  9,  8) 

1.   Cel  qi  promet  a  son  coral 

[amie 

Son  seruizi  cant  lo  ue  ben 

[amant2 


[gmoi  la 


5  E  qar  de  vos  non   si  part 

[nueig  ni  dia 

Jeu  muer  dire edenueie  des- 

[peranza 

Car  ses  mi  es  en  tan  grau 

[benanaza. 

IV.  Lo  brausresposdomna  mes- 

[paoric 


1   l.  :  longa  tendenza. 

1  l.  :  benanant —  '■'•  c.  <:u  :  paia   -   *  /  :  qe  chausimenz   *  c.  en:  li  — 
a  :  domuen 


I.K  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS 


?  J7 


Q  te  mi  fezcs  après  dun  bel 

[semblanz 

Per  qieu  nom   part  de  vos 

[nins  vein  deuanz 

Qen  pensansai  ab  vos.  esieu 

[vesia 

5  Vostre  bel    cors    demueia  ' 

[mauciria 

Pero  mais  voil  lai  morirsenz 

[doptanza 

Qe  viure   sai   en  tan   grieu 

[malananza. 

V.   Lo  bel  semblant  amoros  aut 

re  lie 

El    douz    esgart    el   francs 

digtz  ben  estauz 

De  uos   per  qieu  met  autre 

[en  son  m/. 

En    dreit   dama*  salua  lui- 

[compagnia 

ô  An  dinz  mos  oils.  per  meig 

[fâcha  lur  via 

Don  man  emblat  lo  sen  e  la 

[membranza 

l'or  qieu  non  viu  ab  ioi  mas 

[per  semblanza. 

251 

NALMERIC  DE  BELEUOI 

(  =  B.  Gr.  0,    18) 

1.   Pos  le  gais  temps  de   pas- 

[cor 

Ivmouellae    ve 

Vestitz  de  fueill  e  de  flor 

Chan  tarai  de  se 
5  Catressi  ses  mos  pensât/. 

De  fin  ioi  renouellatz 

Car  mi  sobranciers  volers 


A   cui  nom  platz  vils  pla- 

zera 
A  trobat  a  sou  talen 

lu  Domna  de  cor  e  de    i  a 
Erguillosa  ;  hurail 
De  captenenza  gentil. 

11.   Amar  mi  fai  ad  honor 
Mos  ries  cors  anc  se 
Sen/.  blasme  e  sen/.  follor 
Dautrui  e  de  me 

5  Cane  nom  abeillitz  beutatz 
Ni  paratges.  ni  rictatz 
Si  noi  fo  sen/,  e  sabers 
Qi  san  ''  far  e  dir  plazers 
E  gardar  de  faillimen 

10  Domne  cel  qa  lui  saten 
E  ai  cor  tan  seignoril 
Qaz  autra  amor  nom   apil. 

III.  (p.  235)  Mais   qui   vol  den- 

[tendedor 
Proar  saraa  be 
Gart  son  sen  e  sa  ricor 
Ni  con  si  chapte 
5  Qe  ses  ben  enamoratz 
I.i  faig  eil  dig  el  solatz 
Seran  plus  rie  qel  deuers 
Camors   non    es    mal 5  pla- 
cera 
E  tuit  bel  captenemen 
10  Mot  von  clamar  °  leialmen 
M  us  ieu    non    truep    antre 

[mil 
Un  qi    en    sos   faigtz    non 

[guil. 

IV,  Qi  vol  apenre  dam  r 
Amar  li  coue 

Qe  ia  per  enseigniador 
Non  apenra  re 
5  Qe  fin  amors  so  sapehatz 
Non  es  als  mas  volûtatz 


1  /:  denueia —  2  /.  :  damar. 

3  /.  :  E.  e  —  4 1.  :  fan  —  s  c.  en  :  ma*  —  ,;  Mouon  dam  n 


?-!  ? 


LE  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS 


Caduz  inz  el  cor  vezers 
On  la  reten  bels  plazers 
E  via  de  dous  pensamenz 
10  Per  cui  qû  am  c  retea 
Ea  aut  luec  o  en  sotil 
Vesqez  a  rie  cor  o  vil. 

V.  Mas  tan  a  fiaa  valor 
Cella  qem  mante 

Qe  non  cre  lauzenjador 
Ni  fais  ditz  zo  cre 
5  Qel   sieus  genz   cors1  pre- 

[zatz 
Complitz  de  totas  beutatz 
Conois  menzonias  e  vers 
Per  qe   nom  tem  fais  j.la- 

[zers 
Cab  son.  soâna  e  pren 
1(1  E  iuia  tan  leialmen 
Qe  palais  ten  per  cortil 
Som  noi  fa  fag  agradil. 

VI.  Ni  on  [dus  va u  qeren 
Terra  ni  baron  ni  gen 
Tait  autre  fa  et  mi  son  vil 
Tant  son  li  vostr^  gentil. 

252 

NAIMERIC  DE  BELEUOI 

(=  B.  Gr.    9,  12) 

I.   Merauil  me   com    pot  hom 

apellar 

Ainor  sospir  ni  coials  desi- 

rers 

Ni  com  pot  hom  de  sa  dolor 

[chantar 

Mais  car   nom  puesc    mon 

[cor  dire  estiers 

5  Jeu  chan  forsatz.  ab  alques 

[dalegranza 


Per  zo  qe  tais  aprenga  ma 

[chanzon 

Qe    la  chante    lai    don    nô 

[parc  ni  non  son 

Ni    descubrir  non   laus   ma 

malananza. 

II.  Tuit  li  cortes  qi  ren  sabon 

[damar 

Lo    deuon    dir    de    gaug  e 

[volontiers 

Qe  chascuns  deu  en  si  me- 

[zeus  pensai* 

Con  es  granz  mal  paors  de 

[lauzengiers 

5  Qieu  era  ries  de  sola   les- 

[peranza 

Caissi  sal  dieus  dais  non  ai 

[sospeizon 

Ni    ella   cor    tio    lauzenier 

[fellon 

IVrcasseron  ma  mort  e  ma 

[oranzi. 

III.  {p.  230)  Auoir2  me  fan  dou- 

[zamen  senz  cuiar 
A  la  bella  qem   toltotz  ale- 

grers 

Qe  sa  colors  fresca  el  douz 

[esg  ir 

El  gais  solatz  sauis  e  pla- 

[zen  tiers 

5  Man  e  mon  cor  bnstida.  un  i 

]danz.i 

Qem  pren  cant  fui3  emniet 

[en  tal  preizon 

Qe  issir  nom  puesc  semortz 

[ou  amanz  non 

E    la    mortz    es    ma   maie:- 

[esperanza. 

IV.  Tant  can  puesc  sols  a  una 

[part  estai- 


1  /.  :  cors  ries. 

2  /.  :    Aucir    —  -j  c.   en  :  sui 


LE  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS  849 

Me  pais  ab  ioi  mos  mortals  «-q- 

[cou.- ii  • 

Q«emafagsiautrasresobli-  NAIMERIC    DE    BELEUI 


(=  B.  Gr.  9,9) 

I .   Domna  flor 
1  lamor 


h  dû  vei  luecs  domna  ni 

[caualiers 

5  -Mas    entorn    leia    qem    ten 

[en  remembranz.i  Domna  senz  vilania 

Son  douz   paia  en   sa  g  lia  Resplandor 

saizon  :'  '•  color 

Aqel  pensars  me  plaz  t»n  ""  tota  cortez  ' 

[em  sabbon  Vostramor 

Qe  ma  dolois  mo  par  grai  /.  1<:"  S0C01' 

[alegrnnza.  Aicel  qen  vos  son  fia 

V.   Pero    daitan  li   veil  merce  [0  Trtl  1ePlor 

clamar  Ne  dolor 

Qe  tan1  sera  ab  araanzdrei-  Nou  sen  ve,"-","  mana 

j,    •  Car  de  vos  pies  charn  3  hu- 

Qem  deign  mo  nom  ab  son  [mana 

solatz  mesclar  Jesuchrist  qi  lau  e  sana 

Qe  lais  men  er  nonsabenz  15  Totz  vostl'es  amics  de  '"-l1 

messatgiers  Per  confession  leial. 

5  Qemë  faraal  cor  gran  aie-  1L   Ric  '  iornal 

[grau/,  A  *en  tal 

Cam^medira-daquelsolaiz  Benedeita  gloriosa 

[confon  Qanadal 

K  granz  plazers    qi  bel  ditz  '"   l?os  e0"al 

[perrazon  Maire  fillha  e  espoza 

En  dreg  damor.  engal  dun  re 

[fagbalan/.i.  Cor t  captai 

VI     De  nostre  rei  mi  plagra  da-  in  D°ne  poderoza 

[ragon 
Qe  per  son  «en  disses  doce 

[de  non 

.-.  •  „  m         .             .  Qe  nois  mes  daqesta  nid; 

Ai.-si  coin  pretz  o  renier  e  ' 

Car  noi  trop  tantes  marrida 

onranza.  .„                      r 

lo  Coït  ni  donna  ni  segnior 


10   Un  logal 

Mi  fait/,  s  il 
Misericordiozn 

'  i 


Senz  trebail  ni   senz  doli >r. 

1  i.  :  can  —  -  /.:  Cant. 
Voyez  l'édition  donnée  par  M.  Ghabaneau  dans  la  Itev.   d.   I.  r.  IV 
s.,  t.  IL  p.  571    ss..  —   '•  Ch.i  char  —  '  CI,.:  Qui   Lecture  douteuse-, 
en  :  reial—  s  L:  Doua  C/i.  :  misericoi 


?r»0 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


III.  {p.  237)  Qihonoi- 
Vol  damor 

En  vos  dôna  entemla 

Qe  daillor 
5  Ne  ven  1  plor 

Tôt  ioi  qe  hom  natenda 

Eil  meilhor 

Fan  follor 

Guidon  qe  miels  lur  prenda 
10  Cab  sabor 

Dan  maior 

E  pert  cascus  sa  renda 

Mas  la  vostra  amistanza 

Dona  ioi  e  alegranza 
15  E  tôt  ire  pensamen 

[ ]» 

IV.  Ben  i  pren 
Qui  enten 

En  vous  douse  reina 

Cab  iauzen 
5   Pensamen 

Son  dezirer  afina 

Cor  e  sen 

E  talen 

Mi  donatz  e  aizina 
10  Qe  viuen 

Peneden 

Ab  vera  disciplina 

Dona  mos  pechatz  fenisca 

De  tal  guiza  e  delisca 
15  Cal  iorn  derrer  mi  iutjatz3 

Ab  aicels  cauran  ben  faitz. 

V.  Seignier  en  vos  non  perisca 
Vostre  prez  e  non  delisca 
Qe  cant  la  mortz  eis  dagait 
Tînt  li  cuidar  son  desfait. 


254 

EN  BERTRAN  DE  LA  MÂNO 
(=B.  Gr.  7G,  11) 

I.  Lo  segles  mes  cambiatz 
Trop  laig  don  soi  iratz 
Qapenas  sai  qem  dia 
Qieu  soil  esser  vezatz 

5  De  chant  e  de  solatz 
E  de  caualeria 
Mesclat  ab  cortezia 
E  zo  per  qom  valia 
Era  ma  volontatz 

10  Et  en  diylz  et  en  faitz 
En  tôt  zo  qieu  podia 
E  las  domnas  vezia 
Cellas  cui  valors  tria 
Ab  lur  plazentz  beutatz 

15   Don  era  conortatz 
Del  rie  ioi  qeu  nauia 
E  trac  nen  garentia 
Amor  qi  me  mouia 
Del  tôt  mera  donatz 

20  Azo  qe  valor  platz 
Sil  segles  mo  suffria 
Ara  tem  qe  blasmatz 
Non  fos  e  côdampnatz 
Si  ren  daqo  fazia. 

II.  Ara  me  sui  viratz 
Totz  enics  e  forsatz 
En  zo  qe  non  plaz  mia 
Car  mi  couen  de  plaitz 

5  Pensar  e  dauoeatz 
En  far  lihels  tôt  dia 
E  pois  esgar  la  uia 
Simils4  corrieus  vêria 
Qi  men  ven  da  totz  latz 
10  Polsos  et  escursatz5 


1    l.:  Deven?  (67/. \  — -  C/t.  :  E  foi  de  paubre  manen  —  s  Ch.:  jugatz 
(impos  ible  pour  la  syntaxe  comme  pour  la  rime). 
'•/.  ;  Si  nuls  —  5  /.  :  escuisatz 


LE  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS 


?:»l 


Qe  li  cortz  lo  menui.i 
E  si  me  dit/,  [follia 
Blasmar  non  lauzaria 
Anz  me  ditz  totz]  priuatz 

15  Qen  cor!  es  demandatz 
El  pena  Bescriula 
Qom  nous  perdonaria 
&''S  '  iorns  en  vos  failli  t 
Segnor  ar  esgardatz 

20  (p.  23S)  A  qe  ieu   8ui 
Si. mi  sui  ben  a  la  lia      [natz 

qam  aitan  lo  glatz 
Qom  faz  las  flors  delà  pr 
Qar  non  sai  on  me  sia. 

III.  Baron  a  dieu  siatz 
Qar  nom  qe  viu  forsatz 
Trai  piegz  qe  si  muria 
Al  rei  castellan  plat/. 

5  Qea  sobre  totz  prezatz 
Qieu  tenga  lai  nia  via. 

IV.  Qen  lui  mer  restaura tz 
Jois  e  ehanz  e  solatz 
Qallors  non  reuenria. 

255* 

EN  BERTRAN  DE  LA 
MANNO 

(=B.  Gr.  7o\  21) 

1.    Unacliauzonduneia2ai  telan 

Qieu    la  fassa  ab  gai  sonet 

[cortes 

\i  ges  daitint.  no  mi  for  en- 

i:  emes 

Mis    foi'za    men    amors    <> 

[ma  enanz  >  ' 


r>  Per  la  bella  qea  tant  pro 

v. iléus 
Qeu  non  laus  dir  '-oui  m 
[ab  tiirn. 
Per    ((il   «lirai    chantan 

malananza. 
11.  Lo  primer  Lorn  qieu  vi 

cors  prezan 

Anz    qem    partitz    denantz 

|  Iris  mac  conqes 

Sa  granz  beutatz  e  si  lassât  • 

e  près 

Cane  pois  non  saup  qe  si  foa 

[benananza 

.">  Tant  sui destreitzdangoissos 

[pensamenz 

Car  nom   mi   val  nierces  ni 

chauzimenz 

E  ia   totz  iornz   dobla    ma 

deziranza. 

III.  Mas  can  remir  son  bel  cors 

ben  istan 

Nô  merauill  sen  grant  error 

[ma  mes 

r  sa  beutatz  [ |  es  5 

E  sos  Hz   pretz.  e    sa  gaia 

[coindanza 

5  Al   sieu   lauzar  non   sui  eu 

[pro  sabenz 

Mas    aitals  es  cobs   noi    ha 

mais  ni  meinz 

Con  hom  pot  meils  fazonar 

|  per  semblanza. 

IV.  Al    sieu  rie  pretz  no  sui  eu 

pro  liaient 

Mis  soin  5  valgues.per  amar 

[coralmenz 


1  c.  en  :  Sel. 

'  Voyez  C  édition  de  A/.  Chabaneau  dans  lu  Rev.  d.  I.  r.  IV  s.,  t.  II. 
)>.  564  s.  — 3  c  en  :  dimeia  —  3  Cit.  :  m'o  enanza  —  '  Ch.:  lazat  —  G  C'A.  : 
Peut-être  la  lacune  ett-elle  entre  beutatz   et  es  —  s/.  :  sim  (' 


852 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


Ben    istera  '    égal     en    la 

|  balanza. 

Y.   Del    comte    sai    mo    segnor 

[vermen/.  -' 

Qe  chi3  fara  el   chantz  nû 

[valra  meintz 

E  per  mo  mal  o  '■  chantara 

[en  dan/a. 

256 

EN  BERTRAN  DE  LA  MANNO 
(=B.  Gr.  76,  5) 

I .  (j).  239)  Délassai  de  proen- 

[zam  doill 

Car  al  meu  port  nô    passa 

[ren 

E  car    noi    prenc  zo   qeu  3 

[soill 

Foi  t  menueia.  cascus  o  cre 

5  Mais   segners  faill  qel  sen  G 

[descor 

E  qant   pot  ben   aue?-   lur  7 

[cor 

E  bon  amor  de  tôt  son  co- 

[munal8 

Qel  mils  9  trazaurs    a  senor 

[tan  no  val. 

II.  La  sal  an  mes  a  tan  gran  for 
Per  qeu  tem  fort  e  tem  ancor 
Qel  prouerbis    qes    tau  diz 

[torn  en  mal 

Condugz    ab    caru    totz   es 

[perdutz  per10  sal. 


III.  Qi  aital  ortolan  acueill 
Paor  deu  auer  per  ma  fe 
Qe  uoil  fai'ia  mal  eu  loi  1 1 
Ren  qel   ait  de  beu    en  torn 

[se 
5  Mas  cre  qel  o  fai  per  de- 

[mor 

Car  tal  cet",  ccuuauz  part12 

[son  tezor 

E    nous   cuides   qel  o  fassa 

[per  mal 

Car   a    totz   part   son    auer 

[per  égal. 

IV.  En  bonafaci  a  rie  cor 

E  non  es  ges  cassatz  el  cor 

Qe  donals  seus  e  los  garda 

[de  mal 

Per  qe  li  son  trastuit  bon  e 

[liai. 

V.  Sil 13  qesa  comparatz  a  troill 

[Nos  tenon  sai  estrec14  lo  fre 

E]  nos  teuon  lo   cap  el  soil 

E  noi  troban  15  nulla  merce 

5  Mas   non    es    senblanz    ges 

[encor 
Qe    gérez  10  sos    enemics 

[for 

De  sa  terra  on  li  fazion  mal 

Els  francs  baros  degra17  far 

[atretal. 

VI.  De  la  sal  non  an  ges  per  lor 

Anz  li  son  tuit  li  autre  for 

Qe  uô  nau   trait  ensems  un 

[pieu  grazal 


1  Ch.  :  iflera  (7.  :  istera)  —  2  Ch.  :  ver[a]menz  —H.:   si  ?  (Ch.)  —  *  l.  :  per 
m'amo[r]  lo?(C/(.). 

'  Voyez  l'édition  de  M.  Chabaneau  I.  c.  p.  ~><)~>  s.  —  5  Cli-  :  que  [eu 
-  e  Ch.  :  seu[s]  -  7  Ch.  :  lux,  1.  :  lur  —  «  Ch.  :  cumunal  -  ■'  l.  :  Que  (l) 
nuls  [Ch.)  —  10  L  :  sens  !{Ch.).  Comparez:  Bacons  mal  salez  en  charnier 
empire  Prov.  au  vilain  p.  p.  .1.  Toblerl'Sd,  7  —  "  c.  en:  iet—  ,2  /.  :  per? 
[Ch.)  -  "s  Ch.  :  Sel  —  '*  Ch.  :  estrel  —  '■'  Ch.  :  trobam  —  'G  Ch.  :  getes 
— -  17  Ch.  :  degran 


LE  CHANSONNIER   DE    BERNART  AMOROS  2:>X 


Don  prouerbis  e   pesatges 
[pauc 

VII.  Qui1  mal  semena  malcoill 
E  qi  mal  penza  mais  li  ve 
E  qi  mal  mi  fai  mal  li  voill 
E  prec    deu  2  qe  de  mal 

[lestre 

5  Don  daisso  malegren  3  de- 

|  mor 

E  nai  gran  plazer  .e  mou 

[cor 

Qe  ilius  •  non    gie  aueniar 

[ben  ni  mal 

Ter  qen  seran  tuit  venje  tal 

e  tal. 

VIII.  (p. 240)    Fines   baros    viz:i 

[eus  metetz  °  for 
Deseoratze  noi  ontassescor 
E  membre  vos  de',  cor  7  de 

[la  sal 
Si    non    iamais  non    seretz 

ienzal. 


257  * 

PEIRE  MILON 
(=  B.  Gr.  349,  6) 

I.    Pois  qe  dal  cor  mauen  farai 

[chanzos 
E  [iois  qeu  vei  espandre  flor 
[de  nouel 
E  pois  qeu  \i  alegrar  li auzel 
Qi  van  chantan   sus    larbre 
[qe  follios 
5  E  pois  qeu  vei   lun  del  au- 
tres iauzir 


Ben  [iiiesc  auer  |  ensament 

msir 

Car  anc  un  iorn.  no  fui  ioioa 

[  damar 

Ni  ia  per   mal   damor  non 

pose  estrair. 

II.  Domna   en  vos  trobei.  tais 

[guierdos 

Com  t'a  :il  lop  1"  chabrols  e 

lagnel 

Qant  enver  lui  ill  coi  en  senz 

[reuel 

E  laissam  star  las  fedas  els 

[moulos 

5  Aissi  domna  al  pjv'm  al  mieu 

all.ii' 

Per  la  meiller  ou8  vos  cui- 

dai  chauzir 

Mas  iogador.  ai   vist  souen 

[iogar 

Qe  geta    fal  e   si   cuia  en- 

[trar. 
111.   Lai9  ma  donat  vostre  cors 

[orgoillos 

Tota  10  daissi  lira  el  capdel 

H   fassa     mi    sius   plaz    un 

[semblan  bel 

E   ia  poissas  non  sera  tai- 

nos  n 
5  Merauill  me  car  am  tant  ni 

[dezir 

Qe   per   merces   no   vol  un 

[prec  auzir 

E  ia  ar  12  merces  lo  sogner. 

[deus  dun  lair 

Qi  en  la  crois  li  saup  merce 

clamar. 


«  Ch.  I.  :  Ccl  qui?  —  «  Ch.  ;  don  (  /.  :  dieu)—  3  Ch.  :  malogren  :  /.  :  mal 
vu  {Ch.)  —  4  c.en:drus  — 5:  /.  :  vos(C/i.)  c  ''/>.  :  metes — '  Ch.:  cor[e]. 

'  Voyez  l'édition  de  M.  Appel  d'après  les  »?.«.  I  a  dans  la  Rev.  <l.  I.  r. 
IV  .-.-.  /.  IX  p.  193  ss.  —  8  /.  :  meillor  eu  — ''  Aj>pel  :  Hai  —  '0  c.  en: 
Tola  —  "  A.  :  lainor  —  '*  c.  en  :  ac 


2Ô4 


LE  CHANSONNIER   DE   BERNAUT   ARIOKOS 


IV.  Las   qo    farai    morrai    tau 

[cossiros 

De  '  qeu  non  puesc  de  leis 

auer  apel 

E  «oui    H   soi    cascun   iorn 

[plus  fizel 

Eu  mais  la  trop  vas  mi  plus 

[airos 

5   E  cant  la  veg  encontra  mi 

[venir 

Eu  vauc  vas  leis  tan  ioios 

[per  seruir 

Donc  se  capten  escura  del 

[iogar 

Mas    ia    vi    far  après   scur 

[temps  ben  clar. 

V.  A  ra  soi  eu  en  carcer  tenebros 
Sa  par  no  ui  en  mur  ni  en 

[castel 

Qe  eu  non  puesc  trobar  clan 

[ni  martel 

Qem   puesca    trar    de    leis 

[mans  deLleos 

5  E    pois    merces  qe~a  claus 

[de  lubrir 

{p.  241)  Eu  non  la  trop  soi 

[vencutz  sens  mentir 

Ni  ia  per.zo  nom  recreirai 

[damar 

Qieu  vi  ia  hom  qera  vencutz 

[sobrar. 

VI.   Ai  mala  res  dieus  vos  lais 

[repentir 

Del  malqemfaitz.donmaues 

[fait  fiorir  2 

Caissi    com    pert  [tôt  aiga 

douz  e  mar 

Son  non   sil    pert]  en  vos 

[amors  son  par. 


258* 

PEIRE  MILON 

(=B.  Gr.349,7) 

1 .   Quant  on  troba  dos  bos  com- 

[batedors 

Dengal  proeza  e  dengal  gar- 

[nimen 

E  luns  non  pot  plus  de  lau- 

[tre  nien 

Donc    me   sembla  qel  locs 

[fora  maiors 

5  E    sil    son   dos  sobra  a  un 

[som  par 

Qi   se  combat  qant  qel  pot 

[pois  merces 

Sel  lor  clama,    da  blasmar 

[non  es  ges 

Nom  merauil.  sel  sol  non  pot 

[durar. 

II.    E  pois  qel  dos  qes  del  venzer 

[segnor 

Non  an    del   sol  merces  ni 

[chauzimen 

Adouc  sen  fan    blasmar  de 

[tota  gen 

E  lor  afar  torna  a  deshonor 

5  E  sim  3  autre  vengues  sol 

[aiudar 

E  venqes.  son  pois  los  dos 

[semblant  mes 

Qe  tota  g'entz  iutjera  granz 

[bes  es 

E  da  chascun   il  se  feiran 

[lauzar. 

111.  A  vos  merces  complaing  eu 

[mas  dolors 


1  '■.  en  :  Oc  —  2  c.  en:  florir. 

*  Voyez  l'édition  de  M.  Appel  d'après  les  Mas.  I  a  dans  la  Rev.  d.  I.  r. 
IV  s. ,  /.  IX,  p.Vi'i  ss.  —  a  Appel  :  s'un 


LE  CHANSONNIER  1) 

Qe  no  mon  pot  aiudar  om 
[viuen 

Qieu  soi  lo  sols  qis  combat 
[escien 
Encontra  dos  ma  domna  et 
[amors 
5  E    ia    nom   val   merces  tôt 
[iorn  clamai- 
Or   maiudatz.  si  vos  platz 
[gentils  res 
Qe    chascuns    hom   grazitz 
[los  bes 
Pos  qe   nom  val  ni  ben  dir 
[ni  ben  far. 
IV.    E   sieu   pogues.   eu   fugira 

[ai  Hors 

Mas  lus  dels  dos  menchauza 

|em  repren 

Qi  cor  plus  tost  cauzel  qi  va 

[volen 

Estiermon  gratmi  fa  tornar 

[val  ors 

5  [E    sa   mei'ces  plagues  de 

secors  dar 

Non  o]  pot  far  se   il   tôt  o 

[volgues 

Qe  ma   donna  nol  vol   q«€ 

[ma  conqes 

Anz    vol    qeu    moir  en  lais 

[désespérai*. 

V.   Ara    pose    eu   tornar    mon 

[chant  en  plors 

Pois   qeu    non  puesc   fugir 

[qe  lunz  mi  pren 

E  pois  non  puesc  durai*,  [dus 

[nom  defen 

Pois    de    secors    non   pose 

[auer  valors 

5  Las  qe  farai  nom  sai^.2-/2) 

[acoisselar 


E  BERNART  AMoROS  253 

Se  lus  dels  non  sta  vas  mi 

[cortes 

Pois   qe  sos  hom  mi  tent  ' 

[liges  e  pre 

Sol   del    peebat  qelqe  bem 

[degra  far. 

VI.  Ben   es  maluatz   qis  laissa 


péril]; 


ar 


Alcun  caitiu  saiudar  li  po- 

[gues 

Pois    qen    vas   lei    non   es 

[mespres 

Mas  sol  daitan  de  seruir  e 

[donrar. 

VII.    Ai  ma  donna  si  vas  vos  mi 

! valgues 

Plor   ni    sospir  ni   maltrag 

[qeu  agues 

Ja   per   nul  temps  ioi  non 

[eug  demandai*. 


259* 

PEIRE  MILON 
(=  B.  Gr.  349,  9) 

I .    Si  con  lo  metges  fa  crer 
Al  malaut  qe  crit  e  biai 
Qan  li  ditz  tu  scanparai 
E  de!  morir  sap  per  uer 
5  E  pero  sil  relinquis 
Enanz  qeil  mortz  sia 
Ni  noi  va  tan  can  solia 
Can  siaproisma  de  la  fis. 
II.    Aissi  mi  donz  men  promis 
Em  diz  qe  gauzenz  serai 
Dels  mais  traitz  (je  sufertz 

[ai 
Don  torne  mom  plor  en  ris 


1  c.  en.:  rent.—  *  Voyez  l'édition  de  M.  Appel  d'après  les  manuscrits 
N  I  Ka  dans  la  Rev.  d.  I.  r.  IV  s.  IX,  p.  198 


£56 


LE  CHANSONNIER  DE  BKRNART  AMOROS 


5  Qeu  cuiaua  mom  plazer 

Auers  senz  bauzia 
Ara  veg  qil  no  sufria 
Dels  sien-  bels  oils mi  vezer. 

III.  E  pero  nom  desesper 
Ni  ia  nom  desperarai 
Ni  desesperatz  serai 

Anz  ferm  en  leis  mon  esper 
5  Qe  per  bon  esper  enreqis 
Paubrom  mainta  via 
Per  desesper  non  ac  mia 
Vidas  tracher  paradis. 

IV.  Dieus  per  qe  ai  mon  cor  mis 
Lai  don  ia  non  iauzirai 
l'ois  qe  sa  promessa  estrai 
El  non  son  hoc  contradis 

5  Peros  doblal  meu  dolor 
E  ereis  noit  e  diam 
Mas  som  sembla  gran  folia 
lui  prometre  non  voler. 

V.  E  per  zo  e  nonchaler 
Métrai  el  dezir    qeu  nai 
Fols  qe  aidig.  no  farai 
Qel  nol  vol  cel  qen  poder 

5  Ma  per  qeu  mafortis 
En  sa  compagnie 
Qe  samors  tant  fort  me  lia 
Qe  de  tôt  il  ma  conqis 

VI.  (p.  243)  Eu  soi  cel  qe  nom 

[geqis 
Per  respeig  anz  atendrai 
Ni  ia  nom  en  recreirai 
Anz  serai  de  tôt  aclis 
5  Qel  mont  non  es  nul  auer 
Qirn  des  mauentia 
Per  qieu  mais  en  sa  bailia 
Voill  esser  matin  '  e  ser. 
VII.    Chanzo  dieus  mi  lai  vezer 
Qe  tu  dreita  via 


Anz  midonz  senz  fallia 
Far  lo  mieu  maltrag  saber. 

260* 

EN   PEIRE  MILON 

(=B.  Gr.  349,1) 

I.  Aissi  mauen  con  cel  qi  sei- 

[gniors  dos 

Seru  p[er  tjostemps  ni  nô  ai 

[guizerdos 

E  de  ben  far  en  vas  loi'  sa- 

[fortis 

E    chascun    iorn    son    plus 

[contrarios 

5  Ai  per  qel   fan  ia  comanda 

[razos 

Cel  qi  ben  fai  deu  ben  tro- 

[bar  amis. 

II.  Ben  puesc   esser  duna  ren 

[doloiros 

Car  anc  damor  no  fui  auen- 

[  turcs 

Ni  de   de  doncs 2  e  uas  lor 

[soi  aclis 

Coin    en    seruir    met    plus 

[rnentencios 

5  Eu   mais    los  trop    vas  mi 

[plus  airos 

Ni  ro  3  faz  re  qe  a  lor  abeil- 

[iis. 

III.  Ara  vei  eu  qe  razos  chai  en 

[ios 
E  qe  orgoils  poiarsenz  faillir 

[zos 

Pois  quel  seruir  del  tôt  si 

[relinqis 


'  Appel  :  Voil  e.  mal 

•    Voyez    l'édition  de  M.  Appel  d'après  les  manuscrits  C  1   N  a  dans  la 
lier,  des  l.  r.  IV.,  t  IX,  p.  190ss.  —  a  Appel  :   donas  -    »  l.  :   no 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS     857 


E    qel    befagz.    es    dcl  tôt 

'  nuallios 

5  Qan  hom  merces  dernandon 

[senz  chaizos 

R  perdon  qer  daisso  qe  nom 

faillis. 

IV.   Pois   qe   nom   val    merces 

dreigz  ni  razos 

Seruir  ben  far  esser  fizel  ni 

[bos 

Pauo    mi   valgra    son   fols 

[nienics 

Pois  qaissi  es    qe  non  trop 

[garizos 

5  Plore  BOBpir  etestauc  tene- 

[bros 

Et  enaissi  viurai   tosc  '    e 

[la  fiz. 

V.  Bem  mirauill  qi  anc  no  fon 

[ioios 

E  semprestai.  marritz  et  an- 

[goizos 

Compotviure  qi  damor  non 

i  >  j  i  -s 

Ni  non  atent  ni  bels  digtz  2 

[ni  bels  dos 

5  Qe  si  ma  fag  la  bella  de  cui 

[sos 

Senz  colp  de  fust  ma  mort  e 

[ma  conqis. 

VI.  (p.   244)  Ai    dieus   qe  non 

[pose  esser  amoros 
De  la  bella  qem  fai  star  tant 

irns 

Mas  cant  ieu  veg  3  sa  bocha 

[e  son  cler  vis 

Ab  '*  cor  mi  tocha.  una  tais 

[passios 


5  Corn  la  pogaes  baizar  per 

[fin  amors 

No  sai  qien  die  tan  son  mei 

[enemis. 

Vil.  Chanzo  Lanzac  «peu  no  voil 

|  autre  mis 

E  va  ten  tost  ab  bella   de 

j  cui  sos 

E  <li i-r  li  ben  qeu  moir   de 

lamor  sos 

Si    eu  non    bais    los  siens 

[clars  oils  voltit/. . 

261* 

EN  PEIRK  MILON 

(=  B.  Gr.  349,  5) 

I.    Pos  lunsauzels  envaslautre 

[satura 
De  lais  de  critz  de  voûtas  de 
[chantar 
E  per   amor  per  laire5  ses 
[baudeia 
Eil    tuiG  son  clar  qi  corren 
[per  valeia 
5  Ben    son    doncs    fols    qen 
amor  nom  atur 
E   car    no  soi  ara  gai  ni 7 
[chan  taire 
Pois  caissi  es    eu  chant  e 
[mesbaudei 
E  pois  qeu  vei  reuerdir  pose 
[e  prea. 
II.  Per    vos    amors    chascuns 
[hom  se  meillura 
Car  hom  nés  lares  e  cortes 
[e  8  sap  far 


'c.e?î:trosc  —  -.1  :  digz  —  8  A.  :  eu  ueg —  *  A.:  Al. 
*  Voyez  l'édition  de  M.  Appel  dans  la  Rev.  cl.  I.  r.  IV  s.,  t.  IX,  p.  187 

s.  —  ''Appel:  de  plaire  — ■  A.:  lui,   c.  en  :  riu  —  7  A.  :  e  —  8  A.  :  et 

17 


258 


LE  CHANSONNIER  DE 


Tôt  chauzimen.  e  per  vos  si 

[domneia 

Drutz  en  chambra,   ab    sa 

[domna  priuea 

5  Ben   soi  iratz   car  per  vos 

[non  meillur 

E  car  nonsaupancor1  qe  fos 

[a  faire 

Non  sap  qe  fos  domneiar  ni 

[domnei 

Qe  ma  domna  del  tôt  sen  2 

[es  aléa. 

III.  Qel  iorn  qela  se  mira  non 

[a  cura 

De  negun  hom  qe  la  pogues 

[amar 

Ni  non  auzira  hom  qi  la  veia 

Per  qieu  uolgra  qel  mirador 

[fos  spea 

5  Virar3  vos  puesc  domna  qe 

[dais  non  cur 

Ester  de  vos  de  cui  sui  fiz 

[amaire 

Cant   vostre    cors    auinent 

[gart  e  vei 

Mi  par  qe  deu  sia  en  la  con- 

[trea. 
IV.  Ai  franca  res  non  siatz  tant 

[endura 

Pois  qe  sabez  qeu  no  men 

[puesc  strar 

Cant  penz  de  vos  e  non  saj 

[con  se  seia 

Tôt  mart  del  dol  lo  ventre  e 

[la  corea v 

5  E  ia  non  vol  razon.  qe  lom 

[sendur 

Enuer  celui   qi   no  sen  pot 

[estraire 


BERNART  AMOROS 

De  lei  amar  de  seruir  on  si 

[sei 

Mas    tal    razo    a    uos    nés 

[agréa. 

V.  (p.  245)  De  totz  bos   aibz 

[poia  e  donc  peiura 

Car  il  merees.  a  leis  non  val 

[atrair 

Ar    qe   farai.    pois    merees 

[non  lautreia 

Eu     atendrai     daitant     lai 

[afieia 

5  Qe  meillurar  vol  auanz  qeu 

[peiur 
E  sil  plagues.  qelam  degnes 

[agraire 

Pois  qe  sos  om  liges  a  li 
[mautrei 

Er  bon 5  sorgoil  en  li  fos 
[aualea. 

262* 

EN  PEIRE  M1LON 
(=  B.  Gr.  349,  4) 

I.  Per  pratz  vertz  ni  per  amor 
Non    chant    ni    per    bosc 

[foillutz 
Ni  per  mai  ni  per  pascor 
Ni  perclars  rius  cai  vegutz 
5  Ni  per  chant  dauzel  ni  critz 
Ni  per  vergier  qes  floritz 
Mas  per  las  bonas  del  mon 
Domnas  comenz  machanzon 
Cui  eu  am. 

II.  E  non  sui  ies  recrezutz 
Si  tôt  amor  me  faillitz 
Qeu  nô  am  chant  e  desdutz 


1  .1.  :  ancar  —  2  c.  en:  sou  —  3  c.  en  :  iurar  —  *  A.  :  coreia  —  M.  :  ben. 
*   Voyez   l'édition    de  M.  Appel  dans  la  Iiev.  d.  I.   ?•.  IV  s.,  t.  JX, 
p.  185  ss. 


I 


LE  CHANSOXXIKK  DE   BEHXART  AMoi;oS 


2  59 


E  qe  ioi  non  sei  grazit/. 
5  Gardât/,  seu  agues  razo 
De  far  gauz  e  mession 
Corn  fora  de  gran  valor 
Mas   damor    non    ai    sabor 
Nin  iauzi. 

III.  Tôt  iorn  mi  stauc  sbaitz 
E  soi  en  gran  sospeizo 

Ni  ia  mon  cor  ner  sclairit/. 
Qenaissi  es  la  saizo 
5  Camic  senz  cor  trichador 
Serai  e  fin  amador 
Mas  car  non  soi  conogutz 
E  mes  cant  fatz  en  descutz 
Ni  nom  cal.  ' 

IV.  Bes  non  pot  dar  garizon 
Si  non  cel  qes  bellazor 
Doills  2  de  cor  e  de  faizon 
E  per  zo  soi  en  error 

5  Ben  par  qel  mont  ai  perdutz 
Pois  :i  amor  non    ai  agutz 
Don  totz  temps  soi  eccubitz 
E  de  cel  mal  fui  garitz 
Ni  i  ai  pro. 
V.  Veiatz  e  qe  qe  rieor 

Nom    val.    ont.    en    esser 
[drutz 
Si  fa  e  coin  '  la  genzor 
Gardatz  si  fai5  al  saubutz 
5  Non  per  qe  qe  tant  ar°  ditz 
Non  soi.  non  en  malditz 
Non  pose  als  ar  mi  respon 
Es  lare  oc  e  maluatz.  non 
Ni  vilan. 
VI.  (p.  246)  Saissi   es  non  ses 

[vencutz 
Bu  nô  tro  caial  speritz 
Sofre  lo  dart  e  lescutz 


Eu   oc  qe  tant  ma  bailli!/. 7 
5  Manda  li  qet  fassa  un  don 
Eu  oc  besenz  contenzon 
Qun  ris  te  don  per  amor 
Saizo  l'a/.  ,j:i s  don  meillor 

Nom  es  de9  plus. 

263* 

EN  PEIRE  MILON 
(=  B.  Gr.  349,  8) 

I.  Sieu  anc   damor  sufl'erc  ni 

|  mal  ni  pena 

Dol  ni  trebail  ni  destric  ni 

[rancura 

Danz  ni  mais  traitz.  per  cbalt 

[ni  per  buzerna 

Ni  plors  ni  geins  15  ni  consir 

[ni  sospire 

5  A  rail  grasisc  los  bes   qe  il 

[me  dona 

Lo  gaug  lenanzlo  déport  la- 

[legranza 

E  lo  solatz  del  tôt  el  M  ben- 

[voillenza 

Qim  plai  aitan.  qe  nom  par 

[qe  mal  seia. 

II.  Auiatz  lo  pro  el  be  camors 

[démena 

Encontra  cel.  enuas  cui  il 

[satura 

Qe  chascun  iorn  I2  cui  mal- 

[uastatz  gouerna 

Samor  fatrai  la    vas    lui    al 

[mieu  albire 

5  Lo  rent  cortes  lare  e  pros  e 

[sadona 


1  .t.:  val—  2  Appel  :  d'oils  —  3.1.  :  Pois  c'  —  *  A.  :  con  —  5  A.  :  ùi  — 
6  c.  en  :  ai  —  7 .1.  :  m'abeillit/.  —  8  .1.  :  fa  —  ■'  <:.  en:  N.  des. 

*  Voyez  :  C.  Appel  :  Provenz.  Inedita  aus  Par.  Hss.  p.  242  ss.  —  '"  /.  : 
gems  —  "  /.  :  tota  —  12  /.  :  hoin  —  »3  Appel:  farai;  c.  en  :  satrai 


260  LE  CHANSONNIER  DE 

Vas  los  valenz  e  val  miels 

[sacoindanza 

Ben  mil  ai  tan  e  de  moutz 

[bes  lagenza 

Cel  caisso  fa  mi  pai*  camar 

[se  dcia. 

III.  Fais    blasmador    lamada  ' 

[qarentena 

E  lo  malan  aiaz  qe  vos  fal- 

fzura 

Si  mantenetz  per  qe  la  gentz 

[seferna 

Lo  gaug  del  mon   cor   era 

[plor  2  en  ire 

5  Qar  vos  blasmatz  amor  qe 

[tant  es  bona 

Sol   per    aisso   car   no  vos 

[da  samanza 

E  non  es  dreitz  pos  qel  es 

[sa  voillenza 

Qe  non  vos  am  ni  ia  non  vos 

[guerreia. 

IV.  Chascus  fa  ben  qi  sa  lenga 

[refréna 

E    qi    garda   razo    dreitg  e 

[mezura 

Caisso  no  fa  degresser   en 

[cisterna 

E  degra  trair  pen  e  danz  e 

[martire 

5  E   se    eu  fos  segner  de  la 

[corona 

Ai  mal  astruc  qi  obren  sa 

[musanza 

E  paraulas   laissanar  senz 

[temenza 

De  las   gautas    la   lenga  li 

[traireia. 

V.  [p.  247)  La  mercedeudamor 

[soi  en  cadena 


BERNART  AMOROS 

E  serai  o  mentre  ma  vida 

[dura 

Non  laisarai  si  tolz  rni  en- 

[ferna 

Qeu  non  sia  sos  om  e  sons 

[seruire 

5  E    dei    o  far  quar  il  de  tal 

[persona 

Vol  qeu  aia  samor  e  sa  coin- 

[danza 

La  genzer  es  de 3  lo  mont 

[senz  tenza 

Grâces  li  ren.  qelal4  vol  e 

[lautreia. 

264* 

EN  PEIRE   MILO 
(=  B.  Gr.  349,  2) 

1.  A    vos  merces   voil  retrair 

[mon  afaire 

De  mal  damor  e  de  sa  for- 

[faitura 

Per  merceus  prec  entendetz 

[ma  rancura 

Pois  qen  amor  me  mis  sui 

[fînz  amaire 

5  Con    vos    mercei    merceian 

[humilmen 

Lafan  damor  el  dan  tôt  eis- 

[samen 

Ni  per  merces  il  nom  vol 

[dar  guirenza 

Anz  vol    amors   qeu  moira 

[ab  suffrenza. 

II.  Per  vos  merces  qi  es  tant 

[debonaire 

Nom  vole  amors  far  ten  5  qe 

[fos  mezura 


1  /.:  la  mala  —  *  l.  :  torn  en  p.  e  —  3  L:  de  lot  —  *  A.  :  qc  tal. 
1  Voyez  :    G.  Appel  Prov.  Ined.  p.  239  ss.  —  3  c.  en  :  ren 


LE  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS  2G1 

Sa  vos  plagues  merces  [ar  V.   Auc  ab  mos  oils  non  vi  611a 

ben  dreitura  [de  maire  ' 

Blasmatz  amor  e  si  es  con-  Qi   de  son  cor  volgues  star 

traire  [tant  endura 

5  Senz   vos    merces]    non  es  Sil  oil  gardon  vas  Ici  fi/  e 

[nuls  hom  viuen  [mezina- 

Carnor  de  dieu  pose  auer  ni  Mal  mieu  cor  fiz  aleis  degra 

[de  gen  [atraire 

Ara  mostratz  merces  vostra  5  Car  per  los  oils  se  mes  en 

[vailleDza  [aital  ren 

Encontramor   non    laissetz  Qi  en  son  cor  non  a  merces 

[per  temenza.  [nien 

III.  E  si  merces  no  fos  al  mieu  Nil    seu  bel  oil  non    curan 

[veiaire  [de  tenza 

Lamor  de  dieu  non  cre  qa-  p^i  non  curan  del  meu  cors 

[gués  cura  [per  crezenza. 

De  negun  hom  qe  ves  mer-  yi.  [p.  248)  Els  sieus  bels  oils 

[ces  sendura  [qin  fan  dun  don  donaire 

Pero  amors  aiaz  talan  da-  Aguessen    cor  de   far  ben 

[traire  [senz  falsura 

5  A  vos  merces  e  fares  chau-  us  garderan  meus  oils  et  er 

[zimen  [dreitura 

Car    senes    leis   amors    es  q&\  prim  esgart  tôt  el  meu 

[dengan  pieu  [corn  esclaire 3 

Aiatz  merces  merces  a  soui-  5  e  daitan  prec  il  sieus  clars 

nenza  [oilz  rien 

E    vos    amors    voillatz    qe  Qe  aian  C0I-  de  far  mun  ris 

[merceus  venza.  [plasen 

I V.  [ E  sil  mei  oil  vezen  tal  cap- 

[tenenza 

]  Ren    sai    mos    cors  iauzira 

E  pois  mei  oill   gardar  al  [senz  fallenza. 

[sieu  repaire  y\\    p>ena    domna    aias    damor 

5  Ben   degrals  oils  voler  mal  [talen 

[senz  conten  e  venza  vos  merces  per  tal 

Qi  al  mieu  «or  fan  dolor  tan  [couen 

[souen  Car  mei   oil   fan  voluntiers 

Qeu   sai  camors    dais   oils  [mantenenza 

[primers  comenza  Enmoncoraitotamaconois- 

Per  qe  mos   cors  en  fa  la  Tsenza. 

[penedenza. 

1  Appel  :  da  maire  (/.  :  de  maire)  —  2  A.  :  mesura  —  s  A.  :  cor  m'e. 


26  2     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOHOS 

265 

[  RAIMON  JORDAN  VESCOMS 


DE  SAINT  ANTONI  ] 
{=  B.  Gr.  404, 11) 

I.  Vas  vos  soplei  domna  pri- 

[meiramen 

Per  cui  eu  chant  e  cornerez 

[ma  chanzo 

E  sa  uos  platz  entendetz  ma 

[razo 

Qestiers  nous  aus  descubrir 

[mon  talan 

5  Aissi  maue  qan  vei  vostras 

[faizos 

La  lengamfaill.el  cornai  te- 

[neros  * 

Car   qi  non   tem  non  ama 

[coralmen 

Per  quieu  ting  car  lo  vostre 

[segnoratge. 

II .  Bella  domna  merce  trau  per 

[guiren 

E  pos  merces  nom  vol  dar 

[garizon 

Per  merceus  prec  qe  mer- 

[ces  venzal  no 

Ni  ja  daizo  nom  veires  re- 

[crezen 

5  Anz  clamarai  tant  merce  a 

[rescos 

Tro   qe  merces   tenga  mos 

[bratz  ambdos 

Entrels  vostres  e  fora  chau- 

[zimen 

Car  nô  er  menz   de   certa.ii 

[homenatge. 

III.  E    seu    follei    ben    lo    fatz 

[escien 


Sabetz   perqe  car  mi  platz 

[emsapbo 

E  dirai  vos  per  cal  enten- 

[cion 

Ben  esperan.ven  hom  asal- 

[uamen 

5  E  sim  faitz  ben  molt  en  serai 

[ioios 

E  sim  faitz  mal  sufrirail  per 

[auzos 

Grazirai  lo  ben  el  mal  eis- 

[samen 

Aissi   farai   lo    conort   del 

Tsaluatge. 

IV.  Eu  vos  ai  dat  per  fe  e  leial- 

[ment 

Lo  cor  el  cors  don  vos  faitz 

[tenezo 

E  platz  mi  molt  quieu  sai 

[qe  vostrom  so 

Us  bos  espers  -  de  vos  iau- 

[zen 

5  Qem  bos  segnor  non  perd  om 

[guizardos 

Qui  ben  lo  serf  qeu  vi  main- 

[tas  sazos 

Paubrenrequir  per  bon  en- 

[tendimen 

Per  qieu  en  voil  ben  afortir 

[mon  coratge. 

V.  Eu    conoisc    ben    qieu    faz 

[gran  ardimen 

Qant  ieu  damar  vos  prec  e 

[nous  sap  bo 

E  non  e  puesc  toler  ma  sos- 

[peizon 

Anz  mo  sai  ben  qi  en  3  tre- 

[baill  per  men  ; 

5  Tant  es  valentz  vostre  cors 

[orgoillos 


l.  :  temoros  —  2  /.  :  e.  mi  ten  —  3  /.  :  qen  —  4  /.  :  nien 


LE  CHANSONNIER   DE  BERNART  AMOROS  ?63 

266 


E  tant  puiatz.  som  penz  de 

[sobrels  bos 

Qieu  men  cossir.  desmai  e 

[despauen 

Tan  sui  cochos  qieu  mo  tenc 

[afolatge. 

VI.   {p.  249)  Tant  ai  assis  mou 

[dezir  finainen 

En  vostr  amor  don  ia  dieus 

[ben  nom  do 

Sieu   mais   nous  am  seruir 

[tôt  em  perdo 

Qe  de  uuill  autr  auer.  mon 

[mandamew 

5  Ab  tan  grau  gaug  satrai  mos 

[cors  vas  vos 

Qieu  pos  vos  vi  non  fui  dais 

[poderos 

Tan   en  sui  enueios  l   del 

[vostre  cors  gen 

Qaqi  mezeus  remanc  el  vos- 

[tre  estatge 

Vil.   Garin  ben  sai  chauzir.  fe  qe 

[deg  vos 

En  la  genzor.  e  tu  vail  dire  - 

[chanzos 

A   la    meillor.  et  a   la  plus 

[valen 

Quautra  del  mon  non  am  de 

[bon  coratge. 

VIII.  Cbanzoneta  [uai  ten  tost]  a 

[ma  domna3 
E    portail    mon    rnessatge. 

IX.  E  digasiqedepaubremanen 

Serai  totz  temps  el  sieu  rie 
[segnioratge. 


LO  UESCOMS  DE  SAINT 
ANTONI  RAIMON  JORDAN 

(  =  R.  Gr.  404,  2) 

I.   Ben  es    cambiatz  ara  mos 

[pessamenz 

E  la  turs  fraigz  don  mi  cuiei 

[tener 

Qe  non  ânes  mai  ma  dôna 

[vezer 

Qabaital  gieing.  mi  cuidaua 

[défendre 

5  Mas    ara  sai  si    merces  no 

[lan  uentz 

Qa  mon  dezir  dei  demandai' 

[ma  mort 

Qaissi  men  prez  qan  de  lui 

[mi  parti 

Qan  men  auenc  per  sa  terra 

[passar 

Qancnomsaubi  de  leis  vezer 

[gardar. 

II .   Mas  re  no  sai  si  ses  enchan- 

[tamenz 

Qe  qan  la  uei  de  mi  non  ai 

[poder 

Qamors  lam  fai  tant  blan- 

[dir.  e  tem  5 

Qe  nés  mos  precs  nô  lauze 

[far  entendre 

5  Mas    ill    es    tant    aprez    e 

[conoissenz 

Qe  sap  triar  damor  los  bes 

[els  tortz 

E  de  me  sap  qe  de  mas  6 

[anc  la  vi 

Nom    venc  en    cor   dautra 

[douma  preiar 


1  l.  :  T.   enueios  sui  —  2  /.  :   ,\{v  _  3  /.  :  a   ma    fj    vaj    ten  _  4  /.  :  E 
digas  li.  5  l.  :  temer  — 6  /.  :  pois 


264  LE  CHANSONNIER  DE 

Ni  nuls  '  mal  traigz  no  Ion  2 
[fes  oblidar. 

III.  Tantas  penas   nai  suffertas 

[cozentz 

Per    que    douz   gaugz   men 

[deuri  eschazer 

Pero  ben  sai  no  lam  chai 

[plus  temer 

Qe  se  merces  ia  deu  en  leis 

[descëdre 

5  Ben  es  sazose  vaillamchau- 

[zimenz 

Bona  donna  qem  detz  ioi  e 

[déport 

Si  qe  lesglai  si  parton   tuit 

[de  me 

Qar  ben  podetz  las  perdas 

[emendar 

Sein  retenetz  a  vostre  benes- 

[tar. 

IV.  Car  de  las   très  meillors  es 

[plus  plazenz 

Per  qe  nô  part  de  vos  mon 

[bô  esper 

Mas  tantdorgoil  faitz  contra 

[me  parer 

Perqieu  volgra  vostrabeu- 

[tatz  fos  mendre 

5  E  si   voil  far    tant  vostres 

[mandamentz 

Qe  cbascun  iorn   clam  dieu 

[e  prec  m  oit  fort 

Qeus  met  en   cor  quem  fas- 

[satz  bona  fe 

Cab   vos  guerrei  a   cui  no 

[maus  tornar 

Ni  sai  fugir  ni   puesc  pion 

[echauzar. 

V.  (p.  250)  Ara  son  tant  dôna 

[vas  vos  tementz 


BERVAHT  AMOROS 

Qe  ses  bon  guit  nous  auz 

[anar  vezer 

Tal  paor  hai    qem  voillatz 

[dechazer 

Mas  tôt  en  artz  ne  cug  bon 

[segur  pendre 

5  E  san  iohan  deu  men  esser 

[guirentz 

Qe  dun  bel  dig  ai  trag  tam 

[belconort 

Mas  de  près  3  soi  sel  disses 

[enaissi 

Qon    ieu    deman   e    irai    o 

[proar. 

E  vos  digatz  nel  ver  se  deus 


VI.  Ja  de  preiar  no  serai  recre- 

j^zentz 

Tro    qe   merces    vos    fassa 

[dire  ver 

Et  ora  mais   merce  deuetz 

[auer 

Forze  merces  lorgoillos  cor 

[daprendre 

5  Se  nô  ieu  hai  la  mort  entre 

las  dentz 

Sera  merces   nom  adutz    a 

bon  port 

E    samic    ai  de   preiar  nos 

thai 
Car  qi  merce  pot  a  vos  aca- 

[bar 

Nom   pot  estiers    mai    tant 

bon  gazaignar. 

VII.  A  ma  domna  fai  ma  razon 

[entendre 

Chanzoneta  e  pois  vai  e  no 

[len 

A  mon  dezir.  qe  pens  de  mon 
[conort 


'  c.  en  :  mils  —  -  c.  en  :  lan  —  y-  l.  :  doptos. 


LE    CIIANSOXNILU   DE   BKRNAKT   AMOKOS  265 


[ ••• 

Tôt    enaissi     con   sap    qes 

[taing  afar 

5  Els  compagnos  sapchas  mi 

[saludar. 

267 

LO  UBSCOMS 

DE  SAINT  ANTON  I 

(=B.  Gr.  404,6) 

I.    Per   qal   forfag  o   per  qal 

[faillimen 

Qeu  anc  fezes  encontra  vos 

imors 

Mi  destregnes    nim    tenetz 

[enneios 

Per  la  bella  qe  mos  precs 

[non  enten 

5  Truep  demostratz  e  mi  vos- 

[tre  [lod.'i- 

E  qi  veneut  ventz  fai   pauc 

[desfors  ' 

Si   venqesses  leis    qe   nous 

[tem  nius  blan 

A.donc  sai  ieu.   qe  nagratz 

[honor  gran. 

II.   Ben  euiaua  laissai*  al   es- 

[cien 

Que  nô   camies2    mais    de 

j  vostras  lauzors 

Ni  que  iamais  non  reclames 

[per  vos 

Qarmeratz  tan  de  mal  acuil- 

\unen 

5  Mas  aissom    toi   donal   sen 

[el  saber 

Ca    tota    gen    aug  dire  ad 

[effros:i 


Qel  vostre  pretz  vai  lo  meil- 

[lor  sobran 

Qe   mal   parliers    nous    en 

pot  tener  dan. 

III.  E  qar  sabetz  dona  certana- 

[men 

Que  dantramors    nom   ven 

gaugz  ni  paors 

Perpensatz    vos    sius    pot 

[esser  nuls  pros 

Sim    faîtz   mûrir,    ad   aitan 

[grieu  turmen 

5  Ben  conossetz  si  no  co  faitz 

[parer 

Qil  siens  destrui  qe  non  fai 

[grant  effors 

Vostre  sui  ieu  aissi  ses  tôt 

[enian 

Qe  sien  ren  pert  vos  prenetz 

[tôt  lo  dan. 

IV.  [p.  251)  Car  ieu  vos  am  tân 

[desegadamen 

Cun  pietz  mi  faitz  la  peu 

[e  la  dolors 

Adoncs    aflam    e   sui    plus 

[cobeitos 

5  De  vostre  amor  e  nai  mai 

[de  talen 

E  non    temetz    domna    pe- 

[chat  auer 

Donc  fez  anc  mais  nuls  hom 

[tan  grant  effors 

Com    ieu    car  ai    ses   mort 

[sufert  aitan 

Lo  mal  respos   el   orgoillos 

[semblan. 

V.  La  granz  beutatz  qe  Bobrau- 

[tras  perpren 

E  lavostra  flna  fresca  color 


1  /.  :  ventz  nn  f.  erran  e.  —  -  /  :  cantes  —  ■'■  I.  :  effors 


266     LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


El  genz  parlars  eil  bel  oill 

[amoros 

Mi  far  '  estar  domna  e  mar- 

[rimen 

5  Qar  ieu  non  sai  sim  volretz 

[retener 

En  aisso  es   sim  métrai  en 

[effors 

Hoc  si  voz  platz  lot  al  vostre 

[coman 

Mas  tant  o  voill  per  qieu  i 

[vau  doptan. 

VI.  Qan  mi  membra  qe  sol   nai 

[pensamen 

Qe    iam    pogues  venir  tan 

[gras  honors 

Ai  tan  gran  gaug  qen  folei  a 

[sasos 

Qel    gaugz  qeu  nai  mi  ca- 

[mia  tôt  lo  sen 

5  Donc  qen  dizetz.  sen  sabia 

[lo  uer 

Sem  metria  de  gaug  en  grant 

[effors 

Car  ai  tal  gaug  car  2  sol  ne 

[vau  pensan 

Cane  mos  ioios3  non  conqes 

[de  ioi  tan. 

VII.  Garin  qe  faitz  car  non  la- 

[natz  vezer 

Qe  renon  sap  a  qwes  met  eu 

[effors 

Qi  non  la  ue  o    non    lestai 

[deuan 

Tan  auinen  sap  far  son  beu 

[istan. 

VIII.  Chanzos  vai  ten  e  digas  li 

deuan 


Qe  sa  leis  platz  qe  taprenda 
e  chan. 

Finis  coronat  opus. 
Jacopo  Teissierde  Tharascone. 

[268  (ca  127)] 

PEIRE  BREUMON 

(=  B.  Gr.  331,1) 

I.   En  abiil  qan  uei  uerdeiar 
Lo  pratz  uerç  eluerçei"lflo- 

[rir 
E  ui  5  las  aiguas  esclarir 
Et  aug  los  ausels  allegrar  6 
5  Lolors  dun  erba  floiria 
El  dolç  ebant  qe  lausel  cria 
Mi  fan  mon  iois  renouelar. 
11.  En  qel7  temps  soli  eu  pen- 

Fsar 

L 

Corn  sim  8    pogues    damor 
[iausir 
Ab  caualcar  &  ab  guarnir  9 
Ab  gent  seruir  &  ab  donar 
5  Cui  aqes  ,0  mesters  auiia 
Perço  es  amor  seruia" 
E  pol  on  12  hom   meils  cô- 
[quistar. 
III.  Molt    me  sap    gent  lo  cor 

[emblar 

Cam   près    con   ia  dei  sa13 

[uenir 

Greus  er  mais  iorn  qeus  nô 

[sospir 

Per  un  bel  semblan  qe  il  ui 

[far 
5  Qar  ellam  dis  totas  maria  14 


1  /.  :  fan  —  2  /.  :  can  —  3  /.  :  a  mos  iorns. 

L.  S.:  4  uergiers  —  3  uei  —  6  demorar  —  '  qest—  8  Con  eu  —  9  burdir 
-  '°  Qi  aitals  —  »  iauzia  —  >2  pol  tan  —  >3  pris  comnhat  de  sai  — 
'4  marria 


LE  CHANSONNIER  DE 

Qe  fara  la  uostra  amia 
Bels  ami  cosim  pois  '    Iais- 

[sar. 
IV.2  Per  ço  non  dei  desesperar 
Qanqera  mi  <lon  non  remir 
Qar  celui  qim  ta  fei  çequir 
Lam  pot  far  ben  cobrar 
5   E  seu  son  en  sa  bailia 
Era  mais  torn  en  suria 
•li    dcus  no  men  lais  mais 
[torn  a  r. 

V.  Molt  son  de  dieus  merauil- 

[har 
Com  sim  poic  do  mi  don  -  >- 

[frir 

E  degral  molt  a  grat  tenir 

Qar  anc  per  lui  la  pois  lais- 

sar 
5  Qil  sa  ben  seu  la  peidia 
Qe  iamais  iois  dô  auria 
Ni  hom  oolapoira  mendar. 

VI.  Chançon  tu  irai  oltra  mar 
Fe  qem  dei  uam  3  a  mi   à  m 

dir 

Qa  greus  afan  &  a  martir  • 

Me  fai  la  noiç  el  iornesl 

5   A  guigelme    daitam   pria  ° 

Bona  domna  chançon  qel  te 

dia  > 
E  uama  mi  don  conortar. 8 


BEl'.XAKT  AMOROS 


267 


Vil.  (83  r°)  Qe  filippe  de  mon 

re  al 
Me  ton  pros  en  sa  bailia 
El  ani  tan  sa  compagnia 
Qe  sons  lui  no  men   pi 

[tornar. 

Su i cent  aa /'.  î-15r°:  Ledonatz 
proensals (v. éd.  stengel,p.  1-39), 
f.  l.~>  v°-28  v°  :  Las  rasos  de  tro- 
barde  R.  Vidal  (v.  in.,  p.  07-87), 
/'.  29-33  une  seconde  copie  de 
la  notice  préliminaire  de  Bernart 
Amoros  etdesbiographiesde  Gui- 
raut  de  Rorneil,  Arnaut  Daniel, 
Folquet  de  Marsilia,  Peire  Vidal, 
Gaucelm  Faidit,  Peirol,  Gausbert 
de  Poicibot  et  Pons  de  Capdueil 
(r.  ci-devant),  j>uis  /'.  34-38  r° 
les  biographies  ci-dessous  impri- 
mes : 

Gui  duissel  si  fo  de  lemozi. gen- 
tils castellanz  et  el  e  sei  fraire  e 
soscosinsnelias  eron  segnor  duis- 
sel qe  es  uns  ries  castels  e  li  «lui 
sei  fraire  auia  nom  luns  neble  el 
autre  peire.  El  cozis  auia  nom 
elias  e  tuit  quatre  eran  trobador  c 
trobauan  bonas  chanzos.  Gui  tro- 


i  amies  cui  uoles  —  iL.S.non  hà  lu  tre  stanze  contrassegnate  (IV, V, 
VII),   ma    ha  di  più  questa: 

Eu  chant  qi  deuria  plorar 
Dira  damor  qem  l'ai  languir. 
Tan  mi  remembron  li  sospir 
Qem  fai  la  noit  elinni  pena 
5  Mais  damor  caissi  languia 
Qi  nom  laissa  n  ii1  ni  dia 
Qel  iorn  mi  l'an  eent  uelz  tremblar. 

3  Adonc  e  uai  — 4  Qabchantar  mi  dei  esbaudir  —  »  E  anc  non  mai  auz  i 
parlar  —  6  Gom  chantans  qi  plorar  deuria —  7  Pero  nom  desi  onorl  mia 
—  8  Qancar  aurai  loc  de  chaie 


2  68  LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 

baua  bonas  chanzos  en  elias  bo- 
nas teuzos  e  peire  descaataua  tôt 
qan  li  trei  trobauan.  En  gui  si  era 


canorgues  de  bruide  de  monferrat 
e  si  sen tende t  longa  sazos  en  na 
malgarida  dalbusson  qera  mailler 

den  rainait  lo  uesconte  dalbusson 
et  en  la  comtessa  de  monferrat 
don  fes  maintas  bonas  chanzos 
mas  lo  legatz  del  papa  li  fes  iu- 
rar  qe  mais  non  fezes  chanzos  e 
per  lui  laisset  lo  trobar  el  chan- 
tar. 

Gnillems  de  sainl  leidier  si  fo 
us  ries  castellans  de  uelaic  del 
euescat  del  poi  sa«ta  maria  e  fon 
ornatz  hom  bons  caualliers  dar- 
mas  e  lares  donaire  dauer  e  molt 
enseignât  (34  b)  e  molt  cortes  e 
molt  fiz  amaire  e  molt  era  amatz 
e  grazitz  et  entendet  en  la  mar- 
qeza  de  polomiac  qera  serors  del 
dalfin  daluergne  e  de  nasail  de 
claustra  e  moillier  del  vesconte 
de  polomiac.  Enguillems  de  saint 
leidier  si  fazia  ssas  chanzos  délia 
e  lamaua  per  arnor  e  disia  li  ber- 
tran.  e  a  nugo  marescalc  dizia 
altressi  bertran  qe  era  sos  com- 
paign  e  sabia  totzlos  faitz  els  deitz 
den  guillem  e  de  la  marqeza  e 
tuit  trei  se  clamauan  bertrant  lus 
lautre.moltauien  grant  alegranza 
ensemble  tuig  trei  mas  an  Guil- 
lem de  saint  leidier  tornet  en 
grant  tristeza  qeil  diu  (l.  :  dui) 
bertrant  feiren  grant  fellonia  de 
lui. 

En  raimonz  de  mimnalsï  fo  uns 
paubres  caualers  de  carcases  qe 


non  auia  mas    la  qarta  part  del 
castelde  miraual  et  enaqel  castel 
non  estauon  LX  homes   mas  per 
lo  seu  bel  trobar  e  \>er  lo  seu  bel 
dire,   e  qar  el  saup  plus    damor 
e  de  dopnei  e  de  totz  los  faitz  aui- 
nenz  e  de  totz  los  ditz  plaizenz  qe 
corren  (f.  35  r°  )  entremadors   et 
amairitz  si   fo    molt  honoiatz    e 
tengutz  en    car   per  lo    conte  de 
toloza  qel  clamaua  auderartz  et 
el  lui.  el  coms  li  daua  los  cauals 
e  las  armas   els  draps  qe  bezoig 
li  auian  et  era  segner  de  lui  e  de 
son  aberc.  e  segner  del  rei  peire 
daragon  e  del  uesconte  de  beders 
e  den  bertran  de  faissac  et  de  totz 
los  granz  baros  daqwella  encon- 
trada  e  non  era  nulla  granz  ualens 
dôna  en  totz  aqellas  encontradas 
qe  nô  dezires  e  non  se  pênes  qel 
entendes  en  ella.  o  qe  li  uolgues 
ben  per  domestegessa.  car  el  las 
sabia   plus   onrar  e  fai  grazir  qe 
nuls  autron   per   qe  neguna  non 
crezia   estie  prezada  sel  non  fos 
sos  amies  raimonz  de  miraual  e 
maintas  dompnas  entendet  e  fes 
maintas  bonas  chanzos  e  no  crezat 
mais   qel    de  neguna  agues   ben 
en  dreit  damor.  e  totas  lengane- 
rent. 

Raem  haut-,  de  uacheiras  si  fo  fils 
dun  paubre  chaualier  de  proenza 
del  castel  de  uacheiras  (f.  35  v°) 
qauia  nom  peioebs  qwera  tengutz 
per  matz.  en  raembautz  si  se  fes 
ioglars  et  estet  longa  sazo  corn  lo 
princep  daurenga  sil  fes  gran  ben 
e  gran  honcr  el  nauset  el  fez 
conoisser  e  prezar  a  la  bona  gent 
e  uene  sen  a  monferrat  a  mes  lo 


LE  CHANSONNIER  D 

marqcs  bonifaci  et  cstet  en  sa 
cortz  lonc  temps  e  crée  si  de  sen 
e  darnes  e  de  trobar  et  enamora 
sedelaseror  del  marques  que  auia 
nom  madonnabeatris  q«e  moillier 
demie  del  corret.  e  troba  de  leis 
maintas  bonas  chanzoseapellaua 
la  en  sas  chanzos  mos  bels 
caualliera.  e  fo  crezut  q?/ella  li 
uulgties  gran  b<>n  per  amor.  E 
qant  lo  marques  passeten  roma- 
nia  el  lo  mena  ab  se  e  fes  lo 
cauallier  e  det  li  grant  terra  e 
grau  renda  el  resqisme  de  salamc 
e  lai  el  morie. 

Nue  brunec  si  fo  de  la  ciutat  de 
rodes  qes  de  la  segnoria  del 
conte  de  tolosa  e  fo  clergues  et 
emparet  ben  letras  e  de  trobar.  e 
de  sen  natural.  e  fes  se  iuglar  e 
trobet  bonas  (/.  <?6  r°)  canzos  mas 
non  fetz  sos.  e  briget  con  lo  rei 
daragon.  et  con  lo  comte  de 
tolosa.  e  con  lo  comte  de  rodes  lo 
seu  segnhorecon  bernât danduza 
et  con  lo  dalfin  dauerngne.  et 
entendet  en  una  bergera  dorliac 
qe  auia  nom  madruâ  galiana.  mas 
ellanol  uolc  amar  ni  ritenir  ni  far 
con  lui  uegun  plaizer  damor.  e  fetz 
son  drut  lo  comte  de  rodes  e  det 
comniat  an  nue  brunec.  e  nue 
brunec  per  la  dolor  qel  nac  se 
rendet  en  lorde  chartossa  ellai  el 
defina. 

Gallium  de  montanghagnnut  si 
fo  uns  cauallers  de  proenza.  e  fon 
bon  trobador.  e  grant  amador.  e 
entendia  se  e  madona  iauseranda 
del  castel  de  lunel.  e  fes  per  leis 
maintas  bonas  chauzos. 


E  BERNART  AMOROS  269 

So7-<îcln  fo   de   mantouana   dun 
castel  qe  uen  apelat  got  gênais 
catani  [l.  :  gentils  catanis)  e  fon 
auinenz  hom  de  la  persona  e  fo 
bon  trobador.  mas  moltfon  truâz 
efals.de  las  dOnas  edels(/'.  36v{ 
baros  ab  cui  el  estaua.  et  enten- 
dia se  e  ma  donna  cunisa  sor  de 
mesier  eDgelin  e  de  messeralbric 
de  roman  quera  moillier  del  comte 
de  saint  bonifaci  ab  cui  el  estaua 
e  [ter   la  uoloutat  de  messeren- 
gelim  el  emblet  ma    dona  cunisa 
e  mana  la  uia  e   pauc  après  el 
sen  anet  e  no  nedes  (l.  :  en  cene- 
des)   a  un  castel  de  qels  destrus 
de  ser  enric  e  de  ser  en  guillem 
e   den    ual  pertiti    qeran  mot  sei 
unie  et  espozet  una  sa  seror  cela- 
damenz  qe   auia  nom  ota  e  nenc 
(l.  :  venc)  sen  pueis   a    treuis.  e 
qant  aqel  destrais   lo  saup.  si  li 
uolian  ofendre  de  la  persona  e  los 
amies  del  comte  de  saint  bonifaci 
l'Ks.imen    don    el    estaua   per  la 
terra  si  caualcaua    en   diestriers 
ab  grant   compaignha  de  eaual- 
liers. don  per  temoi-s  daqels  qeil 
uolian  ofendre  el  se  partie  et  ana 
en  proenza.  et  estet  ab   lo  comte 
de  proenza   et  amaua  una  donna 
de  proenza  moût  fort  e  lapelaua 
dolz  enemia.  per  cui  el  fez  main- 
tas bonas  chanzos. 

/'h  lanfran  c'igala  si  fon  de 
genoa  gentils  hom  (/.  37  r°)e  sauis 
e  fou  iutges  e  caualiers  mas  uida 
de  iutie  monaua.  et  era  granz 
amadors  et  entendia  se  en  trobar 
e  fon  bon  trobador.  e  fes  maintas 
bonas  chanzos  e  troba  uoluntiers 
de  dieu. 


270 


LE  CHANSONNIER  DE  13ERNART  AMOROS 


En  blachassete  fon  fils  den  bla- 
chatz  qe  fon  lo  meillor  gentils 
hom  de  proenza  el  plus  ornatz 
baros  el  plus  adret tz  el  plus  lares 
el  plus  cortes  el  plus  grazios  et  el 
fon  ben  adrecamen  sos  fils  en 
totz  ualois  et  en  totz  bontatz  .et  en 
totas  larguessa.  e  fon  grant  ama- 
dor  et  entendia  se  en  trobar.  e 
fon  bon  trobador  e  fes  maintas 
bonas  chanzos. 

Perdigox  si  fo  ioglars  e  saup 
trobar  e  uiolar  truep  be  e  fo  del 
uescat  de  iaualda  dun  castel  qe  a 
nom  lesperon.  e  fon  fils  dun  pau- 
bre  home  qe  era  peseaire  et  per 
so  sen  e  per  trobar  poiet  en  gran 
pretz  et  en  grant  honor  qel  dalfiz 
daluergne  lo  tenc  per  son  caua- 
lier  el  uesti  el  arma  ab  se  lonc 
temps,  eil  det  terra  e  renda.  e 
tint  [l.  :  tuit)  li  princep  eil  gran 
baron  li  fazian  trop  grant  honor. 
e  de   granz   bonas    auenturas   ae 


uengron  li  las  malas  quel  perdet 
los  amies  e  las  amigas  el  pretz  e 
lonor  e  lauer  et  enaissi  si  rendet 
en  lorde  de  sistel  e  lai  el  moric. 

Arnautz   de  merueil  '  si  fo  del 

uescat  de  peirargos  dun  castel  qe 

auia  nom  meroil  e  fon  clergues 

de  paubra   generacion    e   car  el 

non  podia  uiure  per  la  soasletras 

el  sen  anet  per  lo  mon  e  si  saubia 

ben  trobar.  e  sentendeten  la  cort 

de  la  contessa  de  burlac  qe  era 

fillja  del  pro  conte   raimon  muil- 

lier   del    uesconte    de  bezers  qe 

auia  nom  Tailliafer.  et  aqest  nar- 

nautz  era  auinenz  hom  de  la  per- 

sona.    e    chaDtaua    ben   e    legia 

romanz   e  la    contessa   sil    fazia 

grant  ben  e  grant  honor  et  aquest 

si   senamora    en    ella   e  si    fazia 

chanzos   de  la  contessa    mas  no 

lauzaua  dir  ad   ella  ne   a  negun 

pro  nom  qel  las  agues  f^itas  anz 

dizia  qautres   las   fazian.    mas  si 


lôc  temps.  (/.  37  v°  )  mas  molt  li      auenc  qamors  los  forsa  tant  quel 
camieron  las  bonas  auenturas  e      fes  una    canzon  délia  (f.  38  r°)  la 


1  Cette  biographie  et  les  chansons  d'Arnaut  de  Merueil  manquent 
dans  la  copie  complémentaire  du  chansonnier  de  Bernart  Amoros  conte- 
nue dans  les  trois  cahiers  manuscrits  du  fonds  Campori  de  la  biblio- 
thèque de  Modène,  de  même  que  les  poésies  de  Folquet  de  Roman.  Une 
note  à  la  page  500  en  donne  l'explication  :  «  Arnautz  de  Merueil  si  fo 
del  vescat  et  cetera  sono  copiate  tute  le  sue  al  altro  fibro.  »  Comparez 
une  note  analogue  pour  la  biographie  biû'ée  et  les  chansons  omises  de 
Guillem  de  Montagnhagout  à  la  page  379  :  «  Non  debbe  esser  scancellata 
la  vida  seben  le  canzone  non  son  copiate  per  esser  ne'  libri  hauti  dal 
Gaddi  e  dall' Adriani  (voir:  Die  beiden  altesten  prov.  Gramm.  heraus- 
geg.  v.  E.  Stengel  Marburg  1878,  S.  IX)».  M.  Bertoni  veut  identifier  le 
ms.  du  cavre  Gaddi  au  ms.  de  la  Laurenziana  ou  plutôt  à  c*  (l'ancienne 
copie  de  c  de  ma  propre  bibliothèque}  et  le  ms.  de  Marcello  Adriani 
au  ms.  F*.  Il  faut  pourtant  noter  que  ni  c  ni  c"  ne  contient  aucune  des 
poésies  de  Guillem  de  Montagnhagout,  et  que  le  ms.  F*  n'ajoute  aucune 
variante  au  texte  des  poésies  de  ce  troubadour. 


LE  CHANSONNIER  DE 

cals  comenset  la  franca  c  ipte- 
nenzaqeu  non  pose  oblidar.  lit  en 
:i'l'/csta  chanzo  el  li  descobri  la- 
mor  qellî  auia.  e  la  contessa  non 
lesqiuet  an/,  enlendet  sos  pièces 
e  lo  receup  el  grazi.  e  garai  lo  de 
granz  arnes.efes  li  gran  honore 
det  li  baldeza  de  trobar  délia  e 
uenc  honratz  ho  m  de  cort.  e  si 
fea  maintaa  boni-  canzos  de  la 
conl  □   las  qala  el  mostret 

q«el  nac  granz  bes  e  grans  mais. 

Daissi  enan  sou  escrichas  ten- 
zos  de   donas   e    de  caualiers.  e 

oenza  la  tenzos  den  foie  e  île 
siegnhei-  narnaut  e  den  guillem. 

{f.  38  y)  Aissi  son  escrig  li  nom 
dels   trobadora   qe   son  en  aqest 
libre    e    van    luna    après    lautre 
-i  eon  eill  son  escrig  '. 

1.  En    Girautz    de    bornell  * 
[=n"  1-53 
18.  Bernartz  de  ventadorn  *  = 

54-86. 
26.  Arnautz  daniel  *  =  87-96. 
30.  Folquetz  de  marseillia  *  = 

[97-114. 
35.  Peire  vidais    *     =115-132. 

43.  Peire daluerngne=  133-137. 

44.  Gaucelmsfaiditz*=138-171. 


BERNART  AMOROS  2*i  1 

55.   Peirols*      =  172-196. 
61.  Peire  raimonz  de  tolosa  = 

P.  »7-201 
63.  Jordan  bonel  de  cofemet  = 

202. 
63.  Raembautz  daurenga=203- 

[225. 

69.  Gaubertz     de    poncibot    lo 

[monge  '  =  226-227. 
71 .  Peire  d<;   maenzac  |  manque 

ns  a) 
71.  Ponz  de  capdueil  *  =  228- 

[246. 

70.  La  contessa  de  dia  =  247- 

[248. 
75.   Naimeric  de  Belenoill  =  249- 

[253. 

78.  Bertran  dalamanno  =  254- 

[250 

79.  Peire  milon  =  257-264. 
81.   Raimon  Jordan  vescons   de 

[saint  antoni  =  205-267. 
s2.   Ricas  nouas  =  208. 
83.  Gui  duissel  * 
85.   Peire  dugon 
85.  Guillem  de  sain  leider* 
88.  Guillem  de  cabescaing 

90.  Nue  de  sain  sire 

91.  Nelias  de  barjols 

92.  Nelias  cairel 

93.  (f.39  r»)  Nauneric(Z.  :  Nai- 

[merics)  de  rocchafica 

94.  Marchabrus 


Cette  liste,  déjà  publiée  pur  M .  Bartsch  dans  le  Jahrbuch  f.  mm.  u. 
engl.  Lit.  "KIp.  \'S  ss.  estici  imprimée  d'après  ma  collation  sur  le  ms.  —  M. 

Bertoni  a  publié  dans  le  Giorn.  slor.  di  lett.  ilal.  v.  XXXI  V  p.  121  ss. 
la  liste  correspondante  <b's  trois  manuscrits  de  Modène  (uoy.  la  note  ci- 
dessus  au  n°  50J  et  il  vient  d'en  publier  les  poésies  inédites  dans  les  Stmlj 
di  iilologia  romanza  publicati  da  E.  Monaci  e  C.  de  Lollis  vol.  VIII 
p.  4-21-481. 

1  Un  *  indique  que  la  biographie  du  troubadour  précède  ou  précédait 
ses  chansons. 


27  ïf 

LE  CHANSONNIER  DE 

99. 

Raimonz  do  miraual  ' 

107. 

Raembautz  de  vaqeiras* 

107. 

Nue  de  penna 

108. 

Naimerics  de  cariât  (==  sar- 

[lat) 

109 

Naimerics  de  pueiluilan 

113. 

Nues  brunetz  ' 

114. 

Alegretz 

116. 

SerchamoDZ 

117. 

Sadenetz  (=  Cadenetz) 

119. 

Guillem     de     montaingna- 

[gout*  ' 

120. 

SorffëP 

121. 

Lafranc  cigala* 

126. 

Bonifaei  calvo 

130. 

Pojols 

131. 

Ricautz  de  berbezil 

133. 

En  blachassetz* 

135. 

(ou  133?)  Guillem  de  berga- 

[dan 

136. 

Albertetz  de  cestairon 

139. 

Bertran  del  born 

146. 

Bermon(  =  Reimonz)rascas 

146. 

Bernartz  martis 

147. 

Bertrantz   de   pessatz   (  = 

[pessars) 

148. 

Guillem  de  la  tor 

149. 

Lo  coms  de  peiteus 

149. 

Lo  mongens  de  montaudo 

152. 

Arnautz  de  tintignac 

153. 

Peire  toigiers  (l.  :  rotgieis) 

[de  Mirapeis 

154. 

Girautz  de  calenzon  2 

155. 

Pistoleta 

156. 

Daude  de  pradas 

RERNART  AMOROS 

160.  Perdigos* 

162.  Jaufre  rudel 

162.  Arnautz  de  merueil3 

165.  Giraudon  lo  ros 

166.  Guillem  figueria 

167.  Folquet  de  roman3 
169.  Reforzat  de  très 

169.  (f39  v°)  Luquetz  gatelus 

170.  Peire  cardenal 
170.  Calega  panza 

170.  Namoros  dauluc 

171.  Raumon  de  chastelnou 
171.   Ricautz  bonomel  fiaire  del 

[temple 

171.  Porceual  douria 

172.  Peire  de  castelnou 
172.  Bertran  de  paris 

172.  Duranz   sartres  de  carpen- 

[tras 

173.  Engenim  durre  de  valen- 
173.  Giugo  de  cabanes  [tines 
173.  Bertiant  ArrauL  v 

173.  Lo  priuceps  dels  bauz* 

174.  Lo  fils  den  bertran  del  Bor. 

De  sai  enan    son  escrig  li 
nom  dels  trobadors  que  fei- 
ron  las  tëzos  daqest  libre. 
En  foie  seigner    arnautz  e 
[guillem 
Girautz  e  peirônetz 
Loste  e  guillem 
Naugier  e  guillem 
5  (f.  40  r°)  Cabdenet  e  guio- 

[net 


1  Voyez  la  note  à  la  page  270  —  2  Le  complément  de  Modène  fait  pré- 
céder aux  trois  chansons  de  Gir.  de  Cal.  deux  de  Guillem  Adesmar.  Le 
compilateur  de  notre  liste  aura  sauté  le  nom  de  ce  troubadour.  — 
3  Voyez  la  note  à  la  page  270  —  4  Le  ms.  de  Modône  ayant  perdu  deux 
feuillets  à  cet  endroit,  la  fin  de  la  chanson  de  Guigo  de  Cabanes,  ainsi 
que  les  poésies  de  Bertrand  Arnaut  et  du  Prince  del  Bautz,  y  inscrites, 
n'existent  plus. 


LE  CHANSONNIER   DE   BERXART  AMOROS 


273 


Nelias  c  son  cozin 
Luqetz    gatelus  e    bonifaci 
[caluo 
Jaufres  e  helyas 
Nelias  e  son  cozin  lo  cler- 


igue 


10  Sordel  e  johan 

Nebles  e  guillem  adesinar 
[(l.  :  adesmar) 

Nue    de    la    bachalaria    e 
[gaucelim  faidit 

Na  guillelma  e   lafranc  ci- 

[gala 

Albert  e  naimeric 
15  Rofin  e  doinna  h. 

Raimon  e  lantelm 

Gui  duisel  e  ma  donna  na 
[maria. 

Sauaric  el  prebost 

Gaucelm  faiditz  e  sauarics 
[de  malleo  e  de  nue 
20  Jaufre  e  Rainaut 

Gaucelm  faidit   e  naimeric 

Guillem     de     bergadan    e 
[naumeric 

Albert  e  naimeric 

Dalfis   daluergne   e  peirols 
27>  Gaucelm  faidit  e  raembaut 

Perdigo  e  gaucelm  faidit 

Gaucelm  faidit  e  albert 

Naugo  e  bauzan 

Bauzan  e   migo  (l.  :  nugo) 
30  Nelias  e  son  cozin 

Albert  e  raembaut 

Magnet  (=Magret)  e  guillem 

(f.  40  v°)  Nebles  e  son  segnor 

Segner  nisnartz  e  pel  estort 
35  Pomairol  e  guionet 

Guillem  de  sain  leider  e  una 

"dôna 

Vaquier  e  catalan 

Marchabrus  e  segner  nenric 


Simon  e  lafranc 
40  Guigo  e  joris 

Gui  duisel  e  rainaut 

Bertraa  e  soa  domna 

Chardo  e  nugo 

Folqwet  de  marseilla  e  totz 
[temps 
45  Albertz  e  gamli 

Segner  e  lafranc  e  rubaut 

Jacme  e  lafranc 

Certan  (=  Bertran)  e  nugo 

Lo  comte  e  gai"~?.!m 
50  Peire  de  mont  albert  e  gau- 

[celm 

Albertet  el  monge 

Guillem  e  lafranc 

Guillem  e  guizenet 

Pistoleta  e  blacatz 
55  Bonifaci  el  Scot 

Lo  comte  e  narnaut 

Naesmar  e  miraual 

Peire  guillem  e  sordel 

Gauselm  e  son  cozin 
60  Bernartz  e  nelias 

Simon  e  lafranc 

•Simon  e  lafranc 

(f.  40  v°  c.  2)  Ugon  e  ber- 

[tran 

Peirol  e  gaucelm 
65  Peirols  e  son  segnor 

Guillem  e  narnaut 

Madonna  nisabella  en  elias 
[cair[el] 

Lemozin  e  bernart  del  ven- 
[tadorn 

Guizenet  e  raembautz 
70  Lafranc  e  symon 

En  blacatz  e  peire  vidais 

Bertran  de  gordon  e  peire 
[raimon 

Taurel  {ou  :  Jaurel)  e  falconet 

Simon  e  jacme  grill. 


18 


274 


LE  CHANSONNIER  DE  BERNART  AMOROS 


TABLE  DES  CHANSONS 


DE    LA    PARTIE    DU    CHANSONNIER 
PAR  LES  MSS.   a  Ca  Fa  (VOYEZ  LA 

d'après  la  liste  donnée  par  M.  Karl 
Geschichte  der  provenz 


BERNART   AMOROS    CONSERVEE 
NOTE  A  LA  CHANSON  N°  50) 

Bartsch,  dans  son   Grundriss  zur 
alischen  Litteratur 


(*  désigne  les  chansons  tirées  de  c",  °  celle  tirée  de  f*J 


9.  7 

249 

70.35 

59 

167.  9 

150 

242.12 

58 

242.71 

47 

S 

250 

36 

54 

12 

162 

13 

34 

72 

33 

9 

253 

37 

79 

14 

165 

16 

6 

73 

27 

12 

252 

39 

80 

15 

155 

17 

15 

74 

46 

18 

251 

41 

56 

18 

149 

18 

17 

78 

42 

29.  1 

93 

42 

57 

19 

171 

19 

20 

80 

31 

3 

96* 

43 

70 

20 

146 

20 

18 

81 

45 

4 

90 

44 

74 

22 

159 

24 

23 

243.  2 

167 

8 

89 

45 

179 

27 

164 

25 

37 

273.  1 

202" 

10 

87 

76.  5 

256 

29 

160 

28 

32 

276.  1 

243 

12 

92 

11 

254 

30 

142 

29 

39 

323.  1 

38 

13 

94 

21 

255 

31 

145 

30 

36 

11 

136 

14 

88 

80.28 

121 

32 

1:8 

31 

2 

13 

133 

16 

91 

124.  1 

83 

33 

168 

34 

11 

14 

135 

17 

95* 

2 

84 

34 

161 

36 

12 

16 

137 

30.  6 

119 

7 

82 

35 

170 

39 

13 

18 

134 

46.  1 

248 

132.  8 

199 

37 

158 

40 

52* 

326.  1 

229 

2 

247 

133.  5 

122 

39 

156 

41 

1 

331.  1 

268* 

47.  8 

118 

155.  1 

105* 

40 

141 

42 

9 

349.  1 

260 

70.  1 

66 

3 

101* 

43 

147 

43 

10 

2 

264 

3 

55 

5 

103* 

44" 

153 

45 

28 

4 

262 

4 

68 

6 

111* 

45 

140 

46 

21 

5 

261 

6 

77 

7 

112* 

49 

157 

47 

4 

6 

257 

7 

69 

8 

109* 

51 

139 

48 

8 

7 

258 

10 

65 

9 

9S 

52 

163 

49 

43 

8 

263 

12 

75 

10 

106* 

53 

151 

50 

131* 

9 

259 

13 

78 

11 

114* 

54 

166 

51 

7 

11 

265 

15 

61 

13 

246 

59 

143 

53 

14 

355.  5 

200* 

16 

72 

14 

107* 

61 

148 

54 

29 

10 

197 

18 

63 

16 

100* 

62 

144 

55 

53* 

14 

201* 

19 

81 

17 

97 

173.  6 

227 

58 

3 

16 

198 

21 

76 

18 

102* 

14 

226 

59 

51* 

364.  3 

124 

22 

85 

20 

99 

194.  6 

237 

60 

16 

4 

126* 

25 

73 
67 
62 
117 
64 

21 

113* 

242  1 

50* 

62 

5 

11 

129* 

27 
28 
» 
29 

22 

104* 

2 

49 

63 

40 

16 

120 

23 
27 

108* 
110* 

3 
5 

41 
25 

65 

66 

22 
30 

17 
24 

132* 
130 

30 

86 

167.  2 

169 

6 

26 

68 

19 

25 

121 

31 

71 

4 

154 

7 

44 

69 

24 

31 

128* 

33 

60 

6 

152 

11 

48 

70 

35 

33 

115 

LE  CHANSONNIER  DE  BERNAHT  AMOUOS 


275 


301.30 

lia 

360.13 

194* 

372.  2 

230 

379.  2 

22S 

389.21 

220 

42 

127* 

1  i 

175 

375.  1 

238 

389.  1 

207 

22 

222 

45 

123 

15 

196* 

4 

232 

3 

210 

23 

217 

48 

125* 

16 

184 

7 

233 

4 

225 

28 

221 

50 

131* 

19 

193* 

10 

240 

5 

209 

30 

21 6 

360.  1 

189 

20 

176 

11 

241 

7 

21  »  i 

32 

210 

2 

185 

21 

m 

13 

231 

9 

219 

36 

203 

3 

192* 

22 

172 

14 

236 

12 

224 

37 

215 

5 

187 

26 

195* 

18 

234 

13 

218 

40 

213 

6 

177 

27 

178 

19 

239 

14 

223 

41 

214 

8 

188 

29 

190 

21 

242 

10 

212 

404.  2 

266 

9 

180 

31 

173 

22 

235 

18 

211 

4 

191 

11 

186 

33 

182 

24 

244 

19 

208 

6 

267 

12 

174 

34 

181 

25 

245 

20 

200 

11 

265 

Errata  :  n°  58  =  B.  Gr.  70  (au  lieu  de  79),  22  _  no  167  au  lieu  du 
168  et  168  au  lieu  de  167. 


GURGUS 


Lat.  gurgus  ;  formes  féminines   et  masculines 
en  provençal 

Gurgus  ne  m'était  connu  que  par  Du  Cange,  qui  en  cite 
plusieurs  exemples  tirés  des  chartes  italiennes  (charte  de  957 
en  particulier  dans  Muratori,  Scriptores  Rerum  Italicarum, 
tom.  2,  part.  2,  col.  474  ;  cf.  Revue  des  Langues  Romanes, 
43,  p.  69)  ;  l'italien  gorgo  '  réclamait  un  gurgus  plus  ancien 
et  qui  existe  réellement;  il  a  été  signalé  par  K.  Sittl 
[Zur  Beurteilung  des  sogenannten  Miltel/ateias,  in  Archiv.  lat. 
Lex.  II,  p.  578)  et  se  trouve  dans  un  vocabulaire  de  l'abbaye 
de  Saint-G-all.  Ce  gurgus  est  beaucoup  plus  que  gurges  le 
substratum  de  la  plupart  des  formes  provençales. 

Gurgetea.  donné  en  effet  normalement  gourt  (Alpes,  Mistral), 
gourd  (forézien).  De  gurgum2  sont  dérivés  gourg,  gou  (Auver- 
gne), goure  (Alpes),  gurc  (Bordelais).  Gours  etgous  qui  exis- 
tent dans  le  Var  (Mistral,  s.  u.  gourg)  dérivent  de  gurgus 
considéré  comme  indéclinable  (cf.  corpus  ^>  coz,  u\mu$^>  vins, 
etc.).  Le  p  du  rouergat  gourp  s'explique  sans  doute  par 
l'analogie. 

On  a  ainsi  du  même  radical  une  double  forme,  masc.  goure, 
fém.  gourgo.  Le  même  fait  s'est  produit  en  provençal  pour 
d'autres  mots  :  en  voici  quelques-uns. 

Fructu  a  donné  fru,  frut,  fruc,  suivant  les  dialectes  ;  mais 
il  a  existé  aussi  dans  le  latin  vulgaire  une  forme  fructa  dont 
il  reste  de  nombreux  exemples.  K.  Sittl  [Loc.  cit.  ALL.  II, 
p.  569)  en  cite  huit  dont  les  plus  anciens  se  trouvent  dans 
des  documents  publiés  par  Tardif  (ann.  693-697)  et  dans  les 
Formulae  Salicae  Bignonianae  [illa  décima  de  omnia  fructa. 
Form.  Bign.  236,5  ;  ibid.  230,24).  A  cette  forme  féminine  se 


•  Kôrtingdans  la  2e  édition  du  Lat.  Rom.  Wb.,ne  donne  que  gurges. 
8  Une  déclinaison  gurges,  gurgis  est  également  possible. 


GURGUS  277 

rattachent  l'italien  frutta,  esp.  fruta,  port,  frucla  et  les  nom- 
breuaes  formes  provençales  frucho,  fruecho^frutjo^  fruto,  etc., 
suivant  le3  dialectes.  11  faut  noter  que  la  l'orme  féminine  ;i  le 
sens  collectif  en  provençal  :  ex.  lu  frucho  aboundo  (ap.  Mistral 
=  les  fruits  sont  abondants. 

Voici  une  autre  formation  du  même  genre  :  horlus  a  donné 
en  provençal  ort,  jardin,  petit  jardin.  La  forme  féminine 
horta  a  donné  orto,  orta,  grand  jardin  potager  en  langue- 
docien, campagne  en  général  en  provençal  (esp.  huer/a,  ital. 
orta)  K.  Sittl  (ALL.  II,  569)  cite  de  horta  plusieurs  exemples 
dont  le  plus  ancien  est  de  744  ;  en  voici  un  autre  tiré  dc^ 
Gromatici  Veteres  (347 ,  23)  hortua,([ul  ne  peut  être  séparé  de 
hurla. 

Notons  encore  que  si  ramus  donne  prov.  ram,  ran,  rama 
des  Gloses  de  Richenau  donne  prov.  rama,  ramo  (amas  de 
branches,  sens  collectif  comme  pour  frucho). 

Le  gaulois  beccu  est  représenté  en  provençal  par  le  mas- 
culin bec  et  par  le  féminin  bèco  dont  le  sens  est  plus  large 
(croc,  crampon,  Mistral,  Trésor,  s.  u  ). 

Le  représentant  provençal  de  discuta  -  pour  discus  —  est 
desc  ;  mais  on  trouve  aussi  la  forme  féminine  desco  <^  disca. 
(A.  Horning,  Groeber's  Zeitschrift  1901.  p.  740).  M.  Korning 
cite  au  même  endroit  le  prov.  empes  venant  de  impensum  ; 
la  forme  empeso,  venant  de  impensa,  est  signalée  en  Dauphiné 
par  Mistral. 

M.  P.  Geyer,  étudiant  les  traces  du  latin  gaulois  dans 
Marcellus  Empiricus  (ALL.  VIII,  475,  sqq  ),  note  le  mot  sablo 
de  sabulum;sabulum  a  donné  la  forme  masculine  sable,  mais 
le  féminin  saplo,  saulo  (cf.  Mistral,  s.  u.)  et  l'italien  sabbia 
renvoient  à  sabula. 

Culcilra  donne  prov.  consséro;  le  masculin  cousser,  cosser 
est  attesté  en  ancien  provençal  et  remonte  sans  doute  à 
*  culcitrum. 

Un  traitement  à  peu  près  semblable  nous  est  attesté  par 
mietch,  miotch  <^  modium  et  tremèjo,  fr.  trémie  venant  de  tri- 
modia  '. 

1  Le  dauphinois  dia  que  Mistral  traduit  par  coup  de  doigt,  empreinte 
du  doi'/t.  s.  u.  detado  ne  représenterait-il  pas  la  même  chose  que  ital. 
dita  venant  de  'digita  ? 


278  BIBLIOGRAPHIE 

Ce  changement  de  genre  se  trouve  dans  les  noms  d'ani- 
maux, mais  là  il  s'explique  mieux.  M.  P.  Geyer  [toc.  laud.), 
note  que  le  masc.  lacertus  (deux  fois  dans  Marcellus  Empi- 
ricus)  vit  en  français,  en  espagnol,  en  portugais  ;  la  forme 
féminine  lacerto  (plusieurs  fois  dans  Marcellus  Empiricus)  vit, 
dit-il,  en  italien.  On  peut  ajouter  aussi  :  en  provençal  :  cf. 
Mistral,  s.  u.  leserto,  forme  plus  rare  que  lesert.  De  même 
pour  merulus,  cité  aussi  par  M.  P.  Geyer  :  en  espagnol  et 
en  italien  le  masculin  et  le  féminin  alternent  :  il  en  est  de 
même  en  provençal  où  l'on  a  généralement  merle  (masc.)  mais 
aussi  merlo. 

La  formation  des  féminins  d'après  des  pluriels  neutres  est 
un  fait  bien  connu  :  pratum  donne  fr.  pré,  prov.  prat  ;  mais 
le  fr.  prée  et  le  provençal  prado  postulent  un  féminin  latin 
prata.  On  le  trouve  en  effet  dans  les  Formulae  Andecanenses 
(5,  6)  et  dans  les  Formulae  Augienses  (pratas  segaturias  358,  3). 

En  revanche,  on  ne  trouve  pas  de  forme  féminine  proven- 
çale formée  sur  lectum  ;  seul  l'italien  letta  renvoie  à  *  lecta 
(K.  Sittl,  ALL.   II.   570).  Mistral   note   simplement  le  genre 

féminin  donné  à  liée  par  les  Niçards. 

J.  Anglade. 


BIBLIOGRAPHIE 


Diderot.  —  Paradoxe  sur  le  Comédien,  édition  critique  avec  introduction, 
notes,  fac-similé,  par  Ernest  Dupuy.  Pari*,  Société  française  d'impri- 
merie et  de  librairie,  1902,  gr.  8°. 

Le  15  octobre  et  le  1er  novembre  1770,  Grimm  insérait  dans  sa 
Correspondance  une  dissertation  qui  portait  ce  titre  :  Observations  de 
M.  Diderot  sur  une  brochure  intitulée  Garrick  ou  les  Acteurs  anglais. 
Soixante  ans  plus  tard,  en  1830,  le  libraire  Sautelet  publiait  le  Para- 
doxe sur  le  Comédien,  qui  n'était  que  la  dissertation  de  1770  remaniée 
et  allongée  du  double  environ.  Par  qui  ce  remaniement  avait-il  été 
t'ait?  A  cette  question  tous  les  éditeurs  jusqu'ici  n'avaient  fait  qu'une 
réponse  :  c'était  Diderot  lui-même  qui,  à  une  date  difficile  à  déterminer 
ou,  pour  mieux  dire,  à  plusieurs  dates  successives,  avait  repris,  inter- 
polé, transformé  son  opuscule. 


BIBLIOGRAPHIE  279 

Cette  solution,  en  apparence  si  simple,  du  problème  aurait  cepen- 
dant pu  soulever  quelques  objections. 

Diderot  se  répétait  volontiers  :  niais  il  y  a  vraiment  dans  !<•  Para' 
doxe  un  bien  grand  nombre  de  passages  qui  rappellent  d'autres  ouvi  i 
du  même  auteur!  —  Diderot  pouvait  exprimer  des  idées  qui  lui 
fussent  communes  avec  Grimm,  avec  Meister,  avec  Jean-Jacques,  avec 
d'autres  encore  :  mais  ces  sortes  de  rencontres  sont  i'i  bien  nom- 
breuses, et  elles  vont  parfois  jusqu'à  une  ressemblance  étrange  dans 
l'expression  !  —  Diderot  n'usait  pas  d'une  composition  bien  serrée  ni 
bien  méthodique  :  mais  pourquoi  cette  fois  semblait-il  avoir  pris  à 
tâche  de  gâter  un  écrit  dont  la  composition  était  nette  et  l'intérêt 
soutenu,  en  y  introduisant  après  coup  maintes  citations  ou  anecdotes 
peu  utiles,  en  y  multipliant  les  réflexions  froides  et  peu  en  situation, 
en  en  rompant  sans  cesse  le  développement  et  la  suite  des  idées?  — 
Diderot  n'écrivait  pas  toujours  d'un  style  très  châtié  :  mais  par  quelle 
malechance  se  trouvait-il  avoir  ajouté  dans  une  révision  toutes  sortes 
de  phrases  mal  faites  et  d'impropriétés,  en  même  temps  (chose  éton- 
nante de  sa  part!)  qu'il  expulsait  les  façons  de  parler  familières: 
changer  de  linge,  par  exemple,  ou  fourrer  tout  au  travers  ? 

N'était-ce  pas  à  croire  vraiment  que  les  Observations  avaient  été 
revues  par  un  beaucoup  moins  grand  écrivain,  qui  avait  pris  à  tâche 
de  les  amplifier  au  moyen  d'emprunts,  notamment  d'emprunts  faits 
aux  œuvres  de  Diderot  lui-même  ;  qui,  donc,  avait  eu  ces  œuvres,  pour 
la  plupart  inédites,  à  sa  disposition  ;  qui  s'était  cru  le  droit  de  retou- 
cher ce  que  le  philosophe  avait  écrit  ;  et  qui  professait  des  idées  très 
arrêtées  sur  les  défauts  de  style  de  l'écrivain  ?  N'était-ce  pas  à  croire, 
eu  un  mot,  que  le  Paradoxe,  sous  la  forme  où  nous  le  lisons  aujour- 
d'hui, était  l'œuvre  de  Naigeon,  l'ami  et  le  confident  à  qui  Diderot, 
en  1773,  avait  voulu  que,  le  cas  échéant,  l'ont  confiât  ses  manuscrits  ; 
qui  avait  été  autorisé  par  Diderot  à  arranger,  à  revoir  et  à  publier 
une  partie  de  ses  œuvres  ;  et  qui  n'avait  pas  craint,  en  conséquence, 
d'indiquer  ainsi  comment  il  comprenait  son  rôle  d'éditeur  :  «  Je  com- 
mence par  une  remarque  générale  qui  me  paraît  très  importante,  c'est 
que  je  ne  connais  aucun  manuscrit  de  Diderot  parmi  ceux  qui  ont 
quelque  étendue  qui  puisse  être  imprimé  dans  l'état  où  il  l'a  laissé. 
Je  n'en  excepte  pas  même  les  meilleurs  ouvrages  de  cette  riche  col- 
lection. Ils  ont  tous  besoin  d'un  éditeur  qui  joigne  à  des  connaissances 
profondes  sur  divers  objets  un  esprit  juste,  et  surtout  un  goût  très 
sévère.  Ces  conditions  sont  d'autant  plus  nécessaires  pour  donner 
une  bonne  édition  des  manuscrits  de  Diderot,  qu'il  avait,  en  écrivant 
ses  derniers  ouvrages,  deux  tons  très  disparates  :  un  ton  domestique 
et  familier  qui  est  mauvais,  et  un  ton  réfléchi  qui  est  excellent.  »? 

Si,  une  fois,  on  avait  soupçonné  Naigeon  d'être  pour  quelque  chose 


280  BIBLIOGRAPHIE 

dans  la  rédaction  définitive  de  ce  Paradoxe,  qu'il  n'a  pas  publié,  mais 
dont  il  a  parlé,  on  eût  pu  noter  encore  que,  pour  la  pensée  et  pour 
le  style,  cet  écrit  semble  en  plusieurs  endroits  porter  sa  marque,  et 
l'on  eût  pu  faire  la  preuve  morale  que  c'était  à  Naigeon,  non  à  Diderot, 
qu'il  fallait  s'en  prendre  de  la  plupart  des  défauts  que  l'on  trouve  dans 
le  Paradoxe  sur  le  Comédien. 

Cette  démonstration,  dont  nul  ne  s'était  avisé,  M.  Ernest  Dupuy  l'a 
faite  excellemment  dans  l'édition  que  nous  annonçons.  Mais  il  ne  s'en 
est  pas  tenu  là,  et  un  hasard  heureux,  comme  il  n'en  arrive  guère 
qu'à  ceux  qui  le  méritent,  lui  a  permis  de  fournir  la  preuve  directe  et 
matérielle  des  remaniements  de  Naigeon.  M.  Dupuy,  en  effet,  a  décou- 
vert un  manuscrit  de  Naigeon,  qui  était  dès  l'abord  une  copie,  déjà 
allongée  et  remaniée,  des  Observations  de  Diderot,  et  qui  s'est  couverte 
ensuite  de  corrections  nombreuses  dans  les  interlignes,  ainsi  que  de 
longues  additions  marginales.  Ce  manuscrit,  à  son  tour,  ou  un  autre 
équivalent,  a  été  reproduit,  avec  deux  additions  nouvelles,  par  un 
manuscrit  de  Saint-Pétersbourg,  que  suivent  assez  fidèlement  les  édi- 
tions imprimées  du  Paradoxe.  Ainsi,  pour  mettre  sous  nos  yeux  toutes 
les  pièces  du  procès  et,  peut-on  dire,  pour  nous  permettre  d'assister 
au  travail  même  de  Naigeon,  M  Dupuy  n'avait  qu'à  faire  ce  qu'il  a 
fait  :  imprimer  face  à  face,  sur  deux  colonnes,  les  Observations  et  le 
contenu  du  manuscrit  nouveau,  soigneusement  pourvu  de  ses  variantes; 
accompagner  ces  deux  textes  de  celui  de  Saint  Pétersbourg;  et,  au 
bas  de  ce  dernier,  inscrire  tous  les  rapprochements,  toutes  les  remar- 
ques littéraires  qu'il  comporte. 

De  ce  commentaire  très  savant  et  très  fin,  aussi  bien  que  de  la 
décisive  introduction  de  M.  Dupuy,  je  citerais  volontiers  quelques 
extraits  ;  mais  il  faut  laisser  au  lecteur  le  plaisL'  d'étudier  les  argu- 
ments de  l'éditeur  dans  son  livre.  Ajoutons  seulement  que,  si  le  Para- 
doxe sur  le  Comédien  a  été  l'objet  d'une  collaboration  indiscrète,  il 
peut  en  avoir  été  de  même  d'autres  œuvres  de  Diderot,  publiées  tardi- 
vement, elles  aussi,  et  dont  les  manuscrits  n'ont  jamais  été  produits. 
Que  les  fureteurs etles critiques  entrent  doncavec  ardeur  en  campagne! 
M. Dupuy  vient  de  leur  donner  l'éveil.  Eugène  Rigau 

Piul  Glachant.  —  André  Chénier  critique  et  critiqué.  Paris,  Lemerre, 
1902,  1  vol.  in-18  j.  de  IV-432  p.,  3  fr.  50. 

Quand  il  est  mort,  âgé  seulement  de  trente-deux  ans,  André  Ché- 
nier avait  plusieurs  fois  modifié  son  art  et  ses  théories  littéraires, 
sans  arriver  à  leur  donner  une  forme  définitive.  Ses  œuvres,  depuis 
1819,  ont  été  successivement  accrues  par  les  apports  des  différents 
éditeurs,  sans  parvenir  encore,  au  XXe  siècle,  à  constituer  un  recueil 


BIBLIOGRAPHIE  881 

complet.  Il  était  naturel  que,  pour  ces  deux  motifs,  les  jugements 
multipliassent  Bur  André  Chénier,  disparates  et  contradictoires. 

M.  Paul  Glachant,  à  son  tour,  apporte-t-il  unjugeraenl  nouveau? 

.  puisque  plus  de  précision  qo  :  svanciers,  il  montre  ce 

que  Chénier  a  eu  de  classique,  en  quoi  il  se  rattachai!  îpécialeraenl 

au  XVIIIe  siècle  et  à  l'Encj  |u'à  quel  point  il  a  pu  être 

un  précurseur  pour  les  romantiques  et  Burtoul  pour  les  Parnassiens, 

comment  il  a  rétabli  dans  la  poésie  française  le  lyris ,  et  quel  néo' 

clas8icisme  il  tendait,  vers  la  lin  de  sa  vie,  à  inaugurer.  Mais  l'objet 
propre  de  M.  Glacbant  n'est  pas  de  juger,  nue  fois  de  plus,  Chénier, 
poète  ou  prosateur. 

Son  livre  se  divise  pn  deux  parties. 

La  première  :  André  Chénier  critique,  étudie  les  opinions  littéraires 
d'André  d'après  les  œuvres  antérieurement  connues  (comme  l'épître 
à  Lebrun  et  le  poème  de  l'Invention)  et  surtout  d'après  celles  que 
M.  Abel  Lefranc  a  publiées  depuis  l'ouverture  des  manuscrits  de  la 
Bibliothèque  nationale,  le  10  mai  1899.  Nous  avons  ainsi,  rapidement 
comparées  à  sa  pratique,  les  théories  du  poète  sur  la  poésie  lyrique, 
—  sur  la  poésie  épie  i-didactique,  —  sur  le  théâtre,  —  sur  la  pasto- 
rale, —  sur  l'élégie,  —  sur  la  satire,  —  sur  l'épître,  la  fable,  le  conte, 
le  sonnet.  Des  \  les  de  M.    Glachant  rendent  particulière- 

ment neufs  et  instructifs  les  chapitres  sur  le  théâtre  et  la  satire. 

La  seconde  partie,  sous  le  titre:  André  Chénier  critiqué,  forme  une 
bibliographie  raisonnée,  qui  rendra  de  grands  services,  iïile  se  divise 
en  trois  sections  :  diverses  phases  <•>•  l'histoire  du  texte,  —  livres  et 
articles  de  critique  sur  A.  Chénier  et  si'//  œuvre,  —  ouvrages  d'imagi- 
nation ayant  trait  au  poète,  à  son  histoire  et  à  ses  œuvres. 

Des  polémiques  etdes  appréciations  discordantes  sur  André  Chénier 
quelques  vérités  se  dégagent,  qui  semblent  définitivement  acquises. 
Ainsi  la  seconde  partie  du  livre,  dont  on  aurait  pu  croire  d'abord 
qu'elle  ne  tenait  en  rien  à  la  preiière,  conspire  avec  elle  à  nous 
montrer  combien  la  physi  momie  littéraire  d'André  Chénier  a  été-  chan- 
inte,  quelles  difficultés  on  a  dès  lors  dû  éprouver  a  la  saisir,  et 
sous  quels  traits,  en  définitive,  il  paraît  juste  de  se  la  représenter. 

Eugène  Rigal. 

Firmery  (J.).  —  Notes  critiques  sur  quelques  traductions  allemande 
de  poèmes  français  au  moyen  âge  =  Annales  de  l'Université  de  Lyon, 
nouvelle    série,    II.  Droit,    Lettres.    Fascicule    8,   Paris,    Lyon,    1901 

[152  p.]. 

La   littérature   épique   allemande   du    XIIIe    siècle   •  -t  une    p 
d'imitation  ;  personne  ne  le  te  plus  aujourdui.  Les  Minnesânger 


282  BIBLIOGRAPHIE 

sont  avant  tout  des  traducteurs  ;  mais  il  ne  manque  pas  d'éditeurs 
allemands  de  leurs  œuvres  qui  déclarent  encore  actuellement  qu'en 
traduisant  ils  sont  restés  originaux  et  qui  prétendent  démontrer  que 
leurs  productions  sont  supérieures  aux  modèles  français  par  l'élégance 
de  la  forme,  l'art  de  la  composition,  la  «  courtoisie  »  des  idées,  la 
profondeur  psicologique. 

Le  mode  de  démonstration  est  très  scientifique  en  apparence,  puis- 
qu'il repose  sur  des  statistiques.  L'éditeur  réunit  tous  les  passages 
où  la  traduction  diffère  peu  ou  prou  de  son  original  :  suppressions, 
amplifications,  additions,  changements  ;  puis  il  place  arbitrairement 
chaque  difféience  notée  dans  telle  ou  telle  catégorie  de  sa  statistique, 
de  manière  à  montrer  qu'à  chaque  fois  il  i  a  de  la  part  du  traducteur 
perfectionnement. 

Pour  éprouver  la  valeur  de  cette  démonstration,  M.  Firmery  exa- 
mine chaque  fait  en  particulier,  non  plus  dans  une  statistique,  mais 
à  la  place  qu'il  occupe  dans  le  texte.  Il  commence  par  le  roman 
d'Eneas  et  la  traduction  allemande  qu'en  a  faite  H.  von  Veldeke.  Il 
montre  que  cette  traduction  suit  pas  à  pas  l'original  et  que  toutes 
les  divergences  que  l'on  constate  proviennent  de  ce  qu'elle  est  en 
vers.  Le  stile  de  Veldeke  est  naturellement  lâche  et  traînant,  mais  la 
poursuite  de  la  rime  a  continuellement  obligé  le  traducteur  malabile 
à  cheviller,  à  accumuler  les  épitètes  inutiles,  à  délayer,  amplifier  et 
se  répéter.  Si  bien  que  sa  narration,  loin  d'avoir  une  allure  plus  vive 
que  celle  de  l'original,  a  pour  caractère  dominant  la  prolixité  et  la 
diffusion.  Lorsqu'il  i  a  dans  une  description  ou  dans  un  discours  des 
transpositions,  elles  ne  sont  pas  motivées  par  la  recherche  d'un  arran- 
gement meilleur,  mais  appelées  par  les  besoins  de  la  rime,  et  il  en 
résulte  le  plus  souvent  confusion  et  désordre.  D'idée  originale  et 
étrangère  au  modèle,  il  n'i  en  a  pas,  et  quand  dans  un  endroit  appa- 
raît un  développement  que  l'auteur  français  n'i  présente  pas,  il  est 
simplement  tiré  d'un  autre  passage.  En  somme  c'est  une  traduction 
gauche,  diffuse,  maladroite  et  misérable. 

Dans  la  traduction  du  Chevalier  au  lion  par  Hartmann  von  Aue, 
on  retrouve  les  traits  caractéristiques  de  celle  de  Veldeke,  mais  avec 
la  différence  du  talent  :  Hartmann  a  su  se  pénétrer  de  la  forme  agréable 
et  gracieuse  de  son  modèle  ;  sa  langue  est  d'une  limpide  clarté  et 
d'une  impeccable  élégance;  sa  versification  est  d'un  artiste.  Gottfried 
von  Strassburg  dans  son  Tristan  est  de  l'école  d'Hartmann  von  Aue 
en  ce  qu'il  a  donné  à  sa  traduction  un  caractère  plus  réfléchi  et  plus 
didactique  et  çà  et  là  une  couleur  plus  lirique  ;  mais  plus  encore 
qu'Hartmann,  il  est  élève  des  trouvères  français  et  il  a  su  s'approprier 
leur  manière  jusque  dans  les  moindres  particularités  du  stile  et  de 
la  versification.  Seulement  les  ornements  qu'il  leur  emprunte,  figures, 


BIBLIOGRAPHIE  283 

antitèses,  jeux  de  mots  ou  de  rimes,  il  les  prodigue  avec  plus  d'abon- 
dance que  ses  modèles.  Quant  à  la  courtoisie  et  à  la  décence  dans 
la  peinture  de  l'amour,  e'esl  encore  aux  poètes  français  que  les  onl 
empruntées  Hartmann  von  Aue  el  Gottfricd  von  Strassburg  ;  mais 
cbez  leurs  prédécesseurs,  Veldeke,  Herbort,  Otte,  la  pudeur  des 
descriptions  est  souvent  remplacée  par  nue  insistance  Inutile  et 
grossière  sur  les  détails  les  plus  crus  si  les  plus  obcènes. 

En  somme,  la  prétendue  démonstration  des  édit*  urs  allemands  est 
complètement  retournée  par  M.  Firmery,  et  il  résulte  de  son  étude 
que  les  Uinnesànger  sont  Don  seulement  les  élèves  et  les  traducteurs 
des  poètes  fiançais,  mais  que  leur  originalité  est  nulle  et  leur  supé- 
riorité artistique  introuvable. 

Maurice  Gkammont. 

Oréans  (Dr  K.)  —  Die  Leygues'che  reform  der  franzôsischen  syntaxund 
orthographie  und  ihre  berechtigung,  Bielefeld,  Karlsruhe  1901  [150  p.]. 

Le  26  février  1901,  M.  Leygues,  notre  ministre  de  l'instruction 
publique,  a  pris  un  arrêté  rendant  exécutoires  les  réformes  relatives  à 
la  simplification  de  la  sintaxe  française,  sur  lesquelles  l'accord  venait 
de  s'établir  entre  le  Conseil  supérieur  de  l'instruction  publique  et 
l'Académie  française.  Ces  réformes  portent  sur  des  points  très  divers 
et  l'arrêté  les  énurnère  successivement,  mais  ne  les  justifie  pas. 
Comme  il  s'agit  la  plupart  du  temps  do  règles  pour  lesquelles  l'usage 
a  varié  aux  différentes  époques,  ou  bien  d'un  usage  nouveau  tendant 
substituer  à  l'usage  ancien,  M.  Oréans  a  cru  faire  œuvre  utile 
en  résumant  brièvement  l'istoire  de  chaque  question.  Les  faits  qu'il  a 
rassemblés  étaient  connus  et  épars  un  peu  partout,  mais  nulle  part 
réunis.  11  les  expose  d'un"  façon  très  succinte  et  sans  aucune  préten- 
tion à  une  originalité  que  le  sujet  ne  comportait  pas.  11  s'est  abstenu 
d'ailleurs  généralement  déjuger  la  réforme  ;  mais  l'impression  qui 
se  dégage  de  l'ensemble  est  plutôt  une  approbation. 

Et  en  effet  en  général  il  n'i  a  qu'à  approuver;  mais  nous  devons 
reconnaître  que,  puisqu'il  s'agit  A\me  simplification,  il  est  mauvais 
de  tolérer  plusieurs  usages  cote  à  côte.  Si  la  tolérance  est  recom- 
mandable  en  matière  religieuse,  dans  les  autres  domaines  elle  n'est 
qu'anarchie  et  confusion,  ("eux  qui  peuvent  ordonner  que  la  sintaxe 
et  l'ortografe  soient  enseignées  conformément  à  certains  principes, 
..ut  évidemment  qualité  pour  réglementer  ces  principes.  Ils  ont  le 
droit  de  rendre  des  à    une   simplification  ;    ils  en  ont 

même  le  devoir.  Mais  il  faut  que  les  simplifications  proposées  soient 
réelles  et  reposent  sur  la  logique.  Une  tolérance  ne  peut  être  admise 

•pour  une  période  de  transition;  il  est  nécessaire  d'en  venir  bien 


284  BIBLIOGRAPHIE 

vite  à  des  règles  fixes.  Ainsi,  à  propos  du  mot  gens,  l'arrêté  déclare 
qu'  con  tolérera,  dans  toutes  les  constructions,  l'accord  de  l'adjectif 
au  féminin  avec  le  mot  gens.  Ex.  :  instruits  ou  instruites  par  l'expé- 
rience, les  vieilles  gens  sont  soupçonneux  ou  soupçonneuses  ».  La  con- 
struction avec  tons  les  mots  an  féminin  est  seule  logique  au  point 
de  vue  moderne,  et,  comme  le  dit  M.  Oréans,  elle  constitue  une  sim- 
plification qui  est  fondée  à  la  fois  sur  l'ancien  usage  et  l'ethnologie. 
Mais  pourquoi  ne  pas  écarter  l'autre?  Même  lorsque  le  double  usage 
a  existé  autrefois,  ce  n'est  pas  une  raison  suffisante  pour  le  tolérer 
ou  le  réintroduire  aujourdui  :  «  Avec  une  négation  ,  on  tolérera 
l'emploi  du  mot  aucun  aussi  bien  au  pluriel  qu'au  singulier.  Ex.  :  ne 
faire  aucun  projet  ou  aucuns  projets  ».  C'est  l'usage  ancien  sans  doute, 
mais  nous  sommes  des  modernes.  Pour  nous,  aucun  avec  une  néga- 
tion est  l'équivalent  àe  pasun  :  Il  ne  fait  aucun  projet  vaut  il  ne  fait 
p>as  un  projet  ;  si  l'on  veut  se  rendre  compte  de  ce  qu'il  i  a  de  bar- 
bare à  écrire  aujourdui  aucun  avec  un  s  dans  ce  cas,  on  n'a  qu'à  pren- 
dre un  exemple  comme  :  Il  n'a  fait  aucun  acte  coupable,  mettre  un  s 
à  aucun  et  prononcer  :  il  n'a  fait  aucun  z  actes  coupables. 

«  On  tolérera  l'absence  de  trait  d'union  entre  le  verbe  et  le  pronom 
sujet  placé  après  le  verbe.  Ex.  :  est  il  ?  »  Sans  doute  encore,  comme 
nous  le  dit  M.  Oréans,  c'est  l'usage  ancien,  mais  ce  trait  d'union 
n'est-il  pas  un  bénéfice  pour  notre  ortografe?  Si  on  écrit  est  il,  com- 
ment écrira-t-on  aime-t-il?  Il  ne  faut  pas  oublier  qu'une  ligne  écrite 
n'est  souvent  intelligible  que  grâce  aux  ressources  de  l'ortografe 
usuelle  et  qu'une  écriture  strictement  fonétique  serait  dans  la  pratique 
une  source  continue  d'erreurs.  Si  l'auditeur  comprend  ce  qu'on  lui  dit, 
grâce  à  la  prononciation  avec  les  diverses  intonations  quYlle  com- 
porte et  souvent  grâce  aux  gestes  qui  l'accompagnent,  le  lecteur  a 
besoin  d'être  averti  par  des  signes  particuliers  qui  les  remplacent. 
De  là  l'invention  des  points  d'interrogation  et  d'exclamation,  par 
exemple.  Presque  toutes  les  fois  qu'une  confusion  était  à  craindre, 
l'ortografe  usuelle  a  trouvé  un  moyen  de  l'éviter.  Ainsi  à  l'époque  où 
l'on  ne  disposait  que  d'un  seul  et  même  signe  pour  l'w  et  le  v,  on  a 
imaginé  de  mettre  un  h  devant  la  sillabe  initiale  ui-  pour  empêcher 
qu'on  ne  fût  tenté  de  lire  vi-  et  de  confondre  par  exemple  le  mot  uitre 
[huître)  avec  vitre.  L'ortografe  espagnole  est  citée  partout,  et  avec 
juste  raison,  comme  un  modèle  de  simplicité  ;  elle  a  néanmoins  eu 
recours  au  même  procédé  dans  une  situation  analogue.  Il  s'agit  de  la 
sillabe  initiale  ue-  qu'elle  a  fait  précéder  d'un  h  pour  qu'on  ne  la  prît 
pas  pourve-  et  qu'on  ne  lût  pas  veso  par  exemple  le  mot  hueso  «  os  », 
ce  qui  aurait  amené  une  confusion  avec  beso  «  baiser  ».  Aujourdui  Vu 
et  le  v  sont  suffisamment  distincts  pour  que  Vh  soit  devenu  inutile 
dans  ces  cas  particuliers  ;  mais  en  principe  on  ne  doit  pas  rejeter  un 


BIBLIOGRAPHIE  885 

moyen  diacritique  inventé  par  l'ortografe  usuelle,  tant  qu'il  peut 
rendre  des  services. 

Il  i  a  des  distinctions  subtiles  qui  ont  été  introduites  assez  tard 
dans  notre  langue  par  une  recherche  de  grammairiens  et  dont  les 
titres  de  noblesse  ne  remontent  pas  très  aut  ;  est-ce  une  raison  pour 
les  supprimer?  en  aucune  manière.  Une  nuance  de  plus  dans  une 
langue,  c'est  un  gain,  et  la  beauté  artistique  des  langues  est  due  aux 
affînements  successifs  qu'i  ont  introduits  au  cours  des  siècles  les  écri- 
vain-, les  grammairiens  ou  d'autres  encore.  L'arrêté  •  permet  d'écrire 
indifféremment:  elle  a  l'air  doux  ou  douce  ».  Sans  doute  dans  cet 
exemple  le  sens  est  au  fond  à  peu  près  le  même  dans  les  deux  cas. 
Mais  si  vous  êtes  assis  à  une  table  qui  n'est  pas  d'aplomb,  qui  chan- 
celle, vous  pourrez,  dire  «  cette  table  a  l'air  boiteuse  »,  non  pas 
«  boiteux  ».  L'accord  n'est  don.-  pas  indiffèrent  dans  cette  tournure. 

Voici  qui  est  plus  grave  :  «  Lorque  deux  adjectifs  unis  par  et  se 
rapportent  au  même  substantif  de  manière  à  désigner  en  réalité  deux 
choses  différentes,  on  tolérera  la  suppression  de  l'article  devant  le 
second  adjectif.  Ex.  :  L'histoire  ancienne  et  moderne,  comme  l'histoire 
ancienne  et  la  moderne  ».  M.  Oréans  fait  observer  qu'on  supprimait 
déjà  l'article  quand  les  deux  adjectifs  et  le  substantif  désignent  un 
ensemble,  un  groupe  de  choses,  expriment  une  idée  unique  :  L'anti- 
quité grecque  et  romaine  («  klassisches  »  altertum)  ;  mais  il  devrait 
ajouter  que  ce  n'est  pas  ici  le  même  cas,  puisqu'il  s'agit  dans  la 
règle  de  «  deux  choses  différentes  ».  L'histoire  ancienne  et  moderne 
c'est  Vistoire  d'une  manière  générale;  l'histoire  ancienne  et  la  moderne 
ce  sont  deu.e  istoires  ou  deux  périodes  de  l'istoire  considérées  indi- 
viduellement. De  même  :  Lt  chien  blanc  et  noir  désigne  un  seul  chien, 
le  chien  blanc  et  le  noir  eu  désigne  deux.  Il  n'i  a  plus  ici  affaire 
d'accord  ou  d'ortografe  ;  c'est  au  fond  même  de  la  langue  que  l'on 
touche  et  c'est  une  maladresse  de  s'i  attaquer.  C'est  courir  du  reste 
à  un  échec  certain.  La  tolérance  proposée  ne  simplifie  rien,  elle 
fausse  le  sens.  Dans  ce  cas  on  peut  s'offrir  des  décrets  et  des  lois  à 
volonté  :  ils  resteront  vains. 

Ce  qu'il  fallait  réglementer  c'est  notre  ortografe  ;  il  fallait  la  sim- 
plifier en  la  débarrassant  des  chinoiseries  sans  nombre  dont  elle  est 
érissée.  On  écrit  trafiquant  à  côté  de  fabricant,  holocauste  à  côté  de 
olographe,  rythme  à  côté  de  diphtongue,  embonpoint  avec  un  m  devant 
le  b  et  un  n  devant  le p, phonétique  en  face  de  fantastique,  néphréti- 
que en  face  de  frénésie,  triptyque  en  face  de  glyptique,  apocalypse  eu 
face  de  éclipse.  C'est  là  qu'il  faut  porter  la  ache.  La  tolérance  en 
pareille  matière  est  une  utopie.  Dire  :  «  On  écrira  comme  on  voudra  », 
est  une  ineptie.  Dire  :  «  On  écrira  phonétique  avec  un /comme  fan- 
tastique »,   n'est  point  une  simplification,  mais     une    complication, 


28(3  BIBLIOGRAPHIE 

puisque  c'est  ajouter  un  cas  particulier  à  d'autres  cas  particuliers. 
La  seule  manière  logique  de  formuler  une  règle  en  matière  d'orto- 
grafe,  la  seule  qui  soit  une  simplification  est  la  suivante  :  «  Le  groupe 
ph  sera  remplacé  par  un/ dans  tous  les  mots  où  il  existe  encore  et 
il  disparaîtra  de  l'ortografe  française  ». 

Voilà  le  génie  de  réformes  qui  s'imposent.  Mais  supprimer  les 
nuances  d'une  langue  parce  qu'il  i  a  des  gens  qui  ne  les  sentent  pas, 
c'est  du  démocratisme  mal  compris,  c'est  aussi  chimérique  que  de 
vouloir  égaliser  les  fortunes  ou  les  intelligences. 

Maurice  GraMmont. 


E.  Bourriez.  —  Les  mots  espagnols  comparés  aux  mots  gascons  (époque 
ancienne),  Bordeaux,  librairie  Féret.  in-8°,  23  p.  [Extrait  du  Bulletin 
hispanique,  octobre-décembre  1901]. 

Le  titre  de  l'article  de  M.  Bourriez  est  un  peu  trop  vaste  en  com- 
paraison du  sujet  traité.  M.  Courriez  nous  avertit,  d'ailleurs,  dès  le 
début,  qu'il  recherche  simplement  les  origines  de  quelques  analogies 
lointaines,  anciennes,  entre  le  gascon  ou  le  béarnais  et  l'espagnol. 
M.  Bourciez  —  qui  a  été  récemment  indulgent  pour  quelques-unes 
des  théories  de  M.  Mohl  (cf.  Revue  critique,  1901,  II,  151)  —  appli- 
que à  ses  hypothèses  cette  méthode  rigoureuse  qui,  dans  le  domaine 
scientifique,  sait  arrêter  les  écarts  de  la  «  folle  du  logis  ».  Le  résultat 
en  est  que  les  conclusions  d'une  étude  si  hérissée  de  difficultés  sont, 
dans  l'ensemble,  parfaitement  vraisemblables. 

Les  relations  ont  toujours  été  assez  étroites  entre  l'Aquitaine  et  la 
péninsule  ibérique:  à  l'époque  romaine  plus  qu'en  tout  autre  temps. 
De  là,  dans  le  vocabulaire  des  deux  pays',  un  certain  fonds  com- 
mun. Ces  analogies,  d'ailleurs,  débordent  quelquefois  l'Aquitaine  et 
on  les  retrouve  en  Languedoc.2 

Certains  mots  dérivés  du  latin  classique  sont  peu  probants;  on  peut 
dire  d'eux  qu'ils  paraissent  avoir  été  plus  favorisés  dans  la  région 
ibéro-aquitanique  :  ainsi  sol,  ?iaj)us  ;  lucrare,  latrare,  etc.  Mais  M.  B. 
reconnaît  que  casa  est  commun  à  la  plupart  des  langues  romanes  (le 
fr.  chez  prouve  qu'il  a  été  populaire  même  dans  la  France  du  Nord  ; 
à  rapprocher  du  béarnais  a  case,  l'expression  ad  casam  que  j'ai  relevée 

1  Peut-être  aussi  pourrait-on  examiner  si  leur  syntaxe  n'a  pas  quelque 
trait  commun. 

2  Faut-il  expliquer  celles-ci  par  des  influences  ibériques  ou  sont-elles 
dues  à  des  emprunts  modernes  ?  Il  est,  en  tout  cas,  vraisemblable  que 
les  Ibères  ont  occupé  une  partie  de  la  Narbonnaise  (cf.  Grundriss  de 
Grœber,  I,  299;  A.  Darmesteter,  Rcv.  Celt.,  1901,263). 


BIBLIOGRAPHIE  287 

dans  les  chroniques   de  Frédégaire,   Revue  de  philologie  franco 
1900,  p.  151). 

D'autres  exemples  sont  plus  probants  :  Saltus,  abies,  calcaneum, 
perna,  etc.  Mais  encore  ici  tous  ces  mots  n'appartiennent  pas  exclu- 
sivement à  la  région  ibéro-aquitanique  :  pèmo  est  encore  connu  eu 
narbonnais  avec  le  sens  de  quartier,  portion  d'un  tout;  '  abetem  pour- 
rait bien  vivre  encore  dans  le  narb.  abets,  employé  exclusivement  au 
pluriel  et  servant  à  désigner  les  balles  du  blé  qui  se  séparent  du  graiu 
au  dépiquage  et  qui  ressemblent  aux  enveloppes  du  même  genre  qui 
B'entassenl  au  pied  des  sapins.  Kn  revanche,  les  représentants  de 
larcm  et  de  cuna,  de  faecem  et  de  taxum,  des  mots  abstraits  comme 
m>  (uni  et  fatum  viennent  confirmer  la  thèse  de  M.  Bourciez. 

hlle  se  trouve  confirmée  également  par  nombre  déformes  tirées  du 
latin  vulgaire  :  l'esp.  pâjaro  et  le  béarnais  passaroo  renvoient  tous 
deux  au  passai'  de  YAppendix  Probi;  béarn.  cuûat,  esp.  cunado  ren- 
voient tous  deux  à  'cûgnatus.  A  propos  de  chalare  j'ajouterai  que  le 
narbonnais  dit  calhd  (avec  l  mouillé),  qui  me  paraît  être  emprunté  à 
l'espagnol.  L'hypothèse  de  de(la)xare,  pour  expliquer  les  dérivés  de 
laxare  commençant  par  d  n'est  pas  heureuse;  on  connaît  assez  la  ten- 
dance contraire  qu'ont  eue  les  populations  romanes  à  faire  revivre  le 
simple  dans  les  composés  et  même  à  l'occasion  à  y  replacer  l'accent. 
La  différenciation  de  l  en  d  ne  me  paraît  pas  plus  admissible  qu'à 
M.  Bourciez.  L'analogie  seule  doit  expliquer  ces  formes:  faut-il  voir 
ici  l'influence  des  verbes  dare,  donarel  M.  B.  étudie  ensuite  quelques 
dérivés  communs  aux  régions  ibériques,  'nidale,  '  d  extraie  (mais 
celui  ci  existe  aussi  en  provençal,  cf.  Mistral,  Trésor,  s.  u.  des- 
trau)  et  certains  mots  dont  l'évolution  sémantique  est  identique  dans 
les  mêmes  régions  '  [serra,  portas,  cibata,  dont  M.  B.  reconnaît  que 
l'emploi  ne  se  limitait  pas,  au  nord  des  Pyrénées,  à  la  seule  Aqui- 
taine). Le  béarnais  seubemay  —  à  côté  de  l'espagnol  madreselva 
(chèvrefeuille)  —  est  plus  significatif  et  l'emploi  de  natus  est  tout  à  fait 
probant.  Je  n'en  dirai  pas  autant  de  plicare  de  la  Siluiae  Peregri- 
natio;  il  n'est  pas  sûr  que  ladite  Silvia  soit  une  Aquitaine;  j'incline- 
rais même  à  croire  qu'elle  était  plutôt  provençale,  et  plega  pourrait 
être  aussi  ancien  en  provençal  qu'en  gascon.  2 

M.  Bourciez  a  étudié,  en  dernier  lieu  ,  quelques  mots  d'origine 
indigène  qui  ont  passé  dans  lesparlers  romans  des  régions  ibériques. 

1  Secare  est  aussi  resté  vivant  dans  l'ouest  de  la  langue  d'oïl,  où  Ton 
dit  encore  seier  du  blé  (Maine,  Bretagne). 

2  L'édition  Gamurrini,  malgré  les  mérites  de  ce  premier  éditeur,  est 
bien  faible  en  comparaison  de  l'édition  qu'a  donnée  récemment  Paul 
Geyer  (Corpus  Script,  eccl.  lot  .  t.  XXXIX). 


288  BIBLIOGRAPHIE 

Mais  on  sait  assez  que,  sur  ce  point,  c'est  le  fonds  qui  manque  le 
plus.  Aussi  M.  Bonrciez  n'en  a-t-il  traite  que  quelques-uns  (cusco- 
lium,  'artïga,  arrogium,  esp.  arroyo,  etc.).  Je  ne  sais  pas  quel  chan- 
gement de  sens  le  lang.  conscoulho  en  est  arrivé  à  signifier  constitu- 
tion: a  bouno  conscoulho  =  il  a  bonne  constitution,  santé.  Le  mouloun 
et  le  mouroun  doivent  être  deux  mots  distincts  :  le  premier  ne  peut 
venir  que  de  mola;  cf.  prov.  amoulouna,  mettre  en  bas,  entasser. 
(Cf.  a.  fr.  meulon,  meulonner,  in-Godefroy  ) 

Il  y  a  donc  bien  quelque?  différences  locales  dans  le  latin  des 
Gaules;  mais  on  voit  à  quoi  elles  se  réduisent  pour  une  région  déter- 
minée. Il  se  peut,  sans  doute,  que  quelques  faits  aient  échappé  à 
M.  B.  et  que  des  travaux  ultérieurs  viennent  compléter  la  liste  des 
mots  qu'il  a  dressée;  mais  on  peut  dire,  apriori,  que  les  additions  ne 
seront  guère  nombreuses  ;  et  si  l'on  veut  parler  un  jour  d'un  latin  de 
Provence  ou  d'Aquitaine  opposé  au  latin  de  la  Gaule  du  Nord,  il 
devra  rester  entendu  que  ces  dénominations  ne  se  justifient  que  par 
quelques  différences  dont  le  nombre  ne  sera  jamais  suffisant  pour 
rompre  l'unité  du  latin  qui  est  à  la  base  des  langues  romanes. 

J.  Anglade. 


Erratum.  —  Notre  confrère  et  ami,  M.  Weudelin  Fœrster,  membre 
honoraire  de  la  Soeiété  des  Langues  Romanes,  a  célébré,  le  26  octo- 
bre 1901  ,  le  vingt-cinquième  anniversaire,  non  pas  de  son  entrée 
dans  l'enseignement  supérieur,  comme  nous  l'avons  |dit  par  mégarde 
dans  le  numéro  de  janvier  dernier,  mais  bien  de  son  entrée  en  fonc- 
tions comme  professeur  à  l'Université  de  Bonn  et  successeur  de  Diez. 

La  Rédaction. 


Le  Gérant  responsable:  P.  Hamelin. 


SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 
DU  PAPAGAI 


La  nouvelle  provençale  du  papagai,  l'un  des  rares  spéci- 
mens du  genre,  pose  à  l'historien  un  problème  littéraire  que 
son  récent  éditeur,  M.  Savi-Lopez,ne  paraît  pas  avoir  défini- 
tivement résolu  '.  Si,  en  effet,  on  néglige  les  fragments  qui 
nous  en  sont  conservés  par  trois  autres  manuscrits,  le  chan- 
sonnier J  ^Florence,  Ribl.  naz.,  F.  4776)  et  le  manuscrit  R 
(Paris,  Bibl.  nat.,  fr.  22553)  sont  les  seuls  à  nous  donner 
l'ensemble  du  récit  ;  or,  si  dans  l'un  et  dans  l'autre,  sauf  des 
variantes  de  détail,  la  première  partie  est  identique,  la 
seconde  est,  dans  chacun  d'eux,  à  tel  point  différente,  que  nous 
avons  en  réalité  deux  récits  très  distincts  par  la  matière,  par  le 
ton  et  par  l'esprit.  C'est  donc  une  question  de  savoir  lequel  est 
le  récit  primitif  et,  comme  la  version  de  R  mentionne  expres- 
sément comme  son  auteur  un  Arnaut  de  Carcasses,  dont  du 
reste  l'on  ne  sait  rien,  on  se  demande  si  cet  inconnu  fut  le 
premier  à  mettre  en  vers  notre  nouvelle,  dont  «/  ne  nous 
aurait  conservé  qu'un  remaniement,  ou,  si  tout  son  mérite 
aurait  consisté  à  compliquer,  à  dramatiser  le  récit  plus  simple 
de  J,  en  lui  donnant  un  sens  et  une  portée  que  n'avait  pas  le 
récit  original. 

Les  deux  opinions  avaient  été   successivement  exprimées, 


1  Paolo  Savi-Lopez.  La  Novella  provenzale  del  Papagallo,  in-4°,  82  pages, 
Napoli,  1901  (Extrait  des  Atti  dell  Accademia  di  arckeologia  ,  lettere  e 
belle  arti.  Vol.  XXI). 

xlv.  -  Juillet  1902.  19 


2  90  SUR  LA  NOUVELLE    PROVENÇALE 

celle-ci  par  AI.  StengeP,  celle-là  par  Bartsch2,  pour  qui  au 
contraire  Arnaut  de  Carcasses,  auteur  de  la  version  con- 
servée par  R,  était  bien  le  poète  du  texte  original.  Mais  le 
débat  ne  pouvait  être  tranché  qu'après  que  Ton  aurait  réuni 
et  étudié  tous  les  manuscrits.  Il  appartenait  donc  à  l'éditeur 
du  premier  texte  critique  de  départager  les  partisans  des  deux 
opinions  contraires,  et  c'est  ce  qu'a  fait  M.  Savi-Lopez,  en  se 
rangeant  très  nettement  à  l'avis  de  Bartsch,  qu'il  s'efforce 
d'appuyer  de  nouveaux  arguments.  Pour  lui,  la  version  de 
H  est  bien  le  texte  original  et  par  suite  Arnaut  de  Carcasses 
est  bien  le  véritable  auteur  de  la  nouvelle. 

Il  importe  pour  examiner  la  valeur  de  ce  jugement  de 
résumer  le  contenu  de  chacune  des  deux  versions.  Cette  ana- 
lyse précisera  celle  qu'a  donnée  M.  Savi-Lopez  et  apportera 
sur  un  point  essentiel  une  correction  nécessaire.  Ainsi  que 
nous  l'avons  déjà  dit,  le  début  est  identique  dans  les  deux 
récits.  Un  papagai  vient  au  nom  de  son  maître  Antipha- 
nor  supplier  une  dame  de  lui  accorder  son  amour.  La  dame 
commence  par  s'y  refuser  et  par  alléguer  l'attachement  qu'elle 
a  pour  son  propre  mari.  Mais  le  papagai  se  montre  si  éloquent, 
qu'il  parvient  à  la  convaincre.  Elle  promet  d'aimer  Antipha- 
nor  et  dit  expressément  à  son  messager  : 

V.  108.     D'aitan  lo  podetz  conortar 

Que  pels  vostres  precx  l'amaray 
E  ja  de  luy  no*  m  partiray. 

Avec  ces  vers  s'arrête  la  concordance  des  deux  récits.  Il 
importe  de  le  remarquer  dès  à  présent,  car,  pour  n'en  avoir 
pas  tenu  compte,  M.  Savi-Lopez  a  entièrement  faussé  les 
conclusions  que  l'on  peut  tirer  de  la  comparaison  des  ma- 
nuscrits. 

Dans  «/,  après  cette  promesse  de  la  dame,  le  papagai  revient 
auprès  d'Antiphanor  qui,  sur  le  conseil  de  son  messager, 
s'empresse  d'aller  trouver  la  dame.  Celle-ci  le  fait  asseoir 
auprès  d'elle,  ne  lui  cache  pas  la  bonne  impression  qu'elle  a 

i  Cf.  Rivista'di  filologia  romanza  I,  36  sq. 

2  Cf.  Zeitschrift  fur  roman.  Philologie  II,  498-499. 


DU   «  PAPAGAI»  291 

de  lui  et  lui  avoue  que,  cédant  aux  belles  raisons  du  papagai, 
elle  est  toute  prête  à  l'aimer.  Qu'il  lui  jure  seulement  de 
l'aimer  d'un  cœur  sincère.  Antiphanor  se  déclare  prêt  à  jurer 
tout  ce  que  voudra  la  dame,  quand  celle-ci,  gagnée  sans  doute 
par  l'accent  de  sincérité  d'Antiphanor,  renonce  à  ce  qu'elle 
exigeait  et  s'abandonne  à  la  bonne  foi  de  celuiqu'elle  aime.  Les 
amants  se  livrent  à  leurs  transports  et  leur  joie  ne  prendrait 
pas  de  fin  si  le  pa/>agai  ne  revenait  en  toute  hâte  leur  annon- 
cer l'arrivée  du  mari  et  la  nécessité  pour  eux  de  se  séparer. 
Antiphanor  prend  congé  de  sa  dame  et  lui  fait  promettre 
qu'elle  lui  ménagera  bientôt  l'occasion  de  la  revoir.  Le  récit 
devrait  s'arrêter  là,  mais,  de  façon  assez  étrange,  Antiphanor 
répond  à  cette  promesse  par  de  nouvelles  protestations 
d'amour  qui  ne  remplissent  pas  moins  de  cinquante-six  vers. 
On  dirait  qu'il  tient  à  placer  le  serment  qu'avait  d'abord 
exigé  la  dame  et  dont  elle  l'avait  ensuite  dispensé.  Le  récit 
se  termine  après  qu'Antiphanor  a  donné  son  coeur  à  la  dame 
en  gage  des  promesses  jurées  par  lui  sur  l'Evangile. 

Dans  li,  la  dame  ne  se  contente  pas  de  promettre  au 
papagai  qu'elle  aimera  Antiphanor;  elle  lui  donne,  en  gage 
d'amour,  un  bel  anneau  et  un  cordon  de  fin  or  qu'il  remettra 
à  son  maître.  Elle  le  prie  de  retourner  en  hâte  auprès  de  lui 
et  de  le  ramener  dans  le  jardin  où  elle  les  attend.  Le  papagai 
rejoint  Antiphanor,  lui  rend  compte  de  sa  mission  et  lui 
remet  les  présents  remis  par  la  dame.  Mais  au  lieu  de  venir 
au  rendez-vous  donné,  tous  deux  se  préoccupent  du  moyen 
d'entrer  dans  le  jardin.  Le  papagai,  ingénieux,  a  un  plan  tout 
préparé  :  il  mettra  le  feu  à  la  tour  qui  commande  l'entrée  et, 
grâce  au  désordre,  Antiphanor  pourra  arriver  jusqu'à  sa 
belle.  Celui-ci  renvoie  le  papagai  mettre  au  courant  de  ces 
dispositions  la  dame  qui,  de  son  côté,  s'inquiétait  de  savoir 
comment  Antiphanor  pourrait  la  joindre.  Séduite  et  rassurée 
par  le  plan  du  papagai,  elle  n'a  plus  qu'à  souhaiter  la  prompte 
venue  de  son  amant.  Tout  s'accomplit  comme  ils  l'ont  décidé. 
Avec  du  foc  grezesc,  le  papagai  met  le  feu  au  château  ;  la 
dame  profite  de  l'émotion  générale  pour  faire  entrer  Antipha- 
nor et  la  joie  qu'ils  ont  d'être  ensemble  est  telle  qu'ils  se 
croiraient  en  paradis.  Mais  le  papagai  revient  leur  annoncer 
qu'on  s'est  rendu  maître  du  feu  et  qu'il  leur  faut  se  séparer. 


29  2        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

L'amant  prend  congé  de  sa  dame  et  s'en  va.  Le  récit  se  ter- 
mine par  quelques  vers  où  l'auteur  Arnaut  de  Carcasses  donne 
la  moralité  du  récit,  qui  est  fait  pour  railler  les  maris  jaloux 
et  leur  recommander  de  se  fier  davantage  aux  inclinations  de 
leurs  femmes. 

Ces  deux  versions,  très  nettement  distinctes,  sont,  dans  leur 
fond,  également  acceptables.  Sans  doute,  dans  7,  le  long  ser- 
ment d'Antiphanor,  qui  termine  le  récit,  a  quelque  chose  de 
choquant  et  nous  verrons,  qu'en  effet,  c'est  une  addition 
maladroite  au  texte  primitif.  De  même  on  peut  trouver 
qu'il  ne  contient  pas  la  mention  expresse  de  la  séparation 
des  amants  et  du  départ  d'Antiphanor,  le  tout  pouvant, 
comme  dans  B,  former  la  matière  de  deux  vers1.  Mais  nous 
n'en  avons  pas  moins  un  récit  qui,  dans  sa  simplicité,  donne 
à  l'aventure  qui  fait  le  fond  de  la  première  partie  une  suite 
naturelle  et  vraisemblable.  D'autre  part,  la  version  R,  par  le 
développement  et  l'agrément  des  épisodes  qu'elle  imagine,  est 
plus  variée,  plus  dramatique  et,  si  Ton  veut,  plus  intéressante. 
Mais  de  cela  on  ne  peut  rien  tirer  touchant  l'antériorité  de 
l'un  ou  de  l'autre  récit.  Comme  M.  Savi-Lopez  l'a  reconnu 
lui-même2,  un  texte  plus  simple  peut  provenir  d'une  rédac- 
tion plus  richement  développée  ou,  au  contraire,  celle-ci  peut 
n'être  que  le  développement  d'un  texte  originairement  plus 
sobre  et  moins  chargé  de  matière.  En  fait,  pour  trancher  la 
question  qui  nous  occupe,  nous  n'avons  comme  éléments 
d'information  que  la  comparaison  des  manuscrits  d'une  part, 
et  de  l'autre,  l'étude  attentive  du  contenu  de  ces  deux  récits. 

1  V.  304-305,         Antiphanor  s'en  torna  leu 

Com  filhs  de  rey  ab  son  corrieu. 

2  Cf.  loc.  cit.,  pp.  33  et  34. 


DU    «  PAPAGA1  »  293 


Ce  qui  ressort  le  plus  clairement  de  la  comparaison  des 
manuscrits,  c'est  ce  que  nous  avions  tout  d'abor  I  soupçonn  ■. 
que  la  longue  protestation  d'amour  qui  termine  le  récit  de  ./ 
n'en  faisait  pus  primitivement  partie.  Outre  qu'elle  prolonge 
hors  de  toutes  limites   l'entretien  de*  amants,   alors   que   le 
retour  du  mari  leur  fait  de   la  séparation  une  née  issité, 
humbles  supplications  de  l'amant  et  la  demande  qu'il  fait  à  la 
dame  d'agréer  son  amour  ',  n'ont  pas  do  raison  d'être  si  on  les 
attribue  à  Antiphanor.  Celui-ci  n'est  plus  un  amant  en  expec- 
tative et  il  n'a  pas  à  souhaiter  les  menues  faveurs  de  l'amour, 
puisqu'il  en  a  déjà  goûté   los  réalités2.  Ce  n'est  donc   (dus 
Antiphanor  qui  parle  ,   et  le  long  monologue  de   ce   nouvel 
amant  est  complètement  étranger  à  la  conception  primitive  du 
récit.  Et,  en  effet,  dans  le  manuscrit  D  (Modàne,  Chansonnier 
d'Esté)  les  cinquante-six  vers  qui  forment  cette  addition  sont 
conservés  seuls  comme  un  morceau  à  part,  et  dans  le  manus- 
crit G  (Milan,  Bibl.  Ambros  ,  R.  71)  qui,  à  quelques  feuillets 
d'intervalle,  contient  la  partie  commune  aux  deux  récits,  ce 
même  morceau  vientaprèsla  pièce  d'ArnautdeMaruelh  Domna 
genser  qu'eu  no  sai  dir,  sans,  du  reste,  qu'on  puisse  l'y  ratta- 
cher avec  plus  .le  vraisemblance.  Que  ce  soit  une  pièce  com- 


1  Cl".  Savi-Lopez,  loc.  cit.,  p.  66,  v.  41. 

E  vos,  dompna,  prometetz  me 
Qu'ali  franc  cor  et  ab  liai  fe 
Mi  retengatz  per  servidor, 
E  datz  mi  baizan  vostr'amor, 
E  levatz  pueis  de  ginoillos, 

On  eu  ai  eslat  denan  vos. 

2  Cf.  Savi-Lopez,  loc.  cit.,  p.  60.  v.  279. 

Antiphanor  intr'el  vergier 
Eu  un  lieg  dejotz  un  laurier 
Ab  sa  dona  s'anet  colcar, 
E  lunhs  nom  non  o  sap  contar 

Lo  gaug  que  l'o  entre  lor  dos, 
Cals  pus  fo  de  l'autre  joyos. 
Vejaire  lor  es,  so  m'es  vis, 
C'aquo  sia  lur  paradis. 


201        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

plète  en  elle-même1,  ou  seulement  un  fragment  d'un  récit  plus 
important,  il  est  certain  qu'il  ne  fait  pas,  à  proprement  parler, 
partie  de  la  version  J  et  que  son  addition  est  le  fait  d'un  rema- 
nieur maladroit.  Enfin,  son  intercalation  entre  l'adieu  de  la 
dame  et  les  vers  qui  mentionnaient  le  départ  de  l'amant  a  eu 
pour  conséquence  de  faire  omettre  ces  vers  et  de  laisser  le 
récit  inachevé.  Il  y  a  donc  eu  du  texte  de  </  un  état  antérieur  où 
l'adieu  de  la  dame  était  immédiatement  suivi  de  la  séparation 
des  amants,  et  c'est  cette  rédaction  primitive  qu'il  faut  com- 
parer avec  le  récit  de  R.  C'est  entre  eux  et  eux  seuls  que  se 
pose  la  question  d'antériorité2.  Sur  ce  point  précis  il  semble, 
tout  d'abord,  que  l'état  actuel  des  manuscrits  ne  puisse  guère 
nous  renseigner.  Nous  n'avons  pas  de  manuscrit  donnant  le 
texte  original  de  la  version  J,  et  quant  aux  deux  chansonniers 
J  et  /?,  ils  sont  sensiblement  contemporains  et  de  valeur  à  peu 
près  égale.  Le  chansonnier  d'Esté  (Z))3  est  à  écarter  puisqu'il 
ne  contient  précisément  que  le  domnejaire  et,  de  même,  on  ne 
saurait  faire  état  d'un  manuscrit  de  Florence  (Bibl.  Riccard., 
2756),  qui  n'a  conservé  qu'une  cinquantaine  de  vers  repro- 
duits parle  scribe  au  hasard  de  la  mémoire4.  Reste  le  manus- 


1  C'est  l'opinion  de  Bartsch  qui  la  rangeait  dans  cette  catégorie  des 
saluts  d'amour  auxquels  on  donne  le  nom  de  domnejaires.  Cf.  Grundriss, 
p.  41.  Il  faut  remarquer  qu'elle  ne  rentre  guère  dans  la  définition  donnée 
du  genre  par  M.  Paul  Meyer  dans  son  étude  sur  le  Salut  d'amour  dans 
les  littératures  provençale  et  française  (in  Biblioth.  de  l'Éc.  des  Chartes, 
XXVIII,  p.  124  et  sq.).  Mais  surtout  la  caractéristique  du  salut  d'amour 
la  formule  de  salutation,  fait  complètement  défaut,  et  il  faudrait  au  moins 
admettre  que  nous  n'avons  conservé  de  ce  salut  qu'un  texte  mutilé  dont 
les  premiers  vers  auraient  disparu.  En  tout  cas,  je  ne  vois  rien  qui  jus- 
tifie l'hypothèse  exprimée  dans  la  Romania,  XXXI,  169,  et  d'après  laquelle 
ce  domnejaire  serait  d'origine  italienne. 

2  Une  fois  cela  établi,  il  fallait  résolument  écarter  de  la  discussion  ce 
domnejaire  qui   dénature    le    récit   primitif.    On    pourrait   reprocher  à 
M.  Savi-Lopez  de  ne  pas  l'avoir  assez  fait,  et  quand  il  s'offorce  dec;>: 
tériser  le  récit  de  /  d'avoir  tenu  trop  de  compte  de  cette  addition  étran- 

3  Les  variantes  de  D  ont  été  publiées  par  Max  von  Napolski.  Cf.  Zeits- 
chri/t  fur  roman.  Philologie,  II,  PP-  498-499. 

*  Cf.  Wesselof.swski,  Romania,  VII,  326-329  et  Savi-Lopez,  loc.  cit., 
pp.  34  et  42. 


DU    «  PAPAGAT »  295 

cvitG  '  qui,  lui  aussi,  ne  contient  qu'une  partie  de  la  nouvelle, 
mais  dont  précisément  l'état  incomplet  a  fourni  à  Bartsch  et 
à  M.  Savi-Lopez  un  argument  en  faveur  de  leur  thèse.  Le 
fragment  qu'il  nous  a  conservé  comprend  98  vers,  qui, 
sauf  les  variantes  de  détail,  concordent  avec  le  lexte  de  7,  et 
s'arrête  au  vers  140  du  texte  établi  par  l'éditeur2,  c'est-à-dire 
à  l'endroit  même  où,  d'après  Bartsch  et  M.  Savi-Lopez, 
commencerait  la  divergence  entre  les  deux  récits  de  J  et 
de  li.  La  concordance  de  G  et  de  J  pour  les  vers  conservés 
en  commun  attesterait  leur  dépendance  d'une  même  source; 
d'autre  part,  comme  le  fragment  de  G  s'arrête  au  moment  où 
les  deux  récits  complets  de  H  et  de  «/  commencent  à  différer, 
cette  source  commune  à  G  et  k  J  ne  saurait  être  qu'un  texte  in- 
complet du  récit  primitif.  Le  manuscrit  G  aurait  respecté,  en 
quelque  sorte,  la  mutilation  de  son  modèle  et  l'aurait  repro- 
duit sans  chercher  à  le  compléter,  au  lieu  que  J  voulant  le 
compléter,  mais,  ignorant  la  suite  du  récit  primitif,  aurait 
comblé  la  lacune  en  inventant  de  toutes  pièces  un  dénouement 
convenant  tant  bien  que  mal  à  la  première  partie  de  la  nou- 
velle. Ainsi  serait  prouvé  ce  que  l'on  s'efforçait  d'établir,  à 
savoir  que  R  seul  représentait  le  récit  primitif  et  que  «/  ne 
nous  en  offrait  qu'un  remaniement  postérieur. 


1  Les  variantes  de  G  ont  été  publiées  par  Max  von  Napolski,  loc.  cit., 
pp.  498-499. 

*  Ce  qui  difiérencie  G  de  /  c'est  l'absence  des  vers  25-28  et  surtout  des 
vers  55-76.  Ces  lacunes  ne  se  retrouvant  pas  dans  H,  il  est  certain 
qu'elles  sont  le  l'ait  du  scribe  de  G.  Il  a,  semble-t-il,  voulu  reproduire, 
en  l'abrégeant,  le  récit  qu'il  avait  sous  Les  yeux,  sans  se  douter  qu'en 
supprimant  les  vers  55-7(5  il  faisait  disparaître  du  dialogue  l'un  des  pas- 
sages les  plus  vivement  et  les  plus  agréablement  menés.  Toutefois,  l'on 
peul  'lire  que,  d'une  façon  générale,  le  fragment  G  comprend  tout  l'en- 
ien  du  papagai  et  de  la  dam.'.  Leur  séparation,  le  retour  du  messager 
auprès  d'Antiphanor  et  le  commencement  du  discours  où  il  lui  rend 
compte  de  son  ambassade.  Les  derniers  vers  sont  : 

Pois  li  a  dit  :  «  Senher,  jamays 
Non  er  noiritz  nul  papag 
Qe  faza  tan  per  son  senhor 
Com  yeu  ay  fat  per  vostr'amor.  » 

Ils  correspondent  aux  vers  137-140  du  texte  de  M.  Savi-Lopez. 


296        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

Le  raisonnement  est  ingénieux,  mais  repose  sur  des  données 
inexactes.  Tout  d'abord,  il  n'est  pas  sûr  que  l'on  doive  consi- 
dérer le  fragment  de  G  comme  la  reproduction  d'un  texte 
incomplet.il  se  trouve,  en  effet,  dans  une  partie  du  manuscrit 
où  l'auteur  à  réuni  un  peu  pèle  mêle  et  comme  au  hasard  de 
ses  lectures  des  pièces  d'origine  très  différente  '.Peut  être  ne 
doit-on  pas  attribuer  une  très  grande  autorité  à  un  recueil 
dont  on  ne  se  représente  pas  mieux  la  composition.  De  plus, 
la  présence  dans  cette  même  partie  du  recueil  du  domnejaire, 
si  surtout  l'on  admet  qu'il  n'est  lui-même  qu'un  fragment  d'un 
récit  plus  complet,  pourrait  nous  faire  supposer  que  c'était 
chez  l'auteur  un  parti  pris  de  ne  transcrire  pour  certaines 
œuvres  que  les  fragmsnts  qui  l'intéressaient.  En  tout  cas,  pour 
expliquer  l'état  incomplet  de  G,  l'hypothèse  de  M.  Savi-Lopez 
n'est  pas  la  seule  possible.  Pour  lui  ce  ne  peut  être  que  la 
reproduction  d'une  rédaction  tronquée  et  restée  incomplète. 
Avec   tout  autant  de  vraisemblance  on  pourrait  dire  que  le 
fragment  conservé  par  G  est  un  extrait  fait  consciemment 
d'une  rédaction    complète  de  la  nouvelle.   Il  faudra  voir  si 
dans  le  récit  ainsi  coupé  et  limité  nous  ne  découvrons  pas  des 
caractères  et  une  unité  qui  expliqueraient  chez  l'auteur  du 
manuscrit  le  dessein  arrêté  de  ne  conserver  que  cette  partie 
de  la  nouvelle,  considérée  comme  pouvant  former  un  tout. 
Mais  sur  cette  question  le  témoignage  des  manuscrits  ne  peut 
rien  nous  apprendre,  et  nous  ne  pourrons  avoir  une  opinion 
qu'après  avoir  étudié  le  contenu  des  deux  récits  complets  et 
du  fragment  conservé  par  G. 

Mais  les  rapports  que  l'on  suppose  entre  JG  et  leur  source, 
évidemment  identique  hR  pour  la  partie  couservée  en  commun, 
sont-ils  eux-mêmes  si  solidement  établis?  L'argumentation  de 
Bartsch  et  de  M.  Savi-Lopez  ne  pourrait  être  probante  que  si 
jusqu'au  dernier  vers  de  G,  entre  J  et  G  d'une  part,  sauf  les 
lacunes  particulières  à  G1,  et  de  l'autre  la  version  conservée 
par  R,  la  concordance  était  complète.  Or,  il  n'en  est  pas  ainsi. 


1  Cf.  Griitzmacher,  in  Archiv  fur  das  Studium  der  neueren  Sprachen, 
XXXII,  p.  399  et  Grœber,  Die  Liedersammlungen  der  Troubadours, 
p.  546. 

2  Cf.  Supra,  p.  294. 


OU    «  PAPAGAI  »  297 

Nous  ne  relèverons  pas  certaines  lacunes  de  //  ' ,  ni  non  plus 
telle  ou  telle  interpolation  de  vers  qui,  après  tout,  peuvent 
n'être  que  le  fait  d'un  copiste  négligent.  Mais,  comme  on  Ta 
déjà  vu  -',  dans  la  partie  qui  précède  immédiatement  l'endroit 
où  s'arrête  G,  et  à  partir  duquel  J  et  It  diffèrent  entre  eux 
absolument,  ilya  tout  un  passage  pour  lequel  J  et  G  offrent  un 
texte  très  distinct  de  celui  de  R. Sans  doute,  dans  ses  variantes, 
M.  Savi-Lopez  constate  bien  que  les  vers  111-122  ne  se  trou- 
vent que  dans  H  ;  de  même  pour  les  vers  125-130  il  remarque 
que  H  est  seul  à  offrir  ce  texte  auquel  correspondent  dans  J 
et  clans  G  deux  vers  au  lieu  de  six,  et  totalement  différents. 
Mais  il  a  tort  de  considérer  ces  lacunes  et  ces  remaniements 
comme  intéressant  seulement  la  tradition  du  texte  et  non  pas 
la  composition  de  la  nouvelle.  Si,  en  effet,  pour  le  passage  en 
question  on  compare  le  texte  de  J  G  et  celui  de  R  on  constate 
que  l'on  a  affaire  non  pas  à  deux  textes  diversifiés  par  les 
procédés  ordinaires  des  copistes,  mais  à  deux  rédactions 
foncièrement  différentes  3.  Ce  sont  bien   dans  l'une  et  dans 


1  Ci.  notamment  les  vers  19-2i  du  texte  établi  par  l'éditeur  et  de  même 
les  vi'is  133-136  qui  ne  sont  donnés  que  par  /et  G  et  qui  cependant  doi- 
vent être  rétablis. 

-  C\.  Supra,  p.  290. 

3  Nous  reproduisons,  sauf  les  variantes  secondaires,  le  texte  de  ce 
passage  tel  qu'il  est  dans  R  et  dans  G.I.  Onrcmarqnera  que  la  divergence 
imence  non  pas  comme  le  'lisait  M.  Savi-Lopez,  avec  le  vers  L40, 
mais  dès  le  vers  111.  Pour  ne  pas  troubler  la  concordance  et  rendre  La 
comparaison  plus  aisée,  nous  conservons  la  numérotation  des  vers  de 
l'auteur,  et  nous  laissons  en  blanc,  dans  le  texte  de  R,  les  quatre  vers  qui 
ne  sont  conservés  que  par  J  G. 

Texte  de  /.' 

108.  D'aitan  lo  podetz  conorlar 

Que  pels  vostres  precx  l'amaray 
110.  E  ja  de  luy  no-m  partiray. 

E  portatz  lrm  aquest  anel, 

Qu'el  mon  non  eug  n'a  va  pus  bel 

Ab  sest  cordo  ab  aur  obrat, 

Que-1  prengua  per  ma  amistat 
Il   .  E  gardatz  vos  crue  non  estetz  : 

Kn  sest  verdier  m'atrobaretz.  » 


29$  SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

l'autre  les  mêmes  faits  qui  sont  racontés,  mais  au   lieu  que 
dans  JG,  il  y  a  comme  un  parti  pris  de  brièveté   et  de  sim- 

Ab  tan  lo  papagays  respon  : 

«  Dona,  fay  s'el,  si  Dieus  be-m  don, 

Mot  a  aisi  azaut  presen, 
120.  Et  yeu  portar  l'ay  veramen 

E  car  avetz  tan  bel  esgart 

Saludar  l'ay  de  vostra  part. 

Dona,  sel  Dieus  que  no  mentic 

Vos  do  d'Antiphanor  amie 
125.  Em  lays  vezer  c'abans  d'un  an 

L'ames  de  cor  ses  tôt  enjan.  a 

Ab  tan  parton  lor  parlamen, 

De  layns  car  ac  gran  talen 

De  la  don  'e  d'Antiphanor 
130.   Del  vergier  joyos  ses  demor 

Dreg  a  son  senhor  es  vengutz 

E  comtad  com  s'es  captengutz 


135. 


Pueys  li  a  dig  :  «  Senher,  jamays 
Non  er  noiritz  tais  papagays 
Que  tan  digua  per  son  senhor 
140.  Com  yeu  ai  dig  per  vostr'amor. 

Texte  de  /  G 

108.   D'aitan  lo  podetz  conortar 

Que  pels  vostres  precx  l'amaray, 

110.   E  ja  de  luy  no-m  partiray.  » 

«  Dona,  sel  Dieus  que  no  mentic. 
Vos  do  d'Antiphanor  amie.  » 
Lo  papa  gai  fo  moltjoios, 
Et  issi  del  vergier  cochos. 

115.  Davan  son  senhor  es  vengutz 
E  mostra-lh  com  s'es  captengutz. 
Premeiramen  l'a  comensat 
Lo  gran  pretz  e  la  gran  beutat 
De  la  domna,  si  m'ajut  fes, 

120.  E  d'aisso  a  fait  que  cortes. 

Pueys  li  a  dig  :  «  Senher,  jamays 
X<»n  er  noiritz  nuilhs  papagays 
Que  fassa  tan  per  son  senhor 

124.   Com  yeu  ay  fag  per  vostr'amor. 


PU   «  PAPA GAI  »  2  99 

plicité,  il  est  manifeste  que  R  a  voulu  détailler  et  développer 
le  récit. 

Ainsi,  dès  que  la  dame  a  promis  d'aimer  Antiphanor  (v.  108- 
1 10),  J  et  G  sont  d'accord  pour  ramener  rapidement  le  papagai 
auprès  de  son  maître.  Sur  une  brève  formule  de  souhait  il 
s'élance  hors  du  jardin  et  va  annoncer  à  Antiphanor  le  succès 
de  son  ambassade.  Au  contraire,  dans  II,  la  dame  ne  se  con- 
tente pas  de  sa  promesse.  Elle  charge  le  papagai  de  porter 
à  son  maître  les  gages  d'amour  qu'elle  lui  destine.  Elle  lui 
renouvelle  la  prière  déjà  faite  (v.  103)  d'avoir  à  se  hâter  et  lui 
dit  expressément  qu'elle  les  attend,  Antiphanor  et  lui,  dans  le 
jardin.  De  son  côté,  le  papagai  loue  la  beauté  des  présents 
qu'il  portera  à  l'amant  avec  les  saluts  de  la  dame.  Il  souhaite 
aussi,  mais  avec  plus  de  mots,  de  voir  bientôt  l'effet  de  ses 
démarches.  Puis  en  six  vers  au  lieu  de  deux,  qui  y  suffisaient 
dans  l'autre  rédaction,  le  poète  mentionne  le  départ  du  papagai 
et  son  retour  auprès  d'Antiphanor. 

Il  est  donc  certain  que  nous  avons  là  non  pas  deux  états  du 
même  texte ,  mais  deux  textes  différents  dont  l'un  est  le 
remaniement  de  l'autre.  Lequel  est  la  forme  remaniée  et  lequel 
le  récit  primitif?  L'étude  seule  de  l'ensemble  des  deux  récits 
peut  nous  l'apprendre.  Toutefois,  si  l'on  compare  les  trois 
textes  de  R,  de  ./  et  de  G,  pour  la  partie  conservée  en 
commun  (v.  1-110), l'on  voit  bien  que,pourtelle  ou  telle  raison, 
R  omet  certains  passages1,  que,  de  même,  G  laisse  de  côté 
certaines  parties  du  récit2,  mais  J  semble  bien  reproduire  le 
texte  intégral,  puisque  c'est  toujours  d'après  son  témoi- 
gnage qu'il  est  possible  de  combler  les  lacunes  des  deux 
autres  manuscrits 8.  11  est  dès  lors  assez  peu  vraisemblable 
que,  dans  le  seul  passage  qui  nous  occupe,  «/  ait  voulu,  de  parti- 
pris,  abréger  la  rédaction  originale.  En  admettant  même 
l'hypothèse    de    M.  Savi-Lopez   et   qu'à  partir  du  vers   140 

'  Cf.  les  vers  19-24  et  133- 13G  omis  par  l'auteur  de  R. 

2  Cf.  les  ver-  25  28  i  l  55-76  omis  par  l'auteur  de  G. 

Les   seules    lacunes   qu'y   relève    M.  Savi-Lopez  sont  celle  des   \ 
111-122,   commune  également  à  G,  et  celle   des  vers  125-130  remplacés 
par  deux  vers  particuliers  à  JG.  Ce  sont  précisément  celles  qui  différen- 
cient les  deux  rédactions  du  passage  que  nous  examinons. 


300  SUR   LA    NOUVELLE    PROVENÇALE 

l'auteur  ait  inventé  de  toutes  pièces,  on  ne  voit  pas  pourquoi 
il  aurait  supprimé  les  détails  que  donnait  pour  ce  passage 
l'original  conservé  par  R.  En  fait,  ils  s'accordaient  très  bien 
avec  la  suite  qu'il  imaginait1.  De  plus,  si  vraiment  cet  auteur, 
en  présence  du  texte  incomplet  qu'il  utilisait,  a  été  si  embar- 
rassé et  si  dépourvu  d'invention  qu'on  nous  le  dit2,  on  se 
demande  pourquoi  il  aurait  ainsi  délibérément  négligé  les 
indications  que  lui  offrait  ce  modèle  et  qu'il  pouvait  déve- 
lopper à  son  gré.  Il  semblerait  donc  que  dans  ce  passage,  ce 
n'est  pas  J  qui  a  abrégé  le  texte  original,  et,  cette  hypothèse 
étant  exclue,  il  resterait  uniquement  que  c'est  R  qui  l'a  déve- 
loppé. Nous  verrons  si  l'examen  interne  des  deux  récits 
confirme  cette  conclusion.  Pour  le  moment,  il  nous  suffit  de 
constater  : 

1°  Que  jusqu'au  vers  140  l'accord  absolu  qu'on  prétendait 
exister  entre  les  textes,  du  moins  entre  les  deux  rédactions 
de  JG  et  de  R,  n'existe  pas; 

2°  Qu'avant  l'endroit  même  où  s'arrête  G  et  où  commence 
la  divergence  absolue  de  J  et  de  R,  il  y  a  un  passage  attestant 
de  la  part  de  JG,  ou  de  celle  de  R,  un  remaniement  conscient. 

Les  rapports  établis  entre  les  trois  textes  ne  sont  donc  pas 
les  vrais  et  l'hypothèse  de  M.  Savi-Lopez  est  à  rejeter,  puis- 
qu'elle est  impuissante  à  rendre  compte  du  remaniement 
ainsi  constaté.  Pour  lui  comme  pour  Bartsch,  il  n'y  avait 
remaniement  à  partir  du  vers  140  que  parce  que  JG  prove- 
naient d'un  texte  incomplet  et  qui  s'arrêtait  à  cet  endroit 
même.  De  plus  J  était  le  seul  qui,  pour  combler  la  lacune, 
inventait  une  suite,  c'est-à-dire,  en  somme,  remaniait.  Or, 
comme  nous  venons  de  le  voir,  du  vers  111  au  vers  140,  G 
remanie  aussi  bien  que  J  et  de  la  même  façon:  l'accord  entre 
leurs  deux  textes  est  absolu.  De  plus,  la  comparaison  entre  le 
texte  de  JG  et  celui  de  R  montre  que  le  remanieur,  quel 
qu'il    soit,    n'invente    pas  :   tous   deux   ont   le    même    fond 

1  L'invitation  pressante  de  la  dame  avenir  la  retrouver  dans  le  jardin 
convenait  très  bien  avec  le  dessein  de  /,  qui  nous  montre  Anliphanor  et 
le  papagai  se  rendant  sans  tarder  dans  le  verger.  De  même  l'envoi  des 
gages  d'amour,  et  tous  les  autres  détails  de  E  s'accordaient  très  bien 
avec  la  seconde  partie  de  J. 

2  Cf.  Savi-Lopez,  Op.  cit.  p.  33. 


DU    «  P A PAG AI  »  301 

commun1.  Que  JG  soit  la  forme  remaniée  ou,  au  contraire, 
que  ce  soit  R,  les  concordances  constatées  entre  eux  suppo- 
sent nécessairement  que  J  et  G  ont  connu  la  rédaction  R  ou 
inversement.  Dans  l'une  et  dans  l'autre  hypothèse,  le  texte 
remanié  suppose  à  sa  base  l'autre  rédaction,  et  le  remanieur 
n'invente  pas  mais  modifie  les  éléments  fournis  par  l'autre 
récit.  Enfin,  s'il  remanie,  ce  n'est  pas  pour  combler  une  lacune, 
mais  en  vue  d'un  dessein  à  lui  particulier,  qui  doit  corres- 
pondre à  un  changement  dans  la  conception  générale  de 
l'œuvre.  On  pourrait  en  dire  autant  de  la  divergence  qui  existe 
entre  les  deux  rédactions  à  partir  du  vers  140.  Pour  être  plus 
complète  que  celle  que  nous  avons  constatée  du  vers  111  au 
vers  140,  elle  peut  être  cependant  de  même  nature  et  corres- 
pondre elle  aussi  à  un  changement  dans  la  conception  du 
récit.  Ainsi  rien  n'est  moins  sûr  que  les  rapports  qu'on  pré- 
tendait établir  entre  J  et  G  et,  d'autre  part,  entre  ces  deux 
états  du  même  texte  et  l'autre  rédaction.  Les  deux  textes  de 
J  et  de  G  ne  dépendent  pas  nécessairement  d'une  source 
commune  et  G  p  ut  aussi  bien  n'être  qu'un  abrégé  de  </. 
D'autre  part,  sous  sa  forme  actuelle,  J  n'est  pas  non  plus 
nécessairement  une  forme  remaniée  du  texte  original  repré- 
senté par  //.  Tout  ce  que  nous  apprennent  les  manuscrits 
c'est  qu'à  partir  du  vers  J  il2,  nous  avons  deux  récits  diffé- 
rents qui  peuvent,  l'un  aussi  bien  que  l'autre,  représenter  la 
nouvelle  primitive. 


1  II  y  a  plus  dans  R,  mais  à  l'exception  des  vers  113-114  de  JG, 
auxquels  correspondent  les  vers  125-130  de  R,  tous  les  vers  de  JG  se 
iv trouvent  dans  l'autre  rédaction. 

2  Les  divergences  constatées  du  v.  111  au  v.  140  ne  sont,  en  effet,  que 
le  commencement  du  remaniement  total  qui,  à  partir  du  v.  140,  diffé- 
rencie absolument  les  deux  rédactions. 


302        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 


C'est  donc  uniquement  l'examen  interne  des  deux  récits  et 
l'étude  attentive  de  leur  contenu  qui  peuvent  nous  renseigner 
sur  leurs  rapports  réciproques.  C'est  par  là  seulement  que 
nous  pouvons  arriver  à  déterminer  quelle  était  la  rédaction 
primitive.  Si  M.  Savi-Lopez  s'en  fût  mieux  rendu  compte,  au 
lieu  de  demander  à  cette  étude  de  venir  confirmer  les  conclu- 
sions combien  douteuses  qu'il  tirait  de  la  comparaison  des 
manuscrits,  il  eût  été  amené  à  la  pousser  plus  loin  et  eût 
ainsi  évité  des  appréciations  fausses  résultant  évidemment 
d'un  examen  trop  superficiel  *.  11  ne  suffit  pas,  en  effet, 
pour  démontrer  l'antériorité  de  la  rédaclion  R,  de  déclarer 
que  son  récit  se  développe  harmonieusement  et  que,  dans 
l'ensemble,  chaque  épisode  a  sa  place  bien  déterminée.  C'est 
le  principal  et  presque  l'unique  argument  de  M.  Savi-Lopez2. 
Tout  d'abord,  il  ne  semble  pas  que  ce  soit  là  une  caractéristi- 
que suffisante,  ni  que  cela  permette  de  distinguer  R  de  J dont, 
à  vrai  dire,  l'on  pourrait  dire  la  même  chose  et  dans  les 
mêmes  termes.  Une  fois  le  domnejaire  écarté,  le  récit  de  J  peut 
sembler  moins  vivant,  moins  varié,  moins  dramatique,  et  si  l'on 
veut  même,  moins  intéressaut,  mais  au  point  de  vue  de  la 
simplicité  et  de  la  clarté  de  la  narration,  il  est  impossible  d'y 
rien  relever  de  choquant  ou  d'inacceptable.  La  suite  et  le 
dénouement  qu'il  imagine  à  l'entretien  du  papagai  et  de  la 
dame  peuvent  rappeler  les  données  traditionnelles  de  Yalba 
et,  par  suite,  ne  sembler  ni  très  originaux,  ni  très  neufs.  Ils 
sont,  étant  donné  la  fiction,  aussi  naturels  que  vraisembla- 
bles :  il  n'y  a  rien  que  l'on  en  doive  retrancher;  rien  non 
plus,  à  l'exception  des  deux  ou  trois  vers  de  la  fin3,  dont  on 
puisse  constater  l'absence.  Tous  les  détails  du  récit  trouvent 

1  Cf.  Savi-Lopez,  op.  cit.,  p.  35  :  «  Il  giudizio  a  cui  dà  logo  l'esame 
esterno  dei  testi  sarà  ancor  meglio  confermato  da  un  brève  sguardo  al 
contenuto  ». 

2  Cf.  Savi-Lopez,  op.  cit..  p.  35  :«  Il  racconto  di  R  si  svolga  armonico 
in  ogni  sua  parte,  come  ogni  episodio  abbia  confini  ben  misurati  nel 
disegno  générale  ». 

s  Cf.  Supra,  p.  292. 


DU    «  PAPAGAI »  30  3 

dans  le  récit  lui-même  leur  raison  d'être  et  leur  justification. 
Or,  peut-on  en  dire  autant  de  l'autre  rédaction? 

Il  semblerait  qu'une  fois  l'aveu  de  la  dame  obtenu,  après 
qu'elle  a  prié  le  papagai  de  vite  retourner  auprès  d'Antipbanor 
pour  qu'ils  reviennent  la  trouver  dans  le  verger  où  elle  les 
attend,  celui-ci  n'eût  plus  qu'à  accourir  pour  goûter  les  joies 
que  lui  aménagées  son  interprète.  Nous  touchons  au  dénoue- 
ment et  la  situation  ne  semble  pas  comporter  de  longues  péri- 
péties. Du  moins,  celles  qu'a  imaginées  l'auteur  de  H  sont-elles 
vraisemblables?  Il  est  curieux,  tout  d'abord,  que,  de  retour 
auprès  de  son  maître,  le  papagai,  qui  lui  raconte  les  incidents 
de  sa  mission  et  lui  remet  les  présents  de  la  dame,  ne  lui  dise 
pas  la  chose  essentielle,  la  seule  qui  intéresse  vraiment  Anti- 
phanor,  à  savoir  qu'il  l'a  convaincue  qu'elle  devait  l'aimer, 
qu'il  en  a  reçu  l'aveu  et  que,  dès  ce  moment,  la  dame  l'attend 
dans  son  jardin.  Combien  est  plus  naturel  dans  l'autre  rédac- 
tion le  discours  du  papagai,  qui  après  avoir  rapidement  loué 
la  beauté  de  la  dame,  va  droit  à  ce  qui  importe  le  plus  : 

Pueys  li  a  dig  :  «  Sentier,  jamays 
Non  er  noiritz  nuilhs  papagays, 
Que  fassa  tan  per  son  senhor 
Corn  yeu  ai  fag  per  vostr'amor, 
Que  la  dompna  ai  gazanhada. 
Anas  ades  esta  vegada 
Parlar  a  lieis  en  sel  vergier 
Tôt  mantenen  ses  destorbier. 

Et  là-dessus  le  chevalier  s'en  allait  au  rendez-vous  donné 
par  la  dame.  Au  lieu  de  cela,  sans  même  dire  à  Antiphanor 
que  la  dame  l'attend  ni  où,  l'auteur  de  R  se  préoccupe  unique- 
ment des  moyens  à  employer  pour  pénétrer  dans  le  verger. 
Le  papagai  expose  son  plan  :  il  mettra  le  feu  au  château  et, 
grâce  à  la  confusion  générale,  son  maître  pourra  arriver  jus- 
qu'à sa  belle.  Ici  encore  il  semblerait  que,  ce  plan  étant  bien 
arrêté,  il  n'y  eût  plus  qu'à  l'exécuter.  Mais  auparavant  Anti- 
phanor croit  nécestaire  de  mettre  la  dame  au  courant  de  leurs 
projets.  En  des  vers  d'ailleurs  mal  venus  et  qui  trahissent 
le  remplissage,  il  dit  au  papagai  : 


304        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

V.  164-166  Tornatz  premier  al  parlamen 
A  lieys  parlai',  si  a  vos  platz, 
Donc  sestas  razos  li  mostratz. 

Le  papagai  revient  donc  auprès  de  la  dame,  mais,  cette  fois 
encore,  il  semble  oublier  ce  qu'il  doit  avant  tout  lui  dire.  Des 
dispositions  arrêtées  entre  Antiphanor  et  lui  pour  pénétrer 
dans  le  jardin  pas  un  mot,  mais  seulement  six  vers  remplis 
de  formules  banales  pour  exprimer  un  souhait  bien  inutile, 
puisqu'il  est  déjà  réalisé  : 

V.    173-179  Dona,  aisel  Dieus  que  vos  fetz 
Vos  done  so  que  mays  voletz, 
E'us  gar  de  mal  e  d'encombrier, 
Sol  qr.e  lo  vostre  cavayer 
Vulhatz  amar  tan  lialmen 
Com  el  fay  vos  ses  falhimen. 

Autant  un  pareil  discours  serait  naturel  au  début  de  la  nou- 
velle, lors  du  premier  entretien  du  papagai  et  de  la  dame, 
autant  il  est  choquant  ici  où  il  tient  la  place  d'un  autre  dis- 
cours qu'on  attendait  et  qui  n'y  est  pas.  Ce  qui  souligne  plus 
encore  l'invraisemblance,  c'est  que  ce  n'est  pas  le  papagai, 
mais  la  dame  qui  aborde  la  première  le  véritable  objet  de  cet 
entretien.  C'est  uniquement  parce  que  la  dame  se  préoccupe, 
elle  aussi,  des  moyens  pour  Antiphanor  de  pénétrer  dans  le 
jardin  que  le  papagai  se  rappelle  ce  pour  quoi  il  était  venu.  Il 
expose  donc  son  plan,  recommande  à  la  dame  de  bien  saisir 
le  moment  favorable  et  celle-ci  accepte: 

v.  209-210.  Ab  tan  la  dona  ditz  :  «  Platz  me 
Et  anatz  lo  querre  desse.   » 

C'est  la  seconde  fois  qu'elle  invite  le  papagai  à  lui  amener 
Antiphanor  et  avec  la  même  impatience.1 


1  Déjà  elle  lui  avait  dit  en  deux  vers  qui  ne  nous  sont  conservés  que 
par  li  : 

v.  115-116.  E  gardatz  vos  que  non  estetz 
En  sest  verdier  m'atrobaretz. 


DU    «  PAPAGAI »  305 

On  pourrait  déjà  trouver  qu'ainsi  conçu  cet  épisode  ralentit 
beaucoup  l'action  et  qu'à  ce  seul  point  de  vue  l'art  du  narra- 
teur dans  Ii  est  moins  parfait  qu'on  ne  voulait  nous  le  faire 
croire.  Mais  les  invraisemblances  que  nous  y  avons  relevées 
nous  forcent  à  supposer  qu'un  état  du  texte  à  dû  exister  où 
elles  n'étaient  pas,  que  nous  avons  par  conséquent  affaire  à 
un  épisode  interpolé  ou  fortement  remanié  et  en  tout  cas 
étranger  à  la  conception  primitive  de  la  nouvelle.  Cette  sup- 
position se  trouve  confirnu'e  par  l'examen  d'un  passage  par- 
ticulier de  cet  épisode  qui  nous  livre  en  même  temps  avec 
la  preuve  certaine  de  cette  interpolation  la  manière  dont  a 
procédé  son  auteur. 

Il  s'agit  du  passage  où,  pour  la  première  fois,  le  papagai 
expose  à  Antiphanor  son  ingénieux  stratagème.  Il  se  montre 
d'abord  préoccupé  des  difficultés  qu'ils  rencontrent  et  dit 
expressément: 


1  Cf.  v.  153-160.  Mas  jes  no  say  per  cal  razo 

Non  prenguam  sonh  ni  ochaizo 
Que  puscam  el  verdier  intrar  ; 
Jes  no  vos  en  say  cosselhar. 
Mas  yeu  métrai  foc  a  la  tor 
Et  al  solier,  per  vostr'  amor  ; 
E  can  lo  focs  er  abrassatz 
Poiretz  intrar  per  esperatz. 


Autrement  dit,  c'est  le  papagai  qui  avoue  son  embarras,  qui, 
en  présence  des  difficultés,  avoue  à  son  maître  qu'il  ne  sait 
quel  conseil  lui  donner,  pour,  dès  le  vers  suivant,  lui  exposer 
dans  tous  ses  détails  le  plan  qui  assurera  le  succès  de  leur 
entreprise.  Sans  aller  plus  loin,  on  peut,  dès  à  présent,  affirmer 
qu'il  j  a  entre  les  vers  156  et  157  une  contradiction  tellement 
manifeste  qu'il  est  impossible  de  les  laisser  subsister  tels  quels, 
à  la  suite  l'un  de  l'autre,  dans  le  même  texte.  Le  texte  de  Ii 
est  ici  évidemment  corrompu  et  il  faut  chercher  la  correction 
nécessaire. 

Elle  nous  est  suggérée  par  la  comparaison  avec  un  autre 
passage  où  le  papagai  expose,  à  la  dame  cette  fois,  comment 

20 


306        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

il  compte  s'y  prendre.  C'est  elle,  nous  l'avons  vu  ',  qui  songe 
la  première  aux  obstacles  que  rencontre  l'exécution  de  ses 
désirs  amoureux.  La  chose,  au  surplus,  paraît  assez  naturelle, 
car  mieux  que  personne  elle  connaît  la  disposition  des  lieux 
et  les  précautions  dont  elle  est  entourée. 

v.  183-186.  Mas  aquest  verdiers  es  trop  claus, 
E  las  gardas  non  an  repaus  : 
Devon  velhar  tro  al  mati 
Car  lunha  nueg  non  prendo  fi. 

Le  papagai  qui  a  dans  la  tête  son  plan  tout  fait  lui  demande 
avec  malice  : 

v.  187.  Dona,  e  no  y  sabetz  cosselh  ? 
A  quoi  la  dame  réplique  par  l'aveu  très  franc  de  son  embarras  : 

v.  188-189.  Ieu  no,  e  no  m'en  meravelh 
Se  vos  cosselh  non  y  sabetz. 

Et  le  papagai  répond,  tout  fier  de  montrer  son  ingéniosité, 
en  lui  détaillant  tout  ce  qu'il  a  imaginé. 

Cette  partie  du  récit,  conduite  du  reste  avec  vivacité  et 
agrément,  nous  montre  les  deux  interlocuteurs  dans  leur  rôle 
véritable,  avec  les  sentiments  et  les  idées  qui  leur  sont  natu- 
rels. C'est  à  la  dame  de  se  trouver  embarrassée  et  au  papagai 
de  se  montrer  un  intermédiaire  ingénieux.  Dès  lors,  l'on  se 
rend  compte  que  si,  dans  l'entretien  du  papagai  et  d'Anti- 
phanor,  il  est  question  de  l'embarras  de  quelqu'un,  c'est  uni- 
quement de  la  dame  qu'il  doit  s'agir  et  non  pas  du  papagai. 
La  correction  a  apporter  au  texte  de  R  dans  le  passage  que 
nous  avons  reconnu  comme  corrompu, apparaît  dès  lors  comme 
très  simple.  Il  suffit,  au  vers  153  et  au  vers  156,  de  corriger 
le  mot  say  en  sap,  forme  très  voisine  et  dont  on  s'explique 
aisément  l'altération.  Grâce  à  cette  correction,  l'incohérence 
que  nous  signalions  tout  à  l'heure  disparaît  et  le  sens  de  tout 
le  passage  est  le  plus  naturel.  C'est  la  dame  qui  s'est  montrée 

*  Cf.  Supra,  p.  303. 


DU    «  PAPAGAI  »  307 

préoccupée  du  moyen  de  faire  pénétrer  Antiphanor  dans  le 
jardin  et  c'est  le  papagai  qui  l'a  trouvé. 

v.  153-158.  Mas  jes  no  sap  per  cal  ra 

Non  prenguam  sonh  ni  ochaizo 
Que  puscam  el  verdier  intrar 
Jes  no  vos  en  sap  cosselhir. 
Mas  yeu  métrai  foc  a  la  tor 
Et  al  solier,  per  vostr1  amor. 

Il  est  vrai  que  dans  le  premier  entretien  de  la  dame  et  du 
papagai  (v.  7-126)  aucune  allusion  n'a  été  faite  à  ces  préoc- 
cupations et  qu'il  n'en  sera  question  que  dans  leur  second  en- 
tretien, c'est-à-dire  bien  après  l'allusion  qu'on  y  fait  ici.  On 
pourrait  sans  doute  supposer  que  le  premier  entretien  ne  nous 
a  pas  été  rapporté  dans  tous  ses  détails.  Le  papagai  ferait  ici 
allusion  à  une  idée  qui  lui  aurait  été  bien  réellement  exprimée 
par  la  dame,  et  que  le  récit  aurait  laissé  tomber.  Mais  autant 
nous  admettrions,  nous,  la  possibilité  de  tels  sous-entendus, 
autant  ils  sont  étrangers  aux  habitudes  littéraires  du  moyen 
âge.  Le  soin  avec  lequel  nos  anciens  conteurs  nous  rapportent 
les  entretiens  sous  la  même  forme  et,  le  plus  souvent,  avec 
les  mêmes  mots,  nous  force  a  exclure  une  telle  supposition. 
L'allusion  faite  par  le  papagai  à  l'embarras  de  la  dame  et  à 
l'aveu  qu'elle  en  fait,  n'est  possible  que  si  vraiment  la  dame 
lui  a  auparavant  avoué  cet  embarras.  Or,  il  n'en  est  question 
qu'aux  vers  183-190,  dans  le  second  entretien  du  papagai  et 
de  la  dame.  La  conclusion  à  tirer  de  là  c'est  que  l'allusion  faite 
dans  les  vers  153-156  à  un  sentiment,  à  une  idée,  qui  ne  seront 
exprimés  que  dans  la  suite  du  poème,  ne  peut  être  que  le  fait 
d'un  remanieur  maladroit.  Ainsi  se  trouvent  confirmés  les 
cloutes  que  nous  avions  sur  l'authenticité  de  cet  épisode  et 
l'hypothèse  d'une  interpolation  que  nous  avaient  suggérée 
l'inutilité  et  les  invraisemblances  du  second  entretien  du  papa- 
gai et  de  la  dame.  Nous  pouvons  maintenant  affirmer  que  la  fin 
du  premier  entretien  du  papagai  et  d'Antiphanor  (v.  153-166), 
et  la  seconde  rencontre  du  papagai  et  de  la  dame  (v.  167-210) 
sont  fortement  remaniées,  et  que  l'idée  même  de  ce  dernier 
épisode  était  probablement  étrangère  auréoit  primitif  qui  est 
à  la  base  de  la  rédaction  R. 


308        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

Il  peut  sembler  arbitraire  de  vouloir  refaire  d'après  nos 
idées  à  nous  modernes  des  œuvres  que  d'autres  ont  écrites 
pour  d'autres  temps  et  pour  d'autres  lecteurs.  Il  est  à  tout  le 
moins  loisible  de  profiter  de   la  maladresse  des  remanieurs 
pour  dégager  dans  l'œuvre  qu'ils  ont  prétendu  embellir  ce 
qui  leur  revient  et  ce  qui  appartient  à  l'auteur  véritable,  ce 
qui  est  ajouté  et  ce  qui  est  primitif.  Dans  le  cas  présent,  il 
est  aisé  de  voir  en  quoi^a  consisté  l'art  du  remanieur.  Si  vrai- 
ment aux  vers  153-157  il   ne  peut  être  fait  allusion  à  l'em- 
barras de  la  dame,  le  papagai  n'a  pas  non  plus  à  nous  dire 
le  stratagème  ingénieux  qu'il  mettra  en  action.  Dès  lors  son 
retour  auprès  de  la  dame,  qui  n'a  d'autre  raison  d'être  que  de 
lui  communiquer  ce  beau  plan,  se  trouve  sans  objet,  et  l'on 
peut  affirmer  que  l'idée  de  ce  second  entretien  était  étrangère 
à  la  conception  primitive  de  la  rédaction  R  et  à  celle  du  poème 
original.  Celui-ci  devait  essentiellement  se  composer  de  trois 
parties,  l'entretien  du  papagai  et  de  la  dame,  celui  du  papagai 
et  d'Antipbanor,  enfin  la  rencontre  des  deux  amants.  Nous 
les  retrouvons  dans  la  rédaction  J  et  si,  pour  des  raisons  qu'il 
n'est  pas  impossible  de  démêler,  de  ces  trois  parties  la  pre- 
mière seule  a   surtout   été  développée,  l'économie  générale 
du  récit  y  est  conforme  à  la  vraisemblance  et  au  naturel.  C'est 
seulement  par  le  développement  donné  aux  deux  dernières 
parties  que  devait  en  différer  la  rédaction  originale  de  R,  et 
l'on  peut  en  retrouver  l'ordonnance  primitive. 

Il  était  naturel  que,  dès  son  premier  entretien  avec  le  papa- 
gai, après  qu'elle  a  consenti  à  aimer  Antiphanor,  la  dame  se 
préoccupât  de  la  réalisation  de  son  désir.  Les  vers  179-210, 
dont  nous  avons  relevé  l'invraisemblance  à  la  place  qu'ils 
occupent,  auraient  leur  place  naturelle  dans  ce  premier  entre- 
tien, après  la  promesse  de  la  dame  et  l'envoi  des  gages  d'amour. 
La  suite  des  idées  est  si  naturelle  que  l'on  peut  presque  affir- 
mer que  c'était  celle  de  la  rédaction  dont  R  n'est  que  le  rema- 
niement. Que  l'on  transpose  le  morceau  à  la  suite  du  vers  115, 
il  est  impossible  d'imaginer  un  développement  plus  naturel 
des  sentiments  et  des  idées.  La  dame  remet  au  papagai  l'an- 
neau et  le  cordon  d'or  fin  qui  prouveront  à  Antiphanor  son 
amour.  Elle  donnerait  bien  davantage  encore  et  le  monde 
entier,    s'il   était  à   elle,  pour   son   amitié.  Mais   comment 


DU    «  PAPAGAI  »  309 

pourra»t-elle  le  voir,  le  jardin  étant  clos  el  gardé  comme  il 
est?  Elle  désespère  de  surmonter  tant  de  difficultés  ,  mais  le 
papagai  vient  à  son  aiie  et  lui  expose  son  plan.  La  dame 
opte  et  supplie  son  interlocuteur  d'aller  vite  lui  chercher 
Antiphanor  : 

Ab  tan  la  dona  dit/.  :  «  Plat/,  me 
210.  Et  anatz  lo  que  ire  desse.  »  • 

Suivaient  le  souhait  du  papagai  pour  la  réalisation  de  ses 
désirs  et  son  retour  auprès  d'Antiphanor. 

Une  transposition  analogue  sutiit  à  faire  disparaître  toute 
invraisemblance  de  l'entretien  du  papagai  et  de  son  maître. 
Qu'on  fonde  en  un  seul  les  deux  discours  du  papagai  à  anti- 
phanor, en  plaçant  les  vers  220-234  immédiatement  après  le 
vers  lu2,  ce  discours  venant  après  l'unique  entretien  du  papa- 
gai et  de  la  dame,  les  idées  se  présenteront  dans  l'ordre  le 
plus  naturel  et  le  plus  vraisemblable.  Le  papagai  rendait 
compte  de  sa  mission  et  remettait  à  Antiphanor  les  présents 
de  la  dame.  Il  lui  disait  l'embarras  de  la  dame  pour  le  faire 
entrer  dans  le  jardin  et  le  stratagème  imaginé  par  lui.  Après 
l'exposé  de  son  plan,  la  deman  le  du  foegrezesc  suivait,  en  quel- 
que sorte  nécessairement,  et  la  version  originale  de  II  racon 
tait  à  peu  près  de  même  façon  que  R  lui-même  l'exécution  et 
le  succès  du  plan  du  papagai. 

Sans  doute  dans  le  récit  ainsi  obtenu  certains  vers  sul>- 
■nt.  qui  apparaissent  comme  probablement  ajoutés  ou 
modifiés  par  le  remanieur.  Pour  relier  entre  eux  les  passages 
remaniés,  il  devait  naturellement  retrancher  et  plus  souvent 
encore  ajouter  çà  et  là  quelques  vers.  Mais  outre  qu'il  y  aurait 
quelque  arbitraire  à  décider  si  tel  ou  tel  vers  en  particulier 
appartenait  ou  non  à  la  rédaction  primitive,  il  n'entre  pas 
dans  notre  pensée  de  restituer  intégralement  la  rédaction  que 
R  a  remaniée.  Il  nous  suffit  d'avoir  montré  qu'il  y  a  dans  le 
texte  actuel  de  R  des  impossibilités  et  des  invraisemblances 
qui  ne  s'expliquent  que  dans  l'hypothèse  d'un  remaniement. 

1  Les  vers  115-11G  qui  terminent  de  même  façon  Le  premier  entretien 
de  la  dame  et  du  papagai  et  qui  t'ont  en  réalité  double  emploi,  sont 
très  probablement  dus  au  remanieur. 


310        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

Ce  remaniement,  on  le  voit  maintenant,  a  consisté,  suivant 
une  formule  très  suivie  au  moyen  âge,  à  dédoubler  deux 
épisodes.  On  a  coupé  en  deux  le  premier  entretien  du  papa- 
gai  et  de  la  dame  ;  on  a  pareillement  dédoublé  le  discours  du 
papagai  à  Antipbanor;  on  a  intercalé  les  différents  discours 
ainsi  obtenus  qui  supposaient  plus  de  mouvement,  plus  d'allées 
et  de  venues,  et  tout  cela  en  vue  d'allonger  le  récit  et  de 
prolonger  le  plaisir  du  lecteur. 

Dès  lors,  il  apparaît  clairement  que  c'était  mal  poser  la 
question  que  de  se  demander,  comme  on  l'avait  fait  jusqu'ici, 
lequel  des  deux  textes  actuels  de  J  et  de  R  représentait  la 
rédaction  originale.  Il  est  désormais  certain  que  R  n'est  qu'un 
texte  remanié  d'une  rédaction  dont  nous  avons  entrevu  les 
éléments  essentiels,  et  la  question  d'antériorité  ne  peut  plus 
se  poser  qu'entre  la  rédaction  /  et  cette  rédaction  ainsi 
définie.  L'bonneur  que  l'on  voulait  faire  à  Amaut  de  Car- 
casses, d'avoir  le  premier  mis  en  vers  la  nouvelle  du  papagai 
et  de  la  dame,  apparaît  en  tout  cas  comme  immérité.  Il  est 
inadmissible  que  dans  les  derniers  vers  de  R,  où  figure  ce 
nom,  le  remanieur  ait  laissé  subsister  celui  de  l'auteur  de  la 
rédaction  qu'il  modifiait.  Tout  ce  que  nous  savons  des  habi- 
tudes littéraires  du  moyen  âge  et  de  la  facilité  avec  laquelle 
un  remanieur  quelconque  croyait  par  des  changements  de 
détail,  souvent  très  contestables,  s'approprier  un  sujet  déjà 
traité  avant  lui,  nous  permet  d'affirmer  que  cette  signature 
est  celle  du  poète  qui,  travaillant  sur  la  version  que  nous 
avons  déterminée,  en  fit  ce  que  nous  a  conservé  le  manuscrit 
R.  Arnaut  de  Carcasses  ne  fut  donc  qu'un  remanieur,  et  encore 
assez  médiocre.  Tout  son  mérite  a  consisté  à  allonger,  en  le 
gâtant,  un  récit  dont  il  n'était  pas  l'auteur.  Peut-être  aussi 
est-ce  lui  qui  a  voulu  donner  au  récit  une  portée  moralisante 
et  du  conte  plaisant,  assez  voisin  par  la  donnée  du  Castia- 
gilos,  de  Raimon  Vidal,  et  qu'il  s'efforçait  de  renouveler,  faire 
une  leçon  à  l'usage  des  maris  jaloux.  Il  aurait  ainsi  formulé, 
en  l'exagérant,  l'idée  qui  était  au  fond  du  conte,  et  les  der- 
niers vers  de  R  seraient  bien  en  effet  d" Arnaut  de  Carcasses. 

De  ces  mêmes  vers  on  a  cru  aussi  pouvoir  tirer  la  preuve 
que  cet  inconnu  avait  composé  d'autres  nouvelles  et  qu'il 
aurait  ainsi  plus  de  titres  encore  à  figurer  dans  l'histoire  de 


DU    «  PAPAGAI  »  311 

la  poésie  provençale.  En  fait,  le  manuscrit.  H  se  borne   i  dire 
de  façon  peu  claire  : 

v.  306-312.  So  dis  n'Arnautz  de  Carcasses, 

Que  precx  a  faitz  per  m an tas  res 
E  per  los  maritz  castiar 
Quo  volo  lors  niolhers  garar, 
Que  'ls  laisso  a  lor  pes  anar, 

que  may  valra, 

E  ja  degus  no  y  faillira. 

En  plus  de  l'avant-dernier  vers  qui  est  mutilé,  mais  dont  il 
n'est  peut-être  pas  impossible  de  deviner  le  complément1, 
M.  Savi-Lopez  suppose  une  lacune  après  le  vers  307  et  de 
son  aveu  même2,  nous  n'aurions  là  qu'un  texte  corrompu 
dont,  par  suite,  Ton  ne  saurait  rien  tirer  qu'avec  la  plus  grande 
prudence.  Il  est  certain,  en  effet,  que,  dans  ces  vers,  nous 
devons  supposer  une  lacune,  mais  non  à  l'endroit  indiqué 
par  l'éditeur.  Le  sens,  pour  être  parfaitement  acceptable, 
n'exige  rien  entre  les  vers  307  et  308  et  quand  M.  Savi-Lopez 
suppose  entre  eux  l'absence  d'un  ou  plusieurs  vers,  il  n'a, 
sans  doute,  d'autre  raison  que  de  vouloir  trouver  au  moins 
un  autre  vers  rimant  en  -ar  et  de  faire  disparaître  ce  qu'il 
trouve  de  choquant,  dans  ce  groupe  de  trois  vers  terminés 
par  la  même  rime.  Or,  c'est  toute  une  question  de  savoir  si 
dans  le  genre  particulier  des  novas  rimadas,  il  faut  toujours 
chercher  à  retrouver  des  couples  de  vers  rimant  de  deux  en 
deux  et  s'il  ne  comportait  pas  plus  de  libertés  qu'on  ne  saurait 
d'abord  porté  à  le  supposer3. 


1  Cf.  les  notes  critiques  publiées  à  la  suite  de  cette  étude,  p.  328. 

2  Cf.  Op.  cit..  p.  40. 

3  11  est  certain  que,  de  plus  en  plus,  on  a  tendu  à  faire  exactement 
rimer  les  vers  de  deux  en  deux  et  à  alterner  régulièrement  les  rimes 
masculines  et  les  rimes  féminines.  Mais  il  n'en  a  pas  toujours  été  ainsi 
et  L'emploi  de  l'octosyllabe,  qui  est  le  vers  propre  du  genre,  était,  à 
l'origine,  beaucoup  plus  libre  quo  ne  l'ont  fait  les  théoriciens  postérieurs. 
Si  l'on  en  croyait  Azaïs  [Breviari  d'Amor,  I,  cxi,  sq.),  la  versification  des 
novas  rimadas  jouissait  de  tant  de  libertés  qu'en  fait  on  pouvait  violer 
le  principe  même  de  la  métrique  romane:  sans  avoir  égard  à  la  dernière 
syllabe  accentuée  du  vers,   on  pouvait  réunir  dans  la  même  pièce  des 


"il2        SUR  LÀ  NOUVELLE  PROVENÇALE 

C'est,  à  mon  avis,  le  sens  et  le  sens  seul  qui  doit  nous  faire 
admettre  l'existence  d'une  lacune,  et,  de  ce  point  de  vue,  rien 
ne  nous  oblige  à  penser  que  le  vers  308  ne  peut  pas  suivre 


octosyllabes  à  rimes  masculines  ou  en  accen  agut,  et  des  octosyllabes  à 
rimes  féminines  ou  en  accen  greu,  ceux-ci  comme  ceux-là  n'ayant  exac- 
tement que  huit   syllabes  et  la  finale  atone  d'un  vers  à   rime  féminine 
cmiplant  comme  une  syllabe  véritable.  En  fait,  certaines  rédactions  du 
Breviari  eFAmor  sont  tout  entières  rédigées  d'après  ce  principe:  l'effet 
pour  nos  oreilles  en  est  monstrueux.  C'est,  il  est  vrai,  une  question  de 
tir  si  le  poème  original  a  été  rédigé  d'abord  sous  cette  forme  étrange, 
ou  si  les  rédactions  qui  la  présentent  ne  sontpas  des  formes  postérieures 
el  altérées.  Mais  si  l'on  a  pu  prendre  une  telle  liberté  avec  la  constitution 
même  des  vers,  on  conçoit  que  leur  groupement  ait  pu  être  à  l'origine  plus 
libre  qu'on  ne  le  dit  d'ordinaire.  D'abord,  l'alternance  des  rimes  mascu- 
lines et  féminines  n'est  une  nécessité  qu'à  une  époque  très  récente.  Les 
Leys d'Amors,  elles-mêmes,  I,  38,  disent  expressément:  «  E  no  reputam 
a  vici  si  hom  en  novas  rimadas  pau/.a  ad  una  ni  quatre  ni  .VI.  o  mays 
bordos  terminans  en  accen  greu  solamen  o  en  accent   agut,    cant  que 
depueysh  aysso  nos  continue  ».  Il  ne  faut  pas   oublier  non  plus  qu'on 
rencontre  parfois    l'octosyllabe  groupé  en  très  longues   tirades  sur  une 
seule  assonance  ou  rime  (Cf.  Stengel,   Romanische  Metrik  in  Groeber, 
Grundriss  II,  28,  29j.  De  ce  type  sont  les  fameuses  épitres  de  Raimbaut 
de  Vaqueiras.  Dans  notre   texte  même,   nous  voyons  que  l'alternance 
n'est  pas  rigoureusement  observée  :  au  vers  25  de  la  seconde  partie  de 
/(Savi-Lopez,  op.  cit.  p.  62-63),  nous  avons  une  suite  de  quatre  vers 
rimant  en  -en  et  de  même  au  v.  39  une  suite  de  quatre  vers  rimant  en 
-or.  De  même,  si,  à  l'ordinaire,  l'on  groupait  les  octosyllabes  en  couples  de 
deux  rimant  ensemble,  il  se  peut  que   cet  usage  ait  comporté  quelques 
exceptions.  Qu'il  y  ait  eu  quelques   irrégularités,  c'est  ce  que   semblent 
avouer  les  Leys  d'Amors,  I,  140,  où   il  est  dit  :  «  Pauzar  rim  tornat  en 
novas  rimadas  vicis  es  quar  adonx  l'obra  desparia  coma  si  hom  comen- 
sava  alcunas  novas  rimadas  pauzan  las  acordansas  finals  dels  verset/,  de 
dos  en  dos  bordos  ayssi  quo   es  acostumat   de  far   e  pueys  ne  pauzava 
très  acordansas  finals  ad  una.  »  Ce  qui  revient  à  dire  que  si,  à  l'ordi- 
naire, on  accouplait  les  vers  de  deux  en  deux,  la  même  pièce  présentait 
parfois  des  groupes  de  trois  vers  construits  sur  la  même  rime.  L'auteur 
des  Leys  considère  que  c'est  une  faute,  mais  cela  n'est  sans  doute  vrai 
que  pour  l'époque  où  il  écrivait.  Il  est  bien  obligé  de  constater  l'exis- 
tence de  telles  exceptions  dans  les  œuvres  antérieures,  et,ne  pouvanl  les 
condamner  absolument,  il  s'efforce  de  les  excuser:  «Variamen  de  compas 
de  sillabas   e  de  rims  en  novas  rimadas  son  escuzat  en  cas  de  nécessitât 
coma  per  interpositio  d'alqun  dictât  per  causa  d'ishemple  o   per  autra 
maniera   aqui  pauzat.  »  (I.  140).  En  effet,  toute    la   dernière  partie  du 
Breviari  d'Amor,  le  Perilhos  tractât  d'Amor  et  la  fameuse  nouvelle  de 
Raimon  Vidal  En  aquel  temps  c'om  era  jais,  qui  sont  en  grande'  partie 


DU    »  PAPA  GAI  »  313 

immédiatement  le  v.  r.  Au  contraire,  l'impossibilité  pour 

ns  de  rattaoher  i 

a  faitz]  ;  • 

à  ce  <|tii  procède  semble  indiquer  qu'entre  les  deux  \ 

et  1507  quelque  chose  d'essentiel  a  disparu.  Quel   sens,  en 


com]  .  noua  monl  renl  quelles  libi  ! 

on  se  permettait  dans  l'emploi  d  I  tosyllabe  qui 

■i  effet,  le  fond  du  récit,  et  les  citations  sonl   naturellement 
m.  t  -i  curieux,  c  esl   de  voir  <  ommenl  • 

v  dans  '•■  irs.  Parfois  la  citai   ■ 

nettement  d  le  la  nom  iprès  ou  avant  un  cou 

complel  de  deux  octosyllabes   rimant  ensemble.   Par  exemple,  dan 
i;  \  dal  : 

mans  n'a  faitz  d'aut  bas  baros 
El  per  so  dis  en  Pi 

■  paratje  non  mai  re 

M  .■-■  qu'en  a  m  lis  i  7  qui  mieths  se  capi 
E  podetz  conoisser  qu'es  dreitz 
E  pei  sol  i  adreitz 

Bartsi  a,  i 

Mais  le  plus  souvent  li  île  demi  t  citation,  qu 

que  n'él  .  '  couple  et  rimenl  avec  un  octo- 

qui   préci  de  ou  qui  suit,  el  qui    fail    pai 

m  me.  Par  exemple,  en  i  la  même 

E  fetz  issautz 

i  Raimbautz 
E  cels  quim  vol  auzir  m'escoul  : 
«  /'  '  ms  ai  cor  estout 

hum  il  e  bai 
E 

I  oui 

h  ed'a  ■  out 

M  mi 

l  I  agra  ne      R       baut.  » 
No  •  R  limb  lui 

El  i  221,  \.  5-6,  \.  13-1  , 

En  i 

il  de 
mesure  différente,  un  coup!    réel.  Les  ible 


311        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

effet,  attribuer  à  ce  mot  de  precx,  si,  comme  nous  forcerait  à 
le  croire  l'état  actuel  du  texte,  l'antécédent  de  que  est  Arnautz 
de  Carcasses?  L'éditeur  le  traduit  tantôt  par  «  demande 
d'amour,  invitation  amoureuse  »,  et  tantôt  aussi  par  «  exhor- 
tation ».  Mais,  quel  que  soit  le  sens  véritable,  le  mot  désigne- 


et,  en  une  certaine  mesure  au  moins,  l'octosyllabe  reste  isolé.  Sans  doute 
ce  sont  là  des  pièces  d'un  genre  particulier:  il  n'en  reste  pas  moins  que 
si  l'on  a  pu  y  traiter  ainsi  l'octosyllabe,  c'est  que  le  genre  des  novas 
rimadas  n'était  pas  pour  le  groupement  des  rimes,  asservi  aux  règles 
strictes  que  l'on  a  imaginées  depuis.  Il  ne  faut  donc  pas  être  trop  cboqué 
si  l'on  y  rencontre  soit  plusieurs  couples  de  deux  vers  rimant  ensem- 
ble, ce  qui  est  assez  fréquent,  soit  des  groupes  de  trois  vers  sur  une 
seule  rime,  soit  peut  être  même  des  vers  isolés.  On  remarquera  que  dans 
notre  texte,  quand  une  irrégularité  métrique  détermine  l'éditeur  à  sup- 
poser une  lacune ,  le  sens  est  cependant  acceptable  et  n'exige  aucune 
restitution  de  vers.  Cf.  de  même  dans  le  Castia-gilos  de  Raimon  Vidal,  le 
passage  suivant  ou  Appel  ÇProvenz.  Chrestom.)  croit  nécessaire  de  sup- 
poser une  lacune  pour  faire  disparaître  un  vers  isolé,  alors  que  le  sens 
est  très  acceptable  : 

Veus  aisi  vostr'amic  coral 

E  per  Dieu  nom  tengatz  a  mal 

C'uey  ai  per  vos  l'anar  laissât 

De  mo  senhor  a  cui  fort  peza 

Mas  l'amors  qu'en  me  ses  espreza. 

Raynouard,  Choix,  III,  406. 

Par  contre,  dans  un  autre  passage  de  la  même  pièce  on  Ut  : 

Que  en  vostras  terras  estan 

Que  donas  tan  gran  poder  an 

Elas  an  be  tan  gran  poder 

Que  messonja  fan  semblar  ver 

Et  ver  messonja  eissamen 

Gan  lor  plai  tan  an  sotil  sen.  Iôid.,  412. 

Le  vers  transcrit  en  italiques  est  tellement  inutile,  que  je  serais  assez 
porté  à  croire  qu'il  a  été  rajouté  par  un  remanieur,  afin  de  retrouver  un 
couple  de  deux  vers.  Il  y  aurait,  on  le  voit,  une  étude  intéressante  à 
faire  sur  la  métrique  des  novas  rimadas.  Mon  sentiment  est  qu'il  ne 
faut  pas  être  dupe  de  la  régularité  établie  par  les  théoriciens  pos- 
térieurs, que  le  genre  comportait  beaucoup  de  libertés,  que  la  seule 
consi  lération  de  l'irrégularité  métrique  ne  suffit  pas  pour  autoriser 
l'hypothèse  d'une  lacune,  et  que  c'est  le  sens  seul  qui  doit  décider  s'il  faut 
ou  non  supposer  l'absence  d'un  vers. 


!'[      «  PAPAGAI  »  3  15 

rait,dans  la  pensée  de  M.  Savi-Lopez,  d'autres  œuvres  de  cet 
Arnaut  de  Carcasses,  qui  ainsi  aurait  écrit  en  plus  de  la  nou- 
velle du  papagai,  soit  des  «  demandes  d'amour  »,  soit  des 
nouvelles  à  tendance  didactique  et  moralisante  '.  C'est  là, 
nous  semble-t-il,  une  supposition  toute  gratuite  et  que  rien, 
par  ailleurs,  ne  vient  confirmer.  De  plus,  entendre  precx  au 
sens  de  «  exhortation  »  est  peut-être  arbitraire  et  l'on  n'y  est 
autorisé  par  aucun  des  emplois  que  l'on  connaît  du  mot.  Le 
seul  qui  soit  possible  est  celui  de  «  demande  d'amour», mais 
la  difficulté  est  d'attribuer  ces  precx,  ces  «demandes  d'amour» 
à.  Arnaut  de  Carcasses.  Ce  n'est  que  par  un  étrange  abus  de 
mots  que  l'on  pourrait  dire  que,  dans  la  nouvelle  qu'il  vient 
de  nous  conter,  c'est  lui,  Arnaut,  qui  prie  la  dame  d'amour. 
Comment  aus-à,  dans  cette  hypothèse,  entendre  le  per  manias 
'  Dans  la  nouvelle  du  papagai,  celui  qui  fait  le  prec  c'est 
le  héros  véritable  du  récit,  celui  qu'un  long  passé  traditionnel 
confirmait  dans  la  possession  de  ce  rôle  de  messager  amou- 
reux. Et  si  maintenant  l'on  admet  qu'il  était  naturel  de  voir 
rappeler  dans  ces  vers  de  conclusion  le  nom  du  principal 
acteur,  on  pensera  peut-être  qu'il  manque  au  texte  de  II 
la  mention  du  papagai  et  du  caractère  qu'il  a  dans  le  récit. 
Il  suffirait,  au  surplus,  d'un  vers  rimant,  lui  aussi,  en  -es,  et 
qui  pourrait  être 

Del  plazen  papagai  cortes2. 

L'expression  per  mantas  res  serait  restée  vague  à  dessein, 
comme  une  allusion  au  rôle  ordinaire  du  papagai.  Dans  cette 
hypothèse,  Arnaut  de  Carcasses  n'a  rien  à  prétendre  sur 
les  precx  qu'on  lui  attribuait,  puisqu'il  s'agit  des  precx  du 
papagai;  nous  n'avons  pas  à  regretter  la  perte  d'autres 
res,  puisque  il  ne  s'agit  pas  de  poésies  d'un  genre  parti- 
culier, et  Arnaut  de  Carcasses  n'est  toujours  qu'un  remanieur 


1  Cf.  Savi-Lopez.  op.  rit.,  p.   10. 

-  Plazen  et  cortes  sont  ailleui  appliqués  au  papagai.   Cf.  136 

e  d'aisso  a  fait  f/ue  cortes  et  dans  ./.  p.  62,  v.  5,  le  vers  car  hieu  vos  vei 
tan  plazentier  qui,  dans  le  texte,  désigne  Antiphanor,  doit  en  réalité 
s'appliquer  au  papagai. 


316  SUR  LA   NOUVELLE    PROVENÇALE 

médiocre  qui  a  eu  la  chance  de  nous  léguer  son  nom  '  alors 
que  l'auteur  du  récit  primitif  restait  inconnu. 

Une  dernière  question  reste  à  examiner.  Puisque  à  la  base 
de  la  rédaction  R  nous  distinguons  un  récit  plus  simple,  mais 
toujours  différent  de  /  par  les  péripéties  et   par  le  dénoue- 
ment, il  nous  faut  décider  maintenant  laquelle  de  cette  ver- 
sion disparue  ou  de  celle  qui  est  conservée   par  /  est  vérita- 
blement la  forme  originale  de  la  nouvelle.  Mais  la  première 
partie  du  récit  étant  identique  dans  l'une  et  dans  l'autre,  et 
celles-ci  ne  différant  que  par  la  suite  donnée  à  ce  début  com- 
mun, la  question  consiste  à   démêler   laquelle  de  ces  deux 
continuations  continue  le  mieux  le  récit.  Quelle  est  celle  qui 
se  conforme  le  mieux  à  l'esprit,  au  ton  du  début,  et,  par  suite, 
appartient  à  la  exception  originale  de  la  nouvelle?  On  peut, 
en  effet,  a  priori,   s'attendre   à   ce  qu'un  remanieur  unique- 
ment préoccupé  de  renouveler  l'intérêt  de  son  récit,  trahisse, 
pirdes  diseonvenances,  son  travail  de  réfection.  C'est  parce 
qu'on  a  cru  trouvé  de  ces  dissonances  dans  le  texte  de  J  qu'on 
en  avait  imméiatement  conclu  que  cette  version  ne  pouvait 
être  la  version  originale  2.  En  fait,  tout  ce  qu'a  pu  reprocher 
M.  Savi-Lopez  au  récit  de   </,   c'est  de  raconter  avec  moins 
d'agrément,  et  surtout  avec  moins  de  détails,  la  fin  de  l'aven- 
ture. Il  peut  ne  pas  ressembler  à  R,  sans  qu'il  y  ait  entre  les 
deux  parties  qui  le  composent  disconvenance  de  ton  et  d'es- 
prit. Et,  en  effet,  il  est  impossible  de  rien  trouver  dans  la 
seconde  partie  de  ./  qui  ne  soit  en  parfaite  harmonie  avec  la 
première.  C'est  le  même  ton  de  la  narration  simple,  et,  si  les 
discours  y  tiennent  la  plus  grande  place,  c'est  un  trait  de  res- 
semblance de  plus  avec  l'autre  partie.  Ceux  qu'y  échangent 
la   dame  et  Antiphanor   ne   diffèrent  en  rien  de  ceux   que 


1  On  n'est  morne  pas  fixé  sur  la  valeur  de  ce  nom.  M.  Savi-Lopez 
{op.  cit.  p.  38-39;  dit  qu'on  peut  considérer  Carcasse*  soit  comme  dési- 
gnant tout  le  pays  de  Carcassonne,  soit  comme  le  nom  d'un  petit  vil- 
lage de  cette  région.  En  fait,  nous  n'avons  aucune  raison  de  choisir  l'un 
plutôt  que  l'autre.  L'auteur  d'un  compte-rendu  paru  dans  la  Romania 
XXXI,  p.  169,  adopte  délibérémenl  le  second  sens,  mais  sans  nous 
]>"iirquoi. 

'-'  Cf.  Savi-Lopez,  op.  cit.  pp.  35-36. 


DU    «PAPAGAI»  317 

tenaient  le  papagai  et  la  dame.  Il  y  aurait  ainsi  entre  les 
deux  parties  de  J  plus  d'unité  de  ton  que  ne  semble  le  croire 
M.  Savi-Lopez  et  qu'il  n'y  en  a  en  réalité  entre  les  deux 
parties  qui  constituent  le  récit  de  R.  Car,  si  le  ton  de  R  et  de 
la  version  qu'il  remanie  est  bien  toujours  celui  de  la  narra- 
tion, encore  faut-il  reconnaître  que  la  seconde  partie  fait  aux 
péripéties  et  à  l'élément  extérieur  une  large  part  qu'ils 
n'avaient  pas  dans  la  première.  Une  fois  indiquée,  et  très 
sobrement,  la  donnée  générale  et  le  cadre,  toute  cette  pre- 
mière partie  consiste  en  un  dialogue,  du  reste  agréablement 
conduit  entre  la  daine  et  le  papagai.  Au  lieu  de  cela  le  dia- 
logue n'est  plus,  dans  la  seconde  partie  de  11,  la  chose  essen- 
tielle et  l'intérêt  va  tout  entier  aux  péripéties  imaginées  par 
le  narrateur,  aux  allées  et  venues  du  papagai,  au  stratagème 
de  l'incendie,  à  la  rencontre  d'Antiphanor  et  de  la  dame,  au 
retour  du  papagai  et  à  la  séparation  des  amants.  C'est  donc  à 
l'original  de  li  qu'on  pourrait  reprocher  de  ne  pas  présenter 
dans  les  deux  parties  sinon  la  même  unité  de  ton,  du  moins 
la  même  unité  d'intérêt.  A  ce  point  de  vue,  il  serait  certai- 
nement inférieur  à  l'autre  version  et  ce  pourrait  être  une 
preuve  que,  par  rapport  à  7,  l'original  lui-même  de  R  n'était 
sans  doute  qu'un  remaniement. 

Il  est  en  effet  certain  que  l'intérêt  de  la  première  partie 
commune  à  R  et  à  J  consiste  dans  la  discussion  entre  la  dame 
et  le  papagai.  On  le  voit  d'abord  au  parti  pris  du  narrateur 
de  négliger  tout  ce  qui  pourrait  localiser  la  scène  et  lui  don- 
ner quelque  réalité.  Pas  de  description  du  verger  où  le  papa- 
gai rencontre  la  dame,  sinon  que  c'est 

v.  1.  Dins  un  verdier  de  mur  serat. 

Rien  non  plus  sur  la  façon  dont  le  papagai  y  pénètre.  Des 
deux  int  Tlocuteurs,  on  ne  nous  fait  aucun  portrait,  ni  moral, 
ni    physique.    Antiphanor  '    est   un    fils  de    roi    et  la   dame 


1  M.  Savi-Lopez  (Op.  cit.  pp.  8-9)  a  fort  bien  montré  que  ce  nom  n'a 
rien  de  grec,  et  que  c'esl  à  torl  que  Bartsch  avait  vu  dans  ce  nom  ainsi 
i[ue  dana  la  mention  du  foc  une  preuve  de  l'origine  orientale  de 

notre  nouvelle.  Par  contre,  p.  33,  il  reproduit  la  remarque  de  Bartsch 
(lue,  dans  la  première  partie  de  ./,  le  nom  d'Antiphanor  est  menti- 


S18        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

n'a  même  pas  de  nom.  Tant  il  est  vrai  que  pour  l'auteur  de 
cette  première  partie  ce  ne  sont  ni  les  circonstances,  ni  le 
cadre,  ni  les  personnages  eux-mêmes  qui  sont  intéressants, 
mais  uniquement  la  question  qu'il  s'agit  de  discuter  et  le 
débat  qu'il  imagine  entre  deux  interlocuteurs  du  reste  quel- 
conques. Aussi  bien,  en  avons  nous  la  preuve  certaine  dans 
le  récit  lui-même  et  un  vers,  que  jusqu'ici  on  semble  avoir 
laissé  inaperçu,  nous  révèle  le  véritable  caractère  de  ce 
début  dans  la  pensée  de  son  premier  auteur.  Qu'on  se  reporte 
aux  premiers  vers  de  la  nouvelle  qui  servent  à  l'auteur  à 
introduire  son  récit. 

Dins  un  verdier  de  mur  serat. 
A  l'ombra  d'un  laurier  folhat 
Auzi  contendre  un  papagay 
De  tal  razo  corn  ye*us  diray. 

Quand  on  sait  l'usage  à  peu  près  constant  chez  nos  auteurs 
du  moyen  âge  d'indiquer  très  nettement  dès  le  début  le  genre 
auquel  appartient  la  pièce  ou  l'ouvrage  qu'ils  composent  ',  il 
est  évident  que  l'auteur  du  récit  original  s'est  avant  tout  pro- 
posé de  nous  rapporter  une  contenso  ou  tenso,  c'est-à-dire  un 
débat  entre  un  papagai  et  une  dame  2.  L'intérêt  devait  aller 

cinq  fois,  au  lieu  que  la  seconde  partie  paraît  l'ignorer.  Gomme 
Bartsch,  il  semble  voir  là  la  preuve  que  la  seconde  partie  est  un  rema- 
niement postérieur.  A  moins  d'admettre  que  cette  seconde  partie  existait 
indépendamment  de  la  première  et  qu'on  l'y  a  réunie  arbitrairement, 
l'absence  du  nom  d'Antiphanor  ne  prouve  rien.  Dans  l'hypothèse  même 
de  M.  Savi-Lopez,  l'auteur  de  J  voulant  donner  une  suite  à  la  pre- 
mière partie  où  figurait  ce  nom,  n'avait  qu'à  le  reproduire  tel  qu'il  le 
trouvait.  S'il  ne  l'a  pas  fait,  c'est  qu'il  n'y  attachait  pas  une  grande 
importance.  Son  chevalier  n'avail  pas  d'individualité  et  ce  nom  n'était 
pour  lui  qu'un  nom  quelconque. 

1  Cf.  le  début  d'un  débat  inédit  de  l'âme  et  du  corps  contenu  dans  le 
ms.  de  la  Bibliothèque  Nationale,  franc.  14973,  f°  1,  r°. 

L'autrier  ausiy  una  tenson 

vos  dir  en  quall  rason 

An  que  vollyas  estar  e  pas 
E  s'entendes  et  escoylas 

2  Pour  être  moins  fréquent  que  tenso,  le  mot  contenso  s'emploie  pour 
désigner  des  pièces  du  même  genre  tout  comme  joc  partit,  partimen  cl 
partida. 


DU   «  PAPAGAI »  3  19 

surtout  à  la  question  qui  en  fait  l'objet,  une  de  celles  qui 
furent  sans  doute  les  plus  débattues  entre  théoriciens  de  l'amour 
courtois  :  l'amour  conjugal  exclut-il  pour  la  femme  la  possi- 
bilité de  tout  autre  amour?  Le  développement  même  de  la 
discussion,  l'ingéniosité  du  papagai  a  triompher  du  refus  et 
des  objections  de  son  interlocuteur  attestent  que  c'est  bien  là 
l'objet  essentiel  du  récit,  et  l'admiration  manifestée  à  plusieurs 
reprises  '  par  la  dame  pour  l'éloquence  de  son  interlocuteur 
nous  atteste  le  plaisir  que  les  lecteurs  du  temps  prenaient  à 
de  telles  discussions.  Si  tel  était  bien  le  dessein  de  l'auteur, 
l'on  voit  pourquoi  dan3  la  version  J  la  suite  de  l'entretien  est 
rapidement  contée  au  point  de  paraître  presque  sacrifiée. 
L'essentiel  étant  le  débat  lui-même  entre  la  dame  et  le  papa- 
gai, une  fois  l'aveu  de  la  dame  obtenu,  l'auteur  avait  dit  ce  qu'il 
voulait  dire,  et  peu  lui  importait  le  dénouement.  Il  est  même 
inutile  de  considérer  ce  dénouement  comme  une  imitation  de 
Yalba  :  ce  n'est  vrai  que  pour  la  version  R,  qui  manifestement 
lui  emprunte  son  décor  et  ses  acteurs  ordinaires  las  gâchas. 
Le  retour  du  mari  était,  dans  la  donnée  du  récit,  le  dénouement 
le  plus  naturel,  et,  si  l'auteur  l'a  emprunté  à  la  vie  journalière, 
sa  banalité  même  ne  fait  que  mieux  ressortir  l'intérêt  de  la 
première  partie  et  le  caractère  véritable  de  la  nouvelle  primi- 
tive. On  voit  aussi  maintenant  comment  l'auteur  du  manuscrit 
G,  qui  évidemment  a  voulu  conserver  un  extrait  du  récit  primi- 
tif, a  pu  l'arrêter  au  retour  du  papagai  auprès  de  son  maître. 
Si  on  peut  lui  reprocher  d'avoir  négligé  certaines  parties  de 
l'entretien  du  papagai  et  de  la  dame  qui  sont  peut  être  les 
plus  agréablement  racontées,  il  n'en  reste  pas  moins  que  cet 
entretien  suivi  du  retour  du  papagai  et  du  témoignage  qu'il 
se  rend  à  lui-même  pour  son  ingéniosité  et  sa  fidélité  forme 
un  ensemble   ayant  son  unité  et  présentant  un  intérêt  véri- 


1  Cf.  v.  lJ7  sq.        Papagay,  si  Dieus  m'acosselh, 
En  cara-  us  die  que  'm  meravelh 
Car  vos  tan  gen  sabetz  parlar 

Cf.  de  même  dans  J.,  p.  62,  v.  16. 

Cf.  v.  55.  sq.       Papagay,  trop  es  bel  parliers 
Par  me,  si  fossetz  cavayers, 
Que  jen  saupratz  dona  prejar. 


3  20        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

table.  Le  fait  que  lui  aussi  néglige  la  seconde  partie  confirme 
notre  façon  de  comprendre  le  récit  primitif.  C'était  essentiel- 
lement un  débat  dont  tout  l'intérêt  consistait  dans  la  question 
discutée  et  dans  l'art  de  conduire  le  dialogue.  L'auteur  s'ef- 
forçait de  le  raconter  tel  quel  et  pour  lui-même  sans  chercher 
à  l'entourer  de  circonstances  et  d'aventures  plus  ou  moins 
rares,  sans  vouloir  non  plus  lui  attribuer  une  portée  ni  satiri- 
que ni  moralisante. 

Cette  double  préoccupation  caractéristique  de  la  version  R 
et  du  texte  remanié  par  son  auteur,  nous  permet  d'affirmer 
qu'ils  représentent  tous  deux  une  tradition  en  contradic- 
tion avec  la  conception  primitive  de  la  nouvelle  et  par  con- 
séquent postérieure.  D'une  part,  l'importance  que  prend 
dans  l'une  et  dans  l'autre  l'élément  purement  narratif,  la 
recherche  du  pittoresque,  l'effort  fait  pour  donner  à  toute 
cette  aventure  un  air  de  réalité,  attirent  l'intérêt  aux  dépens 
de  ce  qui  était  l'objet  propre  du  récit  primitif.  D'autre  part, 
la  transformation  de  la  nouvelle  en  une  sorte  de  Caslia-gilos, 
est  une  déformation  de  la  donnée  originale.  Or,  si  c'est 
Arnaut  de  Carcasses  qui  le  premier  a  tiré  formellement  de 
l'aventure  la  morale  que  l'on  sait,  en  fait,  cette  morale  était 
en  quelque  sorte  à  l'état  latent  dans  le  récit  qu'il  rema- 
niait. Le  débat  primitif  était  déjà  devenu  le  conte  plaisant 
destiné  comme  le  Castia-gilos  de  Raimon  Vidal,  à  faire  rire  aux 
dépens  des  maris  jaloux,  mais  cela  même  n'était  qu'un  déve- 
loppement postérieur.  Dans  la  partie  commune  à  J  et  à  R,  il 
n'est  permis  nulle  part  de  soupçonner  la  jalousie  du  mari. 
Les  sentiments  qu'il  inspire  à  sa  femme  '  et  qu'elle-même 
invoque  pour  repousser  d'abord  les  prières  du  papagai,  ne 
sont  pas  ceux  que  d'ordinaire  lesja'oux  inspirent  à  leurs  victi- 
mes. Dans  tout  le  récit  de  «/,  le  mot  de  gilos  ne  se  trouve  pas 
et  même  au  moment,  où,  pour  terminer  l'entretien  des  amants, 
il  fait  revenir  le  mari,  rien  ne  permet  de  supposer  que  c'est  un 
mari  jaloux.  En  réalité,  cette  jalousie  du  mari  est  une  invention 


l   Cf.  v.    (')<;.  Ali  tan  vos  ai  yeu  doncx  venrut, 
Qu'eu  am  mon  maril  may  que  re 
Que  si'  el  mon,  de  bona  fe, 
L  lunh  aulr'  amador  no  vuelh. 


DU   «  PAPAGAI  »  321 

du  remanieur.  Elle  a  pu  lui  être  suggérée  par  ce  «vergier 
de  mur  serat»  où  le  récif  primitif  situait,  de  façon  bien 
vague,  la  scène  Au  surplus  elle  était  trop  naturelle  pour 
qu'un  remanieur,  qui  voulait  renouveler  le  récit,  pût  négli. 
ce  qu'elle  apportait  en  soi  de  pittoresque  et  de  dramatique. 
Mais  ainsi,  ni  la  version  remaniée  par  Arnaut  de  Carcasses, 
et  qui  nous  est  conservée  par  le  manuscrit  H,  ni  le  récit 
lui-même  qui  a  servi  à  ce  remaniement  et  qui,  quoique  moins 
développé,  en  reproduisait  les  lignes  essentielles  ne  sont  la 
forme  primitive  de  la  nouvelle  du  papa  g  ai.  Contrairement 
aux  conclusions  de  Bartsch  et  de  M.  Savi-Lopez,  c'est  la 
version  J  qui  représente  le  récit  original  et  ce  récit  est  l'œu- 
vre d'un  inconnu. 


Nous  pouvons  donc  de  ce  même  récit  distinguer  et  retrou- 
ver quatre  états  successifs.  Le  premier,  qui  n'est  plus  repré- 
senté par  nos  manuscrits,  était  constitué  essentiellement  par 
le  récit  dey  débarrassé  de  l'addition  du  domnejaire  et  terminé 
parles  quelques  vers  de  conclusion  que  cette  addition  a  fait 
disparaître.  La  version  qui  s'en  rapproche  le  [tins  est  celle  de 
7,  identique  en  son  fond  mais  gâtée,  vers  la  fin,  par  l'addition  du 
domnejaire.  Le  troisième  état  qui,  lui  non  plus,  n'estpas  repré- 
senté directement  dans  nos  manuscrits,  est  celui  de  la  ver- 
sion qui  est  à  la  base  du  récit  de  R.  Elle  différait  du  récit  pri- 
mitif par  le  développement  de  la  seconde  partie,  l'importance 
nouvelle  donné  à  l'élément  purement  extérieur  et  la  ten- 
dance à  ridiculiser  les  maris  jaloux.  Enfin,  le  remaniement 
d'Amant  de  Carcasses,  est  la  dernière  forme  prise  par  le 
récit.  Elle  est  obtenue  par  le  dédoublement  de  deux  des 
épisodes  de  la  version  précédente  et  ne  cherche,  en  allongeant 
la  narration,  qu'à  prolonger  le  plaisir  du  lecteur. 

Cette  constance  à  remanier  et  à  s'efforcer  de  renouveler  un 
même  thème  narratif,  n'a  rien  qui  doive  nous  surprendre.  Elle 
est  bien  dans  les  habitudes  littéraires  du  moyen  âge.  Mais 
elle  confirme  ce  que  nous  savons  par  ailleurs  du  faible  déve- 

21 


32  2        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

loppernent  que  reçut  en  provençal  le  genre  de  la  nouvelle,  et 
d'autre  part,  elle  rend  plus  frappante  une  pauvreté  d'inven- 
tion qu'atteste  déjà  la  médiocrité  du  récit  original.  Déjà, 
M.  Savi-Lopez,  avait  très  bien  montré  que  la  version  de  /?, 
considérée  à  tort  par  lui  comme  le  texte  original,  résultait 
uniquement  de  la  juxtaposition  de  deux  thèmes  très  répandus 
dans  toute  la  littérature  du  moyen  âge,  celui  de  l'oiseau 
messager  d'amour  et  celui  des  oiseaux  incendiaires1.  C'est 
non  plus  à  Arnaut  de  Carcasses,  mais  à  l'auteur  de  la  version 
remaniée  par  lui  que  revient  le  mérite  d'avoir  ajouté  le 
second  thème  au  premier,  en  faussant,  il  est  vrai,  la  concep- 
tion de  la  nouvelle  primitive.  Quant  à  celle-ci,  on  voit  main- 
tenant à  quoi  elle  se  réduit.  Elle  est  essentiellement,  sous  la 
forme  narrative,  un  débat  sur  l'une  des  questions  sans  doute 
les  plus  rebattues  de  la  doctrine  courtoise.  C'est  une  tenso 
comme  en  échangeaient  entre  eux  les  troubadours.  Qui  sait 
même,  si  ce  débat  n'a  pas  existé  sous  une  forme  lyrique?  La 
question  qui  en  fait  le  fond,  nous  nous  la  posons  encore  quand 
nouscherchons  à  démêlerce  que  fut  l'amour  courtois.  Comment 
les  troubadours  auraient-ils  pu  ne  pas  la  discuter  ?  On  voit 
alors  à  quoi  se  réduirait  le  mérite  de  l'auteur  de  la  nouvelle 
primitive.  Peut-être  a-t-il  uniquement  consisté  à  transposer 
sous  la  forme  narrative  une  tenso  lyrique  et  à  introduire 
comme  interlocuteurs  une  dame  sans  individualité  et  un 
papa  g  ai. 

1  Savi-Lopez,  op.  cit.,  pp.  10-31. 


DU   «  PAPAGAI»  32  3 


NOTES  CRITIQUES 


La  conclusion  du  travail  qui  précède  c'est  que  l'édition  de 
la  nouvelle  àupapagai  devait  être  comprise  autrement  que  ne 
l'a  fait  M.  Savi-Lopez.  Pour  lui,  R  étant  le  seul  manuscrit  qui 
contienne  tout  entière  la  nouvelle  originale  devait  être  à  la 
base  de  l'édition.  Même  pour  la  partie  qui  se  retrouve  dans 
les  autres  manuscrits  son  autorité  est  incontestable,  car  il  est 
de  beaucoup  le  plus  rapproché  du  texte  original,  et  les  autres 
remontant  plus  ou  moins  directement  à  une  même  source  ne 
représentent  qu'une  même  tradition  *.  D'autre  part,  ceux  ci 
ne  conservant  que  des  textes  remaniés,  il  n'y  avait  qu'à  les 
négliger  pour  ne  chercher  à  reproduire  dans  sa  pureté  que  le 
texte  original  d'où  R  dérive  directement.  Par  suite,  l'édition 
de  la  nouvelle  ne  devait  être  que  la  reproduction  du  manus- 
crit R  et  il  ne  fallait  avoir  recours  aux  autres  manuscrits  qu'en 
présence  de  lacunes  certaines  et  de  fautes  évidentes.  C'est 
aussi  ce  qu'avait  pensé  Bartsch,  qui,  négligeant  même  toute 
comparaison  avec  les  autres  manuscrits ,  s'était  borné  à 
reproduire  presque  tel  quel  le  texte  de  R,  ne  le  corrigeant 
qu'en  cas  de  nécessité  absolue  et  à  l'aide  de  conjectures2. 

Le  texte  de  M.  Savi-Lopez  n'aurait  donc  pas  dû  différer 
beaucoup  de  celui  de  Bartsch.  A  l'exception  des  lacunes  de  R, 
qui  devaient  être  comblées  par  la  comparaison  des  autres 
manscrits ,  c'était  partout  sa  leçon  qui,  sauf  impossibilité, 
devait  être  préférée  et  reproduite.  En  fait,  au  point  de  vue  de 
la  méthode,  on  reprochera  au  nouvel  éditeur  de  s'être  montré 
beaucoup  trop  éclectique  et  d'avoir  admis  dans  son  texte  des 
leçons  de  J  ou  de  G,  les  préférant  sans  raison  à  celles  de  R. 
Cf.  notamment  aux  vers  7,  14,  15,  36,  58,  60,  70,  77,  81,  82, 


1  Cf.  Savi-Lopez,  op.  cit.,  pp.  42-45. 

2  Cf.  Chrestomathie  Provençale.  f>*  ùdit.,  pp.  259-266. 


324        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

103,  137.  Mais  surtout  Ton  voit  maintenant  que  les  principes 
mêmes  qui  l'ont  guidé  ne  sont  pas  les  viais.  D'abord  il  semble 
bien  démontré  que  c'est  J  qui  nous  a  conservé  la  nouvelle 
originale.  C'est  donc  le  texte  de  cette  nouvelle  qu'il  fallait, 
avant  tout,  s'efforcer  d'établir  et  presque  exclusivementd'après 
ce  manuscrit.  Pour  la  seconde  partie  c'est  une  nécessité, 
puisque  il  est  seul  à  la  donner.  Il  n'y  avait  qu'à  rejeter  dans 
un  appendice  ou  même  à  supprimer  entièrement  le  domnejaire 
qui  n'a  rien  affaire  avec  la  nouvelle  elle-même.  Mais  même 
pour  la  partie  conservée  en  commun  avec  G  et  avec  R,  c'est 
encore  l'autorité  de  J  qui  devait  être  prépondérante.  11  est,  en 
effet,  le  seul  a  donner  le  texte  intégral  et  c'est  lui  seul  qui 
permet  de  combler  les  lacunes  particulières  kGetkR.  Mais, 
de  plus,  R  étant  un  remaniement  et  son  auteur  ayant  pris 
avec  le  fond  du  récit  les  libertés  que  l'on  sait,  les  leçons 
particulières  à  /?,  dans  cette  première  partie,  peuvent  être, 
elles  aussi,  considérées  comme  des  changements  arbitraires 
du  remanieur. 

Par  contre,  une  fois  établi  le  texte  de  la  nouvelle  originale, 
il  y  avait  intérêt,  en  raison  de  l'agi ément  de  certaines  de  ses 
parties,  à  publier  le  texte  de  R  et  à  donner  ainsi,  après  l'oii- 
ginal,  le  remaniement.  Ici  le  manuscrit  R  reprenait  toute  son 
autorité.  Une  fois  comblées,  grâce  aux  autres  manuscrits,  les 
lacunes  certaines  de  son  texte,  il  n'y  avait  qu'à  le  reproduire 
en  corrigeant  seulement  les  leçons  fautives.  Telle  aurait  dû 
être,  à  notre  avis,  l'édition  double  de  la  nouvelle  du  Papagai 


Sur  l'édition  même  que  nous  en  a  donnée  M.  Savi-Lopez, 
voici  quelques  remarques  et  corrections  suggérées  par  le 
lecture  du  texte  et  des  notes  qui  l'accompagnent*. 

14.  L'argument  donné  pour  préférer  la  leçon  de  ./  que  ùnsti 


»  On  remarquera  que,   en  trois  endroits  (v.  30,  48,  154),  mes  observa- 
tions concordenl  avec  celles  qu'avaient  déjà  faites  M. Antoine  Thoma 

qu'il  avait  communiquées   à  l'auteur   d'un   i ipte-rendu  paru  dans  la 

Romania,  XXXI.  169-170.  Ce  travail  était  rédigé  quand  j'ai  eu  connais- 
sance de  ce  compte-rendu  et  je  n'ai  pas  cru  devoir  supprimer  les  passa- 
ges où  jeine  suis  rencontré  avec  mon  maître. 


DU   «  PAPAGA1  »  325 

per  vos  lu  torney  ne  prouve  rien.  Dans  tout  le  reste  du  pi 
rien  n'indique  que  la  dame  connût  auparavant  Antiphanor  et 
sa  galanterie. 

19-21.  Sans  doute  ces  vers  n'ajoutent  rien  d'essentiel 
qui  a  été  précédemmeni  exprimé,  mais  aux  vers  ?,'.)-'.)  l 

anc  auzetz  dir  (pie  dones 
va  ni  que  la  prezentes 

il  est  fait  allusion  à  des  paroles  et  à  une  proposition  du  papa- 
gai  qui  disparaissent  si,  comme  le  fait  fi,  Ton  omet  les  vers 
19-21. 

23.  La  leçon  de  J  que  d nuira  esser  poderos  est  aussi  accepta- 
ble que  celle  de  II.  L'antithèse  entre  mûrir  et  viure  qu'admire 
M.  Savi-Lopez  pourrait  bien  n'être  qu'une  recherche  du 
remanieur. 

30-31.  Ainsi  ponctué,  le  passage  n'a  pas  de  sens.  La  note 
correspondante  confirma  que  l'éditeur  n'a  pas  compris.  Il  faut, 
évidemment,  ponctuer 

Et  a  li  dig  :  «  Amie,  e  don 
Sai  es  vengutz  e  que  sercatz  ? 

et  entendre  don  =  d'où. 

45.  La  leçon  véritable  ne  serait-elle  pas  celle  de  G  non 
amaz.  Dans  tout  le  discours  de  la  dame  il  n'a  pas  été  question 
d' Antiphanor  et  l'on  ne  voit  pas  quel  pourrait  être  régulière- 
ment l'antécédent  de  lo  dans  non  l'amatz.  De  plus,  la  réponse 
de  la  dame  n'est  possible  que  si  le  papagai  a  parlé  d'aimer 
sans  désigner  précisément  la  personne. 

48.  Vouloir  retrouver  dans  cal  une  forme  du  verbe  caler, 
c'est  se  condamner  à  ne  pas  comprendre.  Comme  l'avait  bien 
vu  Rajnouard,  cal  n'est  ici  que  le  pronom  interrogatif  :  «  Et 
vous  [aimez]  qui,  ma  dame  ?  » 

S.  Du  point  de  vue  même  de  M.  S.  L.,  il  fallait  conserver 
ici  la  leçon  de  //  nom  vue  h  laissar. 

91  92.  On  peut  d'autant  mieux  accepter  sas  vertutz  ou  las 
vertutz  et  y  voir  une  personnification  des  vertus  allant  avec 
Amour,  que  M.  S.-L.  lui-même  (p.  13)  cite  un  passage  de  la 
Messe  des  Oiseaux  de  Jean  de  Condé,  où  le  papagai  enseigne, 
dans  un  véritable  sermon,  les  quatre  vertus  de  l'amour: 
obéissance,  patience,  loyauté  et  espérance. 


526        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

93.  La  forme  d'infinitif  dezir  =  dir,  dire,  particulière  à  R, 
est  une  forme  unique  et  R  est  trop  souvent  fautif  pour  que 
son  autorité  soit  suffisante.  Cf.  E.  Lévy,  Provenz.  Supplem. 
Wœrterb., Il,  24,  qui  semble  la  considérer  comme  devant  être 
rejetée. 

125.  La  leçon  de  R  cabans  d'un  an  est  en  contradiction 
avec  ce  qu'a  dit  précédemment  la  dame,  v.  105,  Queu 
m'acordaray  en  breumen.  Le  papagai  est  plus  expéditif,  cf.  v. 
193.  Encar  a  nueg  l'en  menaray.  Il  faut  évidemment  corriger 
cabans  deman. 

127-128.  Aucune  raison  de  supposer  entre  ces  deux  vers 
une  lacune.  On  ne  voit  pas,  du  reste,  au  point  de  vue  du  sens, 
ce  qu'on  pourrait  intercaler  entre  eux.  On  peut  très  aisément 
entendre  de  layns  même  venant  après  le  vers  qui  précède 
dans  R.  La  seule  difficulté  sérieuse  c'est  l'absence  d'un  sujet 
nettement  exprimé  des  verbes  ac  et  es  vengutz.  Encore  n'y 
a-t-il  rien  là  de  particulièrement  choquant.  Le  papagai  est 
toujours  le  principal  acteur.  C'est  lui  qui  a  parlé  le  dernier  et 
le  vers  127  interrompant  à  peine  le  récit,  il  est  facile  de 
suppléer  le  papagai  comme  sujet  des  deux  verbes.  La  correc- 
tion de  M.  Stengel  Ab  tan  part  de  lor  parlamen  reste  au  sur- 
plus possible,  et  R  qui  est  le  seul  à  donner  le  passage,  n'a 
pas  une  telle  autorité  qu'on  ne  puisse  parfois  le  corriger. 

141.  Le  manuscrit  dit  miray  que  Bartsch  corrige  en  maney 
qu'accepte  M.  Savi-Lopez.  Il  faut  probablement  lire  intrey, 
dont  on  s'explique  plus  aisément  l'altération  en  miray. 

144.  L'éditeur  imprime  telle  quelle  la  leçon  du  manuscrit 
may  volrCesser  soutz  que  près,  à  laquelle  il  est  bien  difficile 
de  donner  un  sens  satisfaisant.  Ne  doit-on  pas  corriger  volria 
en  volia  et  soutz  en  lentz?  «  J'aimais  mieux  être  lent,  aller 
lentement  qu'être  pris  »  ;  ce  qui  concorde  avec  les  précautions 
du  papagai  pour  pénétrer  dans  le  jardin. 

153-156.  D'après  ce  que  nous  avons  dit  (cf.  supra,  p.  304- 
3091  de  la  contradiction  existant  entre  les  vers  156-157,  il  faut 
certainement  rétablir  comme  il  suit  ces  vers  : 

v.  153.  Mas  jes  no  sap  per  cal  razo 
v.  156.  Jes  no  vos  en  sap  cosselhar. 

En  outre,  il  faut  corriger  au  v.  154  non  prenguam  en  nos 
prenguam. 


DU    «  PAPAGA1  »  327 

159.  Corriger  abrassatz  en  abrasatz. 

1(50.  La  correction  per  esperulz  est  à  rejeter  comme  inutile 
et  peu  satisfaisante.  Il  faut,  au  contraire,  maintenir  la  leç  m 
du  manuscrit/^/-  espatz,  qui  est  une  locution  courante  signi- 
fiant à  loisir,  cf.  E.  Levy  Provenz.  Suppl.  Woerterbuch,  111, 
2  17.  Il  est  certain  que  la  correction  de  Bartsch  be  per  espatz 
est  une  conjecture  ;  elle  n'en  est  pas  moins  très  vraisemblable. 
On  ne  voit  pas  pourquoi  M.  S.-L.  se  refuse  à  dériver  espatz 
de  spatium,  ni  surtout  pourquoi  il  n'admet  pas  une  forme 
espatz,  au  moins  aussi  régulière  que  espas. 

173.  La  leçon  du  manuscrit  Dona  sel  Dieu  que  vos  criet  est 
évidemment  fautive,  puisqu'elle  supprime  la  rime  avec  voletz, 
mais  la  correction 

Dona  aisel  Dicus  que  vos  felz 

qui  suppose  une  double  faute,  n'est  probablement  pas  la  bonne. 
Il  faut,  sans  doute,  lire  Dona  sel  Dieus  que  vos  creetz  et 
entendre  creetz  comme  la  2e  p.  plur.  In  lie.  prés,  de  crezer, 
creire=  croire:  «  Madame,  le  Dieu  que  vous  croyez,  en  qui 
vous  croyez  ....  ».  Bartsch  corrigeait  aussi  de  façon  assez 
voisine  que  vos  crietz,  mais  il  entendait  crietz  comme  une 
3e  p.  s.  Ind.  parf.  de  crear,  ce  qui  est  impossible.  C'était,  du 
reste,  le  seul  exemple  qu'il  donnât  de  cette  forme.  Cf.  Chrestom. 
provençale  p.  435. 

182.  Etant  donné  que  Yamislat  d'Antiphanor  est  chose 
acquise  à  la  dame  et  qu'elle  n'a  plus  à  la  souhaiter,  ne  doit-on 
pas  corriger  per  la  vista  d'Antiphanor?  La.  suite  des  idées 
serait  alors  toute  naturelle  et  l'on  s'expliquerait  qu'aussitôt 
après,  la  dame  se  préoccupât  des  moyens  de  le  voir.  Cf.  Dom- 
nej'aire,  v.  36,  ni  per  para  da  ni  per  vista. 

188.  Mettre  une  virgule  après  meravelh. 

193-196.  Aucune  nécessité  au  point  de  vue  du  sens  de 
supposer  une  lacune.  De  même,  les  vers  301-303  et  309-311 
présentent  des  groupes  de  trois  vers  rimant  ensemble  sans 
que  l'on  puisse  davantage,  pour  le  sens,  soupçonner  une 
lacune.  Cf.  supra  p.  311,  note  3. 

204.  Corriger  évidemment  per  fors'  escantir.  Je  ne  connais 
pas  d'emploi  de  per  fort  au  lieu  que  la  locution  per  forsa 
est  courante. 


32S        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 

224-225.  Supprimer  toute  ponctuation  après  cami,  sans 
quoi  il  est  difficile  d'entendre  viatz.On  pourrait  songer,  il  est 
vrai,  à  le  prendre  pour  une  interjection:  «  Allons,  vite  », 
mais  l'on  ne  connaît  pas  d'exemple  d'un  pareil  emploi.  Peut- 
être  faut-il  tout  simplement  corriger  viatz  en  anatz. 

232.  Il  faut  probablement  corriger  faitz  me'n  liurar.  Cf.  234 
li'n  fa  y  liurar. 

238.  La  leçon  du  manuscrit  Vuna  va  et  Vautra  s'en  enquier, 
est  évidemment  fautive,  mais  ni  la  correction  de  Bartsch  Vuna 
ra  et  Vautra  Venquier,  ni  celle  de  M.  Savi-Lopez  Vuna  va, 
Vautra  s' en  enquier,  ne  sont  satisfaisantes.  Quel  sens  donner  au 
verbe  va  ?  Ce  mot  va  est  évidemment  une  faute  pour  uca,  3e  p. 
s.  Ind.  pr.  de  ucar,  qui  désigne  l'habitude  qu'avaient  les  guet- 
teurs ou  gâchas  de  huchier.  Cf.  Raynouard.  Lexiq.  V,  444, 
citant  en  anc.  français  Tote  noit  fist  ses  gaites  et  huchier  et 
corner.  Le  vers  tout  entier  doit  être  lu  :  Vuna  uc  e  Vautra 
enquier.  «  L'un  crie,  l'autre  interroge  ». 

262.  La  correction  /eu  fag  n'ai/  est  une  correction  quel- 
conque. On  lirait  avec  au   moins  autant  de  raison  :  Ben  fag 
n'ay  tôt  V assemamen. 
284.  Ecrire  de  Vautre. 

302.  Ici  encore,  uniquement  parce  qu'il  est  choqué  d'un 
groupe  de  trois  vers  rimant  en  -etz,  M.  Savi-Lopez  suppose 
à  tort  une  lacune  ou  une  interpolation.  Il  est  inexact,  du 
reste,  de  dire  que  en  est  segle  exprime  la  même  idée  que  tant 
cant  viuretz. 

305.  Corrieu  a  évidemment  ici  le  sens  de  courrier,  piqueur 
et  désigne  le  cavalier  qui  accompagne  ou  précède  un  per- 
sonnage d'importance.  Ici  le  mot  est  appliqué  de  façon 
plaisante  au  papagai. 

307.  A  notre  avis  (cf.  supra,  p.  314)  il  faut  supposer  ici  une 
lacune  d'un  vers  qui  pourrait  être  Delplazen  papagai  cor  tes. 
311.  Si  l'on  admet  que  que-lslaisso  a  lorpes  anar  fait  allu  i  m 
au  fait  que  la  dame  était  enfermée  dins  un  verdier  de  mur 
serat,  il  est  vraisemblable  que  le  vers  suivant  contenait  une 
allusion  à  l'autre  précaution  attribuée  au  mari  et  à  la  pré- 
sence des  guetteurs  ou  gâchas.  On  pourrait  supposer  dans 
l'original  de  R 


DU    «  PAPAGAI  »  329 

Que*la  laisso  a  lor  pea  inar 
E  ses  (juchas,  que  may  valra. 


Continuation  de  J  à  partir  du  vers  1 1<>.   Savi-Lopez,  Op.  cit., 
p.  62-64.) 

5.  Effacer  la  virgule  après  analz. 
1415.   Les  deux  vers 

Per  vostre  papagai  vos  val 
Car  hieu  vos  vei  tan  plazeutier. 

contiennent  une  contradiction.  La  <lame  avoue  à  Antiphanor 
que  c'est  à  ce  papagai  qu'il  doit  d'être  accueilli  par  elle.  Il 
faut  donc  corriger  le  second  v  ira  et  lire 

Car  hieu  no-n  vui  tan  plazentier 

«  Car  je  n'en  connais  pas  d'aussi  plaisant.  » 

37.  Le  manuscrit  porte  :  Mas  ieu  non  o  die  per  vos  qui  est 
fautif.  L'éditeur  propose  :  Mas  ieu  j  a  non  o  die  per  vos.  On 
corrigerait  au  moins  aussi  bien  en  lisant:  Mas  ieu  non  o  die  j  es 
per  vos. 

51.  Aucune  raison  da  corriger  la  leçon  du  manuscrit  el cava- 
le er  près  comiat.  Ou  ne  voit  pas  pourquoi  après  es\  préférable 
à  /ires  et  l'emploi  de  comiat  comme  trisyllabique  est  attesté 
par  ailleurs. 

Cf.  277.     Et  a  ubert  ses  comiat 

De  las  gâchas  e  mal  lnr  gi'at. 

60.  L'éditeur,  après  M.  Stengel,  conserve  la  leçon  du 
manuscrit 

e  prec  vos  que  lo  mien  don  man 

à  laquelle  il  est  difficile  de  trouver  un  sens.  M.  Savi-Lopez  le 
reconnaît  lui-même.  Il  faut  certainement  corriger  lo  mieu 
doman.  Le  cavalier  rappelle  à  la  dame  la  demande  qu'il  lui  a 
faite  aux  vers  52 -■  La  tonne  doman  est  moins  fréquente  que 
deman,  mais  a  sûrement  existé.  Cf.  E.  Lévy,  Prov.  Supplem 
Wcerterb.,  citant  les  formes  doman dar,  domandador. 


330        SUR  LA  NOUVELLE  PROVENÇALE 


Texte  du  Domne faire  (Savi-Lopez,  Op.  cit.,  p.  65-67). 

3.  Corriger  évidemment  totz  vostres  mandamenz. 

45.  Le  vers  est  corrompu  dans  les  manuscrits.  Il  faut  cor- 
riger e'm  levatz  paeis  de  ginoillos. 

65.  Le  vers  dompna  per  aquest  sanz  avangelis  est  probable- 
ment altéré.  Au  point  de  vue  du  sens  aquest  ne  s'explique  pas 
très  bien.  Mais  surtout  s'il  faut  considérer  ce  vers  final  comme 
un  vers  isolé  analogue  au  Senher  marques  qui  termine  les 
épîtres  de  Raimbaut  de  Vaqueiras1,  je  doute  qu'on  puisse 
admettre  que  ce  vers  avait  neuf  syllabes,  le  récit  tout  entier 
étant  en  octosyllabes.  Les  Leys  d'Amors  connaissent  bien  un 
genre  de  novas  rimadas  se  terminant  sur  un  vers  isolé  et 
admettent  bien  que  quel  que  soit  le  genre  des  novas  rimadas, 
annexas,  parionas  ou  comunas,  le  dernier  vers,  verset,  o  bordo 
peut  être  biocatz,  c'est-à-dire  incomplet.  Le  vers  qui  termine 
les  novas  rimadas  peut  donc  rimer  avec  un  autre  vers,  ou 
être  isolé,  et  s'il  est  isolé,  il  peut  ou  non  être  incomplet.  Mais 
jamais  on  ne  voit  qu'il  puisse  êire  plus  long  que  le  vers  em- 
ployé dans  le  corps  du  récit.  Il  faut  donc  faire  un  octosyllabe 
du  vers  Domna  per  aquest  sanz  avangelis  et  corriger  Domna 
per  los  sanz  avangelis.  Cf.  du  reste  au  v.  33.  E  per  los  avan- 
gelis sanz. 

Jules  Goulet. 

1  Savi-L«pez,  Op.  cit.,  p.  35. 


BIBLIOGRAPHIE 


Emile    Faguet,  de  l'Académie  française.  —  La  politique  comparée  de 
Montesquieu,  Rousseau  et  Voltaire.  Paris,  Société  française  (Timpi 
de  libr.,  1902,  in-16,  3,50. 

L'auteur  des  Questions  politiques  et  des  Politiques  et  moralistes 
du  dix-neuvième  siècle  continue  son  enquête  sur  «  les  différentes 
questions  qui  nous  préoccupent,  qui  nous  divisent  et  qui  nous  ruinent 
depuis  cent  vingt  ans  »,  et,  cetto  fois,  il  cherche  ce  qu'en  ont  pensé 
«  les  trois  hommes  les  plus  considérables  du  dix-huitième  siècle  », 
Montesquieu,  Rousseau  et  Voltaire.  Successivement  il  passe  en  revue 
Vidée  de  patrie,  —  la  liberté, —  l'autorité, —  l'organisation  sociale  : 
socialisme  et  individualisme,  —  /<!  centralisation  et  la  décentrali- 
sation, —  le  pouvoir  judiciaire,  —  l'Etat  et  les  Eglises,  —  l'Etal  et 
V éducation,  —  l'Etat  et  l'armée,  —  certaines  réformes  administra' 
lives  et  de  législation  ;  et,  sur  ces  divers  points,  il  constate  qu'en 
dépit  de  quelques  hésitations  et  contradictions,  les  trois  écrivains 
représentent  des  doctrines  fort  nettes  et  distinctes.  Montesquieu  le 
libéralisme,  Rousseau  le  despotisme  démocratique,  Voltaire  le  des- 
potisme royal.  Quant  aux  opinions  propres  de  M.  Faguet,  elles  ne 
s'étalent  pas  indiscrètement,  mais  elles  se  laissent  voir  partout,  et  ce 
ne  sont  pas  elles  qui  donnent  au  livre  son  moindre  intérêt.  Libéral 
convaincu,  M.  Faguet  est  le  plus  souvent  d'accord  avec  Montesquieu, 
dont  il  accommode  à  notre  temps  les  théories. 

Sa  conclusion  est  loin  d'être  optimiste  : 

«  Le  rêve  de  Voltaire,  le  vrai,  la  monarchie  absolue,  sous  un  titre 
ou  sous  un  autre,  mais  la  monarchie  absolue,  ennemie  de  toute 
liberté,  concentrant  tous  les  pouvoirs,  intelligente  quand  elle  pourra, 
c'est-à-dire  une  fois  sur  dix,  persécutrice,  défiante,  tracassière  et 
tyrannique  toujours,  protégeant  peut-être  les  arts  et  les  lettres,  qui 
n'ont  pas  besoin  d'être  protégés  ;  c'est  à  quoi  il  faut  s'attendre  et  ce 
qui  nous  attend.  Ç'à  été  le  premier  résultat  de  la  Révolution  fran- 
çaise, c'en  sera  le  dernier.  C'était  la  philosophie  politique  de  Voltaire. 
Elle  sera  réalisée.  L'avenir  appartient  au  roi  Voltaire.  11  appartient 
aussi  au  roi  de  Voltaire.  » 

Nous  ne  pouvons  songer  à  examiner  ici  en  détail,  et  moins  encore 


33  2  BIBLIOGRAPHIE 

à  discuter,  un  livre  qui  touche  à  la  politique  plus  encore  qu'à  la  litté- 
rature. Mais  il  était  bon  de  le  signaler  à  l'attention  de  tous.  On  sait 
de  quelle  variété  de  connaissances,  de  quelle  intelligence  pénétrante, 
de  quelle  puissance  de  pensée  témoignent  les  ouvrages  de  M.  Faguet. 
Il  force  à  réfléchir  ceux  mêmes  qui  sont  le  moins  disposés  à  l'approu- 
ver. Et  pourra-t-on  jamais  assez  réfléchir  sur  les  matières  qui  sont 
traitées  dans  cet  important  ouvrage  ? 

Eugène  Rigal. 

Jules  Lemaître,    de  V Académie  française.  —  Quatre  discours.    Paris, 
Société  française  d 'impr.  et  de  libr.,  1902,  in-16,  2  fr. 

Le  volume  de  M.  Jules  Lemaître  contient  des  discours  prononcés  à 
diverses  dates  :  sur  Racine  et  Porl-Royal,  —  sur  les  Prix  de  vertu, 
—  en  réponse  à  M.  Berthelot,  entrant  à  l'Académie  française,  —  aux 
Femmes  du  monde.  Le  premier  seul  touche  à  l'histoire  de  la  littéra- 
ture :  il  est  exquis. 

E.  R. 

Bernardin  (N.-M.).  —  La  Comédie  italienne  en  France  et  les  Théâtres 
de  la  Foire  et  du  Boulevard  (1570-1791).  Paris,  édition  de  la  Revue 
Bleue,  1902,  in-12,  2  fr.  50. 

Auteur  d'une  très  savante  thèse  sur  Tristan  l'Hermite  et  conféren- 
cier toujours  applaudi  de  l'Odéon,  M.  Bernardin,  outre  qu'il  connaît  à 
fond  l'histoire  du  théâtre,  possède  à  la  fois  les  qualités  austères  de 
l'érudit,  auquel  la  vérité  est  sacrée,  et  les  qualités  aimables  de  l'ora- 
teur, qui  doit  plaire  au  grand  public.  Aussi  n'y  a-t-il  pas  lieu  de 
s'étonner  qu'il  ait  expliqué  avec  exactitude  et  avec  esprit  comment  la 
comédie  italienne  s'est  établie  à  Paris,  comment  elle  s'est  modifiée, 
comment  elle  adonné  naissance  à  l'opéra- comique.  «  C'est,  dit-il,  l'his- 
toire de  cette  installation,  de  cette  évolution,  de  cette  transformation 
enfin,  que  je  veux  rapidement  conter  depuis  le  seizième  siècle  jusqu'en 
1791,  m'arrêtant  seulement  aux  faits  principaux,  aux  écrivains  les 
plus  célèbres  et  à  leurs  œuvres  les  plus  importantes;  car  ce  qui  me 
paraît  intéressant  ici,  ce  n'est  pas  de  réunir  une  quantité  de  noms,  de 
titres  et  de  dates,  mais  bien  plutôt  de  dégager  de  ces  œuvres  oubliées 
et  parfois  mutilées,  l'esprit  même  de  la  Comédie  italienne  et  de  mar- 
quer l'influence  qu'elle  a  pu  exercer  sur  notre  Comédie  nationale;  et 
c'est  aussi  de  montrer  la  part  que  sont  en  droit  de  revendiquer  fière- 
ment avec  elle  les  Théâtres  de  la  Foire  et  du  Boulevard  dans  cette 
conquête  de  la  liberté  des  théâtres,  qui  devait  être  si  féconde  en 
heureux  résultats  ». 


MULIOGHAPniE  333 

Rien  de  plus  agréable  que  la  lecture  île  ce  joli  volume,  d'ailleurs 
orné  de  nombreuses  illustrations.  Si  la  Bibli<>thè</ue  théâtrale  illuth 
que  la  Comédie  italienne  de  M.   Bernardin  inaugure  et  qui    paraîtra 
sous  la  direction  de  M.  Paul  Ginisty,  compte   beaucoup   d'ouvrages 
comparables  à  celui-ci,  son  succès  sera  grand  et  de  bon  aloi. 

Eugène  Rigal. 

Vendryès  (J.).  —  Recherches  sur  l'histoire  et  les  effets  de  l'intensité  ini- 
tiale en  latin.  Paris,  Klincksieck,  L902    XIV,  348  p.]. 

11  i  a  cinquante  ans  que  Dietrich  a  émis  l'ipotèse  d'un  accent 
d'intensité  initial  en  latin;  elle  lui  paraissait  indispensable  pour 
remlre  compte  de  certains  faits  de  siDeope  et  de  mutation  vocaliijue 
qui  apparaissent  dans  l'intérieur  des  mots  de  cette  langue.  Depuis,  la 
question  a  été  maintes  fois  reprise,  étudiée  à  nouveau,  fouillée,  retour- 
née de  toutes  façons  ;  mais  on  n'est  pas  arrivé  à  des  conclusions  suf- 
fisamment démonstratives  pour  entraîner  toutes  les  adésions  dans 
un  sens  ou  dans  l'autre,  et  l'on  peut  dire  qu'il  reste  deux  camps  en 
présence  dont  l'un  considère  l'existence  d'une  intensité  initiale  en 
latin  comme  un  fait  acquis  et  indiscutable,  tandis  que  l'autre  la 
rejette  comme  une  ipotèse  dépourvue  de  tout  appui  et  d'ailleurs 
inutile.  Ces  derniers  reconnaissent  les  mêmes  faits  de  sincope  et  de 
mutation  vocalique  que  louis  adversaires,  mais  ils  croient  pouvoir 
les  expliquer  autrement,  et  chacun  reste  sur  ses  positions.  11  va  de 
soi  pourtant  que  l'une  des  deux  téories  doit  être  erronée  ;  et  il  est 
à  supposer  a  priori  que  si  ses  adversaires  n'ont  pas  pu  démontrer 
nettement  par  où  elle  prête  le  flanc,  c'est  qu'on  s'est  surtout  borné 
jusqu'à  présent  à  étudier  des  points  particuliers  de  la  question  indé- 
pendamment des  autres  N'arriverait-on  pas  à  une  solution  définitive 
en  reprenant  tout  l'ensemble  du  problème  et  en  confrontant  tous  les 
faits  qui  le  concernent?  C'est  ce  qu'a  pensé  M.  Vendryès  et  ce  qu'il 
a  essayé  de  réaliser.  L'entreprise  estardie,  non  seulement  parce  qu'un 
sujet  qui  a  été  pendant  cinquante  ans  remis  sur  le  métier  sans 
résultat  concluant  par  des  savants  de  premier  ordre  présente  évi- 
demment des  difficultés  peu  communes,  mais  encore  parce  que  le 
latin  est  l'une  des  moins  claires  de  toutes  les  anciennes  langues  indo- 
europénnes.  L'auteur  ne  s'est  pas  fait  d'illusions  à  cet  égard,  mais  il 
s'est  senti  mieux  outillé  que  ses  devanciers  parce  qu'il  disposait  de 
deux  instruments  de  plus,  le  contrôle  de  la  fonétique  expérimentale 
d'une  pair,  et  en  même  temps  une  métode  nouvelle  qui  est  en  onneur 
en  Fiance  depuis  quelques  années  et  qui  consiste  à  éclairer  les 
Lingues  mortes  par  les  vivantes,  à  expliquer  le  passé  par  le  présent, 
et  d'une  manière  générale  lorsqu'un  fénomèue  est  obscur  dans   une 


334  BIBLIOGRAPHIE 

langue  et  clair  dans  une  autre,  à  user  des  lumières  que  fournit  celle-ci 
pour  dissiper  les  ténèbres  qui  planent  sur  celle-là. 

La  première  partie  est  destinée  à  donner  une  base  solide  à  la 
seconde.  Elle  a  pour  objet  d'établir  l'existence  et  de  fixer  les  limites 
de  l'intensité  initiale.  L'auteur  examine  tous  les  témoignages  dont 
on  dispose,  c'est-à-dire  ceux  qui  sont  fournis  par  les  langues  roma- 
nes, par  les  grammairiens  latins,  parlafonétique  latine.  Il  arrive  aux 
conclusions  suivantes  :  pendant  la  période  classique,  qui  va  du 
II*  siècle  avant  J.-C.  au  IVe  après,  la  langue  latine  possédait  la 
distinction  des  longues  et  des  brèves  et  de  plus  un  ton  ou  accent  de 
auteur  qui,  suivant  les  cas,  prenait  place  sur  la  sillabe  pénultième 
ou  sur  l'antépénultième  ;  pas  trace  d'un  accent  d'intensité.  Dans  la 
période  préistorique,  le  latin  présentait  les  deux  mêmes  caractères 
puisqu'il  les  tenait  l'un  et  l'autre  de  l'indo-européen  ;  mais  il  avait 
en  outre  un  accent  d'intensité,  dû  non  pas  à  l'élévation  de  la  voix, 
mais  à  l'effort  musculaire.  Cet  accent  d'intensité,  qui  frappait  l'initiale, 
était  une  innovation  du  latin  ;  il  cessa  de  se  manifester  à  l'époque 
où  apparurent  les  premières  œuvres  littéraires.  A  la  fin  de  la  période 
classique  le  sentiment  de  la  quantité  s'efface  peu  à  peu,  le  ton  devient 
progressivement  accent  d'intensité  et  les  sillabes  accentuées  s'allon- 
gent tandis  que  les  autres  s'abrègent.  Cet  état  de  choses  caractérise 
une  troisième  période,  la  période  romane,  qui  dure  encore  aujour- 
dui. 

La  seconde  partie  est  consacrée  à  l'étude  des  effets  de  l'intensité 
initiale;  les  principaux  sont  la  loi  des  mots  iambiques,  la  sincope  et 
la  mutation  vocalique.  Aucun  de  ces  fénomènes  n'est  dû  à  l'intensité 
seule,  mais  à  la  lutte  de  l'intensité  avec  le  principe  quantitatif  ou  au 
concours  de  ces  deux  éléments.  L'intensité  suffit  à  expliquer  le  double 
traitement  sitis  /dûs,  mare/  far(r)  ;  mais  elle  ne  rend  pas  compte  à  elle 
seule  du  double  traitement  de  abl  et  abïuissem;  celui  de  abl  résulte 
à  la  fois  de  l'intensité  initiale  et  de  l'imprécision  quantitative  de  la 
finale.  Le  cas  de  senectùtem  s'explique  par  le  concours  de  l'intensité 
initiale  et  du  ritme  quantitatif.  On  saisit  en  même  temps  pourquoi  les 
deux  sillabes  de  l'élément  iarnbique  obi,  senec-  sont  inséparables  et 
doivent  entrer  dans  un  même  demi-pied,  et  aussi  pourquoi  un  mot 
commençant  par  trois  brèves,  tel  que  miser ia,  n'a  pas  normalement 
chez  Plaute  l'ictus  sur  \x  seconde.  La  formule  générale  de  la  loi  de 
sincope  reste  telle  qu'elle  avait  été  énoncée  en  France  en  1893,  mais 
on  voit  aujourdui  pourquoi  aucune  sincope  ne  se  produit  dans  les 
mots  du  tipe  facilius,  ni  dans  ceux  dont  la  seconde  sillabe  est  lon- 
gue de  position. 

En  résumé, nous  avons  affaire  ici  à  un  excellent  livre  et  la  question 
qu'il  traite  peut  être  considé  nme  définitivement  tranchée.  Aussi 


BIBLIOGRAPHIE  33  5 

ne  chicanerons-nous  pas  l'auteur  sur  quelques  menus  détails  qui 
gagneraient  peut-être  à  être  interprétés  autrement,  sans  que  cela 
change  rien  à  l'ensemble.  Nous  n'avons  pas  dit  que  cet  ouvrage  est 
une  tèse  de  doctorat,  parce  que  cela  n'a  aucune  importance  et  n'inté- 
resse personne,  étant  donné  que  certains  obtiennent  le  même  grade 
avec  des  travaux  dénués  de  toute  espèce  de  valeur.  Ce  qui  vaut 
mieux,  c'est  de  pouvoir  constater  que  l'auteur  est  remarquablement 
documenté  et  fait  preuve  de  beaucoup  de  sûreté  et  de  pénétration; 
son  étude  marque  l'apparition  d'un  nouveau  linguiste  digne  de  ce 
nom,  que  nous  ajouterons  désormais  à  la  liste  si  courte  de  ceux  dont 

la  France  pourrait  s'enorgueillir. 

Maurice  Gkammont. 

LIVRES  ET  BROCHURES  ANNONCÉS  SOMMAIREMENT 

Ascoll  (G.-J-).  —  Ancora  délia  sibilante  tra  vocali  nel  Toscano  (Estralto 
dair  Archivio  glottologico  italiano),  1902. 

M.  Ascoli  montre  que  l'a  intervocalique  latin  est  rendu  en  toscan 
par  s  sourd  dans  les  mots  comme  famoso,  peso,  preso,  etc.,  &  par  s 
sonore  (z)  dans  les  mots  comme  uzo,  vko,  uccizo,  etc.  Dans  la  pre- 
mière catégorie  l'a  intervocalique  provenait  d'un  ancien  -ns-,  dans  la 
seconde  d'un  ancien  -88-  simplifié  après  voyelle  longue.  11  résulte  de 
la  constatation  de  M.  Ascoli  une  conclusion  importante  pour  la  pro- 
nonciation du  latin,  c'est  que  l'a  de  famosus  était  nettement  sourd, 
tandis  que  celui  de  usu8  était  sonore  ou  «  volgente  al  sonoro  ».  Les 
grammairiens  latins  sont  muets  sur  cette  différence  de  prononciation  ; 
mais,  d'une  manière  générale,  ils  nous  ont  dit  si  peu  de  choses,  &  ils 
ont  si  mal  observé  leur  langue  que  leurs  témoignages  sont  le  plus 
souvent  à  peine  dignes  d'être  pris  en  considération.       M.  G. 

Onoranze  a  Graziadio  Ascoli.  —  Une  brochure  in  4°,  32  pp.  Milano, 
tip.  Bernardoni  di  C.  Rebeschini,  1901.  (Pubblicazione  del  Comitato  per 
le  Onoranze.) 

Nous  avons  précédemment  signalé  [Revue,  1901)  le  volume  de 
Mélanges  de  linguistique  publié  pour  fêter  le  soixante-dixième  anni- 
versaire de  la  naissance  de  M.  Ascoli  (10  juillet  1829)  et  le  quaran- 
tième de  son  professorat  (3  janvier  1801).  Le  présent  opuscule 
complète  ce  volume  de  Mélanges.  11  contient  un  court  récit  de  la 
formation  de  ce  comité,  de  son  œuvre,  de  la  fête  où  le  volume  fut 
offert  au  vénérable  professeur,  et  les  discours  prononcés  en  cette 
circonstance.  Le  plus  intéressant  est  celui  de  M.  Ascoli  lui-même, 
qui  a  rappelé  les  origines  de  V Accademia  scientijîco-letteraria  de  Milan, 
où  il  professe,  et  présenté  des  hypothèses  intéressantes  sur  ses 
destinées  probables.  L'Académie  devait  être,  selon  la  pensée  de  ses 


3S6  CHRONIQUE 

fondateurs,  Mamiani,  Carlo  Tenca,  Gabriele  Rosa,  etc.,  une  sorte 
de  Collège  de  France,  lombard  et  italien  :  elle  est  devenue  une 
Faculté  de  lettres  de  plus.  Ascoli  compte  sur  la  transformation,  pro- 
chaine et  nécessaire,  de  l'enseignement  classique  secondaire  en  Italie, 
pour  rendre  inutile  la  coexistence,  à  Milan  et  à  Pavie,  de  deux 
facultés  de  lettres,  et  il  espère  que  l'Accademia  reprendra  alors  sa 
destination  première  et  son  caractère  véritable:  «  Risorgerà  allora 
per  Milano  l'aspirazione  al  gran  modello  del  Collège  de  France,  e 
vuol  dire  la  scuola  che  non  fissa  il  numéro  délie  catedre,  non  i  corsi, 
non  i  programmi  e  anzi  esclude  la  reiterazione  di  un  medesimo 
corso.  »  —  Il  est  intéressant  de  constater  la  réputation  de  notre  vieux 
Collège  de  France  à  l'étranger,  à  l'heure  où  certains  chez  nous  sem- 
blent n'en  pas  bien  comprendre  la  raison  d'être  et  l'utilité. 

L.-G.  P. 

CHRONIQUE 


Dans  un  des  derniers  numéros  de  l'Archiv  fur  das  Studium  der  neue- 
ren  Sprachen  und  Litteraturen  (tome  cvii,  p.  338,  suiv.),  M.  C.  Appel 
s'occupe  à  son  tour  de  Vamour  lointain  de  Jaufre  Rudel  et  apporte 
une  explication  bien  originale.  Uamors  de  terra  lonhdana  dont  parle 
le  poète  serait  un  amour  éloigné  de  la  terre  (p.  343)  et  nous  aurions  ici 
une  des  plus  anciennes  applications  du  langage  de  l'amour  terrestre 
à  l'amour  céleste.  M.  Appel  qualifie  lui-même  son  hypothèse  de  «(ha- 
sardeuse »  :  mais  les  efforts  qu'il  fait  pour  la  justifier  et  pour  détruire 
les  objections  qui  se  présentent  l'amènent  à  une  discussion  des  plus 
serrées,  qui,  si  elle  n'entraîne  pas  la  conviction  absolue,  a  le  mérite 
de  présenter  l'énigme  sous  un  jour  tout  nouveau.  J.  A. 


Le  docteur  LudwigFraenkel,  professeur  au  Gymnase  réal  d'Asehaf- 
fenbourg,  consacre  dans  les  Berichte  des  freien  deutschen  Hochstiftes 
de  Francfort  s.  M.  (Neue  Folge,  Band  XVII)  un  intéressant  article  au 
Kritischer  Jahresbericht  de  Vollmôller.  Nos  lecteurs  connaissent  cet 
annuaire  si  complet  qui  donne  un  résumé  fidèle  de  tous  les  travaux 
qui  se  rapportent  à  la  philologie  romane.  Il  se  divise  en  quatre  parties 
principales  :  Grammaire  des  langues  romanes,  Littérature,  Sciences 
auxiliaires,  Enseignement  des  langues  romanes.  Parmi  les  subdivisions 
de  la  première  partie,  nous  nous  contenterons  de  citer  :  a)  Grammaire 
et  Lexicologie  de  l'ancien  provençal;  b)  Grammaire  et  Lexicologie 
du  provençal  moderne;  c)  Ancien  provençal  (textes);  d)  Provençal 
moderne  (textes)  ;  e)  Patois  provençaux.  Enfin,  dans  la  subdivision 
Grammaire  du  provençal  moderne,  une  place  est  faite  à  la,  Langue  des 
félibres.  Cet  aperçu ,  quoique  incomplet,  suffit  à  montrer  la  place 
qu'occupe  le  provençal  dans  Y  Annuaire  critique  de  M.  Vollmôller,  et 
les  volumes  déjà  parus  prouvent  que  ce  n'est  pas  là  un  vain  pro- 
gramme. J.  A. 


Le  Gérant  responsable:  P.  Hamelin. 


RECETTES  DE  FAUCONNERIE 
ET  ÉLÉMENTS  DE  MÉDECINE 


Le  texte  de  fauconnerie  que  j'ai  publié  dans  cette  Revue  il  y 
a  déjà  longtemps  (voyez  a.  1896,  t.  xxxix,  p.  289),  est  certaine- 
ment l'œuvre  d'un  copiste  italien  qui  prenait  son  bien  ou  il  le 
trouvait,  entassant  pêle-mêle  des  recettes  latines,  italiennes 
et  provençales;  peut  être  avait-il  sous  les  yeux  un  petit  traité 
de  Peire  de  l'Astor.  Les  deux  dernières  recettes  ne  sont  peut- 
être  pas  de  la  même  source;  des  mots    comme  ardoir  (ligne 
187)  et  le  sel  (à  coté  de  sal)  trahissent  une  provenance   fran- 
çaise pour  l'avant-dernière  ;  et  la  dernière  est  toute  eu  italien 
à  peu  près  correct.  Quelques  mots  demandent  une  correction  : 
ligne  4  saur  1.  savi  —  ligne  39  salvar  doit  être  salvatge   — 
ligne  59  le  sens  exige  de  biffer  non  —  ligne  118  defea  1.  defeci, 
maladie  dont  parle  Daude  de  Pradas  au  chap.  LXXXVII  de 
son  Roman  dels  auzels  cassadors  (Studj  di  filol.  rom.  V,  147). 
Encore  je  ne  sais  pas  quelle  maladie,  ni  quel  mot  ce   soit, 
d'avoir  fantamas  aux  pieds  (1.  72)  ;  Yoli  de  sussoim  (1.  157)  est 
peut-être  sizaml  =  sésame  ou  huile  de  jvgeoline. 

Dans  le  verso  du  f.  52,  il  y  a  encore  quelques  recettes  trans- 
crites de  la  même  main,  mais  on  ne  s'est  pas  donné  la  peine 
de  les  traduire  ;  elles  sont  pêle-mêle  en  italien  et  en  latin. 
Quelques  formes  des  deux  qui  sont  en  italien  (la  lre  et  la  1  lme) 
accusent  une  provenance,  ou  une  habitude  de  prononciation 
méridionale  et  probablement  sicilienne  :  unu,  de  miillu.  una 
gamma,  ïunu  coll"  autru,  vinu  caldu. 

En  voici  le  texte  : 

1.  [Fol.  52  verso]  Ad  fare  airare  unu  ociello  che  auesse  retenu  ta 
soa  piumata,  falcone  o  astore  —  Prendi  iij  grana  de  scatapuzça  et  tre 
grana  depepe  et  partile  per  mezo,  et  poy  le  mitti  tucte  dentro  duno 
morsello  de  carne,  et  dalile  seuçaltro,  poy  lo  metti  su  la  pertica  et 
lassalo  stare,  che  uon  de  multu  gectarâ  la  piumata  et  quello  sella 
xlv.  -  Septembre  1902,  22 


i 


338  RECETTES  DE  FAUCONNERIE 

[  =  se  l'ha]  ;  se  nolla  (id.)  gectarà  pur  quello.  Allô  spelveri  o  smeri- 
glio  dânelli  per  mita. 

2.  Ad  faciendum  prohicere  plumatam  :  da  sibi  una?»  fabam  mundam 
ia  modico  pastu,  et  statim  ip[s]am  prohiciet  si  ha&ebit,  et  erit  levius 
primo.  Si  est  astu?'  uel  falco,  da  sibi  duas. 

3.  Ad  avem  que  haieret  oua  :  da  sibi  cum  pastu  de  uernice  cuni  qua 
scribitur  in  q«(mtitate  unius  granelli  tribus  uicibus,  et  curabitur. 

4.  Pro  aue  habente  dolorem.  in  pedibws  :  habeas  lixiuun»  cimas 
édere  et  de  sale,  et  fac  omnia  simul  bulliri  tamqwam  cderaconsumatur, 
et  de  illo  lixiuio  calido  laua  ubi  dolet  et  curabitur. 

5.  Pro  aue  que  haberet  asmu?»  :  da  ei  de  oleo  recenti  amigdalarum 
dulcium,  et  sanabitur. 

6.  Ad  auem  que  haberet  malum  in  ore  quae  se  non  posset  bene  pa- 
scere,  ungas  malum  oris  àictâe  auis  de  suco  celsarum,  et  in  modico 
tempore  sanabitur. 

7.  Ad  auem  que  haberet  oculos  pannosos  :  distempra  çuccar  cum 
modica  aqua,  et  ei  mittas  in  oculis  dictée  auis  [en  marge  :  et  claudas 
oculos]. 

8.  Ad  auem  quae  haberet  goreiam  et  pectus  plénum  da  ei  intestina 
porcelle  iuvenis,  et  eam  vacuabunt.  Et  scias  quod  cor  porcelle  iuvenis 
de  lacté  est  optimum  pastum  [en  marge  :  auibus  qui  sentienti  (sic)  de 
lapide,  uel  que  proiceret  pastum],  et  detur  ei  calidum. 

9.  Pro  aue  que  haberet  tingiolam.  Recipe  cortices  mali  granati,  et 
cimas  mortille,  et  fac  bulliie  in  uino  puro  et  lava  locum. 

10.  Ad  auem  que  prohiceret  pastum  :  fac  eum  satis  ieiunare,  post- 
modum  pasce  eum  de  uno  aue  uivo  scoriato,  non  des  sibi  aliquod  os 
necpennam,  et  quod  dédisses  sibi  in  primo  unosemel,  dasibi  in  tribus 
uicibus.  Aliqui  vero  in  magnam  horam  ante  pastum  ponunt  sibi  in 
gorcia  aliquantulum  et  parum  vini  greci  uel  boni  vini  cum  modico 
puluere  gariophilortm,  ut  fétus  discedat  de  gorcia,  et  ego  satis  laudo, 
non  fatigando  auem  illis  tribus  diebws  postmodum. 

11.  Ad  repunere  una  gamma  che  fosse  rocta.  Agi  un  poco  de 
oncenso,  duy  grana  de  sale,  et  pista  lunu  collautru  et  la  chiara  dellouo 
et  una  peçça  larga  una  oncia,  et  bangala  colle  sopradicte  cose,  et 
legala  bene  et  raderiçça  bene  la  gamma,  che  serra  guarito  ad  tre  di. 
Selli  facesse  tedio  la  peçça  collo  uinu  caldu  e^leualanne. 

12.  Ad  curandum  accipitrem  de  clouardo.  Recipe  radicem  alidonie, 
et  conquassa  aliquantulum,  et  recipe  très  maççocchios  melli  gi'anati 
&niequam  aperiatur,  uel  quasi  sint  in  aperire,  iiostmodum  mitte  \n 
aceto,  et  peraiitte  ibi,  et  de  illo  aceto  fréquenter  inunge  dictum 
clouum  subtus  pedem  accipitris,  et  curabitur  aceipiter. 

13.  Ad  curandum  accipitrem  de  clouardo:  fac  decoctionem  balaus- 


ET  ELEMENTS  DE  MEDECINE  339 

ti.nuin  et  uino  albo  pontico,  elbulliat  usqwe  ad  tertiam  partem, e/  cum 
illo  uino  misceatur  acaçie  holi  armenici  et  calcis  congelate  ex  frigore 
in  muro  ;  ana  :  partes  equales,  et  misceantur  in  modum  unguencti,  et 
utere.  Deo  gratias.  Amen. 


ELEMENTS    DE    MEDECINE 

On  peut,  sans  aucun  manque  de  respect,  passer  des  recettes 
pour  les  faucons  aux  recettes  pour  les  hommes.  En  effet,  si 
tous  les  étudiants  de  médecine,  au  moyen  âge,  n'avaient  eu 
d'autres  traités  pour  apprendre  leur  art  que  celui  dont  je  vais 
m'occuper,  j'avoue  que  j'aurais  plutôt  souhaité,  à  mon  lit  de 
malade,  le  bon  Peire  de  l'Astor,  ou  n'importe  quel  de  ses  con- 
frères. La  science  médicale,  quoique  en  pratique  plus  libre- 
ment exercée,  en  théorie  était  encore  enveloppée  dans  les 
absurdités  de  l'alchimie  et  de  la  cabale  astronomique  dont 
elle  n'a  pu  se  dégager  que  très  tard  ;  même  dans  ses  plus 
illustres  représentants,  comme  Arnaud  de  Vilanova,  on  ren- 
contre cette  fâcheuse  alliance.  D'où  un  certain  air  de  mistère 
qui  voile  l'exposition  scientifique,  un  empressement  enfantin 
et  minutieux  d'employer  des  chiffres,  des  figures,  des  couleurs 
conventionnelles  pour  dérober  aux  profanes  les  hautes  vérités 
de  la  science  ;  ce  qui  est,  d'ailleurs,  une  des  conditions  carac- 
téristiques générales  de  l'esprit  au  moyen  âge.  Mais  nulle  part, 
je  crois,  on  n'a  poussé  plus  avant  cette  manie  que  dans  le 
petit  traité  qui  suit.  A  ce  qu'il  paraît,  on  avait  des  Anlics 
començaments  de  medicina,  qui  donnaient  les  préceptes  usuels 
en  langue  au  moins  intelligible  :  on  donnait  là  les  quatre  dis- 
positions du  corps  humain,  calor,  secor,  humiditat,  fredor  aux- 
quelles correspondent  les  humeurs  colérique,  mélancolique, 
sanguine  et  phlégmatique.  On  en  tirait  une  branqua  en  très 
partes:  natural,  innatural  et  contra  natura ;  et  quoique  on 
puisse  se  demander  pourquoi,  par  exemple,  menjar,  heure,  dor- 
mir et  vetlar  soyent  considérés  comme  innaturels,  on  pouvait, 
en  somme,  comprendre  cette  science  fantaisiste,  mais  claire. 
Trop  claire,  même,  pour  le  moyen  âge  ;  et  pour  la  couvrir  on  a 
disposé  une  segonda  branqua  laquelle  es  novellament  atrobada 
a  espondre  la  primera  artificialment  et  methaphoricalment.  On 
a  substitué  aux  mots  des  lettres  et   des  chiffres    en    quatre 


34  0  RECETTES  DE  FAUCONNERIE 

couleurs,  vert,  bleu,  rouge  et  marron,  et  on  a  compliqué 
cette  mosaïque  par  un  excès  d'abréviations  capricieuses  qui 
rendent  souvent  la  lecture  très  pénible  l. 

J'ai  nommé  plus  haut  Arnaut  de  Vilanova,  parce  que  ce 
traité  est  d'origine  évidemment  catalane,  ce  qui  n'a  pas  em- 
pêché que  le  manuscrit,  qui  est  à  la  Marciana  à  Venise,  ait 
été  catalogué  jusqu'à  nos  jours  entre  les  codici  francesi.  Le 
Catal.  Zanelli  le  désigne  au  n°  XXV  qu'il  conserve  encore 
aujourd'hui  et  note  :  in-4°  cartaceo,  di  fogli  58,  del secolo  XV 
in  circa.  Trattato  di  medicina  in  lingua  francese  senza  nome 
d'autore.  Il  me  semble  de  la  fin  du  XIVe  siècle.  Et  M.  Ciam- 
poli,  dans  ses  Codici  francesi  délia  Bibl.  di  S.  Marco  (Venezia, 
Olschki  1897,  p.  70,  71)  n'ajoute  que  quelques  indications  sur 
la  mesure  [0,290  x  0,  220]  et  sur  V arbre  des  maladies  qui  en 
forme  le  frontispice,  dont  il  n'a  pas  bien  lu  certains  mots,  et 
qui  est  nécessaire  à  l'intelligence  du  texte.  Les  extraits  sui- 
vants suffiront,  je  crois,  à  apprécier  tout  l'ouvrage. 

En  haut  du  frontispice,  il  y  a,  en  rouge,  le  titre  :  «  Arbre 

DELS    COMENCAMENTS    DE    MEDECINA   ET    LA    RODA    ES   LA  RAYT  ». 

Au  pied  de  l'arbre,  dont  nous  donnons  un  croquis  à  part,  on 
a,  en  rouge,  cette  déclaration  : 

«  Dews  que  sois  subirana  uertut  delà  quai  totes  altres  uertuts 
receben  comewcament  et  peHeccio  ab  gratta  et  ab  ajuda  uostra  et  per 
ente?itio  de  uos  honrar  et  seruir  comenz  lart  que  es  dels  comenca- 
merats  et  dels  graus  de  medicina  per  la  quai  luma  eutenjment  sexalça 
sigue?it  la  manera  delà  art  ahreujada  de  trobar  ueritat  a  entendre  los 
secrets  medicmals  et  naturels.  » 

[Fol.  1  verso],  «  del  prolech  »—  2  Com  toda  art  aja  sos  comenca- 

1  Dans  les  deux  figures  ci-dessous  reproduites  les  couleurs  ne  sont 
pas  représentée?  puisque  le  lecteur  pourra  s'en  rendre  compte  en  obser- 
vant la  diversité  des  lettres  correspondantes.  (Voyez  la  note  de  la  page 
suivante). 

2  Je  mets  entre  guillemets  les  rubriques  qui  sont  en  rouge  dans  le 
manuscrit.  En  baut  des  pages  et  tout  au  long  des  marges,  il  y  a  des 
indications  sur  la  matière  traitée  dans  le  texte,  des  notes  nombreuses, 
des  recettes  en  cbillre,  de  diverses  mains,  que  je  ne  copie  pas  parce  que 
elles  sont  toutes  en  latin.  Où  le  ms.  porte  le  petit  signe  rouge  qui 
sépare  les  périodes,  je  sépare  en  allant  à  l'autre  ligne.  Je  conserve 
l'ortographe  du  texte,  quoique  souvent,  à  côté  des  formes  correctes,  on 
en  donne  des  fautives;  la  cédille,  par  exemple,  manque  ou  est  placée  à 
caprice. 


ET  ELEMENTS  DE  MEDECINE  341 

inents  pcr  ço  nos  comenca/*;  aquest  libre  en  loa  comencaments  de 
medecina  per  los  quais  haurem  cône  iments. 

Départi»!  aquest  libre  abreujadament  en.  x.  distinctios  ;  la  primera 
es  la  disposicio  de  tôt  lo  libre.  Segond'  es  del  triangle  uermeill.  Tertia 
es  del  triangle  uert.  Quarta  es  del  triangle  groch.  Qiuta  es  del 
c-mmncament  dels  graus.  Sexta  es  de  v  io  et  corrupcio.  Septima 

es  de  febres.  Octaua  es  de  urjnes.    Nona  es  de  pois.   Décima  es 
metafora. 

«  Delà  primera  distinctio  delà  disposzcio  desta  art  »  —  Natura 

de  entenjment  que  entend  mils  per  demostracio  fêta  per  vista  et  per 

ornament  que  per  cor  tant  solament,   et  per  co   nos   al  comencament 

libre  formam  .1.  arbre  esta  manera    per  tal  que   ab  les 

il,;-  rem  ueritat  de  ço  que  encerca  al  hu?na  entenjment,    lo 

qu  il  arbre  es  apellat  arbre  dels  comencaments   de  medicina.  La  rayt 

del  arbrees  una  roda  composta  de  letres  significans  los  iiij  humors  et 

<;o  es  departida  en  iiij  partes,    la  primera   part  es   delà  colera, 

md  es  <•  t  es  delà  fleuma,  Quarta  es  de  melcucolia. 

lui  enquadrangle  es  demostrada  la.  epuracio  delà  humor  et  la  febra  et 

lo  mesclament  dels  éléments  et  la  major  decesio  delà  febra  et  les  altres 

coses  ques  contenen  eu  la  condicio  del  arbre. 

A  fer  et  aformar  los  demostraments  ques  coucnc»  a  aquesta  art 
sotsposam  a  esser  calor,  b  secor,  C  humiditat,  d  fredor1.  Et  daquestes 
letres  compouem  los  quadrangles  delà  roda  segons  ques  mesclen  los 
humors  et  segons  que  les  unes  han  actio  o  passio  en  les  altres  et  aco 
tes  demostrat  en  la  rayt  del  arbre. 

Delà  rayt  nexen  dues  branques.  La  primera  es  dels  comencaments 
de  medicina  segons  que  es  recomptât  per  los  antichs  que  son  passats. 
Aqwella  branqua  es  en  très  partes  :  la  primera  es  natura],  la  quai  ha 
.vij.  dors,  ço  es  a  saber  éléments,  compactions,  humors,  membres, 
virtuts,  operacions,  spirit.  Item,  ha  en  la  dicta  brancha  .iiij.  Hors,  ço 
saber  état,  calor,  diuersitat  de  mascle  et  de  femna,  et  forma.  La  ij 
[segunda]  es  jnnaïural,  la  quai  ha  .x.  llors,  ço  es  a  saber  aer,  exercici, 
repos,  menjar,  beure,  vetlar,  dormir,  eomplir,  buydar,  accidens  danima, 
ço  es  goig  et  tristitia.  La  iij  branqua  es  contra  natura,  la  quai  ha  .iij. 
flors,  ço  es  a  saber  malautia,  causa,  accidens. 


1  Les  lettres  et  les  chiffres  qui  se  rapportent  à  l'arbre  des  maladies 
sont  toujours  dans  le  ms.  en  rouge,  marron,  bleu  et  vert  selon  la  branca 
à  la  quelle  elles  appartiennent  ;  pour  pouvoir  les  distinguer  typographi- 
quement  nous  avons  employa  isset  fort  pour  le  rouge  [a],  le  petit 

-set  pour  le  marron  [b],  la  majuscule  pour  le  bleu  [C],  et  la  petite 
majuscule  pour  le  vert  [d], 


34  2  RECETTES  DE  FAUCONNERIE 

La  sego?id[a]  branqua  es  nouellame?it  atrobada  a  espondre  la  pri- 
mera artificialment  et  methaforicalment,  et  es  departida  en  .ij.  parts. 
La  primera  part  es  departida  en  a  b  C  d,  la  segond'  es  departida  en 
los  .iij.  triangles  que  son  en  los  comencaments  delà  art  abmijada  a 
tiobar  ueritat,  et  en  .j.  quadrangle  delà  figura  de  predestinacio  la  quai 
se  conte  en  la  art  damunt  dita. 

La  a  es  departida  en  .iiij.  graus  demostrats per  les  figures  del  algo- 
rism  ço  es  a  saber  en  .4.  3.  2.  1.  et  aco  meteix  se  seguex  (sic)  de  a 
b  C  n.  Er'  a  demostrar  los  graus  damuut  dits  coue  elegir  xvj  herbes 
en  gênerai  et  cascuwa  de  significacio  de  les  altres  herbes  que  son  de 
sa  corapliccio,  et  çascuna  de  les  xvj  herbes  sia  nomenada  per  letra  a 
ella  apropriada  per  descripcio,  per  tal  que  mils  et  pus  abreujadament 
sen  pusca  fer  demostracio,  et  coue  que  en  les  letres  no  sia  .j.  ques 
sembla  ab  lo  primer  nombre  dalgorism  ni  noy  sia  .x.  que  significa 
no7?ibre  de  deu.  Lo  nom  dels  herbes  et  dels  letres  es  aquest. 

Vos  sotsposam  et  deym  que  e  es  una  spe<ia  de  simple  medicina  et 
es  en  -I  grau  de  a,  et  en  3  de  b,  et  en  2  de  C,  et  en  1  de  d. 

La  f  es  altra  spetia  que  es  en  3  de  a,  et  en  2  de  b,  et  en  |  de  C- 

La  g  es  altra  speft'a  que  es  en  ^  de  a,  et  en  1  de  b. 

La  h  es  altra  spe/ia  qwe  es  en  1  de  a. 

La  k  es  altra  spetia   que   es ainsi  de  suite  jusqu'à  la  dernière 

spetia,  la  y  que  es  en  1  de  d. 

Per  estes  letres  decorre  esta  art,  et  sens  que  hom  no  sapia  les  letres 
no  enten  la  art. 

Cascuna  dels  letres  coue  esser  flor  en  larbre  et  coue  hauer  propria 
color  et  sos  graus,  per  ço  que  les  letres  et  sos  graus  se  couengue//  a 
fer  la  demonstracio  ;  hon  per  co  nos  apropriam  a  la  :  a.  e.  f.  g.  h. 
color  uermellaeiaquesta  color  metexa  dona??i  alsgrausque  sondecalor. 
A  la  :  b.  k.  1.  m.  n.  dona??i  color  negra  et  aco  meteix  als  graus  que 
son  de  secor.  A  la  :  C.  0.  P.  Q.  R.  donawi  color  blaua  et  aco  meteix 
de  sos  graus  que  significan  hu??iiditat.  A  la:  d.  s.  t.  v.  y.  donam  color 
uert  et  a  los  graîts  que  son  de  fredor. 

Lo  triangle  uermell  es  en  très  flors,  ço  es  :  comeHçament,  miga  et 
fi.  Lo  triangle  uert  es  en  altres  très  fiors,  ço  es  diuersitat,  corecordanca 
et  contrarjetat.  Lo  triangle  groch  es  départit  en  altres  très  flors  ço 
es  a  saber  en  majoritat,  egualtatetminoritat.  Lo  quadrangle  es  départit 
en  .iiij.  flors  ço  es:  esser,  priuucio,  PERFEC10,  defalliment. 
Esser  es  de  color  uermella  et  perfeccio  de  color  blaua  [Fol.  2  verso] 
et  priuacio  de  color  negra  et  deffalliment  de  color  uert.  Quin  aqwesta 
art  uol  entendre  ni  saber  a  saber  li  coue  lalfabet  damunt  dit,  et  coue 
que  les  flors  del  arbre  traslat  en  altres  flors  mouables  colorades  per 
tal  que  pusca  demostratiuameut  mesclar  et  formar  et  eguallar  et  erexer 
o  minuar  ab  les  altres. 


ET  ELEMENTS  DE   MEDECINE  34  3 

«  Dels  condicio//<  àél  arbre  »  '. 

[Fol.  3  recto'  «  D<  la  enteaco  Begons  la  qwal  los  ils  trian- 

gles son  eu  esta  art  »  —  «  De  la  entencio  per  la  quai  es  eu  esta  art 
lo  quadrangle  et  la  rayt  del  arbre  et  generacio  et  corrupcto  »  —  «  D< 
la  entencio  sego//s  la  quai  tracta///  en  esta  art  'le  febra  et  dorina  etàe 
pois  et  de  methafora  »:  [Fol.  3  verso]  Corn  febra  sia  la  pas  uniuersal 
malaltia  et  cor  [l.  corn]  esta  art  sia  abreujada  per  ço  que  en  breu  de 
temps  tragam  de  treball  los  scola>->  pobres  i|«e  perpobretat  han  treball 
en  continnar  lo  studi  de  medicina,  et  coin  los  comencaments  uniuersals 
son  démonstrations  als  comencaments  particulars,  per  co  nos  eu  gen<  rai 
tracta///  de  les  febrea  tanl  solament  etesquiu&m  tractar  de  les  altn  - 
malalties  per  ço  que  no  alonguem  lait,  etc. 

[Fol.  4  recto]  «  Comenca  la  .ij.  distinctio  et  de  .e.  ». 
Fol.  5  recto]  «  De  miga  et  de  .e.  ». 
Fol.  6  rectoJ  «  De  fi  et  de  .e.  ». 

[Fol.  8  recto]  «  Comenca   la  .iij.  disti/ictio  que  es  de   diuersitat, 
concordanca  et  conirarjetat  e/  primerament  de  diuersitat  ». 
Fol.  9  recto]  «  De  concordanca  et  de  .e.  ». 

[Fol.  1 1  recto]  «  De  c//n/m/-ietat  et  de  .e.  ». 

[Fol.  12  recto]  «  De  la  .iiij.  distinctio  de  maior,  menor  et  equal  cl 
de  .e.  ». 

[Fol.  13  verso]  «  Comenca  la  .v.  distinctio  en  la  quai  se  domastra 
[sic)  la  manera  segons  la  quai  los  grains  deucn  esser  encercats  ». 

[Fol.  11  verso]  «  En  quai  manera  coue  encercar  les  kalitats  dels 
herbes  segons  los  dits  dels  actors  et  segons  los  comencame??ts  naît- 
rais ». 

[Fol.  15  verso]  «  Dels  comuns  comencaments  narrais  ab  los  quais 
deuen  esser  encercats  los  graus  en  les  coses  medicinals  ». 

[Fol.  16  recto]  «  En  quai  mauera  deuen  esser  encercats  los  .iiij. 
gratis  en  la  hu/nana  spefc'a  ». 

rFoL.  17  verso]  «  Comenca  la  .vi.  distinctio  qne  es  de  generacio  et 
de  corrnpcio  ». 

[Fol.  18  verso]  «  De  generacio  et  corrapcio  en  lo  mesdames  de  : 
e.  f.  g.  h,  k.  1.  m.  n,  0.  P.  Q.  R,  s.  t.  v.  y.  per  orden  segons  ques 
coue  ». 

[Fol.  10  recto]  «  De  generacio  et  corrnpcio  en  animais  » 

[Fol.  20  verso]  «  De  generacio  et  corrnpcio  en  los  metalls  ». 

[Fol.  21  recto]  «  Comenca  la  .vij.  distinctio  de  febres  ». 

[Fol.  22  verso]  «  De  febra  qwartana  dobla  ». 

'  Sauf  un  ou  deux  traits  in!<  re^sants,  je  me  borne  dorénavant  à  donner 
les  rubriques  du  texte. 


344 


RECETTES  DE  FAUCONNERIE 


[Fol.  23  verso]  «  De  tercana  dobb/  ». 

[Foi,.  24  recto]  «  De  febra  cothidiana  »  —  «  de  febra  continua  et 
aguda —  «  I  i  la  .vnj.  distmctio  de  urjnes  »  — [id.  verso]  «  de 

orina  colerica  ». 

[Fol.  25  recto]  «  De  orina  sanguim/a  »  —  «  do  orina  fleumatica  » 
[id.  verso]  «  de  orina  malincolica  »  —  .<  Comenca  la  .ix.  distincio  de 
pois  »  —  «  de  pois  colerich  ». 

[Fol.  26  recto]  «  De  pois  sangujny  » —  «  de  pois  fleumatich  »  — 
«  del  pois  melencolich»  [id.  verso]  «  La  .x.  distinccio  de  metha- 
fora  ». 

(Fol.  29  verso]  «  De  la  spera  de  la  nit  »  :  Si  tu  fas  de  lanto  o 
daltre  mettall  o  de  paper  una  rota  que  a  lo  nom  damurct  dit  et  cpie  es 
jnstrument  a  conexn-  les  hores  delà  njt.  lo  quai  jnstrument  sia  fet 
segOHs  esta  figura  tu  poras  metaforicalmejit  apercebre  per  la  figura 
en  quai  ora  delà  nit  regen  a  b  C  d  plus  fonne?it,  car  cada  letra  lia 
sego«s  lo  moMJme/it  del  firmame/it  major  pu  1er  en  la  .j.  qî^adrangle 
de  la  nit  que  en  laltre  ;  et  si  tu  aco  coneixs  poras  saber  la  bora  q«es 
coue  a  donar  la  medicina  segom  ques  coue  ab  la  qiialitat  dels  letres  et 
ab  les  hores,  et  si  tu  estudies  o  uas  per  lo  canii  sabras  conexer  per  la 
spera  en  quai  hora  es  de  la  nit. 


ET  1  r  BMENTS    DE  MÉDECINE  3  15 

Pcr  lo  forât  q  I    •    !  •  ' 

muntana  cl  ull  par  ço  '|"-'  mils  1 1  put 

.wnij.  h  •!•  :  la  lo   i 

1IM/U  III  ■ 

.  lo 

ni  d(  1  i  nji  ni  quant  lia  Lro  al  dia  ; 

al>  m  en  la 

que  la 
aei  al  tyn  —  .  . 

'....  .  uj, 

'I  nom  •: 
■  a    :>  •  b  o  fac 

m  menjai  .  I  !oin 

la  sa! 

il  li  ii.  : ■•■  nom  fa 

;  lo  quai  n  la 

.  •  la 
lin.--  lut 

'.    1  i 

.vij.  .  :  i  de  .1  1 1 

re  lo  !"■ 
i  qu  il  i  al  général,  el  u  I 

'.  Bpeft'al 

.,  sien  i  de  jus- 

.   Molta  dall  lents  poi 

i  parlar  delà  comenca- 
■  aatura  io  aem  li  aie 

•  al»  ajuda  i 
de  ; 

11  ma  compétence  d  ■  cherche) 

quelle  place  peut  oce  i  lité  dans  l'histoire  de  la 


1   Environ  à  moitié  du  'o. 

1  Dans  l.i  ;  a        on  a  écril  de  main  plus 

lité  qui  suit  au  fol. 
/  "•  antequam  legatur 

Au 
et  3î 
incompl 


ET   I  I  BMENTS    HE   MEDECINE  347 

Médecine.  J''  me  bornerai  plutôt  a  rappeler  ici  '|u>'  noua 
avons,  m  Bologne,  le  Traité  de  Roger,  mis  en  vers  provençaux 
(on  en  poasè  le  même  ane  tra  Inetioo  en  prose),  et  à  Florence 
la  version  provençale  du  Traité  d'Henry  de  Mon  :■  ville'. 

Une  autre  profession,  'l'une  grande  importance  au  moyen 
âge,  dont  nous  n'avions,  que  je  sache,  aucun  traité  eu  pro- 
vençal, et  ijui  tient  également  de  lascience,  pour  sa  manualité 
pratique,  et  de  l'art,  pour  les  remarquables  compositions 
qu'elle  nous  a  laissé,  681  celle  de  l'enluminure  ou  min  ature. 
Cette  laoune  vienl  d'être  comblée  par  le  petit  ti  nivant, 

trouvé  et  publié  par  M"e  AnnaVolta,  docteur  ès-lettres  -'.  Le 
manuscrit  en  est  aussi  à  Bologne.  Evidemment,  la  Haute-Ital  e 
du  XIV"  Biècle  n'élait  pas  envahie  seulement  par  les  Trou- 
badoui  a  ;  au  dessous  de  la  poésie  -e  mouvait  un  large  courant 
de  e  ■•  .  -   ;re  en  prose   provençale,  qui  trouvait  chez 

nous  un  bon  accueil   et  des  louanges  même   excessives.    ESn 
effet,  c'est  bien  contre  la  langue  vulgaire  de  Provence  «  mca- 
simamente di lingua  à  0        ;ue  le  plus  grand  des  Italiens  éte- 
indra :  »  la  gran  bontà  del  valgare  di  Si  ». 

A.    R.BSTORI. 


'  Y.  mon  .11  i  littér.  prov.—  Montpellier,  Hamel  n  1894, p.  L23. 

2  II  <ira  pub]  i i ; i i 1 1  fasi 


NOTERELLE    PROVENZALI 


1.  Sopra  due  componimeuti  di  Cercalinon 

Una  data  veramente  fondata  e  taie  da  non  sollevare  dubbio 
di  sorta  intorno  a  uno  <le'  primis3imi  poeti  di  Provenzi  c 
sempre  un  buon  guadagno  per  chi  volga  suo  studio  al  primo 
flore  délia  lirica  occitanica. 

LTacquisto  riesce  poi  a  niaggior  ragione  prezioso  quando  si 
tratti  di  Cercalmon  —  o  Cercamon  J  — ,  pel  quale  fanno 
quanto  mai  difetto  quelle  notizie  e  quei  dati  sicuri ,  che  si 
desidererebbero  intorno  a  un  trovatore  che  possedette  un'arte 
assai  raffinata  e  ad  essa  educô  un  célèbre  poeta  provenzale  : 
Marcabruu. 

Il  bisogno  di  guadagnare  per  la  biografla  di  Cercaimon  un 
punto  fisso,  intorno  a  cui  si  fosse  svolta  l'attività  poetica  del 
nostro  trovatore,  fu  già  sentito  dal  Rajna,  il  quale  s'adoprô, 
parecchi  anni  sono,  intorno  alla  tenzone  :  Car  vei  fenir  a  tôt 
dia  2  e  trasse  da  essa  alcuni  ingegnosi  argoraenti,  che  erano 
sfuggiti  ail'  editore  dei  componimenti  di  Cercalmon  :i  e  che 
provano  essore  stata  la  tenzone  scambiata  nell'anno  1137, 
dopo  la  morte  di  Guglielmo  VIII,  conte  di  Poitou  e  X  duca 
d'Aquitania,  e  prima  délia  assunzione  di  Luigi,  figlio  di  Luigi 
il  Grosso,  ad  erede  di  parte  dei^ossessi  del  Conte  (9  aprile  — 
30  maggio  1137\ 

Dopo  Farticolo  del   Rajna,  comparve  nella  Zeitschrift  del 


1  Cercalmon  dà  sempre  il  ms.  D  in  testa  ai  componimenti  e  nell'  in- 
dice a  capo  del  codice 

2  P.   Rajna,    Cercamon,    Car  vei  fenir  a  tôt  dia,   in  Romania  VI, 
j.  115-9. 

3  Malin,   Der   troubadour  Cercamon,    in    Jahrb.  f.    roman,  u.  engl. 
Lit.  I,  83. 


NOTERFJ.LE    PROVFXXAI.l  3-19 

Grober  uno  studio  di  K.  Zenker,  che  cercô  di  contestare 
l'attribuzione  délia  tenzone  :  Car  vei,  contenuta  in  un  solo 
manoscritto,aCercalmou  e  penso  di  identificare  il  «maistre», 
che  in  essa  figura,  con  Rainion  de  Mira  val  '.  In  tal  modo 
verrebbe  tolto  di  mezzo  Cercalmon  e  il  componirncnto  per- 
dei'ebbe  in  gran  parte  il  pregio  délia  sua  ragguardevolis- 
sima  antichitù. 

La  questione  era  troppo  importante  per  la  storia  délia  lirica 
provenzale  perché  a'.tri  non  sentisse  il  bisogno  di  ritornarvi 
90pra.  L'opinione  del  dotto  tedesco  trovù  infatti  un  forte  e 
acuto  oppositore  in  A.  Jeanroy  %  il  quale  si  studio  di  ricer- 
care  su  quali  fond  amen  ta  si  reggessero  le  nuove  argomenta- 
zioni  e  dopo  un  attento  esame  di  esse,  si  mostiô  disposto  ad 
accettare  le  conclusion!  del  Rajna  scrivendo  :  «  Je  remar- 
»  querai  que  le  système  de  M.  Rajna  les  explique  toutes  (le 
»  allusioni  storiche)  de  la  façon  la  plus  satisfaisante,  tandis 
»  que  celui  de  M.  Zenker  n'en  explique  aucune,  lime  semble 
»  donc  qu'il  est  prudent  de  s'en  tenir,  jusqu'à  nouvel  ordre, 
»  en  ce  qui  concerne  cette  pièce,  à  l'opinion  exprimée  ici,  il 
»  y  a  treize  ans,  et  de  continuer  à  regarder  la  pièce  Car  vei 
»  fenir  comme  le  plus  ancien  spécimen  conservé  de  la  ten- 
»  con  3  ». 

a 

Un  nuovo  testo  di  Cercalmon  pubblicato  da  poco  diploma- 
tieamente  negli  Studi  del  Monaci  e  De  Lollis4  viene  a  confer- 
mare  la  relazione  del  nostro  poeta  con  Guglielmo  di  Poitou  e 
ribadire  la  data  del  1137.  E  questa  volta  la  conferma  è  sicura 
e  non  occorre  certamente  gran   sforzo  per  dimostrarla  taie. 

Si  tratta  di  un  p/anh  scritto  da  Cercalmon  per  la  morte  di 
un  «  Conte  de  pitieu  »  (v.  13)  che  non  puô  essere  altri  che 
Guglielmo  di  Poitou  3  Questi  infatti  mon  il  9  aprile  1137  nel 

i  Zeitschrift  f.  rom.Pkil.,  XIII,  298. 

-  A.  Jeanroy,  Sur  la  tençon,  Car  vei  fenir  a  tôt  dia,  in  Romania, 
XIX.  394. 

k  cit.,  pag.  'k>-\ 
*  Studi  di  filol.  rotn.  iasc.  23,  p.  5  delT  estr  (a0  IV). 

-  Recentissimamente  la  opinione  é  stata  emessa  dal  Meyor  in 
Romania,  XXXI.  p.  1G0.  Alla  morte  di  Guglielmo  VIII  si  alludc  anche 
da  Maivabrun  nell'  ultima  strofe  del  Vers  del  lavador,  corne  fece  osser- 
vare  il  Meyer  stesso   in   Romania,  VI,  pag.    123.    Si  cl'r.   V.  Cresciai, 


350  NOTERELLE  PROVENZALÏ 

santuario   di    Conipostella  '    dopo  aver  compiuto  un  devoto 
pelle  grinaggio,  e  Cercalmon  alludendo  a  cid,  dice  : 

Saint  Jacnie  (ms.  iacine),  membre'us  del  baro 
qe  devant  vos  iai  pelegris. 

Il  pianlo  è  adunque  dei  più  iraportanti  per  la  biografia  del 
nostro  poeta  e  per  la  storia  provenzale.  Conservatoei  in  un 
testo  non  del  tutto  corretto,  si  lascia  in  più  luoghi  migliorare 
con  non  grande  difficoltà  e  certamente  formera  buon  argo- 
mento  di  esame  al  futuro  editore  di  una  edizione  critica  di 
Cercalmon. 

Ma  lo  scopo  délia  présente  noterella  non  è  tanto  quello  di 
segnalare  Timportanza  di  questo  pianto  e  di  attestare  con 
un  nuovo  documento  la  data  1137,  quanto  di  ricliiamare  l'at- 
tenzione  degli  studiosi  sopra  un  componimento,  che  nel  Grun- 
driss  del  Bartsch  figura  sotto  il  nome  di  Peire  Bremon  Ricas 
Novas,  mentre  nell'  edizione  del  Mahn  leggesi  tra  le  poésie 
di  Cercalmon. 

Il  testo  che  ci  intéressa  :  Pois  nostre  temps  comenza  a  bru- 
nezir,  cosi  com'è,  puô  infatti  dar  luogo  a  molti  dubbi  circa  la 
sua  attribuzione2.  Ma  fortunatamente  noi  potremo  d'ora  in- 
nanzi,  giovandoci  dell'  autorità  dello  stesso  canzoniere,  cui 
appartiene  il  planh,  toglierlo  al  Ricas  Novas  e  darlo  a  Cercal- 
mon senza  scrupolo  di  errare.  Infatti,  quel  testo,  quai  è 
conosciuto,  è  mutilo  e  manca  precisamente  di  alcuni  versi, 
che  tolgono  di  mezzo  il  problema,  poichè,  secondo  un  uso 
assai  noto  nell'  anticalirica  di  Provenza,  contengono  il  nome 
del  trovatore.  Questi  versi  vengon  subito  dietro  alla  5  strofe 
—  l'ultima  del  Mahn  —  del  nostro  componimento  e  non 
possono  essere  ritenuti  un  '  aggiunta  posteriore  per  due 
ragioni  ;  anzitutto  perché  la  poesia  sarebbe  senza  di  essi  man- 
cante  di  tornada;  in  secondo  luogo  perché  lo  stile,  il  concetto 


Testo  critico  e  illustrazione  d'uno  dei  più  solenni  canti  di  Marcabruno, 
in  Atti  del  R.  Istituto  Veneto  di  Scienze,  Lettere  ed  Arti,  T.  LIX,  P.  II, 
pag.  707. 

'  Rajna,  Op.  cit.,  pag.  117. 

2  Rajna,  Le  origini  délia  Epopea  francese,  Firenze,  1884,  pag.  517. 
Quivi  si  tocca  del  nostro  componimento  sotto  il  rispetto  metrico. 


NOTERET.LE   PROVËN2AL1  35  1 

e  le  rime  dirnostrano  ch'  essi  vengono  a  integrare  il  testo  di  : 

Pois  nostre  temps. 

Eccoli  nella  lezione  del  ras.  (pag  309). 

Cercamonz   di/.  qe   uas    amors   sirais.  merauill  es  com    pot  lira 

suffrir.  (jira  damor  es  paors  e<esglais.  enon  pothom  trop  uiure 

ni  mûrir. 
Fagz  el  lo  ueis  enon   deu  ueillezir.   segon  aisso  qe  monstra  la 

razos  qanc   bonamors.  non   galict  ni  frais,  anz  dona  ioi  als 

arditz  amoros. 

Non  mi  è  noto  quale  lezione  per  questo  componimento  dia 
il  ras.  C,  il  solo  che  lo  attribuisca  a  Cercalmon  1,  e  non  so 
conseguenteraente  se  ivi  pure  si  legga  questa  doppia  lornada. 
Se  si,  potremo  a  maggior  ragione  ritenere  questo  nostro 
testo  opéra  di  Cerca'mon. 

Se  non  ci  siarao  ingannati,  due  fatti  abbiam  cosi  messi  in 
cbiaro  riguardanti  due  diversi  ordini  di  cose  :  l'uno  si  rife- 
risce  al  piccolo  bagaglio  poetico  di  Cercalmon  ;  l'altro  viene  a 
fissare  un  punto  sicuro  e  a  illuminare  d'uno  spiraglio  di  luce 
le  moite  ténèbre,  ond'  è  avvolta  la  sua  vita. 

Cercalmon  eraguascone  e  suddito  perô  di  Guglielmo  VIII, 
suddito  affezionato  e  devoto,  corne  si  apprende  dalla  strofe 
IV  dello  stesso  plank  : 

Glorios  Dieus,  a   vos  me  clam 
Car  mi  tolez  aquel(s)  q'ieu  am  : 
Aissi  com  vos  formetz  Adam, 
Lo  defendetz  del  fel  liam 
Del  foc  d'efern  qe  non  l'aflam... 

Il  pensiero  del  poeta  si  ferma  perô  in  particolar  modo  alla 
sua  terra  natale  : 

Gasco,  cortes,  nominatiu, 

Perdut  aves  lo  segnoriu. 

Fer  (ms.  ser)  vos  deu  esser  et  esquiu 

Don   iovenz  se  clama  chaitiu, 

1  Dal  Grundriss  parrebbe  che  C  fosse  edito  in  Malin,  Gedichte,  n°  908, 
ma  veramente  qui  abbiamo  null'  altro  che  la  lezione  di  I,  secondo  la 
quale  il  Malin  dà  il  suo  testo  in  Jahrb.  cit. 


35  2  NOTERELLE  PROVENZALT 

Qar  us  non  troba,  on  s'aiziu, 
Mas  qan  n'Anfos,  q'a  ioi  conqis. 

Chi  sarà  questo  Alfonso?  La  scelta  puô  cadere  sul  re  di 
Castiglia  e  di  Léon  Alfonso  VIII  o  anche  sopra  Alfonso  Gior- 
dano  conte  diTolosa  dal  1112  al  1148. 

L'uno  e  Taltro  di  questi  principi  fu  cantato  da  Marcabrun 
e  nulla  toglie  ch'  essi  possano  anche  esser  stati  conosciuti 
da  Cercalmon,  il  quale,  a  sentir  la  biografia  provenzale, 
derivô  il  suo  nome  dal  lungo  suo  errare  di  paese  in  paese.  In 
verità  io  non  saprei  decidermi  frai  due  '  e  parmi  che  l'allu- 
sione  si  presenti  in  se  troppo  indefinita  per  permettere  una 
identificazione  sicura.  Un  accenno  storico  j)iù  importante 
abbiamo  nella  strofe  seguente  :  «  Lo  piangono  Francesi  e 
Normanni  e  ben  lo  deve  piangere  il  Re,  a  cui  lascio  la  terra 
e  la  proie  ».  Si  allude  chiaramente  a  Luigi,  il  cui  figlio  era 
stato  eletto  da  Guglielmo  a  sposo  di  Eleonora,  che  recava  in 
dote  i  dominî  di  Aquitania  e  Poitou. 

Qesta  allusione  si  riconnette  a  quelle,  che  trovansi  nella 
tenzone  :  Car  vei,  la  quale  fu  certo  composta  intorno  al  mede- 
simo  tempo. 

In  questi  due  soli  componimenti  Cercalmon  si  compiace  di 
toccare  avvenimenti  del  suo  tempo  :  tutte  l'altre  sue  poésie 
sono  ispirate  alla  natura  e  ail'  amore  e,  benchè  in  générale 
semplici  e  piane,  rïsentono  un  po'  di  quel  convenzionalismo, 
che  costituirà  poi  la  nota  prédominante  nella  lirica  provenzale. 


2.  Un  nuovo  testo  délia  canzone 
alla  Vergine,  Flors  de  Paradis, 
e  una  parafrasi  del  Patfr. 

Il  primo  testo  è  contenuto  nel  ms.  Ashb.  délia  Laurenziana 
luô:l-h,  cosi  magistralmente  descritto  dal  Meyer  2,  e  sfuggi 
sinora,  ch'  io  sappia,  ail1  indagine  degli  studiosi. 

i  II  De  Lollis  (Studi  di  fil.  rom.,  fasc.  24,  p.  2  dell'  estr.)  tocca  soltanto 
di  Alfonso  di  Tolosa. 
2  Romania,  X1Y,  485-548. 


NOTERELLE  PROVENZALI  353 

A  sottrarlo  aile  ricerche  erudite  concorse  senza  dubbio  il 
fatto  che  nel  catalogo  dei  codd.  Ashb.,  dovuto  al  Paoli  ,  esso 
è  indicato  corne  un'  operetta  di  carattere  religioso  in  prosa  '. 

La  sua  importanza  non  è  certo  grande,  ma  non  va  dimen- 
ticato  che  precisamente  dal  coufronto  di  questo  componi- 
mento  col  serventese  di  Guilhetn  Figueiras  contro  Roma  il 
Rajna  fu  indotto  ad  esporre  una  nuovateoria  intorno  al  génère 
poetico  del  serventese  2.  A  questo  titolo  soltanto  io  offro  ai  let- 
ton parte  del  testo  del  cod.  laurenziano  :  3 

[Cod.  Ashb.  105'-,  c.  21r]. 

1 .  Flors  de  paradis  regina  de  bonayre  auos  imiren  clins  penedens 

sens  coruayre  forfag  emesquins  preguas  per  mi  saluayre  que 
guizes  abon  port  e  me  gart  de  la  mort  dêferns  don  conort 
degun  homs  nô  pot  trayre  D  neguna  sort. 

2.  Uerges  al   mieu   tort  uoshay  trop   ofenduda   repenedimen  fort 

(fort)  requeri  uostra  iuda  donas  mi  çfort  que  nô  sie  perduda 
marma  car  caszut  soy  si  la  uertut  dedieu  non  ânes  al  port  el 
fuoc  nos  defen  daques  trop  deyfendut. 

3.  Uerges  lo  san  frut  que  de  uos  près  naysensa  de  dieu  desendut 

per  uera  cmoysensa  nos  arezemut  de  mort  ede  temensa  siben 
confesat  siam  et  êpas  dccort  attirât  aueracjnoycensa  ploran  los 
pecast. 

Tralasciodi  citarealtre  strofi  perché  il  testo  ashburnhamiano 
non  présenta  alcuna  particolarità  di  qualche  rilievo;  riporto 
invece  per  intero  una  parafrasi  ancor  inedita  del  Pater,  che 
si  legge,  a  c.  4  délia  prima  parte  dello  stesso  ms.  I  primi  versi 
furono  pubblicati  dal  Meyer. 


1  I  Godici  Ashburnhamiani  délia  R.  Biblioteca  Mediceo-Laurenz.  di 
Firenze.  Vol.  I,  fasc.  1°,  Roma,  1887  (Pubbl.  del  Ministero  délia  Pubblica 
Istruzione). 

*  Giorn.  di  filol.  rom.,1,  pag.  84.  Si  veda  di  contro  :  Bartsch,  Zeitschrift 
f.  roman.  PMI.,  IV,  439,  ove  si  impugna  l'antichità  délia  nostra  can- 
zone  alla  Vergine. 

3  Si  cfr.  l'edizione  del  Bartsch  in  Denkmàler.  73,  26,  e  si  tenga  présente 
che  un  altro  testo  di  questa  preghiera  esiste,  corne  avverte  il  Rajna,  nella 
biblioteca  di  Siena. 

23 


S54  NOTERELLE  PROVENZALI 

Parafrasi  in  versi 
del  Pater  ' 

[105*  c.  4  r.] 

Payre  nostre  qui  es  cels 
Permas  en  toz  savis  feels, 
Mons  de  pechatz  et  de  ruzihls 
Moudaz  nos  quauem  nom  tosfils 
5  Degrasia  que  siecit  plas 
Tôt  nom  et  nos  santifia 
Enaysi  con  sem  drey  crestia 
De  Crist  siam  fermet  sertan 
Eus  comandament  de  ta  ley 
10  E  que  siam  humil  ues  tu 
Per  lesperit  delatemor 
De  te  los  nostre  bon  senhor 
Per  tal  quelregne  auer  puscam 
Celestial  que  cobeytam 
15  Que  auran  si  contuas  dig 
Cil  que  son  paure  en  esperit 
Pueys  ti  preguam  ereqwerem 
Bels  dois  payre  si  con  deuem 
Que  anos  lotieu  règne  uengua 
20  Et  enaysi  mondar  nos  decha 
Quel  rené  amnos  enos  amte 
Bels  sentier  dieus  si  con  couen 
Per  lesperit  de  pietat 
Quens  aias  se  ti  plas  donat 
25  Per  so  que  ben  puscam  tener 
Leretatat  quesperam  auer 
En  terra  de  promecihon 
On  crecamrem  gran  guisardon 
E  gran  ganh  e  gran  benestansa 
30  De  durabla  bonauransa 
A  quil  cobedente  sont 
Tan  can  uion  en  aques  mon 
Preguem  te  per  ta  santeta[t] 
Quens  fassaz  far  satauclût  (?) 

1   Ne  do  una  riproduzione  struttamente  diplomatica. 


NOTERELLE  PROVENZALI  355 

35  Enterra  sels  quetamarant 
Aysi  com  langcl  elcel  fan 

En  don  lesperit  de  siensa 

Que  sapchamauer  conoieêsa 

Cnm  nos  puscam  eschirgaytar 
40  Dels  diable  e  pusca?«.  plorrar 

Pels  falhimens  epels  forfayt 

Qua  uem  en  aquet  segle  fag 

Et  après  P  laper  donansa 

Del  ticu  îenue   hô  ses   dobtâs[a] 
45  Crezem  que  serem  confortât 

Sil  que  con  fes  auran  plorat 

Senher  doua  nosalauzar 

Lopa  dont  hom  deu  co?tforta[rJ 

Las  armas  els  cos  cascundfar] 
50  Ses  erguelhe  ses  fellonio 

Per  lesperit  dafortimentl  l 

Quauran  tuit  sil  perfi  t;  | 

Cui  tu  daras  talauentur.i 

Qaurant  amasat  dedrechuil 
55  Quel  celerchus  coronat| 

De  te  quies  pas  uin  saludan| 

Per  douanas  per  ta  mistat 

Los  pechat  dont  sera  ecep| 

E  n  aysi  ean  nos  perdonan| 
60  A  toz  fiels  cil  que  tamaral 

Per  lesperit  dacordamel 

Car  be  sabem  uerayanien 

Que  sil  ueyran  perdonas 

Mas  qui  debon  cor  non  perdon 
65  [c.  4  v°]  Ja  non  aura  el  sel  corona 

Mot  ci  deu  doc  espauentar 

Tôt  hom  que  nô  uol  perdonar 

Quan  lo  payre  nostre  adig 

Quenaysi  con  aue  sauzit 
70  Seguon  drez  eseguon  razô 

Cuer  a  dieu  que  aia  nô  perdon 

Quar  qui  non  a  merce  dautruy 

Non  es  dreg  dieus  laia  deluy 

'  La  lineettn  indica  che  il  margine  délia  carta  ù  stato  ritagliato  forse 
in  causa  délia  legatora  del  codice. 


356  NOTERELLE  PROVENZALI 

Apres  si  querem  altre  don 

75  Non  ameus  en  temtat  ion 
Ni  non  nos  layces  tan  temptar 
Que  nos  pucca  sobremontar 
Lo  diable  nostre  enemic 
Mas  uers  dieus  et  uers  amies 

80  Dam  dam  lesperit  de  ten  demê 
Que  conosquam  lentendemë 
Del  tempdador  cui  terrem 
Etenaysi  nos  enguardem 
Que  paradis  per  ton  plaszer 

85  Puscam  la  tiua  facia  uezer 
Dieus  deyliyra  nos  de  tôt  mal. 
E  de  nostre  enemic  mortal. 
Lo  diable  que  nos  batalha. 
Que  nô  es  iorn  que  nô  nos  asalha 

90  Dans  lesperit  de  sabieza. 
Que  puscam  uenser  cobeeza. 
Erguel  e  tôt  los  autres  uiszes 
Et  en  eysi  cisplas  nos  guizes 
Quem  pas  estem  et  permanhan 

95  E  pas  anem  emant  enc  guâ 
Per  tal  que  siam  apellat. 
Li  tieu  bon  fil  benaurat 
E  quecel  gauc  puccam  gauzir 
Que  aurelha  non  pot  auzir. 

100  Uelhs  uezer  ni  boca  parlar. 
Ni  negu  cor  dôme  pessar 
Car  aquest  asaparelhat. 
Atot  sels  que  taurâ  amat 
Cest  gaug  aiam  cominamë 

105  Tuit  li  tieu  fiel  amen. 

Giulio  Bertoni. 

(A  suivre.) 


LA  TRADUCTION  DU  NOUVEAU  TESTAMENT 

EN   ANCIEN   HAUT   ENGADINOIS 
Par  BIFRUN 


L'G  CUDESTH  DELS  FATS  DALS  APOSTELS 

CAP.  XVI. 

(1)  Et  arriuô  à  Derben  &  â  Lystram,  &  uhé  un  schert  dis- 
cipul  era  allô  cun  num  Thimotheus  filg  d'ûna  scherta  duonna 
liideaua,  chi  craiaua,  mu  l'g  bab  era  Grec.  (2)  Ad  aquaisti  l'g 
dêuan  buna  testimuniaunza  tuots  l's  frars  chi  eran  â  Lystris 
&  ad  Iconijs.  (3)  Aquel  uous  Paulus  chi  gies  cun  el,  &  Vg 
hauiand  prais  in  cumpagnia,  schi  l'g  armundô  el  parmur  dais 
liileaus,  quaîls  chi  eran  in  aquels  lous.  Perche  tuots  sauaiuen 
che  ses  bab  era  Grec.  (4)  Et  passand  els  très  las  cittêds,  schi 
dêuan  é  ad  aquels  aschantamains  da  saluer,  quœls  chi  eran 
hurdenôs  dais  apostels  &  dais  preers  quels  chi  eran  â  Hieru- 
salem.  (5)  Et  in  aquella  guisa  las  baselgias  s'cunfarmêuanîlla 
fe,  &  in  immiinchia  di  creschaiua  [451]  l'g  inumber.  (6)  Et 
siand  passés  très  la  Phrygiam  à  la  cuntrêdgia  Galatica,  & 
chels  eran  scumandôs  delg  saine  spiertdapredgiêr  in  Asia,  (7) 
schi  sun  els  ieusin  Mysiam,  et  apruêuan  dad  ir  in  Bithyniam, 
&  l'g  spiert  nu  Fs  laschô.  (8)  Mu  cura  che  fiitten  passés  très 
Mysiam,  schi  gitten  é  giu  â  Troadem,  (9)  &  îlla  not  es  stô 
uais  à  Paulo  iina  uisiun,unhum  da  Macedonia  chi  eraauaunt 
el  &l'g  aruêuadschant:  VitteninMacedonia&n'ssacuorra.(10) 
Et  sco  el  hauét  uis  la  uisiun,  schi  hauain  nus  impestiaunt 
scherchiô  dad  ir  inMacedoniam,  siand  aschertôs,  che  l'g  signer 
haués  clamô  nus  â  predgièr  ad  aquels  l'g  euangeli.  (11)  Et 
par  aqué  cura  che  nusfûschen  mufts  da  Troade  ,  schi  gnisthen 
nus  à  dastaiséd.  dastais  cuors  â  Samothracem,  <i.  îlg  di  dsuain- 
terâNeapolira(12)c\:  dalonder  âPhilippis,  quaelachi  es  la  prima 
cittêd  colonia  da  la  part  da  Macedonia^.  Mu  nus  dmurêuan 
allô  in  la  cittêd  uerzequauns  dis.  (13)  Et  l'g  di  delg  sabath 


358  L  G   CUDESTH  DELS   FATS  DALS  AP03TELS 

ischens  ieus  oura  de   la  cittêd  dspera  Y  g   fliïm,   innua    chi 
s'sulaiua  fêr  l'uraciun,  &  seziand  faulêuans  cun  las  dunauns, 
quselas  chi  eran  guidas  insemmel.(  14)  Et  era  iina  scherta duonna 
cun  num  Lydia,   iina  chi  uendaiua  purpur,  de  la  cittêd   da 
Thyatiri,  quêla  chi  seruaiua  â  dieu,    chi  atadlô  :  6:  l'g  signer 
aurit  l'g  cour  d'aquella,  par  chella  faschés  sursen  ad  aquelles 
chiôses,  qua3las  chi  gniuan  dittas  da  Paulo.  (15)  Mu  si-[452]- 
and  battagiêda,  ella  et  sia  chiêsa,  schi  aruô  ella,   dschant  : 
Schi  uus  hauais  giiidiohiô  ch'  eau   saia  fidêla  agli  signer,  schi 
gni  aint  et  stêd  in  mia  chiêsa.  Et  n'sstfurzô   nus,   (16)  et 
dchiappô  giand  nus  â  fêr  uraciun,  che  ùna  scherta  matella, 
quaela  chi  hauaiua  l'g  spiert  da  Pythonis,  inscuntrô  in   nus, 
quaela  chi  dêua  iin  grand  guadang  à  ses  patruns  cun  ingiu- 
uinêr.   (17)   Et   aquaista   giet   dsieua   Paulum  &  dsieua  nus 
cv  clamêua  dschant:  Aquaist[s]  hummens    sun   famalgs  dalg 
hutischem    dieu,    &    predgian   â    uus    la    uia    delg    saliid. 
(18)  Et  aqué  faschaiua  ella  bgiers  dis.  Mu  hauiand  Paulus 
aqué  inuidas,  schi  s'  uuluét  el  &  dis  agli  spiert  :  Eau  cumand 
à  ti  per  l'g  num  da  Iesu  Christi,  che  tu  giaias  our  d'aquella. 
Et  in  aquell' hura  giet  el  oura.  (19)  Et  ueziand  l's  ses  patruns, 
che  la  spraunzada  lur  guadang  fus  sinida,  pigliaun  é  Paulum 
&  Silam  &  l's  trassen  alla  plazza  tiers  l's  parzuras  (20)  &  l's 
apresthantand  als  mastrôs,  dissen  :  Aquaists  humens  ingua- 
rinan  nossa  cittêd,  siand  els  Iiideaus,  (21)  &  predgian  mœds  da 
uiuer,  quels  chi  nun  ôdan  â  nus  da  prender  sii  né  da  saluer, 
siand  nus  Rumauns.  (22)  Et  currit  l'g  pœuel  incunter  els,  & 
l's  mastrôs  hauiand  dstramô  lur  uesckimainta,  curnmaVn- 
daun  chels  gnissen  battieus  cun  perchias.  (23)  Et  cura  chels 
l's  hauetten   fat   hgierras  plêias,  schi   l's    chiatschaun  é   in 
praschun,  cumandant  alg  guardiant  de  la  praschun,  chel  l's 
parchiiirâs  cun  [453]  diligijntia.  (24)  Quasi  hauiand  arfschieu 
tal  cummandamaint  l's  chiaschô  in  praschun  dadains,  stran- 
schand  lur  pês  îlg  schep.  (25)  Et  da  meza  not  Paulus  &  Silas 
urant  ludêuan  dieu.  Et  aquels  chi  eran  praschuns  l's  udiuan. 
(26)  Et  subittamaing  es  gnieu  iina  granda  terratrimbla,   da 
sort  che  l's  fundamains  de  la  praschun  s'asthquassêuan.  Et 
impestiaunt  sun  auerts  tuots  l's  hiisths,  &.  dsthliô  l's  liams  da 
tuots.  (27)  Et  l'g  guardiant  de  la  praschun  es  astdastdô  sii,  & 
cura  chel  uezét  l's  hiisths  de  la  praschun  auerds,  hauiand  trat 


L  G  CUDESTI1   DELS  FATS  DALS  APOSTELS  359 

our  la  dêia,  schi  s'  uulaiua  el  amazêr  sesues,  pissiand  chels 
praschunijrs  fiïssen  fiigieus  uia.  (28)  Mu  Paulus  clamé  ad  liôta 
uusth,  dschant :  Nu  fêr  A  ti  duessa  iinguotta  d'mêl,  per  che 
dus  ischen  zuonds  aqui.  (29)  Et  hauiand  dumandô  ùna  liûsth, 
schi  s'inscurzo  el  aint  tremblant  d'  te  m  ma,  cV  s'  bittô  giu  als 
pes  da  Paulo  &  da  Silœ,  (30)  l's  hauiand  mnôs  oura,  schi  dis 
el  :  Signer,  che  stou  eau  fêr,  ch'eau  uigna  sait  ?  (31)  Et  els 
dissen  :  Craia  îlg  signer  Iesum,  schi  uainst  ad  esser  salf  tu  & 
tia  chiêsa.  (32)  Et  predgiaun  agli  l'g  plêd  delg  signer,  &  â 
tuots  aquels  chi  eran  in  sia  chiêsa.  (33)  Et  el  prandét  aquels 
in  aquella  prœpia  hura  d'not,  &  l's  lauô  giu  las  plêias,  ce  es 
adiintrat  battagiô  &  tuotta  la  sia  braiêda  d'chiêsa.  (34)  Mu 
cura  chel  hauét  aquels  mnô  in  sia  chiêsa,  schi  mattét  el  ad 
aquels  giu  maisa,  oc  stet  [454]  led,  par  chel  hauaiua  craieu  â 
dieu  cun  tuotta  sia  chiêsa.  (35)  Et  cura  che  uen  di,  l's  mastrôs 
tramtetten  l's  mes,  dschant  :  Lascha  ir  aquels  humens.  (36)  Et 
l'g  guardiaunt  dis  aquaists  plêds  â  Paulo:  l's  mastrôs  haun 
tramis  che  uih  daias  gnir  laschôs  ir.  Huossa  dimê  izen  cun  la 
psesth.  (37)  Mu  Paulus  dis  ad  aquels:  N's  hauiand  battieus 
auertamaung,  sainza  udir  la  chiaschun,  siand  nus  Rumauns, 
cv  n's  haun  chiatschô  in  praschun,  ce  huossa  ad  ascus  n's 
uœglian  chiatschêr  oura?  Nha  par  l'g  uaira,  dimperse  uignen 
els  suessa  (38)  &  n's  mainen  oura.  Et  l's  mes  purtaun  aquaista 
uerua  als  mastrôs.  Et  els  tmetten  hauiand  udieu  che  fussen  Ru- 
mauns, (39)  &  uennen  &  l's  arua[u]n,  et  l's  hauiand  mnôs  oura, 
schi  l's  aruêuan  é  che  giessen  our  da  lur  cittêcl.  (40)  Et  siand 
gnieus  oura  da  la  praschun,  schi  gietten  é  aint  tiers  Lydiam, 
&  hauiand  uis  l's  frars,  schi  l's  haun  é  cufurtôs  &  sun  tiiôs 
uia. 

ANNOTATIUNS 

Purpur]  iina  scherta  gui.sa  d'  pan  u  d'ualiidda  culur 
d'  briinchiœschen,  chi  sulaiuen  iisêr  l's  grands  signuors  in 
uesekimainta.  Spiert  da  Pytkonh]  un  spiert  dalg  diêl  Apolli- 
ne, un  spiert  ingiuuinêl]  un  spiert  dalg  gimuni,  chils  acradan- 
têua.  Colonia]  es  iina  cittêd  quaela  chels  inimichs  aguadaguen, 
cv  prenda  oura  la  lieud  chi  es  alaint,  &  metta  aint  lur  œgna 
lieud.  par  manti-[455]-gner  la  cittêd,  sco  faiuen  l's  Rumauas. 
Maslrôs]  superiours,  arischaduors,  pudastêts. 


360  l'G  CUDESTH  DELS  FATS   DALS  APOSTELS 

CAP.  XVII 

(1)  Et  hauiand  fat  strêda  très  Amphipolim  &  Appoloniara, 
schi  uennen  é  â  Thessalonicam,  innua  chi  era  la  Synagoga 
dais  Iiideaas.  (2)  Mu  Paulus  suainter  sia  ûsaunza  giet   aint 
tiers  els  &    per  trais    sabaths    dispùtêua   cun    els   our   da 
las   scrittiiras,   (3)  mettant!  oura  &  apruand,   che    Christus 
haués  stuieu  indûrêr  à:  aresiistêr  dais  muorts,  6:  che  aquaist 
saia    Christus  Iesus,     queel  ch'eau   (  dschaiu'el  )   predgia    â 
uus.  (4)  Et  qualchiiins  d'aquels  craietten,  &  s'accumpagnaun 
cun  Paulo  &  cun  Sila,  &  bgiera  lieud  dais  deuots  Grecs  &  da 
las  inauaunt  dunauns  brichia  pôchias.  (5)  Et  l's  Iiideaus,  chi 
nu  uousen  crair,  amuantôs  da  l'inuilgia,  hauiand  prais  cun 
els  in  cumpagnia  alchiùns  sthgualanots   d'iïna  mêla  uiita  cV 
hauiand  araspô   sii  la   lieud,  schi  amuentaun  é  sii  la  cittêd, 
&   faschand   forza  à  la  chièsa    da   lasonis,  scherchiêuan  dais 
mnèr  oura  agli  pœuel.  (6)  Et  nu  l's  hauiand  achiatôs,   schi 
traiaiuen  é  Iasonem  &  qualchiiins  dais  frars  tiers  l's  parzuras 
délia  cittêd,  clamant  :  Aquaists  sun  aquels  chi  haun  sthguar- 
dinô  l'g  erses  de  la  terra,  <k   sun  gnieus  er  aqui,  (7)  quels  che 
Iason  ho  prais  aint  ad  ascus,  &  aquaists  tuots  faun  incunter 
Fs  aschantamains  dalg  Cœsaris,  dséhant,  che  sa-[456]-ia  un 
ôter  araig  Iesum.  (8)  Et  amuantaun  sii  l'g  pœuel,  <k  l's  mas- 
trôs   délia  cittêd,  udiant  aquellas  chiôses,  (9)  et  hauiand  arf- 
schieu   buna    cuntentezza  da   Iasone  &  dais  ôters,   schi   l's 
laschaun  é  ir.  (10)  Mu  l's  frars  adiintrat  in  la  not  tramtetten 
dauent  Paulum  &.  Silam  insemmel  in  Berrhœam.  Qurels  cura 
che  fiitten  ariuôs,   schi  tiraun   é   uia  in    la  synagoga    dais 
Iiideaus.  (11)  Mu  aquaists  eran  dais  plii  nœbels  trauntêr  els, 
d'aquels   chi  eran  â  Thessalonica,  qusels   chi  hauaiuen  arf- 
schieu  l'g  plêd  cun  tuotta  praistezza  da  la  uœglia,  examinand 
inmiinchia   di  las    scrittiiras,   schi    aquellas    chiôses   fiïssen 
uschia,  (12)  &.  bain  bgiers  d'aquels  craietten,  &  er  hundrêdas 
dunnauns  Grascas  &  hummens  brichia  pougs.  (13)  Et  cura  che 
l's    Iiideaus    da   Thessalonica  sauetten  ch'er  â  Berrhose  fiis 
predgiô  l'g  plêd    da    Paulo,  schi  uennen  é,  &   er  allô   amu- 
antêuan  sii  arimur.  (15)  Alhura  impestiaunt  l's  frars  tram- 
tetten dauend  Paulum,  chil  gies  sco  ir  alg  mêr.  Mu   Si'as  cv 


L'G  CUDESTH  DELS  FATS  DALS  APOSTELS  361 

Timotheus  arumagneten   allô.    (14)  Et  aquels  chi  accumpa- 
gnêuan  Paulum  l'g  condiïsthetten  infina  ad  Athenis.  Et  hau- 
iand  prais  comischiun  tiers  Silam  &  Thimotheum  che  gnissen 
su  l'g  plii  praist  tiers  el,schi  sun  els  tirôs  uia.  (1G)  Et  intaunt 
che  Paulus  aspettêua  els  ad  Athenis,  schi  s'asckiudôua  sieu 
spiert  in    el,    ueziand  el   tuotta  la   cittêd  chi  era  dêda   alg 
seruezzen  de  las  immêginas.  (17)  Et  el  dimê   disputêua  in  la 
sjnagoga  cun  l's  Iii-  [457]  -deaus  (éd.  Iùdia)  &  cun  las  per- 
sunas  deuotas,  &  in  la  plazza  inmiimchia   di  cun  aquels   chi 
giauen  par  uentiira  tiers  el.  (18)  Et  iinqualchiiins  philosophi 
dais  Epicureis   &  dais   Stoicis  chiampastêuan  cun  el,  &  qua- 
lchiiins  dschaiuen  :    che  uuol    dir  aquaist  schanschêdar?  & 
alchiiins  ôters  dschaiuen:   el  pêra  esser  lin  chi  disth  da  nuofs 
dimunis,  per  che  chel  predgiêua   ad  els  Iesum   &   l'aresiïs- 
taunza.   (19)   Et  l'g  hauiand  apigliô  Yg  mnaun  é  alla  plazza 
da  Marcij,  dschand  :  pudaia  nus  sauair,  da  che  guisa  saia 
aquella  nouua  duttrina,    queela  chi  uain  da  te  araschunêda? 
(20)  Per  che  tu  mettas  aint  in  nossas  uraglies  schertas  chiôsas 
nouuas.  Nus  uulain  dimê  sauair,  che  aqué  uuol  esser.  (21)  Mu 
tuots  aquels  da  Athenis  &  er  l's  fullastijrs  chi  afdêuan  allô, 
nun  attendaiuen  ad  ôter  co  dir  u  dad  udir  iinqualchiôsa  da 
noef.  (22)  Et  stant  Paul  us  in  meza  la  plazza  da  Marcij,  dis  : 
Hummens  d'Athenis,  eau  uez  uus  intuottes  chiôses  bunamang 
memraa  supersticius,  (23)  par  che  passand  eau  très  &  cuschi- 
drant  las  uossas  deuociuns,  schi  hse  eau  acchiattô  un  hutêr,  in 
aquœl  stêua  scrit  sii  :  agli  nun  cunschieu  dieu.  Aquel  dimê  che 
uus  nun  cunschiand  hundras,  aquaist  predg  eau  â  uus  :  (24)  Deus 
quasi  chi  ho  fat  l'g  muond  &  tuottes  aquellas  chiôses  chi  sun  in 
el.  Aquaist  siand  signer  delg  schil  &  da  la  terra,  nu  sto  in 
taimpels  fats  cun  mauns,  (25)  né  [458]  uain  agli  seruieu  cun 
mauns  humauns,  nun  hauiand  el  bsiing  d'unqualchiôsa,  siand 
el  quasi  chi  do  â  tuots  lauitta&  rgflêdpertuot:(26)  &  ho  fat  our 
d'un  saung  tuotta  la  giniïra  délia  lieud,  par  chella  afdâs  sur 
l'uniuersafatscha  de  la  terra,  &  ho  determinô  hurdenôs  tijmps, 
&  ho  ourauaunt  ifichiô  aint  L's  terms  da  lur  afdaunza,  (27)  par 
che   scherchiassen  dieu,  schi  par  uintiira  l'g  apalpen  <k  l'g 
acchiatten,  cutibain  chel  nun  es  dalœnsth  da  scodiin  d'uus.  (2*) 
Per  che  très  el  uiuain  nus  &  n's  amuantains  (éd.  amuantaim) 
&  ischens  :  da  co  ch'er  qualchiiins  dais  uos  poets  haun  dit  :  Nus 


36  2  L'G  CUDESTH  DELS  FATS  DALS  APOSTELS 

ischen  er  da  quella  sclatta.  (29)  Siand  nus  dimê  de  la  sclatta 
da  dieu,  schi  nu  daiuen  nus  pisser,  che  la  deitad  saia  sum- 
giaunta  agli  ôr  c\:  argient,  u  ad  iiua  pedra  intagliêda  cun  art  ; 
u  â  qualchiôsa  spiêda  delg  hum.  (30)  Et  hauiand  deus  infina  ad 
in  huossa  laschô  passer  uia  F  s  tijraps  da  quaista  ignuraunza, 
huossa  fo  el  assauair  alla  lieud,  per  che  tuots  da  per  tuot  im- 
giuran  ;  (31)  par  chiaschun  chel  ho  aschantô  iin  di,  in  aqurel 
chel  uain  â  giiidichêr  cun  giiistia  Y  g  crês  de  la  terra,  très  aquel 
hum,  par  aqo?ul  el  ho  hurdenô,  hauiand  fatfe  â  tuots,  cura  chel 
l'g  ho  hagieu  astdastdô  su  dais  muorts.  (32)  Et  cura  chels 
hauetten  udieu  l'aresustaunza  dais  muorts,  alhura  alehiiins 
ariauen  del,  &  alehiiins  dschaiuen:  Nus  uulain  aunchia  d'a- 
[459J-  que  udirte.  (33)  Et  uschia  Paulus  es  ieu  our  da  miz  els. 
(31)  Et  qualchiiins  humens  stand  tiers  el  craietten  agli,  in 
aquaels  era  Dionisius  areopagita(éd.  arœpagita)<k  iiaa  duonna 
cun  num  Damaris,  &  ôters  cun  els. 

ANNOTATIUNS 

Phi/osopJii]  amêdars  de  la  sahbijnscha.  uschia  anumnèuan 
é  l'a  sabbis   da  tijmp  uijlg.   Epicuri  u  Epicurei]  eran  lieud 

d'iina  upiniun,  chi  managiêua,  che  la  mêr  beadijnscha  fus  â 
uiuerbain  &  à  triuphêr  senza  ôter  pissijr  in  aquaist  muond. 
Stoici]  eran  d'iina  upiniun,  che  la  mèr  beadijnscha  fus  â 
uiuer  hunestamang  ec  indret,  &  nu  pigliêr  pissijr  da  las 
chiôses  da  quaist  muond,  dimperse  las  laschêr  passer  uia. 
Areopagita]  iin  acusglijr  u  giudisth  ad  Athenis. 


CAP.  XVIII 

(1)  Dsieua  aqué  es  Paulus  tirô  uia  our  da  Athenis,  6:  uen 
â  Corinthum,  (2)  c\;  hauiand  acchiattô  iin  Iiileau  cun  num 
Aquila  de  la  naciun  Poutieus,qua3l  chi  era  gnieu  da  poick  da 
Italia  cun  sia  mugliêr  Priscilla,  par  chiaschun  che  Claudius 
hauét  cumandô  che  tuots  Iùdeaus  dessen  s'pariir  our  da 
Ruma  :  <k  el  giet  tiers  aquels,  (3)  perche  el  era  d'aqué  prœpi 
îuastijr,  schi  stêua  el  tiers  aquels  &  lauurêua.  Et  lur  art  a?ra 
da  tessijr    pauigliuns.    [460]  (4)    Et    dispiitêua   inmùnchia 


LG  CUDESTH   DELS  FATS  DALS  APOSTEI.S  303 

sabath  in  la  synagoga,  &  intraguidcua  l's  Iudeaus  &  l's  Gr^es 
insemmel.  (5)  Mu  cura  che  Silas  cV  Timotheus  fiitton  gnieus 
da  Macedonia,  schi  gniua  Paulus  stranschieu  delg  spiert,  chel 
doua  testimuniaunza  als  Iiideaus  che  Iesus  fus  Christus.  (6)  Et 
cunterds  liant   aquels  &  blastraant,  hauiand  el  sthquassô  giu 
sia  uesckimainta  schi  dis  el  ad  aquels  :  Vos  saung  saia  sur 
uos  chiô.  Dad  huossa  inuia  uœlg  eau  ir  net  tiers  l's  paiauns. 
(7)Etsingiét  dalô  &  giet  aint  in  la  chiêsa  dad'iin,  quasi  chi  hau- 
aiua  num  giiist,  qusel  chi  seruiua  â  dieu,  la   chiêsa  da  qusel 
tnchiêua  la  synagoga.  (8   Et  Crispus  parzura  de  la  synagoga 
craiétagli  signer  cun  tuotta  sia  chiêsa,  &:  bgiers  dais  Corin- 
ters  udiant  craiauen  &  gniuan  battagiôs.  (9)  Et  l'g  signer  dis 
d'not  très  iina  uisiun  â  Paulo:Nu  tmair,  dimperse  fauella,c\: 
n  u  taschair,  (10)  par  aqué  ch'eau  sun  cun  te,  &  iïngiiin  nu  uain 
â  t'assaglir  par  t'dêr  fadia,  per  che  ch'eau  hae  un  grand  poeuel 
in  aquaista  cittêt.  (11)  Et  stet  allô   un  an  &  sijs  mais  amus- 
sand  aquels  l'g  plêd  da  dieu.  (12)  Mu   siand    Gallio  guuerna- 
dur  dal'Achaiae,  schi  s'aluaun  su  l's  Iudeaus  pariina  incunter 
Panlum,  &  l'g  mnauii  allahaunchia  de  l'araschun  (13)  dschant: 
Aquaist  intraguidalalieud  daseruir  â  dieu  incunter  la  lescha. 
(14)  Et  in  aquella  che   Paulus    s'pardarschaiua  par  aurir  la 
[461]  buoehia,  schi  dis  Gallio  als  Iiideaus  :  0  Iudeaus,  self  elg 
es    qualch  ingiiirgia  u    quai    niêl    trat,   schi  ataidl  eau    uus 
appussaiuel  :  (15)  Mu  sch'  elg  es  dabat  dalg  plêd  u  da  nums 
&  da   uossa  lescha,   schi  guardô  uus  suessa.  Per  che  eau  nu 
uœlg  esser  giiidist[h]  daquaistas  chiôses.(16)Et  dsthchiatschô 
aquels  uia  da  la  baunchia  de  l'araschun.  (17)  Et  tuots  Graecs 
hauiand  appigliô  Sosthennem  parzura  de  la  synagoga  Vg  bat- 
taiuen   auaunt  la  baunchia  de  l'araschun  né  Gallio  hauaiua 
ùngiuna  chiiira  d'aquellas  chiôses.   (18)  Et  Paulus  dalonder 
inuia  es  dmurô  allô    bgiers  dis  ;  alhura  hauiand  prais  cumiô 
dais  frars  nauigiô  in   Syriam,  Tgaccumpagniand  Priscilla  cv 
Aquilla,  dsieua  chel  haués  araes  l'g  chiô  in  Cenchreis,  per  che 
chel  hauaiua  uut.  (19)  Et  dsieua  arriuô  el  ad  Ephesum  &  laschô 
aquels  allô.  Et  el    giet  aint  in  la  synagoga  <k  dispiitêua  cun 
l's  Iudeaus.  (20)  Et  aruand  els  chel  uulés  plu  bgier  tijrap  stèr 
cun  els, schi  nu  uous  el  dêr  tiers,  (21)  dimperse  prandét  cumiô 
dad  els,  dschant  :  Eau  stou   ignameed  fêr  la  festa  chi  uain  fi 
Hierusalem,  mu  schi  deus  uoul  schi  uœlg  eau  darchiô  turnêr 


364  L'G  CUDESTH  DELS  FATS  DALS  APOSTELS 

tiers  uus.  Et  muet  da  Epheso,  (22)  &  cura  chel  fut  arriuô  â 
Csesaream  Oc  chel  fut  ieu  sii  oc  hauét  saliidô  la  baselgia,  schi 
giet  el  giu  ad  Antiochiam.  (23)  Et  dmurô  allô  un  pô  d'iin 
tijmp,  oc  es  chiaminô,  giand  très  da  lœ  in  lœ  suainter  huor- 
[462]  -den  l'g  paias  da  Galatica  oc  da  Phrisgia,  cunfermand 
tuots  l's  discipuls.  (24)  Et  un  schert  Iiideau  cun  num  Apollos, 
da  naciun  Alexandrin,  un  hum  parlaint,  ariuô  ad  Ephesum, 
chi  era  pusaunt  in  las  scrittûras.  (25)  Aquel  era  intraguidô 
in  la  uia  delg  signer,  oc  fafiêuacun  Yg  spiertbugliaint,cc  amus- 
sêua  cun  diligijncia  aquellas  chiôses  chi  sun  delg  signer, 
sauiand  sullamaing  l'g  bataisem  da  Iohannis.  (26)  Et  aquaist 
cumenzôâfafiêrliberêlmang  in  la  synagoga.(27)  Qusel  hauiand 
udi.;u  Priscilla  oc  Aquilla  l'g  prandetten  tiers  els,  oc  mettet- 
ten  our  â  gli  plii  perfettamaing  la  uia  delg  signer.  (27)  Et 
uuliand  el  ir  in  Achaiam,  schi  l'g  intraguidaun  l's  frars,  oc 
scriuetten  als  discipuls,  che  l'g  dessen  arschaiuer.  Qusel  siand 
arriuô,  ualét  bgier  ad  aquels  chi  hauaiuen  craieu  très  la 
gracia.  (28j  Per  che  chel  cuuanschaiua  fickrs  Iiïdeaus,  amus- 
sand  auertamang  très  las  scrittiiras  che  lesus  era  Christus. 

ANNOTAT1UNS 

Claudius]  qusel  chi  era  imperadur  â  Ruma. 


CAP.  XIX. 

(1)  Et  es  duantô  siand  Appollos  â  Corinthi,  che  Paulus 
siand  passô  très  l'g  paias  zuras  chel  uen  ad  Ephesum,  & 
hauiand  achiattô  alchiùns  discipuls,  (2)  dis  ad  aquels  :  Nun 
hiuais  uus  arfschieu  Tg  saine  spiert,  da  pœia  che  uus  hauais 
craieu  ?  Mu  [463]  aquels  dissen  ad  els  :  Bain  plii  nus  nun 
hauain  pur  udieu,  schi  l'g  es  Tg  saine  spiert.  (3)  Et  el  dis  ad 
aquels  :  Schi  cun  che  bataisem  dimê  isches  battagiôs?  Et  els 
dissen:  Culg  bataisem  da  Ioannis.  (4j  Et  Paulus  dis:  Ioannes 
ho  bain  battagiô  culg  bataisem  de  l'aruflijnscha,  dschand  agli 
pœuel  da  quel,  qusel  chi  daiua  gnir  dsieua  el,  par  che  craiessen, 
.que  es  da  Christo  Iesu.  (5)  Et  hauiand  udieu  aqué  schi  sun 
els  battagiôs  îlg  num  dalg  signer  Iesu.  (6)  Et  cura  che  Paulus 


L  G  CUDKSTH  DELS  FATS  DAI.S  APOSTELS    365 

liauét  mis  l's  mauns  ad  aquela,  schi  uen  \'g  saine  spiert  sur 
els,  &  failêuan  launguax  et  profesêuan.  (7)  Et  erari  tuots 
intuorn  dudesth  humens.  (8)  Mu  siand  ieu  aint  in  la  synagoga, 
schi  fciflêua  el  trais  mais  da  lung,  disputant  &  intraguidant 
delg  ariginam  da  dieu.  (9)  Et  cura  clie  alchiiins  s'indiiritten 
né  craietten,  dschant  mèl  auaunt  la  lieud  de  la  uiadalg  signer, 
schi  es  el  tirô  uia  our  da  quels,  &  ho  zauurô  oura  l's  discipuls, 
dispiitand  inmiinchia  di  in  la  scoula  dad  un  schert  Tiran. 
(10)  Et  aqué  es  duantô  duos  ans  da  lung,  da  sort  che  tuots 
aquels  chi  afdêuan  in  Asia,  udîuan  l'g  plêd  dalg  signer  Iesu, 
l'a  li'uleaus  &  l's  Grades  insemmel.  (11)  Et  deus  faschaiua  très 
l's  mauns  da  Pauli  uirtiids  brichia  commiinas,  (12)  da  sort 
che  s'  purtêuan  er  da  sieu  chiœrp  l's  fazolets  &  las  schintas, 
oc  l's  mettaiuen  su  l's  amallôs,  par  che  las  malatias  tirassen 
uia  dad  els,  oc  l's  mois  spierts  giessen  oura.  (^13)  [464]  Mu 
qualehi  uns  dais  Iudeaus,  quael  [s]  chi  giauen  intuorn  scungiiirand 
apruaun  de  clamer  in  agiûd  sur  aquels,  chi  hauaiuenl'g  mêl 
spiert,  l'g  num  dalg  signer  Iesu,  dschant  :  Nus  scungiurain 
uus  par  Iesum,  qusel  che  Paulus  predgia.  (14)  Mu  elg  era 
scherts  set  filgs  da  Sceua  Iiïdeau  parzura  dels  sacerdots, 
quœls  chi  faschaiuen  aqué.  (15)  Et  Tg  mêl  spiert  arespondiant 
dis  :  Eau  eugniousth  Iesum  &  eau  sae  Paulum,  mu  uus  chi 
isches?  (16)  Et  l'g  hum,  in  aquœl  chi  era  l'g  mêl  dimuni,  saglit 
in  aquels  &  l's  hauét  sur  maun  oc  l's  uanschét,  da  sort  che 
lugitten  our  da  quella  chiêsa,  niids  &  plaiôs.  (17)  Et  aqué  es 
gnieu  â  sauair  â  tuottels  Iudeaus  &  Grsecs,  qusels  chi  stêuan 
ad  Ephesi,  cV  es  gnieu  una  granda  temma  sur  aquels  tuots,  & 
l'g  num  dalg  signer  Iesu  gniua  adhuzô.  (18)  Et  bgiers  da  quels 
chi  craiauen,  gniuan  ce  cunfessêuan,  &  dschaiuen  oura  lur 
fats.  (19)  Et  bgiers  dels,  qusels  chi  hauaiuen  adruô  arts  da 
striceng,  hauiand  purtô  insemmei  l's  cudesths,  &  schi  l's 
ardetten  é  auaunt  tuots  ce  siand  fat  quint  da  lur  pritsths,  schi 
acchiattaun  é  da  schinquaunta  milli  danêrs.  (20)  Uschi  ferm 
craschaiua  l'g  plêd  da  dieu  &  s'  cufermêua.  (21)  Siand  cum- 
plieu  aqué,  schi  prandét  Paulus  auaunt  se  l'g  spiert,  che  cura 
chel  aués  passé  Macedoniam  &Achaiam,  chel  uulés  ir  â  Hie- 
rusalem,  dschant  :  dsieua  ch'ea(sic)  uing  ad  esser  stô  allô,  schi 
stou  [465]  eau  er  uairRuma.  (22)  Et  hauiand  tramis  duos  da  quel  s 
chi  l'g  seruiuan,  numnêdamang  Timotheo  oc  Erasto,  in  Mace- 


366  l'g  CUDESTH  DELS  FATS  DALS  APOSTELS 

doniam,  schi  arumagnét  el  par  un  tijrnp  in  Asiam.  (23)  Et  in 
aqué  tijmp  es  aluô  su  sthguardin  brichia  pitschentrês  aquella 
uia.  (24)  Per  che  un  schert  cun  num  Demetrius,  lauurêdar  delg 
argient,  qusel  chi  faschaiua  chiapellas  d'argient  da  Diana?, 
dêua  brichia  pitscben  guadang  als  artischauns,  (25)  quaels 
bauiand  el  clamô  insemmel,  oc  er  aquels  chi  eran  laurains  da 
tal  chiôses,  dis:  Humens,  uus  sauais  che  our  da  quaist  mas- 
tijr  es  â  nus  guadang,  (26)  &  uezais  &  udis  che  brichia  sullet- 
taniang  ad  Ephesi,  mu  bunamang  per  tuotta  l'Asia  aquaist 
Paulus  ho  surpladô  &  uuluieu  un  grand  pceuel,  dschant  che  nu 
saien  disels,  aquels  chi  uigna[u]  fats  cun  maun.  (27)  Et  brichia 
sullettamaing  uain  aquaista  part  â  nus  in  priuel,  chella  nu 
vigna  arfiidêda,  mu  bain  er  che  l'g  taimpel  de  la  grauda  diela 
Diana  uigna  aestmô  par  iinguotta,  èc  che  uigna  â  gnir  che 
uigna  er  sthdriit  la  sia  maiestêd  quaela  chi  guard'oura  tuotta 
l'Asia  et  l'g  muond.  (28)  Hauiand  aquels  udieu  aquellas  chiôses, 
schi  sun  els  gnieus  plains  d'ira,  &  bragitten,  dschant:  La 
granda  Diauna  dais  Ephesers.  (29)  Et  tuotta  la  cittêd  es  gnida 
plaina  d'  confusiun  &  pariina  faschetten  els  iin  sthfors  îlg 
Theatro,  <k  apigliand  Gauis  et  A  -[466]-  ristarcho  da  Mace- 
donia  cumpagniungs  da  Pauli.  (30)  Et  uuliand  Paulus  ir  aint 
tiers  l'g  pceuel  schi  nulg  uuosen  laschêr  ir  l's  discipuls.  (31) 
Et  qualchiùns  er  dais  priims  da  Asise,  quels  chi  eran  ses  amichs, 
tramtetten  tiers  el,  Yg  aruant  chel  nu  s'  laschâs  aint  îlg 
theatro.  (32)  Chi  clamêua  par  aqué  d'ùna  guisa,  chi  clamêua 
d'un'  ôtra.  Per  che  la  communitœt  era  suot  sura,  oc  la  mêra 
part  nu  sauaiuen  perche  chiasohun  els  liissen  gnieus  insemmel. 
'33)  Et  traietten  our  delg  pceuel  Alexandrum  l'g  astumpland 
oural'slùdeaus.  Et  Alexander  hauiand  culg  maunaggiauuschô 
che  s' taschés,  uulaiua  arender  araschun  agli  pceuel.  (34)  Quasi 
sco  els  cunschetten  chel  fus  un  liideau,  schi  s1  aluô  su  iina 
uusth  da  tuots  bunamang  duos  huras  dalung  da  quels  chi  cla- 
mêuan  :  La  granda  Diauna  dais  Ephesers.  (35)  Mu  cura  che  l'g 
scriuaunt  hauét  aquaidô  l'g  pœuel,  schi  dis  el  :  Humens 
Ephesers,  chi  es  aquel  hum  chi  nu  sappia  che  la  cittêd  dais 
Ephesers  saia  seruiainta  de  la  granda  diaela  Diauna  tk  da  l'imê- 
gina  gnida  giu  da  loue  ?  (36)  Siand  dimê  ch'ungiiin  ad  aqué  nu 
cunterdia,  schi  bsiigniasses  stêr  quaids,  ce  nun  fer  iinguotta 
memma  imprescha.  (37)  Per  che  uus   hauais  mnô  aquaists 


l'g  cudesth  dels  fats  dalô  apôsîels       àêl 

humens,  chi  nu  sun  né  lêdars  da  baselgias  né  blastmaduors  in 
la  uossa  disela.  (38)  Che  schi  Demetrius  c\:  aquels  artischauns 
chi  sun  cun  el  haun  qualch  araschun  incunter  al  -[467]- 
chiiin,  schi  es  é  drachiùra  c^:  sun  guuernaduors;  s'acchiùsen 
liiin  liôter.  (39)  Mu  schi  elg  es  che  uus  s1  dumandês  da  ôtres 
chiôses,  schi  s' ladina  cun  iina  ligiaisma  communitêd.  (40)  Per 
che  elg  espriuel,  che  nus  nu  duaintan  culpauns  da  quaist  ari- 
mur  d'huoz,  nun  hauiand  alchiiina  chiaschun  cun  aquôla  che 
nus  possan  arender  araschun  da  quaista  curraria.  Et  hauiand 
dit  aqué  schi  laschô  el  ir  la  communitêd. 

ANNOTATIUNS 

Diê/s  et  diêlas]  dees  u  deas  dais  paiauns.  Theatrum]  l'g 
palaz.  un  lœ  innua  chi  si  fo  tramelg  u  cusselgs  u  drachiiiras  u 
cumoen.  Schinqunnia  milli  danêrs]  fo  125.000  sckiiids.  da 
loue]  da  lur  deus  Inpiter. 


CAP.  XX. 

(l)Mu  dsieua  che  fût  passô  uia  la  rimur  hauiand  Paulus 
clamô  Ts  discipuls  tiers  se,  schi  imbraschô  el  aquels  &  es  tirô 
uia  par  ir  in  Macedoniam.  (2)  Et  siand  passô  très  aquels 
paias  &  hauiand  mis  â  maun  ad  els,  schi  uen  el  in  Greciam,  (3) 
&  cura  chel  fiit  stô  allô  trais  mais,  schi  agli  mis  dsieua  spias 
dais  Iiideaus,  cura  chel  era  par  nauigiêr  in  Syriam,  &  el 
hauaiua  îlg  sen  da  turnêr  très  Macedoniam.  (4)  Ma  Sopater 
da  Berrochae  l'g  ho  accumpagnô  infina  in  Asiam  :  &  da  Tessa- 
lonica  Aristarcus  &  Secundus  &  Gaius  Derbseus  &  Timo- 
theus.  [468]  Et  de  Asia  Tychicus  &  Trophimus.  (5)  Et  aquels 
passauri  auaunt  <k  aspettaun  nus  â  Troade.  (6)  &  nus  dsieua 
l's  dis  dels  Azijms  nauigijschens  da  Philippis  &  ariuaschen 
tiers  aquels  â  Troadem  in  schinc  dis  innua  che  nus  hauain 
dmurô  set  dis  (7)  Et  îlg  prûm  di  da  l'hemna,  siand  gnieus 
insemmel  Ts  discipuls  par  arumper  Tg  paun,  Paulus  araschu- 
nêua  cun  els,  s'uuliand  îlg  di  dsieua  partir,  &  surtras  l'g  plêd 
inlîna  à  meza  not.  (8j  Et  eran  bgierras  liiisths  in  la  saela 
innua  che  nus  eran  araspôs.  (9)  Et  seziand  un  giuuen  cun 
num  Eutijchus  su  la  fenestra&  gniand  aggrauô  d'un  hôt  sœn, 


368         l'g  CUDESïH  DEt.S  FATS  DALS  APOSTELS 

araschunand  dich  Paulus,  es  el  plu  fick  chialchiô  dalg  sœn,  & 
es  tumô  da  la  terza  ssela,  &  es  prais  &ù  mort.  (10)  Et  siand 
gnieu  giu  Paulus,  s'imbrunchiô  sùn  el,  l'g  pigliô  in  bratsth  cv 
dis  :  Nu's  cunturblô,  per  che  la  sia  huorraa  es  aunchia  in  el. 
(11)  Et  siand  ieu  su  &  hauiand  aruot  l'g  paun  &  mangiô,  schi 
hol  dijch  faflô  cun  els  infina  alla  damaun,  alhura  alla  dauous 
tirôl  uia.  (12)  Et  mnaun  Yg  giuuen  chi  era  uif,  &  sun  fick 
cufurtôs.  (13)  Mu  nus  siand  muntôs  in  barchia  gnischen  ad 
Asson,  allô  daiuens  prender  aint  Paulum.  Per  che  chel  hau- 
aiua  uschia  hurdenô,  chel  uulaiua  fêr  Yg  uiêdi  par  terra.  (14) 
Et  cura  nus  fùschen  gnieus  insemmel  ad  Asson,  Yg  hauiand 
prais  aint,  schi  gnischen  in  [468]  Mitylenem,  (15)  &  nauigiand 
da  londer,  îlgdi  dsieuagnischens  ad  arriua  â  Samum,  cv  ischens 
dmurôs  â  Trogijlli,  é:  ilg  prossern  di  gnischens  in  Miletum. 
(16)Per  che  Paulus  hauaiua  prais  auaunt  se  da  passer  uia 
Ephesum,  per  nu  cusiiniêr  uia  l'g  tijmp  in  Asia.  Per  che  el 
stinéua,  schi  fiis  â  si  possibel,  da  fer  l'g  di  d'schinquaisma  â 
Hierusalem.  (17)  Et  hauiand  tramis  mes  da  Mileto  ad  Ephe- 
sum schi  clamé  el  l's  preers  de  la  baselgia,  (18)  qusels  cura 
che  fùtten  arriuôs  tiers  el,  schi  dis  el  ad  dels  :  uus  sauais  che 
dalg  prùm  di  inné  ch1  eau  sun  antrô  in  Asiam,  in  che  mœd 
ch'  eau  sun  stô  adùna  cun  uus,  (19)  seruiand  agli  signer  cun 
tuotta  humilitaed  dalg  cour  :  è:  cun  bgierras  lharmas  &  atten- 
tamains,  qusels  chi  sun  â  mi  crudôs  tiers,  tpês  la  malizchia 
dais  Iiideaus.  (20)  Co  ch'  eau  nun  hae  sckiuieu  iinguotta  da 
quellas  chiôses,  quselas  chi  eran  in  uos  iittel,  ch'  eau  nun 
hêgia  dit  â  uus  auertamang  &  par  scoduna  chiêsa,  (21)  dant 
testimuniaunza  &  er  als  Graecs  da  rariiflijnscha  chi  es  uia  â 
dieu,  &  de  la  fe  quaela  chi  es  uia  â  nos  signer  Iesum.  (22)  Et 
huossa  uhé  cunstrit  dalg  spiert  uing  eau  â  Hierusalem,  aqué 
chi  uain  â  mi  ad  interuegnir  aqué  nu  sse  eau,  (23)  arsaluô 
che  l'g  spiert  ssenc  par  tuottas  las  cittêds  do  testimuniaunza, 
dschant  :  ch'eau  [470]  daia  d'aspettêr  liams  &  astijns.  (24) 
Mu  da  que  nu  hse  eau  iingiiin  pisijr  :  ner  la  mia  uitta  es  âmi 
mues  chiêra,  pur  ch'eau  dfinescha  mieu  cuors  cun  algrezchia, 
&  Yg  ufici  ch'eau  hê  arfschieu  dalg  signer  Iesu  par  dêr  testi- 
muniaunza alg  euangeli  de  la  gracia  da  dieu.  (25)  Et  huossa 
uhé  eau  sse  che  aqui  dsieua  uus  tuots,  très  aquaels  ch'eau  sun 
passé  preilgiand  l'g  ariginam   da  dieu,  nu    gnis  â  uair  mia 


l'g  cudesth  dels  fats  DALS  APOSTELS    869 

fatscha.  (2G)  Très  aqué  clam  eau  uus  in  testimuniaunza  îlg  di 
d'huoz,  ch'eau  sun  net  d'alg  saung  de  tuots.  (27)  Per  che  eau 
nuu  hae  skiuieu,  clie  nun  hêgiapredgiô  â  uus  tuottelgcusselgda 
dieu. (28)  Par  a  [ué  attende  â  uus  &  à  tuottelg  trœp,  in  aquael 
l'g  spiert  88Bnc  ho  aschantô  uns  huastgs  par  arischer  la  basel- 
gia  da  dieu,  quaelachel  ho  accunchiiistô  cun  sieu  saung.  (29) 
Per  che  eau  sse  aqué,  che  dsieua  che  eau  suit   tirô   uia,  che 
uignen  ad  antrêr  in  uus  grefs    luis,  quaels  chi  nu   uignen  à 
schioagiêr  l'g  trœp.  (30)  Et  our  da  uus  suessa  uignen  â  s'aluêr 
piï  humens  chi  uignen  â  schanschêr  l'g  cuntrêdi  par  mnêr  l's 
discipuls  dsieua  se. (31)  Très  aqué  uagliô  algurdaiuels  ch'  eau 
nu  hae  pussô  par  trais  ans  da  lœng  d1  di  ce   d'  not  da  auisêr 
scodiin  cun  lharmas.  (32)  Et  huossa  arcumand  eau  uus  frars  â 
dieu  oc  agli  plèd  de  la  sia  gracia,  quel   chi  es  pussaunt  da'  s 
se  lifichier  &   dêp  à  uus   l'hierta  traunter   tuots   santifichiôs. 
(33)  Eau  nun   lue   aggia-[47J)-  niischô   argient  ce  ôr,   u  la 
ueskimainta  d'alchiûn.  (34)    ce  taunt   plii    uus  sauais  che    als 
mes  bsiings  oc  ad  aquels  chi    eran    cun  me,  haun  suruegnieu 
aquaists  mauns.    (35)  Eau   ha3  tuot  amussô   â  uus,  che    in 
aquella  guisa  s'affadiand  s'astouua  prender  su   l's  flaiuels  :  & 
s'algurdêr  dalg  signer  Iesu,  per  che  el  ho  dit  suessa:  Che  elg 
es  plii  biêda  chiôsa  â  dêr  co  ad  arschaiuer.  (3ô)  Et  cura  chel 
hauét  dit  aqué,  schi  s' metjtét  el  giu  insthnuoglias  oc  urô  cun 
tuot  aquels.  (37)  Alhurafut  cumanzô  un  grand  cridêr,  ce  s'bit- 
têuan  dintuorn  l'g  culoez  de  Pauli,  ce   l'g  biitschêuan  :  (38) 
hauiand  mêla  uitta  al  g  postiitt  da  quel  plêd  chel  hauaiua  dit, 
che  nu   gnissen  â  uair  plii   la  sia  fastcha.    Et  l'g  accumpa- 
gnêuan  â  la  nêf. 

ANNOTATIONS 

Santifichiôs]  fats  saencs. 

(A  suivre.)  Jacques  Ulrich. 


24 


IV 
DOCUMENTS  SUR  LES  RELATIONS 

DE 

L'EMPEREUR  MAX1MILIEN  ET  DE  LUDOVIC  SFORZA. 

r.N  l'année  1499 


(Suite) 

[21   mai] 

Illm0  et  E\mo  signore  mio  obsermo,  Dapoi  la  partita  de  la  Cesarea 
Maestàdi  questo  locho  non  se  è  inteso  altro,  salvo  che  qui  è  venuto 
aviso  como  Suyceri,  havendo  inteso  che  la  predicta Maestà  se  era  dri- 
zata  verso  Felchirch,  havevaao  anchora  loro  mandato  grosso  exercito 
contra  la  Maestà  sua.  Ma  per  divertire  e  dividere  le  forze  de  Suiceri, 
oltrachele  gente  quale  se  ritrovano  ad  Basilea  dovessino  moversi  da 
(jiiella  banda,  questa  sera  furono  inbarchati  duo  millia  fanti  in  questo 
locho  etaltritantisenedoYevanoimbarcharearîUberling,perunirsetutti 
insieme  e  fare  demonstracione  de  voléfe  intrare  nel  paese  de  Suyceri 
che  e  sopra  questo  lacho,  acio  non  havessino  faculta  de  mandare  tutto 
el  sforzo  suo  verso  la  Cesarea  Maestà.  La  quale,  per  quello  se  è  inteso 
per  veio,  non  havera  cum  se  mancho  de  20.000  fanti  e  1.500  cavalli. 
Credo  non  passaiano  doi  di  chel  se  intendera  qualche  cosa,  e  sono 
certo  che  per  la  via  de  Chiavena,  al  quale  locho  sera  vicino  el  facto 
per  due  giornate,  la  E.  V.havra  più  presto  lo  aviso  che  da  me;  enien- 
tedimeno  io  ne  daro  etiam  noticia  e  più  vera  che  si  potra. 

Essendomi  voluto  ben  informare  se  de'  capitanei  de  Suyceri  quali 
havesseno  fama,  ne  erano  stati  morti  in  queste  guerre,  me  è  stato  cer- 
tifichato  che  la  magior  parte  de  H  principal!  capitanei  loro  sono  man- 
chati,  et  in  spetie  del  locho  de  Urania  ne  sono  stati  morti  circa  qua- 
ranta  de  li  primi,  e  fra  li  altri  Aman  Bernardino  ;  sono  etiam  stati 
morti  doy  fratelli  del  abbate  de  Santo  Gallo,  quali  erano  li  principal! 
capitanei  che  erano  stati  sempre  al  servitio  de  Francesi;  de  Zuiïgho  no 
sono  manchati  asay,  e  novamente  se  è  inteso  esser  stato  preso  uno  de 
li  principali  del  dicto  locho  de  Zurigho  verso  Basilea  ;  el  quale  per 
esser  fa:to  presone  e  nonmenato  per  li  ferri  corne  se  fa  ogniuno  gène- 


MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA  371 

ente,  se  estima   sia  proceduto  per  intendere  tutti    li  desegni  de 
Suyceri,  e  che  li  aiuta  e  soccorre. 

La  Cesarea  Maestà,  fin  queati  di  passati,  scripse  alli  reali  de  His- 
pania  questi  movimenti  de  Suyc  tndoli  esserli  mossa  queBta 

:  i   per  instigatione  de  Francesi;  quali  aon  solo  erano  causa  de 
questi  movimenti,  ma  li  nutrivano  et  aiutavan  hando  a  quelle 

e  Maestate  che,e  p  sr  L'obligo  e  per  la  affinita,  volesseno  moversi  e 
fare  contra  Francesi  ;  e  perhohaven  do  l'Ex.tia  V.rascripto  sopra  qm 
ta  materia,  aon  sera   aecessario    ricordare  altramente  alla  Cesarea 
Maestà  che  scriva,  bavendo  ,  ma  s  ilum  significarli  quello 

che  la  E.  V.  ba  scripto  ley  in  conformita  di  questo. 

Alla  I11"1U  S.  Yra  continue  me  ricomando. 

Ex  Lindo,  xxi  maii   141»'.». 
Excme  Ill'ne  Dominationis  Vrc  minimus  servitor, 

Marchesinus  Stanga. 

(Lindau,  23  mai) 

Illmn  et  exm0  signor  mio  obsmo, 

Havendo  expedito  el  présente  cavallaro  solo  j»ercln-  l'Ex.  Yraiuten- 
da  quello  me  ha  scripto  la  Cesarea  Maestà  e  sapia  dove  havera  a  dri- 
zare  li  cavallari  che  hora  venerano,  me  è  anche  li  quello 

che  in  questo  di  se  è  inteso  in  questa  terra.  Gli  significo  aduncha 
como  de  verso Constantia  è  venuto  aviso  che  quelle  gente  de  la  Cesarea 
Maesl    sb    se  ritrovanolihanno  brusatomoltilo  ùceri,  evedendo 

:  Suiceri  nonpotere  resistere  aile  gente  da  cavallo  che  se  ritrovano 
:n  quelle  confine,  per  levarli  le  facultàcossi  del  brusare  facilmente  le 
terre, como  del  vivere  de  li  cavali  inimici,  loro  medesimi  hanno  brusati 
H  strami  in  le  terre  sue  e  reducano  tutte  le  robe  alli  loci  più  securi. 
Epsi  Suiceri  sono  constreti  ad  tenere  le  forze  sue  divise  in  tre  loci: 
perho  che  dal  canto  de    Basilea  è  uno  exercito  grosso  del  qnale  è 
capo  M.  Federicho  Capeller  et  el  conte  de  Furstembergo  ;  et  in  questo 
exercito  è  la  guarda  de  Burgogna  che  sono  800  cavalli  ellectissimi  et 
lertissimi;  adCostanza  è  un  altro  exercito,  e  dove  se  ritrova  la  Ce- 
sarea ^Iaestà  un  altro.  El  duca  Federicho  de  Saxonia  ellectore,  secun- 
do è  stato  dicto  qui,  è  arrivatoad  Olmo  lontanoda  Costanza  due  gior- 
n.ite  et  cum  lui  se  dice  essere  el  duca  de  Pomoro,  quali  veneno  cum 
comitiva  de  800  cavalli  e  0.000  fanti.  Queste  cose  sono  state  affirmate 
qui,  e  i  le  h;  ho  intese  ho  voluto  significarle  alla  IU1"*  S.  V.  In 

boj  ia  de  laquale  continue  me  ricomando. 

Ex  Lindo  xxiii  maii  1499. 

E.  lllrae  D.  V.  minimus  servitor 

Marchesinus  Stanga. 


372  MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFOR2A 

(23  mai  i  Î99) 

Illra0  et  exmo  sigaor  mio  observai!™0, 
LaCesarcaMaestàper  uuo  cavallaroraandato  ad  posta,  me  ha  scripto 
quello  che  per  la  inclusa  lettera  vedera  la  Ex.  V.,  laquale  me  è  parso 
mandarli  acio  habia  del  tutto  et  intenda  quanto  epso  mi  ha  scritto  per 
le  lettere  de  la  predicta  Maestà  mi  ha  ricerchato  dirrective  alli  subdit 
de  l'Ex.  V.  in  Valtolina  che  provedano  aile  gente  sue  de  victualie  : 
htvcudo  epsa  scripto  alla  p. ta  M. ta  che  lhaveva  dato  bono  ordine 
circa  questo.  Io  ho  scripto  al  capitauo  de  Valtolina  et  Giov.  Angelo  de 
Baldo  quello  che  per  l'inclusi  extracti  potera  vedere,  eperho,  quando 
Giov.  Angelo  habia  havuto  commissione  sopra  questo,  mi  persuado  la 
«xeguira  ;  quando  anche  non  l'havesse  havuta,  la  E.  V.  li  fara  quella 
provisione  parera  alla  prudentia  sua.  Ho  mandato  Augustino  da  la 

Maestà  sua   como  ha  ricerchato Domatina  me  levaro  anchora  io 

dequa,  e  me  inviaro  ad  Malzo,dove  saro  in  quatro  di  eli  altri  ambas- 
ciatori  che  sono  qua  restarano,  non  havendo  loro  ordine  alchuno  ne  de 
stare  ne  delevarsi.  Alla  Illm»  Slia-  V*a  continue  mericomando.  Ex  Lin- 
do,  23  maii  1499. 

E.  Illme  D.  V.  minimus  servitor, 

Marchesinus  Staxga. 

[28  mai] 

111. mo  et  ex.mo  signor  mio  obs.mo, 

Le  cose  occorse  verso  Malzo  da  poy  la  partita  mia  da  Lindo  non 
hanno  permesso  che  io  mo  li  sia  possuto  transferire,  como  haveva  deli- 
berato  et  era  designato  da  la  Cesarea  Maestà.  Ringratio  bene  Dio  che 
non  habia  voluto  me  sia  ritrovato  tanto  inante  ad  questo  camino  chel 
ritornare  non  fusse  poi  stito  in  faculta  mia.  De  quelle  cose  che  sono 
accadute  li,sapendo  che  l'E.  V.  e  da  Jo. Colla  e  da  Augustino  Somenza 
ne  è  stata  longamente  avisata,  io  non  li  replicaro  el  medesimo  per 
non  fastidirla.  Questo  li  diro  solum,  chel  numéro  de  li  morti  in  questo 
conflicto  non  è  stato  tanto  quanto  se  era  vociferato;  e  per  fermo  se 
tene  che  de  Grisani  ne  siano  morti  el  doppio  più  de  li  Gesarei,  et  el 
numéro  depsi  Cesarei  pare  non  sia  stato  se  non  800. 

Io  sono  arrivato  in  questo  locho  de  Himbst,  vicino  ad  Malzo  cin- 
quanta  millia  italiani,  dove  ho  ritrovato  lettere  de  la  Cesarea  Maestà, 
per  lequale  me  commette  che  me  debia  firmare  fin  che  me  scrivera 
altro,  attribuendo  el  farmi  dimorare  qui  allacarestia  del  vivere  et  alla 
pocha  securita  de  la  via.  Quanto  al  periculo  de  la  via,  ho  creduto 
facilmeate  al  scrivere  de  S.  Maestà,  ma  quanto  al  vivere,  non  so  como 


MAXIMIL1EN    ET    LUDOVIC   SFORZA  373 

per  la  via  si  possa  ritrovare  mono,  non  alchuna  ne 

perel  viverede  le  persone  ne  de  cavalli.  Tuttavolta  se  fara  al  m< 
se  potera  per  obedire  la  Maestà  sua. 
Allaill™"  Signoria  vostra  continue  me  raccomando. 

Ex  Himbst,  28  maii  1499. 
Mininimua  servitor  Marchisinus  Stanga. 


18 

Giorgio  Soprasasso  à  Ludovic  Sforza  ' 
Sion  en  Valais,  26  mai  1499).  Analyse. 

M  i.i  'li!  una  lettera  <lol  Re  de  Franza  a  Blés,  de  24  aprilis, 

alli  coufederati,  per  confortarli  allô  assetto  de  la  guerra,  accio  che 
V  ra  Excellentia  intenda  quando  per  el  mezo  suo  seacconcianoleco.se 
che  fin  habia  parturire  la  pace. 

Kl  Re  scrive  che,  considerando  quanto  detrimento  sii  per  portare 
a  loro  li  inimici  e  a  tntto  el  christianesimo  la  guerra  sua  cou  Suevi 
et  adherenti,  li  è  parso  interponere  l'opéra  sua  per  sedare  questa 
il  per  I  tquale  se  porriano  sminuire  le  forze  de  la  christianità, 
et  augumentare  quelle  del  Turco  ;  perô  manda  soi  ambasatori  a  loro  et 
alli  inimici  per  trac  tare  dicto  effecto;  pregandole,  per  la  reverentia 
del  Salvatore,  per  la  fede  nostra  e  de  tutto  el  cristianismo,  vogliano 
exhibirse  prompti  e  parati,  et  perché  forse  li  ambassatori  non  por- 
riano arrivare  cossi  presto,  fare  tregua  per  qualchi  di,  accio  non  se 
venga  ad  conflicto  inante  la  zouta  loro  :  che  saria  perniciosa  cosa. 

M.  Zorzo  subjunge  che'  Suiceri  hano  mandato  incontra  aile  bom- 
barde del  Re  de  Franza;  che  Bernesi  li  hano  scripto  chel  voglia 
drizare  le  lettere  che  se  scriverano  per  V.ra  Excellent 

Circa  la  resolutione  de  Vostra  Excelle  itia  per  li  soi  mille  fiorini  dice 
che  gli  pare  sii  honesto  che  li  dinari  prestati  siino  restituiti  a  V.ra 
Excellentia,  e  lui  li  haveria  dmiandato  a  Monsignore  quando  fusse 
stato  el  termino,  quale  è  a  Kalcn.  Julii,  ma  expectara  voluntera pur- 
che  la  causa  de  M.  Matheo  non  se  differischa,  o  se  li  usi  negligentia 
per  questo  ;  el  che  non  se  poria  fare  senza  incommodo  de  Vostra 
Excellentia,  non  essendo  bastante  la  vechieza  de  Monsignore  a  domare 
quelli  populi. 

Che  in  la  pensione  de  li  soi  ducento  ducati  gli  sono  retenuti  ogni 
anno  venticinque  ducati,  perche  non  se  paghino  senon  fiorini  quattro 

1  Milan,  ibid.  Pot.  E  Svizzera.  Copie.  Summario  de  lettere  de  Val- 
lesi  de  M.  Zorzo  Supersaxo,  die  26. 


3  74  MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA 

l'uno,  se  doveriano  pagare  a  4  floiini  8;  che  lui  non  creda  sii  mente 
de  V.  Ex.,  hâve n do  lui  servito  e  in  tempi  de  guerra  e  pace,  non  senza 
mazore  spesa,  de  laquale  non  ha  mai  domandato  ne  havuto  cosa 
alcuna.  Gli  basta  la  gratia  de  V.  Es.  se  la  po  havere. 


19 

Les  lieutenants  et  conseillers  impériaux  d'Inspruch 
à  Ludovic  Sforza  i 

(Inspruch,  27  mai  1498  [sic]) 


Illustrissime  etexcellentissime  princeps,  doniinneobservandissime, 
paratissimum  semper  obsequendi  animum  comendacione  prsemissa, 
Ex  spectabili  viro  illustrissimœ  Dominationis  Vestra?  cancellario, 
nobis  ob  ejus  virtutes  et  prudentiam  quibus  is  in  agendis  rébus 
prsestare  videtur  prœcipue  accepto,  sa3pe  intelleximus  devotionem 
illam  et  benivolentiam  quibus  Dominatio  Vestra  Illustrissima  erga 
sacram  régiam  Majestatem  et  dominum  nostrum  graliosissimum 
terrasque  suas  et  subditos  afficiatur.  Unde  etiam  factura  sit  quod 
illi  de  Liga  Grisea  segre  ferant  prœsertim  de  eo  quod  D.  V.  Illus- 
trissima in  complacentia  Régie  Majestatis  inhibuerit  ne  ex  terris 
suis  ulla  victualia  sibi  advehantur.  Quam  quidem  benivolentiam  et 
favorem  sacre  Régie  Majestati  accurate  significavimus,ejusque  eapi- 
raneo  exercitus  inimicorum,  si  contingeret  subditos  Dominationis 
Vestrse  illustrissimae  ab  hostibus  predictis  molestari,  illis  proviribus 
auxilio  et  defensioni  esse;  nec  dubitamus  ipsam  regiam  Majestatem, 
quaa  nunc  terris  suis  hereditariis  (contra  quas  bellurn  agitur)  appro- 
pinquavit  illasque  iugressus  est,  iu  hiis  et  longe  majoribus  erga 
Dem  Vr,m  1111"»111  quam  gratiosissime  et  amicissime  se  ostensuram.  Sed 
pro  eo  quod  cupit  Dominatio  Vestra  111. ma  de  successuetactibus  belli 
certior  reddi,  eidem  significandura  duximus  hiis  diebns  proxime  tran- 
sactis  in  Valle  Venusta  non  mediocrera  stragem  factam  esse,  ubi 
circiter  quinque  milia  hominum  utriusque  partis  interierunt,  nostro- 
rum  videlicet  infra  duo  milia,  hostium  vero  numerus  residuus.  Est 
etiam  Regia  Majestas  illius  conaminis  et  propositi  contra  eosdem  de 
Liga  Grisea  tanta  auctoritate  agere  et  procedere  ut  eorum  temeritas 
taliter  opprimatur  quod  non  solura  ipsa  Majestas  Regia,  sed  et  Ili"1* 
Dominatio  Vestra  et  utriusque  terre  subditi  posthac  quietius  tutiusque 
perrnaneant.  Quod  Dominationem  Vestram  Illustrissimam,  ad  cujus 
beneplacita  et  obsequia  nos  paratissimos  offeriraus,  latere  noluimus. 

i  Milan.  A.  D.  S.  Carti-ggio  Générale.  Original. 


MAXTMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA  375 

Kx  oppido  [nsprugg,  x\viima  die  mensis  Maii  mcccclxxxxvjii70. 
Etomanorum  Régis  Domiui   nos  tri  gratiosissimi   locumtenentes  et 
consiliarii  iu  Iusprugg. 


20 

L'ambassadeur  milanais  Jo.  Colla  à  Ludovic  Sforza  ' 

pruch,  31  mai  L499) 

Illustrissime  etexcellentissimosignor,  signoremio  observandissimo, 
Ho  commtmicato  a  questi  regenti  quanto  rn'ha  scripto  la  Excel- 
lcntia  Vostra  haverli  dicto  Zoanne  Antonio,  a  nome  de  M.  Jo.  Jacomo 
Triullio,  delà  !  ssdicta  de  li  vinti  di  e  li  altri  avisi  de  Suiceri,  e  cosi  la 
commissione  facta  a  Bodino  de  li  doi  milia  faoti,  e  la  descriptione  se 
fa  sul  Lago  Maggiore,  e  li  rispecti  per  che  se  fa  questo  :  loro  hanno 
demonstrato  grandissima  displicentia  de  la  desdicta  de  M.Jo.  Jacomo, 
persuadendi  ise  perô  ehe  la  sïa  più  presto  demonstratione  eha  chel  n'ha- 
Iria  reuscire  ad  effecto.  Li  è  beue  summameate  piaciuto  l'aviso  de  la 
mala  contentezza  de  Suiceri  del  re  de  Franza.  Quanto  al  ricordo  fa 
la  Excellentia  V  >r  questi  avisi  possono  cognoscere  essere 

lo  tempo  de  cas ti gare  i  Suiceri,  dicono  che  sperano  de  bene  spendere 
questa  opportunità  ne  havere  in  animo  una  minima  scintilla  de  fare 
pace,  e  più  se  si  dovera  fare,  sara  cum  reputatione  secura  e  cum  ho- 
norevole  inclusione  de  la  E.  V.  Tutavolta  sperino  in  Nostro  Signore 
Dio  che  la  Maestà  Cesarea  e  la  E.  V.  insieme  che  li  ha  adiutati  debel- 
larano  e  triumpharano  de  questi  rustici  Suiceri,  e  che  ringratiano  la 
E.  V.de  li  avisi  e  del  ricordo;  el  quale,  cosi  como  amorevolmente  li  ù 
sposto  da  la  E.  V.,  cosi  fidelmente  el  tenerano  secreto  e  il  metarano 
in  opéra.  Me  domandarono  se  la  E.  V.  avisava  la  Maestà  Cesarea  de 
questo  et  havendoli  risposto  ch'ella  ne  scriveva  al  magniâco  M  essor 
Marchisino,  hano  pur  perô  ordinato  de  scriverne  a  la  Maestà  sua,  loro 
parendoli  avisi  de  non  pocho  momento.  Da  laquale  si  maravigliano 
che  non  habino  qnalche  aviso  gia  doi  giorni  passati,  sebbene  sono  certo 
che  la  Maestà  sua  sia  in  coutinuo  exercitio  per  finir  la  impresa  contra 
Grisani. 

In  bona  gratia,  et  ;. 

Ex  Hispruch,  ultimo  maii  1499. 

Jo.  Colla. 

1  Milan,  A.  d.  S.  Polenze  Estere,  Germanià.  Original.  Lettre  en  partie 
chiffrée,  mais  avec  le  déchiffrement  de  la  chancellerie  milanaise.  Sus- 
cription:  111. mo  principi  et  cxmo  Dn°  meo  observmo  Domino  duci  Medio- 
lani. 


3  7  6  MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA 

21 

Ludovic  Sforza  à  Maximilien  ' 

(Milan,  7   juin  1499) 

Minime  opus  erat  qnod  Vestra  Majestas  a  me  peteret  ut  opéra  Au- 
gustini,  quem  in  Vallem  telinam  misit,  uti  posset  pro  comeatibus  ad 
exercitura  suum  transmittendis  ;  nam  cum  suum  sit  mihijubere,  et  ego 
nil  magis  cupiam  quam  ei  morem  gerere,  persuadere  sibi  débet  posse 
uti  dehis  qui  mihi  serviunt,  non  secus  ac  si  Majestati  Vestre  servirent. 
Sed,  cum  jam  antea,  audiente  Majestatem  Vestram  finibus  Dominii  mei, 
quod  suum  est,  appropinquare,  a  me  ea  provisio  adhibita  sit,  per  quam 
comeatus  ad  eam  confluèrent;  et  nunc  quoque,  intellectis  his  qiue  Au- 
gustinus  significavit  Majestatem  Vestram  cupere,  omnia  diligenter  et 
céleri  ter  expediri  curaverim  (sicut  ab  ipso  Augustino  intelliget),  et 
insuper  miserim  D.  Balthasarem  Pusterulam  ,  equitem  et  eonsilia- 
rium  meum,  Tiranum  cum  aliis  ministris  qui  huic  negocio  intendant, 
arbitior  M.tem  V.ram  non  moleste  laturam  quod  Augustinum  ad  eam 
redire  jusserim...  Etiam  e  re  sua  erit  ut  eam  sequatur,  [ut  melius]  in- 
telligat  quod  a  me  scribi  contigerit,  et  ipse  de  felicibus  progressibus 
M.tis    V.re,  et,    si  ipsa  aliud  me  jubere  volet,  monere  possit. 


22 

L'Impératrice  Bianca  Maria  à  Ludovic  Sforza  ' 

(Fribourg,  10  juin  1499) 

Bianca  Maria,  Dei  gratia  Romanorum  regina  semper  augusta. 
Illme  princeps  patrue  et  pater  carissime, 

Heri  recevessemo  le  lettere  de  la  Signoria  Vostra  de  9  e  12  del  pas- 
sato.  In  una  ne  faceva  intendere  quanto  havesse  havuto  grato  l'officio 
per  nui  a  suo  beneficio  fatto  apresso  elserm0  signor  Re  nostro  consorte, 
ringratiandone  d'esso  e  pregandone  a  continuare;  ne  l'altra  diceva 
esser  advisata  che  nui  bavessemo  scritto  lettere  al  R.mo  et  Ill.mo 
signor  vicecanceliere  suo  fratello,  et  ad  al  tri ,  in  favore  de    uno  per 

i  Milan,  ibid.  Pot.  Estere,  Germania.  Minute  originale.  Suscription  : 
Régi  Romanorum. 

1  Milan,  ibid.:  Pot.  Ext.  Germania.  Original.  Suscription:  Principi  pa- 
truo  et  p[at]ri  [carissi]mo  D.  no  Ludovico  Marie  Anglo,  duci  Mediolani. 


MAXIMILIEN  ET  LUDOVIC  SFORZA  377 

la  coadiutoria  pel  vescovato  de  Gurza,  quai  e  promessa  a  M.  Petro, 
da  Trieste,  instante  el  serm0  signor  Re  predicto,  e  ne  pregava  ad  scri- 
ver  de  novo  ad  chi  havessemo  scritto  per  questa  cosa,  reducendola 
al  proposito  de  M.  Petro.  Ad  la  prima,  dicemo  esserne  piazuto  asai 
sentire  che  a  la  Signoria  Vestra  con  tanto  meglior  animo  e  promp- 
teza,  haveremo  a  perseverare  ne  lo  advenire  ;  de  una  cosa  ne  recresse, 
non  posser  fare  tanto  quanto  desiderariamo  per  la  Signoria  Vostra. 
Ma  almancho  in  ogni  tempo  se  deportaremo  in  tal  modo  verso  de 
quella,  che  cognoscera  non  esserne  manchata  la  volunta  de  giovarli. 
Cossi  non  devevemo  essor  ringraciate  de  cio,  perche  quello  fazemo 
lo  fazemo  per  debito,  volendo  satisfare  a  li  obligi  havemo  a  la  Sig.  V. 
e  eonrisponder  al  paterno  anio  ne  porta  quella.  A  la  parte  de  la  coa- 
diutoria, respondiamo  nui  esser  nove  de  le  dicte  lettere;  che,  quando 
le  havessemo  scritte,  non  séria  stato  per  ignorantia,  essendo  nui  beu 
informate  de  1'  opéra  fatta  fin  al  présente  per  el  predicto  sermo  signor 
Re,  nostro  consorte,  et  anche  per  la  Signoria  Vestra,  in  favor  de 
-M.  Petro;  ma,  ultra  che  non  voriamo  contravenir  a  S.  Maestà  ne  a 
la  Sig.  Via,  glie  anchora  el  rispetto  del  dicto  M.  Petro,  quai  ami- 
amo,  si  per  el  grado  tene  apresso  el  sermo  siguor  Re  nostro  con- 
sorte, si  per  esser  ornato  de  virtù.  E  voriamo  più  presto  aconzarlo 
cha  iuconimodarlo  ne  la  ditta  coadjutoria.  Per  laquai  cosa,  la  Signo- 
ria Vostra  debbe  esser  certa  nui  nou  haver  scritto  ne  al  predicto 
R'"°  et  Iflmo  signor  ne  ad  altri  contra  Messer  Petro  :  perilche  non 
ne  accadde  anchora  dover  rétractai'  quello  non  havemo  fatto.  Per 
testificatione  pero  che  habiamo  caro  el  commodo  de  M.  Petro.  scri- 
viamo  per  la  alligata  ad  lo  predicto  Rmo  ed  Illmo  Signor  in  favor  d'esso 
e  tanto  più  volentera  per  che  la  Signorio  Vostra  cognossa  nui  esser 
prompte  ad  farli  cosa  da  piacere. 

M.  Claudio  de  Wandre  l'altro  heri  vene  de  Bergogna  qui,  per  andar 
poi  verso  el  predicto  sermo  signor  nostro  consorte,  e  quello  zorno  et 
heri  fu  a  visitarne.  Fraie  altre  cose,  ne  disse  haver  adviso  de  uuo  suo 
amico  franzese  chel  Re  de  Franza  era  venuto  de  Bertagna  a  Lione, 
tutto  intento  a  la  impresa  contra  la  Signoria  Vostra,  e  che  gia  haveva 
mandato  inanti  verso  Hast  cinquecento  lanze,  con  certa  quantita  de 
artelaria,  e  doveva  venire  de  le  persone  cinquanta  miliia  e  venir  lui 
in  persona  a  la  ditta  impresa.  Delche,  abenche  tutto  non  crediamo, 
ce  perô  parso  advisarne  la  Sig.  V.,  perche  essendone  advertita,  halù 
a  star  ben  provista.  A  la  Sig.  V.  se  recommandiamo,  certificandola 
como,  per  la  Dio  gratia,  siamo  sane  ;  e  che  continuameute  desidero 
de  quella  intendere  e  cossi  de  li  suoi  figlioli. 

Ex  Friburgo,  x  junh  1499. 

Bianca  Maria  manu  propria.  Ge.  Gadius. 

L.-G.  P. 
{A  suivre.) 


BIBLIOGRAPHIE 


A.  Jeanroy.  —Règle  des  Chanoinesses  Augustines  de  Saint-Pantaléon 
ou  des  Onze  mille  vierges  à  Toulouse  (1358),  in-4°  de  31  pages,  Tou- 
louse, Chauvin,  1901  (Extrait  des  Mémoires  de  la  Société  archéologique 
du  Midi  de  la  France,  tome  XVI,  sous  presse). 

L'intérêt  du  texte  publié  par  M.  Jeanroy  consiste  en  ceci,  qu'écrit 
en  1358  et  à  Toulouse,  il  est  pour  nous  un  témoin  authentique  de  la 
langue  parlée  dans  cette  ville  au  milieu  du  quatorzième  siècle.  Aussi, 
l'édition  qui  nous  en  est  donnée  est-elle  essentiellement  philologique. 
L'inl  ion  nous  donne  bien  quelques  indications  sur  la  fondation 

du  couvent  auquel  s'appliquait  cette  règle,  mais  l'on  s'y  est  surtout 
attaché  à  relever  ce  que  le  texte  offre  d'intéressant  au  point  de  vue  de 
la  phonétique,  de  la  morphologie,  de  la  syntaxe  et  du  vo  :abulaire. 

L'édition   elle-même  ne    présentait  pas   de  grandes  difficultés  :  la 

iction  qu'elle  reproduit,  bonne  en    général,   ne   réclamait  que  de 

loin  en  loin   des   corrections,  le   plus   souvent   assez   simples.   Voici 

cependant  quelques  remarques  ou  corrections  notées  au  cours  de  la 

lecture  *. 

4.  L'éditeur  imprime  dyagne  et  de  même  750  archidyagne.  Malgré 
ce  double  exemple,  je  crois  qu'il  faut  écrire  dyague  et  archhhjague. 
Cf.  E.  Levy.  Provenz.  Suppl.  Woerterh.  II.  233,  qui  regarde  lui  aussi 
comme  douteuse  cette  forme  dyagne. 

17.  Rien  ne  peut  justifier  la  graphie  provesisccûaquo.  La  compa- 
raison  avec  196  montre  qu'il  faut  écrire  provezisca  aquo.  Cette  cons- 
truction du  verbe  provenir  semble  inconnue  à  Raynouard  [Lex.  Rom. 
V.  537)  qui  ne  mentionne  que  les  constructions  provezir  ad  alcuna  re 
et  provezir  ad  alcu  de  alcuna  re.  Mais  la  construction  directe p>roi' 
alcutia  re  est  toute  naturelle  et  a  dû  exister  à  côté  de  prévenir  alcuna 
re.  Les  deux  verbes  provezir  et  prévenir  sont  trop  voisins  pour  qu'ils 
n'aient  pas  réagi  l'un  sur  l'autre.  Cela  est  si  vrai  qu'en  ancien  fran- 

i  On  corrigera  aussi  un  certain  nombre  de  fautes  d'impression:   221. 

riger  vesprasau  lieu  de  vestras;2&i.  corriger  offici :  274.  écrire  adver- 

n  se  en  deux  mol  écrire  endoctrinada  en  un  seul  mot:  373. 

corriger  sors;  511.  écrire  licencia;  675.   corriger  permetra;  721.   écrire 

aysso  ;  743.  corriger  las  au  heu  de  lase. 


BIBLIOGRAPHIE  3  79 

çais,  porveoir  s'employait  pour  «  prévoir  »  et  pour  «  pourvoir  ».  Cf. 
Dictionnaire  général,  s.  v.  pourvoir. 

29.  Rétablir  devant  psalm  l'article  défiai  ;  cf.  234.  digua  le  psalm; 
237.  dïgan  le  psalm. 

45.  Corriger  évidemment  cor  en  cors;  cf.  292.  la  eleratiu  del  ors 
de  J  h  es  u  (  ri  st. 

58.  Rétablir  [e]  en  sa  absencia. 

69.  Ecrire  vint  e  una  en  trois  mots  et  de  même  72.  vint  e  duas, 
75.  vint  e  très.  De  même  1.  78,  la  graphie  vinte  quatre  est  à  rejeter. 
11  fallait  choisir  entre  vintequatre  et  vint  e  quatre. 

72.  Rejeter  la  graphie  rinteduas  et  de  même  102.  trcntadua's  et 
132.  quaranta  dua's.  Ecrire  vint  e  duos,  trenta  duas,  quaranta  duas. 
On  ne  peut,  eu  effet,  admettre  que  dua's  soit  pour  duas  es.  11  eût  fallu 
relever  cet  emploi  des  nombres  cardinaux  una,  duas,  très,  quatre, 
servant  à  former  les  ordinaux. 

121.   Uniformiser  les  sa   laus,  laun,  launa.  Cf.  9L,  loi,  458 

etpassim.  Aucune  des  explications  données  (page  9)  de  ces  formes  ne 
me  parait  satisfaisante.  Ni  le  féminin  la  una,  ni  l'expression  corélative 
l'autre  ne  me  paraissent  pouvoir  rendre  compte  du  masculin  laun. 
L'explication   véritable   m'a  été    su  par    M.    Chabaneau,  qui 

considère  laun,  launa  comme  formés  sur  L'analogie  de  cadaun, 
cadauna. 

187.  Corriger  psams  en  psalms  comme  le  fait  du  reste  M.  J.,  à  la 
ligne  280.  —  225.  Corriger  de'l  dire.  —  246.  Corriger  si  n'avia  et  en 
tendre  »'  =  ne  =  en.  —  258.  Rétablir  [e]  que  no  demande.  —  202. 
Corriger  d'après  36  que  [la]  empache.  —  298.  Rétablir  d'après  47  [e] 
a  la  messa. 

442.  Inutile  de  corriger  vegan  du  manuscrit  en  vengan  si,  comme  le 
die  ailleurs  (p.  7)  l'éditeur,  la  chute  de  n  devant  une  consonne  est 
une  des  caractéristiques  du  texte. 

447.  Corriger  ses  qm  n'agues.  —  4^4.  Corriger  e  las  quatre.  — 488. 
D'après  145  et  passim  rétablir  [las]  quatre  plu*  antiquas. — ■  516.  Mettre 
un  point  el  virgule  après  despensar.  —  517.  Corriger  fo  eu  so. 

519.  Corriger  le  dejuran  du  manuscrit  non  en  dejunran,  mais  en 
dejunaran. 

535.  Corriger  o  cantar  ■>  legir.  Cf.  39.  Comendaran  o  sia  legir  o 
cantar. 

544.  Rétablir  [de]  mossenhe  Cf.  422.  La  ténor  del  testamen  de  bona 
memoria  de  mossenher  le  cardinal. 

611.  Corriger  évidemment  a  lor  en  al  cor.  —  617.  Ecrire  laquai  en 
un  mot  et  de  même  711.  lequel.  —   661.  Corriger  processios  en  , 
cessio  . 


3  80  BIBLIOGRAPHIE 

663.  On  pourrait  rétablir  mosaen  au  lieu  de  mosse[nher].  Cf.  756. 
mossen  et  782.  mosen. 

667  et  671.   Rétablir  [las]  qutre  sur*. 

691.   Inutile  de  corriger  aquesta  aja  du  manuscrit  en  aquestas  ajan. 

725.  Rétablir  [de]  defora  et  de  même  à  la  ligne  suivante  [de] 
dedins. 

756.  Corriger  presencia[l]men. 

758.  La  correction  nos[lre\  est  inutile  et  l'on  peut  très  bien  com- 
prendre avec  nos,  pronom  personnel. 

L'étude  linguistique  qui  forme  la  plus  grande  partie  de  Y  Introduction 
est  telle  qu'on  la  pouvait  l'attendre  de  l'auteur.  Exacte,  précise,  et  en 
général  complète,  elle  relève  ce  que  le  texte  présente  de  caractéris- 
tique. En  particulier  je  ne  vois  guère  à  ajouter  aux  cliapitres  concer- 
nant la  phonétique  et  la  morphologie.  On  eût  pu  cependant  note:  la 
forme  vials  =  vïïcx,  présentant  un  traitement  connu  par  ailleurs,  mais 
peut-être  particulièrement  fréquent  dans  le  parler  de  Toulouse  Cf. 
les  formes  fiel  etjfoZpour  fil,  citées  par  Noulet,  Ordenansas  et  Coustu- 
mas  del  Libre  Blanc,  p.  128.  De  même  il  eut  fallu  relever  les  formes 
de  cas  régime  du  pronom  personnel  féminin  de  la  3e  personne  luy  et 
lu,  d'ordinaire  assez  rares,  et  qui  dans  notre  texte  sont  au  contraire 
très  fréquentes.  Cf.  204,  258,  527  et  passim.  Enfin,  page  9,  N°  22, 
on  corrigera  al  (en  lo)  en  el  (en  lo). 

Peut-être  les  remarques  relatives  à  la  syntaxe  auraient-elles  pu 
être  enrichies  et  certaines  constructions  être  relevées.  Mais  surtout  il 
eût  fallu  se  demander  dans  quelle  mesure  l'on  pourrait  faire  fond  sur 
l'usage  syntactique  de  ce  texte.  Il  eût  fallu  rechercher  si  certaines 
constructions,  certaines  tournures  singulières  ne  trahissaient  pas 
limitation  parfois  servile  d'un  original  probablement  latin  dont  notre 
texte  ne  serait  que  la  traduction.  L'autorité  qu'on  doit  accorder  à 
notre  texte  dépend   de  la  réponse  faite  à  cette  question. 

Enfin  dans  la  partie  consacrée  au  lexique,  voici  plusieurs  mots  qui 
eussent  dû  figurer,  soit  qu'ils  aient  été  inconnus  à  Raynouard,  soit 
qu'ils  se  présentent  ici  avec  des  acceptions  particulières  et  non  don- 
nées par  lui. 

Arrasigat  (185)  =  enraciné.  Le  mot  n'est  pas  dans  Raynouard  qui 
ne  cite  que  arasignar  (Lex.  rom.,  V,  30)  du  reste  fautif  et  corrigé 
avec  raison  par  E.  Lévy,  en  arasiguar. 

Idonea  (328),  mot  emprunté  au  latin  et  qui  naturellement  ne  figure 
pas  dans  Raynouard  pouvait  être  relevé  comme  deposit  et  mora. 

Orde  (228).  Pour  ce  mot  Raynouard  (Lex.  roui.  IV,  379)  ne  cite 
qu'un  exemple  auquel  il  donne  à  tort  le  sens  de  ordinaire  de  la  messe. 


I 


BIBLIOGRAPHIE  ri  SI 

La  comparaison  de  notre  passage  et  de  l'exemple  cité  atteste  pour  le 
mot  le  sens  plus  général  de  liturgie. 

Subte  (428  et  598)  est  employé  deux  fois  comme  adjectif  et  devait 
être  relevé,  car  Raynouard  (Lex.  rom.  V.  241)  ne  connaît  que  subte 
adverbe. 

Vespra  (225).  Raynouard  ne  connaît  pas  cette  forme  de  singulier 
d'autant  plus  curieuse  qu'elle  se  présente  ici  avec  le  sens  tout  parti- 
culier de  veille.  Le  contexte  indique  en  effet  que  l'on  doit  sanctifier 
le  jour  de  la  fête  dès  la  veille  même,  cf.  de  même  e  exceptât  lot-:  los 
Saples  j>er  la  revi  rencia  dt  !  dim  ntge.  C'est  du  reste  le  même  sens  qu'il 
I  attribuer  sans  doute  à  avespre  citépar  Raynouard  {Lex.  rom.  V. 
et  dont  il  nedonnequ'un  exemple.  C'est  ce  sens  qui  s'est  conservé 
dans  les  patois  actuels.  Cf.  Honnorat. Diction. prov.-franç.  s.v.  vespra 
donnant  au  mot  le  sens  de  la  veille,  le  soir  d'avant  et  Noulet,  Libre 
blanc,  p.   185,  citant  plusieurs  exemples  du  mot  avec  ce  sens. 

Mais,  eu  somme, .sous  son  apparence  modeste,  le  travail  de 
M.  Jeanroy  est  une  bonne  contribution  à  l'étude  de  l'ancien  parler 
toulousain.  Il  pourra  être  directement  utilisé  pour  l'étude  à  laquelle 
l'auteur  nous  convie  et  qui  consisterait  à  comparer  la  Règle  publiée 
par  lui,  et  les  textes  sensiblement  contemporains  des  Leys  oVamors 
et  des  Deux  manuscrits  provençaux  édités  par  MM.  Noulet  et  Cha- 
baneau  en  vue  de  fixer  les  traits  essentiels  de  la  langue  parlée  à 
Toulouse  au  XIVe  siècle. 

Jules  Coulet. 


Hermann  Kempe.  —  Die  Ortsnamen  des  Philomena.  Inaugural- 
Dissertation,  in-8c  de  71  pages.  Halle,  a.  S.  1901. 

Cette  dissertation  de  prétentions  modestes  complète  utilement 
l'édition  du  Philomena,  publiée  naguère  par  M.  Schneegans1.  Sous 
son  titre,  qui  n'est  du  reste  qu'à  moitié  exact,  elle  nous  présente 
d'abord  (pp.  7-20;  une  analyse  du  texte  qui  manquait  à  l'édition  et 
dans  la  seconde  partie,  la  plus  importante,  elle  nous  donne  l'Index 
des  noms  de  lieux  que  j'avais  regretté  de  n'y  pas  trouver  -. 

De  l'analyse  elle-même,  je  dirai  seulement  qu'elle  m'a  paru  faite 
avec  soin,  peut-être  trop  détaillée,  mais,  somme  toute,  satisfaisante. 
Quant  au  tableau  (pp.  7-8)  destiné  à  nous  faire  comprendre  la  com- 
position des  Gesta,  c'est  peut-être  une  description  par  l'extérieur  des 

1  Gesta  Karoli  magni  ad  Carcassonam  et  Narbonam,  édition  Schnee- 
gans, Halle,  a.  S,  1898. 

2  Cf.  Annales  du  Midi,  XII,  238 


382  BIBLIOGRAPHIE 

différentes  parties  du  récit  ;  à  coup  sûr,  il  ne  nous  renseigne  pas  sur 
sa  structure  même  et  sur  ce  qu'on  pourrait  appeler  sa  composition 
interne.  Ni  M.  Kempe,  ni  avant  lui  M.  Schneegans,  n'ont  montré,  à 
mon  avis,  comment  s'était  développé  ce  récit  où  l'abondance  et  le 
désordre  apparent  des  épisodes  semblent  nier  l'existence  de  tout 
plan.  J'espère  du  reste  pouvoir  bientôt  reprendre  la  question  et 
apporter  quelque  lumière  sur  la  véritable  composition  des  Gesta. 

Dans  la  seconde  partie  de  son  travail,  l'auteurs'est  proposéde  dresser 
la  liste  complète  de  tous  les  noms  de  lieux  cités  dans  le  texte,  de  donner 
toutes  les  variantes  de  formes  de  l'original  latin  et  de  la  traduction 
provençale,  enfin,  autant  que  possible,    de    retrouver    ces    noms  de 
lieux  dans  la  toponymie  du  temps  ou  de  les  identifier  avec  des  localités 
encore  existantes,  ~"e  que  l'on   reprochera  surtout  à  M.   Kempe,  c'est 
d'avoir  ainsi  compris  et  limité  son  sujet.  L'élément  local  a,  dans  la 
composition  des  Gesta  une  telle  importance,  que  l'étude  des  noms  de 
lieux  cités  pouvait  nous  aider  à  mieux  comprendre  l'œuvre  et  aussi  à 
mieux  connaître  son  auteur.  Elle  eût  permis  de  prouver  ce  que  l'on 
s'était  surtout   borné   à  affirmer,  à  savoir  l'exactitude  des  descrip- 
tions et  la  connaissance  qu'avait  l'auteur  du  pays  où  il  fait  mouvoir 
toute  son  action.  Un  autre  trait  intéressant  à  signaler,  c'est  son  em- 
barras à  trouver  pour  les  lieux  qu'il  cite  et  qu'il  connaît  surtout  sous 
leur  nom  vulgaire  et  provençal  la  forme  latine  exigée  par  la  rédac- 
tion en  latin  de  son  récit.  Il  se   traduit  parfois  par   une   diversité  de 
formes  si  étranges  qu'on  ne  sait   si    certaines  ne  sont  pas  vraiment 
fautives;  parfois  encore  l'auteur  se  borne  à  donner  une  terminaison 
latine  à  la  forme  provençale,  parfois  enfin,  il  la  transcrit  telle  quelle. 
D'autre  part,  il  eut  été  curieux   de   voir  comment  l'auteur  de  la  tra- 
duction   provençale  traitait  à  son  tour  ces  noms  latins   ou  pseudo- 
latins. Parfois,  ils  disparaissent  totalement  dans  le  passage  du  latin  au 
provençal,  et  si,  dans  certains  passages,  cette  absence  peut  s'expliquer 
par  un  désir  manifeste  d'abréger  le  récit,  dans  d'autres  il  est  cer- 
tain  que  le  traducteur  les  a  omis  consciemment,  parce  qu'il  ne  les 
reconnaissait  pas.  Ailleurs  encore  il  se  borne  aies  transcrire  tels  quels; 
parfois  enfin,  il  les  déforme  de  telle   façon,   qu'il   est  certain  qu'il  ne 
sait  pas  de  quelles  villes  ou  de  quels  pays  il  s'agit.  Il  y  avait  là  des 
comparaisons    curieuses    à   faire    et    des    remarques     intéressantes 
qu'on  regrettera  de  ne  pas  trouver  dans  le  livre  de  M.  Kempe. 

Ce  travail,  tel  que  l'a  conçu  son  auteur,   est,    somme  toute,  satis- 
faisant '.  On  ne  relèvera   dans    sa  liste   ni  omission,  ni  lacune    im- 


i  Oi.  endant  à  M.  K.  de  n'avoir  pas  apporté  un 

suffisant  u  la  composition  matérielle  du   livre  et   a  la    correction  de  ses 


BIBLIOGRAPHIE  3S3 

portante  et  ses  identifications,  dont  du  reste  la  plupart    B'imp 
sont  en  général  vraisemblables.   11  u'est  que  juste    d'ajouter  que  le 
travail  avait  été  en  partie  préparé  par  M.  Schneegans  et  que  M.  Kempe 
a  utilisé  les  indications  réunies  par  lui   pour   les  préciser  parfois  et 

surtout  pour  les  compléter. 

P.  21-22  à  propos  du  nom  à'Albarras  M.  K.  pense  que  l'identifica- 
tion avec  la  Chaîne  des  Albères  ue  .-'impose  pas  et  qu'il  peut  s'agir 
tout  aussi  bien  du  petit  village  d'Albère  (dép.  «les  i'yrén. -Orient., 
arr.  de  Céret,  cant.  d'A  .  Mais  il   faudrait  d'abord  attester  au 

treizième  siècle  l'existence  de  oc  village.  Déplus,  la  façon  dont  le  texte 
latin  désigne  cet  endroit  ubi  vocalur  ad  Albarras  indique  que  c'est 
une  dénomination  imaginée  par  l'auteur  pour  indiquer  un  défilé,  un 
-âge  conduisant  vers  les  Albères.  Au  surplus,  le  village  actuel 
d'il  Ibère  est  trop  à  l'écart  de  la  route  de  France  en  Espagne,  que 
l'auteur  du  récit  fait  évidemment  suivre  à  l'armée  de  Charlemagne. 

P.  31.  M.  K.  déclare  qu'on  ne  voit  pas  de  quel  Clarum  Montera  il 
s'agit  à  la  ligue  2631,  et  il  nous  laisse  le  choix  entre  Clerniont- Fer- 
rant! et  un  chef-lieu  de  canton  du  Tarn-et-Garonne,  appelé  de  nos  jours 
Monclar  de  Quercy.  On  ne  s'explique  pas  ce  doute,  car  le  texte  latin 
indique  expressément  qu'il  s'agit  bien  de  Cleimunt  en  Auvergne. 
«  Misitautem in  Alvernia  apud  Clarum  Montent.  » 

P.  31.  A  propos  de  la  ligne  2630,  misit....  apud  Convenarum,  au 
lieu  de  se  demander  s'il  s'agit  des  habitants  du  comté  de  Cominiuges 
en  général,  si  l'auteur  a  pensé  k  Lugdunum  Convenarum  ou  à  Aquae 
Convenarum,  M.  K.  eut  mieux  fait  de  déclarer  le  texte  latin  corrompu 
et  toute  identification  impossible. 

P.  31.  M.  K.  réunit  en  un  même  article  CaucoUbrium  dont  il  es 
question  à  la  ligne  2481,  en  provençal  Cogliure,  et  une  localité  appelée 
(1.  845  et  908)  en  latin  Culieria  et  en  provençal  Culieyra.  Il  les  identifie 
toutes  deux  avec  le  village  actuel  de  Collioure  (Pyr. -Orient.,  arr.  de 
et,  cant.  d'Aigelès).  Si,  pour  la  première,  cette  identification  est 
certaine,  rien  par  contre  ne  la  justifie  en  ce  qui  concerne  la  seconde. 


suves.    Les  fautes   d'impression   abondent   dans  son   livre;  en  voici 

quelques-unes,  notées  au    cours   de  ma   lecture,  et  qu'on  voudra  bien 

:P.  i,  ô.  lire  Foncin  au  lieu  de  Foncier  ;  p.  20,5,  lire  Agde  au 

;  ii.  24,  16,  lire/bronau  lieu  m;   p.  25,  i\,  lire  Aix-en-P. 

el  Aix-les-Bains  ;  j>.  31,  18.  Lire  Saillagouse;  p.  33,  8,  lire  Constantino- 

fa?ia;i>.  12,  33,  lire  Limoux;  p.  46,  27,  lire  cum  au  lieu  de  cam; 
p.  ">i,  20,  lire  Petragoricensium ;  p.  56,  19,  lire  Prokenssals ;  p.  56,  24, 
Ure  Raynaborc;  p.  5S,  24.  lire  Bovinam;  p.  59,  19,  lire  destruxerunt  ; 
]'■  63,  ;,'i.  hre  Th  mias;  p.  64,  32,  lire  paroccialis ;  p.  61,  :j,  lire  Taug  au 
lieu  de  Tang. 


384  BIBLIOGRAPHIE 

Au  point  de  vue  de  la  forme,  le  latin  Culieria  n'a  rien  de  commun  avec 
Caucolibrium,  ni  le  provençal  Qulieyra  avec  Cogliure.  De  plus,  dans  les 
deux  passages  où  il  est  question  dcl  rey  de  Qulieyra,  il  semble  bien 
qu'il  s'agit  d'un  roi  sarrasin  d'Espagne. 

1'.  46.  L'auteur  eut  dû  réunir  en  un  même  article  ce  qui  concernait 
Garinus  de  Monteclario  et  Falco  de  Montesclario.  Ce  sont  évidemment 
deux  personnages  de  la  même  famille  et  tirant  leur  nom  d'une  même 
localité.  Qu'en  ce  Garinus  de  Monteclario  revive  Garin  de  Montglane 
ou  de  Monglan,  l'ancêtre  de  la  geste  de  Guillaume,  c'est  ce   qu'on 
aurait  déjà  pu  supposer  avec  vraisemblance,  si  le  traducteur  provençal 
n'avait  pris  soin  de  l'appeler  expressément  de  Monglan.  Ce  qui  était 
intéressant  ce  n'était  pas  de  chercher,  vainement  d'ailleurs ,  à  identifier 
ce  Monglan,  mais  a  retrouver  le  Montclar  prononcé  Moncla(r),  qu'on 
a  pu  ainsi  substituer  à  M< onglan  prononcé  Mongla(n).  L'auteurpensequ'il 
s'agit  encore  ici  de  Montclar  de  Quercy.  Il  eut  pu  au  moins  mentionner 
l'existence  d'un  autre  Montclar  plus  voisin  de  Narhonne  et  de  Lagrasse  ; 
c'est  le  village    actuel  de    ce  nom,  situé  dans  l'arrondissement  de 
Carcassonne,  canton  de  Montréal. 

P.  55.  Les  noms  de  Prat-naout  et  Prat-vieil  peuvent  actuellement 
servir  à  désigner  une  métairie  sans  qu'ils  signifient,  comme  le  dit 
M.  K.,  métairie  haute  et  métairie  basse. 

Jules  Coulet. 


OUVRAGES  ANNONCES  SOMMAIREMENT 

Baist  (G.)-  —  Variationen  liber  Roland  2074,  2156  =  Beitr.  z.  rom.  u. 
engl.  phil.,  Festschrift  fiir  W.  Fœrster,  s.  213-232. 

M.  Baist  cherche  à  préciser  par  divers  moyens  la  date  de  la  com- 
position et  le  lieu  d'origine  de  la  Chanson  de  Roland.  Il  examine  suc- 
cessivement les  noms  des  armes  qui  sont  mentionnées  dans  le  poème, 
les  noms  géografiques,  les  noms  etnografiques,  puis  la  question  de 
la  composition  et  des  remaniements  et  il  conclut  ainsi  :  «  Danach 
wûrde  sich  ergeben,  dass  unser  Roland  von  einem  Normannen  auf 
franzischem  Gebiet  fiir  Francier  nach  franzischer  Voilage  bearbeitet 
worden  ist,  im  ersten  Viertel  des  12.  Jh.».  Cet  article  est  surtout  un 
travail  de  précision  et  il  est  émaillé  de  remarques  fort  intéressantes. 

M.  G. 


Le  Gérant  responsable:  P.  Hamelin. 


LE  PARLER 
DE  BAGNÈRES-DE-LUCHON 

ET    DE    SA    VALLÉE 


INTRODUCTION 

Nous  nous  proposons  d'examiner  ici  le  parler  de  Bagnères- 
de-Luchon  et  de  sa  vallée.  Nous  avons  pu  l'étudier  sur  les 
lieux  mêmes,  principalement  à  Saint-Mamet,  depuis  1892. 

Bagnères-de-Luchon  est  un  chef-lieu  de  canton  du  dépar- 
tement de  la  Haute-Garonne.  Sa  population  est  d'environ 
3700  âmes.  C'est  une  charmante  ville  d'eaux  thermales, 
située  au  centre  de  la  région  pyrénéenne,  dans  une  fraîche  et 
riante  vallée  qu'arrosent  deux  rivières,  l'One  et  la  Pique.  Les 
étrangers  qui  viennent  la  visiter  se  plaisent  à  lui  donner  le 
nom  de  Reine  des  Pyrénées.  Sa  position  géographique  nous 
indique  déjà  que  son  parler  fait  partie  du  dialecte  gascon  pro- 
prement dit,  qui  comprend  en  gros,  comme  on  le  sait,  tous  les 
pays  situés  entre  l'Océan,  l'Adour,  le  gave  d'Oloron,  les  mon- 
tagnes neigeuses  et  les  cours  de  l'Arize  et  de  la  Garonne. 

Dans  le  gascon  ainsi  défini,  on  peut  maintenant  distinguer 
deux  sous-dialectes,  caractérisés  par  la  forme  de  l'article.  En 
effet,  tandis  que  les  Gascons  des  plateaux  et  des  plaines  se 
servent,  comme  les  habitants  de  la  Guyenne,  du  Languedoc 
et  de  la  Provence,  des  articles  masc.  le  ou  /u,  fém.  la  1,  les 
Pyrénéens  du  centre,  depuis  Oust,  dans  l'Ariège,  jusqu'à 
Lasseube  et  Aramits,  dans  les  Basses-Pyrénées,  se  servent  de 
l'article  masc.  ez-,  et  ou  etc/i  (venant  de  illum  et  non  de  illûm, 
et  plus  ou  moins  modifié  dans  sa  finale),  fém.  ela  ou  exa.  Le 

i  Voir  au  début  de  la  première  partie,  pour  l'alphabet  adopté. 
xi.v.  —  Septembre-Novembre  l'J02.  25 


S86  LE   PARLER    DE  BAGNERES-DE-LUCHON 

parler  de  Luchon  appartient  donc  au  sous-dialecte  qu'on  peut 
appeler  le  gascon  montagnard. 

A  leur  tour,  les  patois  du  Haut-Comminges,  de  la  Barousse, 
de  la  vallée  de  la  Pique  et  de  l'One,  de  la  haute  vallée  de  la 
Garonne  ou  du  Gar,  val  d'Aï  an  compris,  et  des  vallées  d'Aure 
et  de  Louron  forment,  dans  le  gascon  montagnard,  un  groupe 
qu'on  pourrait  désigner  sous  le  nom  de  groupe  des  Vallées 
(comme  comprenant  en  gros  les  «  Quatre-Vallées»)  ou  mieux 
de  groupe  onésien  (du  nom  des  Onésiens,  anciens  habitants  du 
pays  de  Luchon,  qui  occupe  le  centre  de  cette  région).  Ce 
groupe  est  limité  au  nord  par  celui  que  forment  ensemble  les 
parlers  du  Bas-Comminges  et  du  Nébouzan  (Saint- Gau- 
dens,  etc.).  Ceux-ci  se  distinguent  des  parlers  onésiens  par 
l'emploi  de  l'article  fém.  ela  (au  lieu  de  eza),  par  des  pluriels 
en  -es  de  noms  masculins  terminés  par  une  consonne  (Ex.  :  ûs 
«  ours  »,  pi.  uses),  etc. 

On  peut  ensuite  distinguer  nettement,  dans  le  gioupe  oné- 
sien, le  parler  du  canton  de  Luchon  de  celui  des  pays  immé- 
diatement voisins.  Il  va  sans  dire  que,  du  côté  de  Venasque 
[Bendsk),  les  Pyrénées  forment  une  limite  décisive1.  Bans  le 
groupe  onésien:  1°  La  vallée  d'Aran,  à  l'est,  bien  que  pays 
gascon,  a  subi  assez  profondément  l'influence  espagnole:  ce 
qui,  ajouté  à  la  diversité  primitive,  a  amené  des  différences 
notables  dans  le  vocabulaire  (Ex.  :  on  dit  en  aranais:  a  kabnlh 
«  à  cheval  »  ;  kûchu  «  boiteux  »  ;  g  as  tu  «  dépense»  ;  espantâ-s 
«  s'épouvanter  »  ;  kedd-s  «  s'arrêter»  ;  on  emploie  le  pronom 
neutre  16  pour  sô,  etc.).  Bailleurs  (et  ceci  encore  rapproche 
l'aranais  de  l'espagnol],  l'aranais  a  une  tendance  à  préférer  le 
son  u  au  son  û  (Ex.  :  brûcha  «  sorcière  »,  luch.  brûcho;  bezûnh 
«besoin»  ,  luch.  et  larb.  bejùnh)  ;  mais  u  existe  cependant  en 
aranais  (Ex.  :  ûa  «  une  » ,  luch.  yô,  larb.  ibâ  ;  arlùid  «  arrêter» 
etc.).  Enfin,  l'influence  catalane,  elle  aussi,  s'est  fait  sentir 
dans  la  vallée  d'Aran,  qui,  comme  on  le  sait,  fait  partie  de 
la  Catalogne  (province  de  Lérida,   en  catalan,  Lhêyda),  dont 

i  La  Catalogne  s'étend  jusqu'au  sud  de  la  vallée  d'Aran.  La  vallée  de 
Yénasque,  au  sud  de  celle  de  Luchon,  fait  partie  de  l' Aragon  (province 
de  lluesca).  Son  parler  est  un  parler  de  transition,  à  ce  qu'il  nous  semble, 
entre  le  catalan  et  Varagonais. 


ET   DE   SA  VALLEE  387 

elle  occupe  l'extrémité  nord-ouest.  Ainsi,  p.  ex.,  le  catalan 
aime  les  gutturales,  et  l'aranais  dit  agi,  agéso,  agût,  au  lieu 
du  luch.  a/ci,  aioéso,  awût  (passé  déf. ,  imparf.  du  subj.  et 
part.  pass.  du  verbe  awé,  «  avoir  »)  ;  digi,  au  lieu  du  luch. 
dichi  ou  did'i  (pass.  déf.  du  verbe  dide,  «  dire  »),  etc.  —  2°  La 
vallée  de  Louron  et  la  vallée  d'Aure  suppriment  y  à  la  lin 
des  mots  (Ex.  :  Ansiza  «Ancizan»,  Sarraykuli  «  Sarranco- 
liu  »).  Elles  disent  ù  unie  «  un  homme  »,  comme  le  Béarn  ; 
à  Luchon,  on  dit,  au  contraire,  avec  y  gutturale,  ùy  ôme: 
prononcez  presque  ûng  orne;  (bien  qu'on  dise  cependant,  par 
exception,  yâwte  «un  autre»,  ce  qui  suppose  *û  t'ucte,  puis 
*  K'âwte).  Elles  disent  ex-  pour  l'article  masculin  devant  une 
voyelle  (Ex.:  ex-  ûs  «  l'ours»;  cf.  à  Oloron  ex-aiolhè  «le  ber- 
ger »).  Elles  emploient  y  pour  j  (Ex.  :  yioén  «jeune  »  luch. 
jicén).  Ajoutons  encore  que  s  finale  est  conservée  dans  la 
vallée  d'Aure,  là  où  le  luchonnais  la  laisse  tomber  (Ex.:  exa 
lits  «l'avalanche»,  luch.  exa  lit;  saùéls  «vous  savez», 
luch.  sa/jét;  pourtant  larb.  sabéts).  — 3°  Enfin,  au  nord  du 
pays  de  Luchon  *,  le  parler  de  Marignac  et  de  Saint-Béat, 
très  semblable  au  luchonnais,  s'en  distingue  d'abord  par 
l'emploi  fréquent  de  la  terminaison  tch  là  où  le  luchonnais 
n'emploie  que  t  (Ex.:  Sem-Byâtch,  luch.  Sem-Byât,  «Saint- 
Béat»;  y  êteh  anâlc/i?  luch.  y  et  anal?  «y  êtes-vous  allé?») 
A  Luchon,  le  t  final  est  simplement  prononcé  avec  force;  la 
terminaison  tch  existe  bien  en  luchonnais,  mais  elle  n'y  ré- 
sulte guère  que  du  groupe  11  latin  devenu  final.  De  plus  le 
parler  de  St-Béat,  termine,  comme  ceux  de  la  Plaine,  en  -à, 
•ùs,  -on  les  mots  terminés  en  luchonnais  en  -e,  -es,  -en  (du 
latin  -at,  -as,  -ant)  ;  l'article  féminin  pi.  y  est  exas  (luch.  es); 
«  une  »  s'y  dit  ûo  (luch.  yô,  larb.  iùâ).  Enfin  il  possède  des 
mots  spéciaux  (daioâtch  «  sous»,  luch.  debâtch;  umpyâ  «  rem- 
plir», luch.  emplyâ,  etc). 

Maintenant,  dans  le  langage  du  canton  de  Luchon  lui-même, 
il  y  a  une  distinction  à  établir  entre  le  parler  de  la  vallée  de 
Luchon  (ancien  lac  desséché),  arrosée  par  la  Pique,  et  dirigée 
du  sud  au  nord,  et  celui  des  vallées  de  Larboust  et  d'Oueil, 

(1)  Dos  qu'on  sort  du  canton,  à  Gaziu-L -ivrisse,  ;i  Lège,  à  Guran,  on 
quitte  le  luchonnais. —  La  Barousse  parle  à  peu  près  comme  Saint-Béat. 


388     LE  PARLER  DE  BAGNERES-DE- LUCHON 

arrosées  par  l'One  et  les  Nestes  qui  la  grossissent,  orientées 
de  l'ouest  à  Test,  plus  élevées  que  la  vallée  de  Luchon,  moins 
ouvertes  pour  ces  deux  causes  aux  influences  du  dehors,  et 
conservant,  par  suite,  quelque  chose  de  plus  archaïque  dans 
la  langue  et  clans  les  mœurs  *.  Le  parler  larboustois  se  sépare 
du  parler  luchonnais  proprement  dit  par  plusieurs  caractères: 
1°  Le  larboustois  (ainsi  que  I'aranais)  conserve  l'a  final  aione 
du  latin  (féminins  et  impératifs  terminés  en  a  au  lieu  de  o, 
conditionnels  en  yâ  au  lieu  de  yô,  etc.),  ce  qui  donne  quelque 
chose  de  plus  naïf  à  ce  langage;  ^°  les  noms,  les  adjectifs  et 
surtout  les  participes  masculins  font  leur  pluriel  en  i  plus 
souvent  que  dans  la  vallée  luchonnaise  ;  3°  le  son  u  est  parfois 
préféré  au  son  ù  (Ex.:  brûcha,  «  sorcière»;  à  h\xc\\oxi,brûcho)\ 
ce  caractère,  comme  le  premier,  rapproche  le  larboustois  de 
I'aranais  et  de  l'espagnol;  4°  le  vocabulaire  a  quelque  chose 
de  plus  antique  et  de  plus  proche  du  latin  (Ex.:  baxâ  «  danser  », 
bas  «  auge  »,  kiréw  «  corral  »,  arrûpa  «robe  »,  estuykà  «arrê- 
ter»; yêggwa  «jument»,  pris  au  louronnais,  etc.),  et  les  mots 
sont  souvent  moins  modifiés  que  dans  la  vallée  luchonnaise 
(Ex.:  larb.  tivâ  «  tienne  »,  swâ  «sienne  »,  luch.  tyô,  syô; 
larb.  wâ  «une»,  luch.  yô  ou  yù;  larb.  aketô  «cela»,  luch'. 
akrô;  cep.  larb.  pyâ  «  pleine»,  luch.  plyô  ;  dèntya  «jusqu'à», 
luch.  diykyo  ou  diyko;  jâmès  «jamais»,  luch.  famés;  mcâti 
«nous  autres»,  luch.  nuzâwli,  etc.),  ce  qui  contribue  encore 
parfois  à  rendre  le  parler  plus  doux.  Mais,  ces  réserves  faites, 
le  larboustois  (étudié  déjà,  comme  on  le  sait,  par  un  savant 
archéologue,  enfant  du  pays,  Julien  Sacaze)  peut  être  consi- 
déré comme  ne  formant  qu'un  seul  et  même  langage  avec  le 
luchonnais  2. 

Enfin,  dans  le  luchonnais  proprement  dit,  parlé  par  envi- 
ron 6,000  âmes,  c'est-à-dire  par  plus  des  deux  tiers  des  habi- 

1  Voy.  J.  Sacaze,  Epigraphie  de  Luchon,  p.  4-6  ;  Histoire  ancienne  de 
Luchon,  p.  3-6. 

2  Nous  aurons  l'occasion  de  revenir  plus  d'une  fois  sur  la  compa- 
raison du  luchonnais  et  du  larboustois.  Cette  comparaison  sera  plus 
fructueuse,  lorsque  nous  aurons  remarqué  les  caractères  distinctifs  du 
luchonnais  pris  dans  son  ensemble  :  les  caractères  spéciaux  de  chacune 

:  iux  divisions  pourront  alors  rire  mieux  discernés  des  caractères 
généraux  communs  à  toutes  deux. 


ET   DE   SA    VALLEE  389 

nuits  du  canton,  peuplé  d'environ  8.500  ;"i  a  >s,  il  convient  de 
mettre  un  peu  à  part  les  pari  ers  de  Gouaux,  d'Artigue  et  de 
Sodé,  villages  élevés  situés  sur  le  flanc  oriental  delavalléede 
Luchon.  L'altitude  et,  par  conséquent,  l'isolement  relatif  de  ces 
vidages,  a  conservé  à  leur  langage  que  que  chose  de  plus  ancien 
(par  exemple,  on  dit  à  Artigue  eiadiû  ou  cxa  di<''*,  «  le  jour  », 
en  deux  syllabes  et  fém.  ;  luch.  ed  dyô,  larb.  ed  dyâ\  —  on 
dit  atoji  pour  «  entendre  »,  bï  pour  «  venir»),  ce  qui  le  rap- 
proche un  peu  du  larboustois. Cazarilli  est  aussi  un  peu  à  part, 
par  suite  île  sa  situation  élevés  sur  le  liane  occidental  de  la 
vallée  de  Luchon.  Le  parler  de  Luchon  est  à  classer  avec 
ceux  des  villages  du  fond  de  la  vallée,  c'est  à-dire  avec  ceux 
de  Cier,  de  Salles,  d'Antignao,  de  Moustajon,  de  Juzet,  de 
Montauban  et  de  Saint-Mamet.  Les  différences  sont  minimes 
entre  tous  ces  parlers  ;  ils  sont  plus  ou  moins  purs  suivant  les 
villages1  et  quelquefois  même  suivant  les  maisons  2. 

Une  chose  tend,  malheureusement,  à  altérer  de  plus  en 
plus  le  langage  original  de  cette  région  :  la  grande  vogue 
dont  jouit  la  station  thermale  de  Bagnères-de-Luchon  depuis 
une  cinquantaine  d'années.  La  ville  a  doublé  en  étendue; 
une  foule  de  constructions  nouvelles  se  sont  élevées  et  la 
la  population  a  notablement  augmenté,  par  suite  de  l'immi- 
gration non  seulement  des  gens  de  la  vallée,  ou  même  du 
canton  (d'où  un  certain  mélange,  à  Luchon  même,  du  parler 
larboustois  au  parler  bichonnais),  mais  encore  des  gens  des 
vallées  plus  septentrionales,  de  la  Plaine  ou  de  plus  loin 
encore;  enfin,  le  contact  des  étrangers  a  fait  négliger  de  plus 
en  plus  le  parler  local. 

Une  autre  cause  d'altération,  importante  aussi,  c'est  le  dé- 
part d'un  grand  nombre  de  Luchonnais  pour  les  villes  de  la 
Plaine,  notamment  pour  les  régions  de  Bordeaux  et  de  Cette, 


1  Quelques  mots  ditièent  :  ainsi,  à  Saint-Mamet  et  à  Luchon  on  dit 
plutôt  w-lii  «ouvrir»  que  dawct]  béy  •<  voir,  que  bédé;  a  Montauban 
«traîneau»  se  dit,  au  lieu  .1.'  lu-,  suték.  Gouaux,  Juzet,  Montauban 
■M  plus  lentement  qi 

-  ('.  parlenl    i  serre  »,    l'autres  d'un  .  Mieux 

vaut  1^  premier,  sans  exagér  is  ou  moins  archaï- 

que et  plus  ou  moins  mélange,  suivant  l'histoire  delà  maison. 


390  LE   PARLER  DE  BAGNERES-DE-LUCHON 

le  plus  souvent  à  titre  de  petits  employés.  Quand  ils  revien- 
nent (car  ils  gardent  l'esprit  de  retour),  ils  ont  un  peu  perdu 
l'habitude  de  leur  langage  ;  et  leurs  enfants  peuvent  ne  savoir 
que  le  français. 

Ajoutons  enfin  l'influence  de  l'école,  des  journaux  et  des 
livres  ;  mais  elle  est  plus  faible  que  celles  du  dépaysement  et 
des  étrangers. 

Malgré  tout,  si  le  langage  de  la  ville  s'est  un  peu  corrompu , 
celui  des  villages  ne  s'est  pas  trop  altéré.  Cela  tient  avant 
tout  au  genre  de  vie  de  leurs  habitants  :  pasteurs  et  agricul- 
teurs, ils  n'ont  pas  trop  de  rapports  avec  la  ville,  et  peuvent 
conserver  ainsi  la  pureté  de  leur  parler.  Ce  fait  est  resté 
longtemps  vrai  de  Saint-Mamet,  dont  la  population  devait 
même  habiter  autrefois,  dans  le  délicieux  vallon  de  Burbe,  un 
village  écarté,  aujourd'hui  en  ruine,  du  nom  de  Simadûs. 
D'ailleurs,  les  habitants  de  Saint-Mamet  sont  ceux  qui  res- 
semblent le  plus,  à  tous  les  points  de  vue,  à  ceux  de  Bagnères- 
de-Luchon. 

Les  gens  de  Saint-Mamet  et  de  Luchon  sont  remarquables 
parleurs  caractères  physiques  et  moraux1.  L'abbé  Ferrère, 
dans  son  ouvrage  intitulé  Une  voix  des  montagnes,  publié 
en  1869,  s'étonne  du  «  type  singulier  »  des  gens  de  Saint- 
Mamet.  «  Depuis  quelques  années,  dit-il  (p.  110),  il  disparaît 
peu  à  peu,  à  cause  des  nombreuses  émigrations  de  la  jeunesse. 
Ce  type  faisait,  de  ce  peuple  de  cinq  cents  âmes,  quelque 
chose  à  part,  d'étonnant,  d'impossible,  quelque  chose  d'aussi 
étonnant  pour  le  moraliste  que  les  rochers  de  granit  d'Oo 
pour  le  minéralogiste.  On  est  à  se  demander  d'où  il  vient. 
Rien  ne  lui  ressemble,  ni  à  Luchon,  ni  dans  les  villages 
voisins.  Population  unique,  seule,  isolée  des  autres  comme 
une  île  au  milieu  de  l'Océan...  .  en  dehors  de  tout  mélange. 

L'histoire  est  pour   elle   une   page   effacée Quoi  qu'il  en 

soit,  la  pensée  jaillit  de  l'esprit  de  ce  peuple  comme  une 
étincelle  ;  son  langage  est  vif  et  saccadé  ;  il  imite  le  torrent 
dans  sa  course  bouillonnante  sur  les  rochers.  Son  caractère 


1  Voy.  aussi  ce  qu'en  dit  Taine  dans  <on  Voyage  aux  Pyrénées.  Il 
trouve  chez  les  Luchonnais  quelque  chose  de  plus  vif,  de  plus  alerte  que 
chez  les  populations  voisines. 


ET  DE  SA  VALLEE  391 

est  pétri  de  salpêtre.  Prompt  à  la  colère  et  à  la  vengeance, 
rien  ne  pourrait  l'arrêter.  Il  est  agile,  fort,  impétueux.  Et  ce 
lion  du  désert,  tout  sauvage  qu'il  paraît,  tout  frémissant  qu'il 
est,  a  un  coeur  d'or.  Quand  ils  aiment,  c'est  pour  tout  de  bon  ; 
ils  ne  font  rien  à  demi.  Pour  leurs  amis  ils  se  feraient  mettre 
en  pièces.  Dès  qu'il  s'agit  de  leurs  intérêts,  ils  ne  forment 
qu'une  famille  compacte,  et  qui  insulte  l'un  d'eux,  insulte  le 
village  tout  entier.»  L'auteur  de  ces  lignes  n'était  pas  un  homme 
étranger  au  pays  :  pour  être  ainsi  frappé  du  caractère  des 
gens  de  Saint- Mamet,  il  a  bien  dû  y  trouver  quelque  chose 
d'original.  Il  va  trop  loin  néanmoins  à  notre  avis,  en  distin- 
guant aussi  profondément  qu'il  le  fait  la  population  de  Saint- 
Mamet  de  celle  des  autres  villages  et  surtout  de  celle  du  vieux 
Luchon,  à  laquelle  elle  est,  aujourd'hui  du  moins,  physique- 
ment et  moralement  semblable. 

C'est  donc  des  Luchonnais  en  général  que  nous  dirons  ce 
que  dit  Ferrère  des  habitants  de  Saint-Mamet.  Il  y  aurait  ici 
une  importante  question  ethnographique  à  élucider,  à  l'aide 
de  mesures  anthropométriques  précises.  Les  remarquables 
travaux  de  M.  Collignon  sur  l'ouest  et  le  sud-ouest  de  la 
France  s'arrêtent  à  la  vallée  de  Louron.  Ils  ont  révélé  déjà 
que,  tandis  que  les  habitants  de  la  plupart  des  hautes  vallées 
des  Pyrénées  (Pyrénées  Orientales,  et  Pyrénées-Occiden- 
tales du  pays  Basque  exclusivement  à  la  vallée  d'Aure  inclusi- 
vement) sont  assez  dolichocéphales,  ceux  du  pays  de  Lanneme- 
zan  et  de  la  vallée  de  Louron  sont  très  nettement  brachycé- 
phales,  et  se  rattachent  ainsi,  avec  la  plus  grande  partie  de  la 
Gascogne  (malgré  quelque  chose  de  plus  allongé  dans  la  face), 
aux  types  du  Plateau-Central,  de  la  Bretagne,  et,  en  somme, 
à  la  grande  masse  de  la  population  française.  M.  Bertrand, 
dans  ses  études  celtiques,  classe  le  centre  des  Pyrénées  dans 
les  pays  brachycéphales.  Mais  il  doit  y  avoir  sans  doute  ici 
des  distinctions  à  faire.  De  même  que  la  vallée  d'Aure  est 
plus  dolichocéphale  que  celle  de  Louron,  de  même  le  Larboust 
est  probablement  plus  dolichocéphale  que  la  vallée  de  Lu- 
chon. En  tout  cas,  dans  le  Larboust,  à  côté  de  figures  assez 
carrées,  on  trouve  des  faces  remarquablement  longues; 
dans  tous  le  pays,  les  faces  rétrécies  vers  le  bas  et  les  men- 
tons pointus   sont  fréquents.  Pour  les  habitants    de   Saint- 


392  LE   PARLER  DE  BAGNERES-DE-LUCHON 

Maniet,  de  Luchon  et  de  sa  vallée,  ils  doivent  être,  à  en  juger 
par  l'aspect  extérieur,   nettement   brachycéphales.  Le   type 
observé  par  Ferrère  a  la  taille  haute  en  général  ;  il  est  plutôt 
blond  que  brun  ;  la  tête  est  assez  petite  relativement  au  corps, 
le  cou  assez  court;  le  front  est  large,  découvert,    un  peu 
fuyant  ;  le  sommet   et  l'arrière  de  la  tête  sont   assez   déve- 
loppés ;  les  yeux  sont  gris,  le    nez  droit  ou  aquilin,  le  corps 
un  peu  sec  et  les  jambes  longues.  Ce  type  se   retrouve,  avec 
quelques   nuances  et    un  certain  mélange  à  un   autre  type 
plus  petit  et  plus  brun,  à  Luchon  même   et  dans  tous  les 
villages  delà  vallée.  On  voit  combien  il  se  rapproche  du  type 
dit  celtique  ;  ce  qui  concorde  avec  les  découvertes  d'objets 
et  de  monuments  préhistoriques  faites  dans  le  pays  (travaux 
de  MM.  J.  Sacaze,  Piette  et  Gourdon).  On  peut  donc  penser 
avec    M.    Lu  chaire,   que   les    Celtes   s'avancèrent    dans    les 
Pyrénées  plus  avant  qu'on    ne  le  croit  d'ordinaire  (ulongius 
opinio  e  processerunt  »)  et  qu'ils  influèrent  profondément  sur 
cette  région.  Sans  doute,  ce  quelque  chose  de  plus  allongé 
et  de  plus  fin  que  présente  la  physionomie  des  Luchonnais, 
comparée  à  ce  le  des  habitants  du  Plateau-Central,  dénote 
quelque  mélange  avec  les  Ibères  ';  sans  doute,,  la  langue  bas- 
que explique  un  grand    nombre  des  noms   de   lieu   du  pays. 
Nulle  part  cependant  dans   les   Pyrénées  il  ne  doit  y  avoir 
plus  de  sang  celtique  que  dans  la  région  centrale,  dont  Lu- 
chon fait  partie. 

Ces  remarques  sur  la  race,  le  tempérament  et  le  caractère 
des  gens  qui  parlent  le  langage  que  nous  devons  étudier  ne 
nous  seront  pas  inutiles;  elles  nous  permettront  d'expliquer 
plusieurs  des  particularités  qu'il  présente.  Contentons-nous, 


1  Nous  employons  dans  ce  travail  (bien  qu'on  ait  contesté  que  les 
Basques  fussent  les  descendants  des  anciens  Ibères  proprement  dits,  el 
qu'on  ait  supposé,  d'autre  part,  que  la  langue  qu'ils  parlent  aujourd'hui 
pouvait  ne  pas  leur  appartenir  en  propre,  mais  avoir  été  emprun 
eux,  soit  aux  anciens  Ibères,  soit  à  d'autres)  les  mots  Ibère  et  ibèrien 
pour  désigner,  au  point  de  vue  de  la  race,  une  race  semblable  à  la  race 
basque,  et,  au  point  de  vue  de  la  langue,  une  langue  île  même  famille 
que  la  langue  basque.  (Voy.  l'étude  'le  M.  Collignon  sur  les  Basqui  • 
—  r  en  signifie  par  conséquent  au  ■  nous,  aux  deux  points 

de  vue  signalés,  celto-basque. 


ET  DE  SA   VALLEE  30  3 

pour  l'instant,  do  faire  ressortir  que  nous  avons  affaire  ici  à 
une  population  originale  et  énergique.  De  lu  un  langage  vif, 
contracté,  expressif,  C'est  à  Saint-Mamet  et  à  Luchon  qu'i  n 

l'articule  le  plus  nettement  ;  c'est  là  qu'on  le  parle  avec  le  plus 
de  force  el  dans  le  rythme  le  plus  i 

Nous  avons  il  inc  '«'terminé  la  place  du  luchonnais  dans  la 
langue  d'oc  et  le  dialecte  gascon,  et  indiqué  le  caractère  de 
ceux  qui  le  parlent.  Il  nous  resterait  à  en  faire  l'historique, 
B  irnons-nous  à  dire  que  son  histoire  se  confond,  dans  ses 
grandes  lignes,  avec  celles  du  gascon  Le  luchonnais  B'est  dé- 
veloppé suivant  les  mêmes  lois  internes  (voy.  la  Phonétique 
et  la  Morphologie)^  et,  d'une  façon  générale,  sous  les  mêmes 
inlluences  externes  [voy.  surtout  la  Lexicologie).  Nous  aurons 
d'ailleurs  pins  d'une  fois  l'occasion,  dans  la  présente  étude, 
de  mettre  en  lumière  les  transformations  qu'il  a  éprouvées. 

Venons-en  donc  à  son  examen  direct.  Voici  l'ordre  que 
nous  allons  suivre  : 

1°  Nous  étudierons  d'abord  les  sons  du  luchonnais,  et  nous 
nous  efforcerons  d'indiquer  les  principales  lois  phonétiques 
qui  les  ont  produits  et  qui  les  gouvernent  encore. 

2°  Nous  passerons  ensuite  à  l'étude  de  son  lexique,  exami- 
nant successivement  l'origine,  la  formation  et  la  signification 
des  mots  qui  le  constituent  ; 

3°  Nous  arriverons  enfin  à  l'examen  de  sa  morphologie  et 
de  sa  syntaxe,  à  l'occasion  des  diverses   parties  du  discours. 

Il  nous  restera,  pour  conclure,  à  envisager  du  point  de  vue 
littéraire  le  parler  de  Bagnères-de-Luchon. 


39  4  LE  PARLER  DE  BAGNERES-DE  LUCHON 


PREMIERE  PARTIE 


PHONÉTIQUE 

Dans  l'étude  des  sons  du  luchonnais,  par  laquelle  nous 
commençons,  nous  examinerons  successivement:  1°  quels  ils 
sont;  2°  quelle  est  leur  origine,  comment  ils  se  sont  formés; 
3°  quelles  modifications  ils  éprouvent  dans  leurs  rencontres 
actuelles. 

Dès  cette  première  partie,  nous  pourrons  voir  comment 
ceux  qui  parlent  ce  langage  ont  su  le  marquer  à  leur  empreinte. 


I 

REVUE  GÉNÉRALE   DES  SONS   DU  LUCHONNAIS 

Il  y  a  lieu  de  distinguer  ici  les  voyelles  d'une  part,  les  semi- 
voyelles  et  les  consonnes  de  l'autre. 

1°  Voyelles 

Nous  examinerons  d'abord  leur  timbre,  puis  leur  accentua- 
tion et  leur  quantité. 

A)  Timbre  des  Voyelles 

1)  Voyelles  pures.—  Il  y  a  en  luchonnais  huit  voyelles  pures: 

1°  Fondamentale  :  a  plus  ou  moins  ouvert  '.  Ex.  :  mas, 
makd. 

1  Cependant  a  et  h  sont  assez  rapprochés  l'un  de  l'autre  pour  que 
nous  puissions  nous  dispenser,  dans  tout  ce  qui  suivra,  de  les  distin. 
guer. 


ET  DE  SA  VALLEE  395 

2°  Lourdes:  o  (o  ouvert),  o  (o  fermé),  et  u  (ou  français). 

Ex.:  tôs  :  dyô,  kâzo  ;  s*'s. 
3°  Légères  :  è  (e  ouvert),  e  (e  fermé),  et  t'  (i  français). 

Ex.  :  mes  ;  arrés,  sexe;  bi\  —  auxquelles  il  faut  ajou- 
ter: ù  (u  français),  léger  comme  i,  mais  labial  comme  u. 

Ex.  :  dûs. 

Les  voyelles  à,  o  et  e  sont  un  peu  plus  ouvertes  que  les 
voyelles  françaises  correspondantes  ;  o  est  un  peu  plus  près 
de  ô  qu'en  français,  c'est-à-dire  est  plus  ouvert  que  l'o  français 
(c'est  un  son  le  plus  souvent  issu  récemment  de  à  ou  de  a)  ;  û 
est,  semble-t-il,  plus  près  de  i  qu'en  français  (Cf.  plus  loin  les 
semi-voyelles).  — Les  voyelles  o  ouvert  et  ô  fermé  n'existent 
point  en  luchonnais  ;  mais  les  Luchonnais  les  prononcent 
dans  les  noms  propres  français. 

2)  Voyelles  nasales.  —  Il  y  a  en  luchonnais  sept  voyelles 
nasales  : 

1°  Fondamentale:  ay,  plus  ou  moins  ouvert.  Ex.  :  m/iy, 

maykâ. 
2°  Lourdes  :  ôy  et  uy.  Ex.  :  tôy\  sûy. 
§°  Légères  :  èy,  ey  et  iy.  Ex.  :  mêy  ;  arréy,  teygi;  biy  ;  — 

et  ûy.  Ex.  :  ûy. 

Les  voyelles  nasales  correspondent,  on  le  voit,  aux  voyelles 
pures  :  seul,  o  fermé  ne  donne  point  de  nasale.  En  français 
n'existent  que  ay,  èy,  ày  ;  et  oy  (avec  ô  ouvert)  qui  manque 
en  luchonnais  comme  ô. 

Les  voyelles  nasales  luchonnaises  se  distinguent  des  voyelles 
nasales  françaises  par  une  prononciation  assez  différente.  En 
eff<  t,  quand  on  les  entend  prononcer,  on  perçoit  (surtout 
lorsqu'au  lieu  d'être  suivies  d'une  gutturale,  elles  sont  suivies 
d'une  voyelle)  un  son  particulier,  dû  à  un  mouvement  du 
palais1  et  que  l'on  peut  appeler  une  n  gutturale  (son  qui  man- 
que en  français  et  que  nous  désignerons  par  le  caractère  y). 
Ainsi,  quand  on  prononce  ûy  ôme  «  un  homme»,  on  entend 

1  C'esl  L'énergie  du  son  y  qui  explique  sans  doute  les  formes  téyge 
«  tenir»,  béyye  a  venir  ■>,  piygulâ  a;rand  comme  \m  pin  »,  "ù  un  (/s'esl 
inséré  après  y- 


396  LE  PAHLER  DE  BAGNERES-DE-LUCHOX 

presque  ùng  ôme1.  —  Cependant,  il  faut  reconnaître  que  la 
prononciation  des  voyelles  nasales  luchonnaises,  surtout  quan  1 
elles  ne  sont  pas  suivies  d'une  autre  voyelle,  n'aurait  qu'à 
s'affaiblir  un  peu  pour  rejoindre  la  prononciation  française. 
C'est  à  peu  près  ce  qui  arrive  dans  certaines  rencontres  2  ; 
on  prononce  avec  une  y  assez  douce  :  ïnj  tchibôxo,  ùy  tsala- 
bânt ;  y  est  ici,  à  l'égard  de  y  devant  une  gutturale  ou  une 
voyelle,  à  peu  près  ce  qu'est  k  devant  c  ou  i  à  k  devant  a,  o 
ou  u;  —  mieux  encore,  on  dit  uni  pas,  un  dit,  et  un  fô/t  (ce 
dernier  sans  n  sensible),  tuais  dans  ces  trois  exemples  on  a 
un  u  nasal  prononcé  comme  les  nasales  françaises.  (La  véri- 
table notation  serait  donc  û"m  pas,  ùun  dit,  ùa  fort).  Ajoutons, 
enfin,  qu'on  sent  une  légère  nasalisation  dans  la  voyelle  qui 
précède  nh  finale  (Ex.  :  bânh  «bain»),  et  les  groupes  nd  /// 
ou  ns  (Ex.:  arréndo,  «  rente»  ;  sent,  e  cent  »;  mens,  «  moins  »)  ; 
mais  n  se  fait  entendre. 

En  tout  cas,  l'existence  de  vojelles  nasales  dans  le  luchon- 
nais  le  rapproche  du  français  plus  que  bien  d'autres  parlers 
méridionaux  3.  Seulement,  ce  sont  plutôt  des  nasales  guttu- 
rales, et  elles  sont  prononcées  en  ouvrant  la  bouche  plus 
qu'en  français. 

B)  Accentuation  et  quantité 

1)  Accent  d'intensité  et  diphtongues. 

1°)  Toutes  les  voyelles  luchonnaises  psuvent  être  toniques 

1  En  français  même  on  a  écrit  autrefois  «un»  ung;  mais,  selon  Dar- 
mesteter,  simplement  pour  distinguer  vn  de  vu.  —  La  différence  entre 
les  voyelles  nasales  françaises  et  les  voyelles  nasales  luchonnaises  est 
indéniable,  comme  le  montre  ce  fait  que  (sauf  s'il  s'agit  d'un  mot  termine 
par  un  suffixe  existant  déjà  en  bichonnais,  comme  -tion,  hxch.-syûn)  La 
nasale  française  ne  donne  pas  une  nasale  en  luchonnais  :  Ex.  :  fr.  moyen, 
luch.  muycn\ïv.  chirurgien,  luch.  sûrjên. 

2  Voy.  ci-après,  dans  les  rencontres  des  consonnes,  les  assimilations 
des  nasales. 

3  En  montalbanais,  p.  ex.,  y  n'existe  pas  entre  deux  voyelles,  mais 
seulement  (et  affaiblie)   devant  des   gutturales    On   remarque    pourtant 

une  n  prépalatale  à  la  premièn    pei  lu  singulier  du   p 

faitdel'in  licatif  des  verbes.  Ainsi,  kantéi  «  \  ai»,  betsêi    ■  <     ris  », 

se  prononcent  presque  kanténi,  betséni.Les  autres  personnes  ont  après 
une  gutturale.  Cf.  Luchaire,  Idiomes  pyr.,  p.  225. 


ET   DE  SA  VALLEE  397 

ou  atones.  Les  voyelles  ouvertes  peuvent  être  atones  (Ex.  : 
pour  ô,  larb.  à  :  eskûtô-w  «  écoute -le  »,  larb.  eskûtà-w;  pour 
è,  l'occasion  ne  se  présente  guère  que  dans  des  proclitiques  : 
/i'<?  dit  «j'ai  dit  »  ;  le  larb.  dit  pourtant  jâmès  «jamais  »). 

2°)  Il  n'y  a  point  en  luchonnais  de  véritables  diphtongues  ; 
chaque  voyelle  fournit  une  syllabe.  Il  y  a  seulement  des  com- 
binaisons des  voyelles  avec  les  semi-voyelles  îv,  w  et  y.  Seul 
w  ne  peut  se  trouver  devant  une  consonne,  ni  à  la  fin  des 
mots,  ni  entre  deux  voyelles.  Quand  10  et  y  se  trouvent  devant 
une  consonne,  ils  appartiennent  à  la  syllabe  précédente; 
devant  une  voyelle,  à  la  syllabe  de  cette  voyelle.  Ainsi  on 
dit  daw\x('i  «  dorer»  ;  on  disait  kaw\ftâ  «  chauffer  »  ;  mais  on 
dit  aujourd'hui  ka\ioâ.  De  même  ay\mâ  «aimer»,  mais  be\yô 
«je  voyais  ». 

3°)  L'accent  d'intensité  est  susceptible  de  deux  degrés  : 
ainsi,  dans  les  mots  un  peu  longs,  il  y  a  souvent  un  accent 
principal  et  un  accent  secondaire.  Exemple:  nêwcitût  «nour- 
riture ». 

Nous  ne  marquerons  que  l'accent  principal  (neicxitùt). 

Tous  les  mots  portent  l'accent  principal  d'intensité  seule- 
ment sur  la  dernière  ou  l'avant  dernière  syllabe.  Pourtant 
l'existence  de  l'accent  mélo  lique  fait  qu'il  y  a  des  mots  non 
seulement  oxytons  et  paroxytons,  mais  encore  perispomènes, 
et  même  propérispomènes.  (Voy.  ci-après  bas  prononcé  bâas, 
Iles,  fiées,  et  Hase,  Hanse).  11  y  a  là  comme  une  transition  vers 
l'espagnol,  qui  connaît  les  proparoxytons  ou  esdrujulos. 

L'accent  d'intensité  est  assez  fort  en  luchonnais  pour  qu'il 
fût  possible,  si  l'on  voulait,  d'y  faire  des  vers  fondés  sur  cet 
accent,  comme  en  espagnol  parfois,  en  anglais  eten  allemand. 
Par  là,  le  luchonnais  se  distingue  du  français,  et  des  patois 
de  la  Plaine,  assez  plats,  si  Ton  peut  dire,  à  cet  égard,  et  se 
rapproche  au  contraire  de  l'espagnol. 

2)  Quantité  des  voyelles. 

Les  différences  de  quantité  des  voyelles  latines,  on  le  sait, 
se  sont  transformées,  dès  le  latin  populaire,  en  différences 
de  timbre  (ainsi  é  a  donné  è,  ë  a  donné  e,  etc.).  Les  diffé- 
rences de  quantité  des  voyelles  romanes  ont  donc  une  autre 


398  LE  PARLER  DE  BAGNERES-DE-LUCHON 

origine  :  avant  tout,  mais  non  uniquement  ',  la  présence  ou 
l'absence  de  l'accent  d'intensité.  La  quantité  des  voyelles  est 
bien  plus  apparente  en  luchonnais  qu'en  français  et  môme 
que  dans  les  parlers  de  la  Plaine.  Les  voyelles  qui  portent 
l'accent  d'intensité  sont  longues  en  général ,  les  voyelles 
atones  en  général  brèves  2.  Les  voyelles  ouvertes  sont  tou- 
jours longues,  quand  elles  sont  accentuées.  Signalons  enfin 
l'existence,  en  luchonnais,  de  Ve  fermé  long  (inconnu  au  fran- 
çais, selon  Darmesteter  %  mais  connu  à  l'espagnol)  Ex.:  Dy&w 
«  Dieu  ». 

3)  Accent  mélodique. 

L'accent  d'intensité  ayant  remplacé  l'accent  de  hauteur  ou 
accent  mélodique,  celui-ci,  comme  en  français,  flotte  sur  la 
phrase,  se  pose  sur  les  mots  expressifs,  interrogatifs,  excla- 
matifs,  etc.,  et  toujours  (comme  en  latin,  et  malgré  sa 
mobilité)  sur  une  voyelle  accentuée  4.  Il  faut  remarquer 
pourtant  qu'en  luchonnais  la  voix  peut  monter  et  redescen- 
dre sur  une  même  voyelle  longue,  principalement  dans  les 
mots  qui  terminent  les  phrases.  Soit  l'adverbe  jâ  «  oui, 
certes,  déjà  »  terminant  une  réponse.  Ex.  :  ja  y  bàio,  jâ 
«j'y  vais,  certes  ».  Il  se  prononce  avec  a  long,  porte 
l'accent  d'intensité  et  l'accent  mélodique,  ce  dernier  très 
semblable  à  ce  que  devait  être  l'accent  mélodique  circonflexe 
du  grec  et  du  latin  anciens  5  :  on  dit  presque  jâa6 ,  la  voix 
s'élevant  sur   le   premier  a,  s'abaissant   sur  le   second,  de 


i  Voyez  plus  loin  la  diphtongaison  des  voyelles  libres. 

2  Mais  si  l'on  crie  par  exemple  à  quelqu'un  :  'pàrtà-t!  «  écarte-toi  !»,  o 
est  long,  bien  qu'atone.  Dans  kâp  «  tête  »,  a  est  long  ;  mais  dans  kap 
(négation),  il  est  ordinairement  atone  et  bref. 

3  Cependant  dans  «  aimé-je  »,  il  semble  bien  que  é  est  long. 

4  Si  l'on  crie  :  'pàrtô-tl  à  peut  être  assez  allongé,  dans  cette  exclama- 
tion pour  porter  lui  aussi  l'accent  d'intensité.  L'exception  confirme  donc 
la  règle. 

5  Si  l'accent  circonflexe  mélodique  ancien  peut  ainsi  se  retrouver  dans 
le  luchonnais,  cela  tient  évidemment  à  la  netteté  avec  laquelle  les  voyelles 
toniques  et  longues  se  distinguent  dans  ce  parler  des  voyelles  atones  et 
brèves. 

6  De  la  l'orthographe  française  «  ôo  »  pour  le  village  à'O.  Cf.  sans 
doute  les  noms  béarnais  Puyôo,  Morlaas,  etc. 


ET   DE    SA   VALLÉE  399 

manière  à  mettre  entre  les  deux  tons  l'intervalle  d'une  tierce 
environ  *.  C'est  de  même  qu'on  prononcera,  en  employant 
parfois  à  moduler  la  voyelle  plus  d'une  seconde,  sii  pour  si 
«  si,  oui»  ;  de  sées  pour  de  ses  «le  soir  »  ;  prawbôôt/  pour 
prawbôtl  «pauvret!»;  et,  bien  qu'un  peu  moins,  buas,  âêè, 
lmu.se  dans  ta-um  bas?  «où  vas-tu?»,  ke  bulett  lié?  «que 
voulez-vous  faire?»  et  ke  bulék  ke  base?  «  que  voulez-vous 
qu'il  fasse?».  — Le  parler  luchonnais  est  par  suite  un  peu 
chantant.  Remarquons  cependant  que  le  langage  de  Saint- 
Mamet  et  de  Luchou  traîne  moins  sur  les  voyelles  accen- 
tuées que  celui  des  villages  voisins. 

Cet  accent  mélodique  n'a  pu  être  hérité  du  latin  classique 
parle  luchonnais,  car  le  latin  populaire  avait  déjà  transformé 
l'accent  mélodique  du  latin  classique  en  accent  d'intensité 
avant  même  son  introduction  dans  les  Gaules  ;  il  a  donc 
été  refait  par  le  luchonnais,  ou  mieux  par